La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/02/2010 | CEDH | N°32146/05

CEDH | AFFAIRE EUGENIA LAZAR c. ROUMANIE


TROISIÈME SECTION
AFFAIRE EUGENIA LAZĂR c. ROUMANIE
(Requête no 32146/05)
ARRÊT
STRASBOURG
16 février 2010
DÉFINITIF
16/05/2010
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Eugenia Lazăr c. Roumanie,
La Cour européenne des droits de l'homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
Josep Casadevall, président,   Elisabet Fura,   Corneliu Bîrsan,   Boštjan M. Zupančič,   Alv

ina Gyulumyan,   Egbert Myjer,   Ineta Ziemele, juges,  et de Santiago Quesada, greffier de section,
Après ...

TROISIÈME SECTION
AFFAIRE EUGENIA LAZĂR c. ROUMANIE
(Requête no 32146/05)
ARRÊT
STRASBOURG
16 février 2010
DÉFINITIF
16/05/2010
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Eugenia Lazăr c. Roumanie,
La Cour européenne des droits de l'homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
Josep Casadevall, président,   Elisabet Fura,   Corneliu Bîrsan,   Boštjan M. Zupančič,   Alvina Gyulumyan,   Egbert Myjer,   Ineta Ziemele, juges,  et de Santiago Quesada, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 26 janvier 2010,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 32146/05) dirigée contre la Roumanie et dont une ressortissante de cet Etat, Mme Eugenia Lazăr (« la requérante »), a saisi la Cour le 29 août 2005 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  La requérante est représentée par Me Horaţiu Istrat, avocat à Deva. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. Răzvan-Horaţiu Radu, du ministère des Affaires étrangères
3.  La requérante se plaint du caractère ineffectif de l'enquête ouverte sur le décès de son fils à l'hôpital de Deva. Selon elle, cette enquête n'a pas permis l'élucidation des causes du décès et l'établissement de la responsabilité des médecins concernés, qui auraient manqué à leurs devoirs.
4.  Le 14 juin 2007, la Cour a communiqué la requête au Gouvernement. Comme le permet l'article 29 § 3 de la Convention, elle a en outre décidé d'examiner conjointement la recevabilité et le fond de l'affaire.
EN FAIT
I.  LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
5.  La requérante est née en 1951 et réside à Dobra.
1.  Les circonstances du décès du fils de la requérante
6.  Dans la nuit du 10 au 11 juillet 2000, la requérante conduisit son fils Adrian, alors âgé de 22 ans et présentant des signes de suffocation, à l'hôpital départemental de Deva. A 2 h 30, Adrian fut admis au service des urgences de l'hôpital, où il fut examiné par le médecin M. Il fut ensuite transféré dans le service d'oto-rhino-laryngologie (« ORL ») de l'hôpital, où il fut examiné par le médecin C., qui lui administra par voie injectable douze ampoules de cortisone. Vers 2 h 45, C. fit appeler le médecin M., lequel se trouvait alors à son domicile. Compte tenu de la gravité de l'état du patient, M. décida de le trachéotomiser afin de dégager ses voies respiratoires. Vers 3 h 15, M., assisté par C., commença l'opération. Au cours de celle-ci, l'insuffisance respiratoire d'Adrian s'aggrava ; il fit un arrêt respiratoire. N., le médecin de garde, fut alors appelée. Elle tenta de réanimer le patient, en vain. Il décéda vers 5 h.
7.  Le 20 juillet 2000, la requérante déposa auprès du tribunal départemental de Hunedoara une plainte pénale contre les médecins de l'hôpital de Deva qui avaient examiné Adrian dans la nuit du 10 au 11 juillet 2000. Elle leur reprochait des manquements graves à leur obligation d'agir avec célérité pour sauver la vie de son fils.
2.  Les avis médico-légaux et disciplinaires sur les circonstances et les causes du décès
a)  Les avis médico-légaux
8.  Le 6 novembre 2000, le laboratoire de médecine légale de Deva établit un rapport d'autopsie détaillé à la demande de la police de cette ville. Dans ce rapport, il était précisé que le décès d'Adrian était dû à une asphyxie causée par un pneumothorax pulmonaire bilatéral survenu à la suite d'une trachéotomie réalisée correctement, mais tardivement. Il y était mentionné que le retard avec lequel cette opération avait été effectuée était dû à un dysfonctionnement d'organisation découlant d'un manque de coordination dans le protocole de prise en charge médicale d'urgence. Précisant que l'erreur résidait dans la manière dont le patient avait été orienté après son admission au service des urgences, le rapport indiquait que, dans la situation critique où Adrian s'était trouvé, la trachéotomie aurait dû être réalisée toutes affaires cessantes, au sein même du service des urgences, et que l'intéressé n'aurait pas dû être transféré dans le service ORL de l'hôpital.
9.  Le 6 novembre 2000, à la demande du parquet, la Commission de contrôle de l'Institut médico-légal de Timişoara rendit un avis sur le rapport établi par le laboratoire de médecine légale de Deva. Elle y indiqua que, dans la situation critique où Adrian s'était trouvé, « la réalisation d'une trachéotomie s'imposait toutes affaires cessantes, le cas échéant au sein même du service des urgences, sans que le patient fût transféré dans le service ORL de l'hôpital ». Toutefois, elle conclut que « pareil défaut de coordination entre les services de l'hôpital n'était pas de nature à engager la responsabilité médicale » des praticiens qui avaient examiné Adrian la nuit de son décès.
10.  Le 15 octobre 2001, sur saisine du parquet, la Commission médicale supérieure de l'Institut « Mina Minovici » de Bucarest – l'autorité nationale suprême en matière d'expertise médico-légale – se prononça sur les avis rendus par le laboratoire de médecine légale de Deva et l'institut médico­légal de Timişoara. Elle déclara que, dans un cas tel que celui d'Adrian, la littérature spécialisée préconisait la réalisation d'une trachéotomie en urgence en l'absence de signes d'amélioration des symptômes d'insuffisance respiratoire après l'administration de doses de cortisone par voie injectable. Au vu de cette recommandation, elle conclut que  les médecins qui avaient pris part aux soins prodigués à Adrian avaient agi dans les règles de l'art, sans commettre d'erreur médicale.
b)  La procédure disciplinaire dirigée contre C.
11.  A une date non précisée, la Commission de discipline du Conseil départemental de l'ordre des médecins de Hunedoara se saisit du dossier médical ouvert à la suite du décès d'Adrian. Après examen, elle décida de ne pas infliger de sanction disciplinaire aux médecins qui avaient examiné Adrian la nuit de son décès. Pour se prononcer ainsi, elle s'appuya sur plusieurs expertises qu'elle avait sollicitées auprès de médecins-chefs des hôpitaux de Timişoara et de Cluj-Napoca, d'où il ressortait que l'examen du cas d'Adrian devait prendre en compte l'absence des équipements nécessaires à la réalisation d'une opération au sein du service des urgences, de la structure pavillonnaire de l'hôpital et de l'impossibilité de procéder à un examen ORL dans le service en question. Cette décision fut communiquée à la requérante le 17 janvier 2001.
12.  L'intéressée contesta cette décision auprès de la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins. Par une lettre datée du 8 mai 2001, elle informa le conseil départemental de l'ordre des médecins de Hunedoara qu'elle avait exercé un recours contre la décision en question et l'invita à communiquer le dossier concernant le décès de son fils à l'autorité compétente pour l'examiner.
13.  Le 19 octobre 2001, la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins annula la décision critiquée et infligea un blâme à C. Elle estima, après avoir examiné le recours formé par la requérante, les pièces versées au dossier médical d'Adrian, les déclarations de C. et les expertises médicales réalisées par les établissements médico-légaux compétents (paragraphes 8 et 9 ci-dessus), que C. avait indûment tardé à pratiquer une trachéotomie sur Adrian, ce qui avait conduit au décès de celui-ci. Elle releva en outre que C. avait continué à exercer la profession de médecin à l'hôpital public de Deva alors même qu'elle avait été mise à la retraite pour limite d'âge, et qu'elle s'était donc rendue coupable d'exercice illégal de la médecine, infraction réprimée par le code pénal.
14.  Le 20 mars 2002, saisi d'un recours formé par C., le tribunal de première instance annula la décision de la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins au motif que la requérante aurait dû exercer son recours devant le conseil départemental de l'ordre des médecins de Hunedoara – à qui il revenait de transmettre le dossier relatif au décès d'Adrian au Conseil national de l'ordre des médecins – et non directement devant cette dernière instance.
3.  La procédure pénale visant les médecins suivie devant le parquet
a)  Les poursuites pénales initiales
15.  Le 5 novembre 2001, le parquet près le tribunal de première instance de Deva prononça une décision de non-lieu en faveur des médecins qui avaient examiné le fils de la requérante dans la nuit du 10 au 11 juillet 2000. Pour se prononcer ainsi, il s'appuya sur l'avis rendu à sa demande le 15 octobre 2001 par la Commission médicale supérieure de l'Institut « Mina Minovici » de Bucarest, aux termes duquel « tous les médecins qui avaient pris part aux soins prodigués à Adrian avaient agi dans les règles de l'art, sans commettre d'erreur médicale ».
16.  Le 9 juin 2001, saisi d'un recours formé par la requérante, le procureur en chef dudit parquet confirma la décision en question.
17.  Par une ordonnance du 14 février 2002, le procureur en chef d'une section du parquet près le tribunal départemental de Hunedoara accueillit le recours formé par l'intéressée contre la décision de non-lieu rendue par le parquet de rang inférieur. Il infirma la décision en question et ordonna la poursuite de l'enquête, qu'il confia à la section des poursuites du parquet près le tribunal départemental de Hunedoara. Dans son ordonnance, il jugea que les investigations antérieures avaient été incomplètes, relevant à cet égard que les procureurs chargés de l'instruction de l'affaire avaient omis de prendre en compte :
-  l'avis de la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins et le blâme qu'elle avait infligé à C. au motif qu'elle avait indûment tardé à pratiquer une trachéotomie, ce qui avait conduit au décès d'Adrian ;
-  l'avis rendu le 6 novembre 2000 par la Commission de contrôle de l'institut médico-légal de Timişoara, d'où il ressortait que le retard apporté à la réalisation de la trachéotomie était dû à un dysfonctionnement organisationnel découlant d'un manque de coordination dans le protocole de prise en charge médicale d'urgence.
18.  Le 28 mars 2002, le procureur en chef du parquet près le tribunal départemental de Hunedoara prit une ordonnance de non-lieu en faveur de, C., M., V. et N, les médecins qui avaient examiné Adrian dans la nuit de son décès. Pour se prononcer ainsi, il s'appuya notamment sur :
-  l'avis rendu le 15 octobre 2001 par la Commission médicale de l'Institut « Mina Minovici » de Bucarest, qu'il qualifia d'« autorité compétente en dernier ressort pour se prononcer sur la question de savoir s'il y a eu faute médicale » ;
-  les expertises que le conseil départemental des médecins de Hunedoara avait sollicitées auprès de médecins-chefs des hôpitaux de Timişoara et de Cluj-Napoca, d'où il ressortait que l'examen du cas d'Adrian devait prendre en compte l'absence des équipements nécessaires à la réalisation d'une opération au sein du service des urgences, de la structure pavillonnaire de l'hôpital et de l'impossibilité de procéder à un examen ORL dans le service en question.
19.  Le procureur conclut que les faits retenus par le Conseil national de l'ordre des médecins n'étaient pas suffisants pour engager la responsabilité pénale des médecins mis en cause et qu'il n'était plus possible de rechercher de nouveaux éléments de preuve aux fins de la poursuite de l'instruction car toutes les expertises médico-légales que les organes d'enquêtes pouvaient demander en vertu de la loi avaient déjà été réalisées.
b)  Les poursuites pénales subséquentes
20.  Le 15 août 2002, un procureur du parquet près la cour d'appel d'Alba-Iulia fit droit au recours exercé par la requérante contre les ordonnances de non-lieu du parquet de rang inférieur. Il les annula et renvoya le dossier au parquet près le tribunal départemental de Hunedoara en vue d'un complément d'information. Il se prononça ainsi après avoir examiné les conclusions des différents instituts médico-légaux – qu'il jugea « confuses et contradictoires » – et constaté que les circonstances de fait étaient imprécises et insuffisamment établies. Il jugea enfin que la réalisation d'une nouvelle expertise médico-légale par une équipe de spécialistes était absolument nécessaire et dressa une liste de questions auxquelles ils devraient répondre, parmi lesquelles figurait celle de savoir si l'asphyxie à l'origine du décès d'Adrian était une complication survenue lors de la trachéotomie, circonstance de nature à exclure la faute médicale, ou si elle résultait du retard apporté à la réalisation de cette opération.
21.  Le 3 décembre 2002, le parquet près le tribunal de Hunedoara chargea le service départemental médico-légal de Deva de réaliser une expertise sur les causes du décès d'Adrian. A cet effet, il lui fournit une liste de questions auxquelles il devrait répondre et qui figuraient dans l'ordonnance rendue le 15 août 2002 par le parquet près la cour d'appel d'Alba-Iulia (paragraphe 20 ci-dessus).
22.  Le 23 février 2003, le service départemental médico-légal de Deva répondit au parquet qu'il n'était plus compétent pour pratiquer une nouvelle expertise ou compléter celle qu'il avait déjà réalisée dès lors que l'Institut de médecine légale de Timişoara et l'Institut « Mina Minovici » de Bucarest avaient rendu un avis sur cette affaire.
23.  Le 25 février 2003, le parquet près le tribunal de Hunedoara demanda à l'Institut de médecine légale de Timişoara de réaliser une expertise sur les causes du décès d'Adrian en lui adressant une liste de questions auxquelles il devrait répondre (paragraphe 20 ci-dessus).
24.  Le 3 mars 2003, cet institut refusa d'exécuter la mission qui lui avait été confiée. Il répondit au parquet que la loi no 459/2000 sur le fonctionnement des instituts médico-légaux et le règlement d'application de l'ordonnance gouvernementale no 1/2000 (ci-après « l'OG no 1/2000 ») empêchaient les organes judiciaires de solliciter une nouvelle expertise médico-légale auprès des établissements médico-légaux hiérarchiquement inférieurs à l'Institut « Mina Minovici » dès lors que la commission supérieure de celui-ci avait déjà émis un avis, comme c'était le cas en l'espèce.
25.  Le 26 mai 2003, le parquet près le tribunal départemental de Hunedoara prononça une décision de non-lieu en faveur des médecins qui avaient examiné Adrian la nuit de son décès, estimant qu'aucune faute médicale ne pouvait leur être reprochée au vu des éléments du dossier.
c)  La reprise des poursuites
26.  La requérante forma un recours contre la décision du 26 mai 2003 auprès du parquet hiérarchiquement supérieur, faisant valoir qu'il ressortait du rapport de l'autopsie pratiquée sur le défunt et de la décision du 19 octobre 2001 – par laquelle la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins avait sanctionné C. – que le décès de son fils était dû au retard apporté à la réalisation de la trachéotomie.
27.  L'intéressée fut informée que le parquet près la cour d'appel d'Alba­Iulia avait fait droit au recours qu'elle avait formé contre la décision de non-lieu rendue par le parquet inférieur, auquel il avait renvoyé l'affaire pour supplément d'enquête. Dans sa décision de renvoi, le parquet en question releva que les preuves retenues par le parquet de rang inférieur étaient insuffisantes et non concluantes, et que celui-ci n'avait pas procédé aux investigations complémentaires que l'ordonnance du 15 août 2002 lui avait enjoint de réaliser. Il l'invita notamment à déterminer si, en demandant à M. de se transporter depuis son domicile au chevet d'Adrian, démarche qui avait réduit le temps disponible pour l'intervention, C. avait agi en conformité avec le protocole de prise en charge, sachant que l'hôpital disposait d'un bloc opératoire rattaché aux services d'ORL et de chirurgie, où des médecins de garde étaient présents. Relevant en outre que les déclarations qui avaient été faites antérieurement étaient incomplètes et contradictoires, il ordonna à nouveau la réalisation d'une expertise médico­légale par une équipe de spécialistes et dressa une liste de questions auxquelles ils devraient répondre.
28.  Le 25 mars 2004, le parquet près le tribunal départemental de Hunedoara adressa à l'Institut de médecine légale « Mina Minovici » une demande en vue de savoir si une expertise médico-légale pouvait être réalisée par ses experts, à laquelle il joignit le dossier de l'enquête ouverte à la suite de la plainte pénale introduite par la mère d'Adrian.
29.  Par une lettre du 30 avril 2004, la Commission supérieure de l'Institut « Mina Minovici » répondit au parquet qu'elle avait déjà donné un avis et que l'article 28 du règlement d'application de l'OG no 1/2000 lui interdisait de pratiquer une nouvelle expertise médico-légale en l'absence de nouvelles données médicales ou d'éléments nouveaux apparus lors de l'enquête.
30.  Le 18 mai 2004, un procureur du parquet près le tribunal départemental de Hunedoara prononça un non-lieu en faveur des médecins C., V., M. et N. Il observa que la poursuite de l'enquête n'était pas susceptible de faire apparaître de nouveaux éléments. A cet égard, il renvoya à la réponse de l'Institut « Mina Minovici » en date du 30 avril 2004, qui avait conclu à l'impossibilité de la réalisation d'une nouvelle expertise (paragraphe 31 ci-dessous). Il nota par ailleurs qu'une très longue période – quatre années environ – s'était écoulée depuis le décès d'Adrian, et qu'aucune autre démarche que celles déjà entreprises en vue de la manifestation de la vérité ne pouvait plus être envisagée. Il rappela que les dispositions de l'OG no 1/2000 empêchaient les organes judiciaires de solliciter une nouvelle expertise médico-légale auprès des établissements médico-légaux hiérarchiquement inférieurs à l'Institut « Mina Minovici » dès lors que la commission supérieure de celui­ci avait émis un avis. Il jugea enfin que les circonstances de fait établies lors de l'enquête coïncidaient avec les conclusions figurant dans les avis médico-légaux versés au dossier.
31.  Le 2 juillet 2004, le procureur en chef du parquet près le tribunal départemental de Hunedoara confirma le bien-fondé de l'ordonnance du 18 mai 2004. Pour se prononcer ainsi, il releva notamment que les conclusions du Conseil national de l'ordre des médecins d'où il résultait que C. avait indûment retardé la réalisation de la trachéotomie et que ce retard avait entraîné le décès d'Adrian n'étaient pas corroborées par les rapports d'expertises médico-légales établis pour les besoins de la procédure, seuls éléments pouvant être reçus comme preuve dans le cadre d'un procès pénal.
32.  A une date non précisée, la requérante introduisit un recours contre cette décision devant le tribunal de première instance de Deva.
4.  La procédure pénale visant les médecins suivie devant les juridictions nationales
33.  Par un jugement du 15 octobre 2004, le tribunal de première instance de Deva accueillit le recours de la requérante, annula l'ordonnance de non­lieu rendue par le parquet et lui renvoya l'affaire en l'invitant à ouvrir à l'encontre de C. des poursuites pénales du chef d'homicide involontaire, infraction incriminée par l'article 178 du code pénal.
34.  Critiquant la manière dont les investigations avaient été menées par le parquet, le tribunal jugea que, dans une affaire aussi complexe, les poursuites pénales auraient dû être ouvertes dès l'automne 2000, époque à laquelle il y avait suffisamment d'éléments de preuve pour que l'on pût établir le degré de responsabilité des médecins mis en cause. Il estima inadmissible que les poursuites pénales se fussent étendues sur une durée de cinq années et que plusieurs décisions de reprise des poursuites ordonnant un supplément d'enquête eussent été ignorées en dépit de leur caractère obligatoire. Il considéra que les preuves requises pour que l'on pût déterminer avec certitude les faits survenus dans la nuit du 10 au 11 juillet 2000 s'en était trouvées altérées.
35.  Quant au déroulement ultérieur de la procédure, il indiqua que la première tâche incombant au parquet était d'établir le déroulement des faits en procédant à l'audition des personnes mises en cause, dont les déclarations devaient être confrontées avec les dépositions versées au dossier. Il précisa que le parquet aurait dû en l'espèce déterminer si le service ORL de l'hôpital présentait les conditions requises pour qu'Adrian pût être opéré et si C. avait accompli les préparatifs nécessaires à cet effet.
36.  Il observa qu'il appartenait à l'Institut « Mina Minovici » de réaliser une expertise médico-légale digne de ce nom, opération qu'il estima absolument nécessaire à la manifestation de la vérité dans cette affaire. Il jugea inconcevable que cet institut, reconnu comme l'autorité suprême en matière d'expertises médico-légales, eût invoqué certaines dispositions légales dans le but d'éluder son obligation d'effectuer l'expertise en question et indiqua que seul un rapport d'expertise de haute tenue scientifique et intellectuelle pouvait contribuer à l'établissement de la vérité.
37.  Il releva par ailleurs que les questions formulées par le parquet près la cour d'appel d'Alba-Iulia (paragraphe 20 ci-dessus) étaient restées sans réponse. Il observa également que les conclusions des premiers rapports d'expertise rendus par les autorités médicales de Deva, dont il souligna la « rigueur scientifique » et le « professionnalisme » et d'où il ressortait que la trachéotomie avait été correctement mais tardivement réalisée, avaient été  « diluées » dans les avis ultérieurs émanant des instituts médicaux hiérarchiquement supérieurs. Il estima que ces derniers avaient en fait « considéré les actions ou les omissions du personnel médical mis en cause sous un angle abstrait et impersonnel, en mettant l'accent sur le manque de coordination du système médical et des services de l'hôpital » et, se référant plus spécialement à l'avis rendu par l'Institut « Mina Minovici », il observa que celui-ci s'était borné à décrire le protocole médical à respecter dans des cas similaires à celui d'Adrian et à exonérer de toute responsabilité les médecins concernés sans livrer d'analyse ou d'explication scientifique propre à étayer pareille conclusion.
38.  Il conclut que l'instruction pénale menée par le parquet était insuffisante et renvoya l'affaire au parquet près le tribunal départemental de Hunedoara pour supplément d'information.
39.  Le parquet et C. contestèrent cette décision, arguant que le décès d'Adrian était dû à des complications survenues au cours de l'intervention chirurgicale, non au retard prétendument apporté à la réalisation de celle-ci.
40.  Par un arrêt définitif du 8 février 2005, rédigé le 16 mars 2005, le tribunal départemental de Hunedoara déclara recevables et bien fondés les recours dont le parquet et C. l'avaient saisi. Se prononçant sur le fond, il rejeta le recours formé par la requérante contre les ordonnances de non-lieu rendues par le parquet près le même tribunal. Après avoir relevé que la Commission supérieure de l'Institut de médecine légale « Mina Minovici » de Bucarest était l'autorité nationale suprême en matière d'expertise médico-légale, il observa que celui-ci avait indiqué qu'aucune nouvelle expertise ne pouvait être pratiquée dès lors que la commission en question s'était prononcée. Il rappela que la législation sur l'organisation du système national de médecine légale empêchait les organes judiciaires de solliciter, en l'absence d'éléments nouveaux d'ordre médical ou liés à l'enquête, une nouvelle expertise médico-légale aux instituts médicaux hiérarchiquement inférieurs à l'institut « Mina Minovici » de Bucarest après que la commission supérieure de cet institut eut émis un avis. Constatant qu'aucun élément nouveau n'était apparu en l'espèce et s'appuyant sur le dernier avis rendu par l'Institut « Mina Minovici », il estima que le décès d'Adrian était dû à une complication postopératoire dont les causes n'étaient pas prévisibles et que C. devait dès lors être exonéré de toute accusation d'homicide involontaire.
II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
1.  Sur les avis médico-légaux et les organes habilités par la loi à les délivrer
41.  A l'époque des faits, l'exercice de la médecine légale était régi par l'OG no1/2000 sur l'organisation et le fonctionnement des institutions spécialisées en matière de médecine légale, par le règlement pris le 7 septembre 2000 pour l'application de ce texte et par les règles sur la procédure de réalisation des expertises médicales et des autres travaux médico-légaux.
42.  Les articles pertinents du règlement d'application de l'OG 1/2000 étaient libellés comme suit à l'époque des faits :
Article 23
« La Commission supérieure médico-légale de l'Institut de médecine légale « Mina Minovici » de Bucarest est l'autorité scientifique suprême en matière de médecine légale. Elle a pour mission de contrôler, d'évaluer et d'analyser le contenu des divers actes médico-légaux ainsi que les conclusions qui y figurent et de rendre à leur sujet des avis scientifiques à la demande des organes judiciaires. »
Article 27
« Si la Commission supérieure médico-légale constate des contradictions entre une première expertise et une autre réalisée ultérieurement ou d'autres actes médico­légaux, elle peut rendre un avis sur tout ou partie des conclusions figurant dans l'une de ces expertises ou dans l'un de ces actes médico-légaux en y apportant, le cas échéant, des précisions ou des ajouts. Si les conclusions  des actes médico-légaux soumis à son contrôle ne peuvent pas être approuvées, elle peut recommander la réitération totale ou partielle des travaux d'expertise et émettre des propositions ou des conclusions à cet effet (...) »
Article 28
« Dès lors que la Commission supérieure médico-légale a délivré un avis, les organes judiciaires ne peuvent demander aux instituts qui lui sont hiérarchiquement inférieurs de réaliser d'autres expertises médico-légales, à moins que des données nouvelles d'ordre médical ou résultant de l'enquête ne soient apparues après qu'elle a donné son avis, auquel cas la réalisation de l'expertise incombe à l'Institut « Mina Minovici ». »
43.  L'OG no 1/2000 confiait la mission de contrôler la légalité des conditions de réalisation des actes médico-légaux à des commissions mixtes composées de médecins légistes du ministère de la Santé et de juristes du ministère de la Justice. Ces commissions pouvaient être saisies par le ministre de la Justice ou celui de la Santé lorsqu'il existait des indices d'infraction à la loi. Elles établissaient des rapports écrits. Si elles estimaient que la loi avait été méconnue, elles pouvaient saisir les autorités judiciaires ou les organes compétents du Conseil national de l'ordre des médecins. Ces dispositions ont été maintenues dans la nouvelle version de l'OG no 1/2000 complétée par l'ordonnance gouvernementale d'urgence no 57/2001, approuvée par la loi no 271/2004 et publiée au Journal officiel du 10 novembre 2005.
44.  Le règlement d'application de l'OG no 1/2000 a été complété par la l'arrêté gouvernemental no 1204/2002, qui y a notamment apporté des précisions sur les modalités de désignation des organes de direction des instituts médico-légaux et sur la procédure applicable devant les commissions mixtes. L'article 28 précité du règlement d'application de l'OG no 1/2000 n'a pas été modifié et n'a pas été abrogé.
45.  Ce cadre législatif confère aux instituts de médecine légale – qui sont des institutions exclusivement publiques limitativement énumérées par la loi – compétence exclusive pour établir des constats, réaliser des expertises ou rendre des avis médico-légaux pouvant servir de preuve devant les juridictions nationales en vue de la manifestation de la vérité dans les affaires d'atteinte à la vie, à l'intégrité corporelle ou à la santé des personnes. Ces instituts ont notamment pour mission de réaliser, à la demande des organes judiciaires, des constats et des expertises sur des cadavres, opérations qui peuvent les conduire, en cas de mort violente, suspecte ou survenue peu de temps après une intervention chirurgicale, à pratiquer des autopsies et à rechercher les causes du décès. Leurs activités sont coordonnées et contrôlées par le ministère de la Santé. Elles sont financées sur le budget du ministère de la Justice (lorsqu'ils agissent sur ordre des tribunaux) ou celui du budget du ministère public (lorsqu'ils agissent sur ordre du parquet). Les médecins légistes sont tenus de respecter les principes de la déontologie et de l'éthique médicale. Les organes judiciaires qui souhaitent faire établir un constat ou réaliser une expertise médico-légale sur une personne en vie ou un cadavre doivent adresser une demande écrite à l'institution de médecine-légale territorialement compétente. La demande doit préciser les données d'identification du sujet sur lequel les actes médico-légaux doivent porter, le type d'expertise dont la réalisation est sollicitée, les questions auxquelles les experts doivent répondre, les documents et les données mises à la disposition des médecins-légistes ainsi que le délai qui leur est imparti pour exécuter leur mission.
La Commission supérieure médico-légale de l'Institut national de médecine légale « Mina Minovici » de Bucarest est l'autorité suprême en matière d'expertise médico-légale. Elle est composée de plusieurs membres permanents – à savoir le directeur et le directeur adjoint de l'Institut national « Mina Minovici », les directeurs des instituts de médecine légale des centres universitaires roumains, le titulaire de la chaire de morpho­pathologie de l'université de médecine de Bucarest et quatre médecins légistes expérimentés, désignés sur proposition du directeur de l'institut « Mina Minovici » – dont la liste est approuvée par arrêté du ministre de la Santé sur proposition du Conseil supérieur de médecine légale. Elle a pour mission de contrôler et de rendre des avis scientifiques, à la demande des autorités judiciaires, sur les conclusions figurant dans les actes médico-légaux réalisés par les autres établissements publics de rang inférieur habilités par la loi à établir des constats, à pratiquer des expertises et à rendre des avis médico-légaux, à savoir : a) les cabinets de médecine légale ; b) les services départementaux de médecine légale et c) les instituts médico-légaux rattachés aux centres universitaires.
Ces derniers disposent de commissions chargées de formuler des avis scientifiques, à la demande des autorités judiciaires, sur les rapports et avis médico-légaux rendus par les établissements qui leur sont hiérarchiquement inférieurs, à savoir les cabinets de médecine légale et les services départementaux de médecine légale.
Il n'entre pas dans les attributions de la Commission supérieure médico­légale de l'Institut national de médecine légale « Mina Minovici » (ci-après « la Commission supérieure ») de se transporter sur les lieux et d'examiner les personnes concernées. Dans le cas où elle estime ne pas pouvoir approuver les conclusions des actes médico-légaux émanant des établissements soumis à son contrôle, elle peut recommander la réitération totale ou partielle des actes en question. Les avis qu'elle rend, après avoir exercé son contrôle, à la demande des autorités judiciaires, sur les rapports d'expertise pertinents rendus par les établissements hiérarchiquement inférieurs doivent être adressés à celles-ci dans un délai de quarante jours.
46.  L'OG no 1/2000 ne comporte aucune précision quant à la forme des avis en question. Elle renvoie, de façon générale, aux dispositions du code de procédure pénale (CPP), ce qui donne à penser que celles-ci sont applicables en matière d'expertise médico-légale. Pour leur part, les règles sur la procédure de réalisation des expertises médicales et des autres travaux médico-légaux (paragraphe 41 in fine) énoncent que : a) le rapport d'expertise médico-légale est un document établi par un expert à la demande des organes judiciaires et dans lequel figurent les éléments relatifs à l'expertise effectuée et b) l'avis est un acte délivré à la demande des organes judiciaires par la commission supérieure médico-légale ou par les commissions de contrôle des actes médicaux et portant approbation du contenu et des conclusions de l'acte médico-légal soumis à contrôle, ou recommandant la réitération des travaux d'expertises réalisés ou contenant les conclusions énoncées par les commissions de contrôle. Dans l'hypothèse où l'avis recommande la réitération des travaux d'expertise réalisés, la tâche en incombe à une commission formée d'au moins deux experts d'un grade supérieur à celui de l'auteur des travaux en question. Celle-ci a pour mission de réexaminer les travaux réalisés et, le cas échéant, de procéder à de nouvelles investigations. Elle rend ses conclusions sur la base des constats opérés dans les travaux antérieurs, des preuves versées au dossier et des objections formulées par les organes judiciaires.
2.  Les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'expertise comme moyen de preuve au procès pénal
47.  L'article 119 § 2 du code de procédure pénale (ci-après « le CPP ») dispose que lorsqu'une loi spéciale prévoit que la réalisation d'une expertise doit être effectuée par une institution spécialisée en matière de médecine légale, les organes d'enquête et les tribunaux ne peuvent s'adresser qu'à elle pour faire réaliser l'expertise en question. Cette disposition a été contestée à plusieurs reprises, par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité, par des justiciables qui ont invité la Cour constitutionnelle à la déclarer contraire à la Constitution au motif que, en empêchant les tribunaux ou le ministère public de confier la réalisation d'une expertise médico-légale à un expert indépendant, elle portait atteinte aux droits de la défense ainsi qu'à l'indépendance de la justice. Ils lui ont également demandé d'ordonner que l'article 119 § 2 du CPP soit modifié et complété de manière à ce que les expertises sollicitées par les organes judiciaires puissent être réalisées non seulement par des institutions publiques, mais aussi par des institutions privées, des spécialistes ou des experts indépendants bénéficiant d'une habilitation légale.
48.  Dans l'une des décisions (no 944/2006) qu'elle a rendue en la matière, la Cour constitutionnelle a considéré que l'article 119 § 2 du CPP ne méconnaissait ni les droits de la défense ni l'indépendance de la justice. En outre, elle s'est déclarée incompétente pour ordonner une refonte de l'article 119 § 2 du CPP afin d'y faire introduire la possibilité de confier la réalisation d'expertises à des experts indépendants ou à des institutions privées, soulignant que pareille opération emportait modification des règles de preuve en matière pénale et relevait à ce titre de la compétence exclusive du pouvoir législatif.
49.  L'article 123 du CPP énonce que tout rapport d'expertise doit contenir : a) une introduction mentionnant notamment l'objet de l'expertise, les questions auxquelles l'expert devait répondre, les documents sur la base desquels l'expertise a été rendue ; b) une description détaillée des opérations effectuées dans le cadre de l'expertise ; c) les conclusions de l'expertise, où doivent figurer les réponses aux questions posées et l'avis de l'expert.
50.  L'article 124 du CPP autorise les autorités de poursuite et les instances judiciaires à ordonner un supplément d'expertise ou à demander des éclaircissements à l'expert lorsqu'ils constatent qu'une expertise n'est pas complète. Les précisions ou éclaircissement peuvent être sollicités par écrit notamment auprès du service médico-légal ou de l'institut spécialisé auteur de l'expertise. En vertu de l'article 125 du même code, les autorités de poursuite ou les instances judiciaires peuvent ordonner la réalisation d'une nouvelle expertise si elles doutent de l'exactitude des conclusions du rapport d'expertise. L'article 118 énonce que toute expertise doit être effectuée selon les règles prescrites par le CPP, à moins qu'une loi spéciale n'en dispose autrement, auquel cas les dispositions de celle-ci priment sur les règles en question.
51.  L'article 63 du CPP n'attribue aucune valeur probante particulière aux éléments de preuve versés au dossier de l'enquête. Les organes d'enquête et/ou les tribunaux apprécient librement la valeur de chacun des éléments de preuve selon leur intime conviction et leur conscience, à la lumière de l'ensemble des preuves du dossier.
3.  Sur la responsabilité civile du personnel médical
52.  Avant l'entrée en vigueur de la loi no 95/2006 portant réforme du secteur de la santé et régissant la responsabilité civile du personnel médical ainsi que celle des prestataires de services médicaux, sanitaires ou pharmaceutiques, il était admis par la doctrine et la pratique nationales que la responsabilité civile du personnel médical pouvait être engagée sur le fondement des articles 998-1000 du code civil (pour une description détaillée de ces dispositions, voir les arrêts Iambor c. Roumanie (no 1), no 64536/01, § 142, 24 juin 2008 ; et Pantea c. Roumanie, no 33343/96, § 153, CEDH 2003-VI (extraits). De nature éminemment subjective, cette responsabilité était fondée sur la faute commise de façon intentionnelle ou par simple négligence. En la matière, la doctrine établissait une double distinction entre, d'une part, la faute par action (en roumain, « culpa comisiva ») – résultant d'un acte médical inapproprié – et la faute par omission (« culpa omisiva »), résultant de la non-réalisation d'une action nécessaire et obligatoire, et, d'autre part, la faute in eligendo (choix erroné des procédés médicaux utilisés) et la faute in vigilando (omission de porter secours dans des situations critiques).
53.  La pratique des juridictions nationales reflétait également la nature subjective de la responsabilité médicale. Il ressort de plusieurs décisions communiquées par le Gouvernement que, nonobstant leur acquittement au pénal au motif que les faits qui leur étaient reprochés n'avaient pas atteint le degré de danger social d'une infraction, des médecins se sont vu condamner au civil au paiement des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de leur faute professionnelle. Pour qu'elle pût donner lieu à réparation, la faute devait être dument établie par un rapport d'expertise médico-légale dressé par les organes bénéficiant d'une habilitation légale (voir le paragraphe 40 ci-dessus).
54.  Le titre XV de la loi no 95/2006 portant réforme du secteur de la santé y a introduit la notion d' « erreur professionnelle » et en a fait le fondement de la responsabilité civile du personnel médical. Le chapitre V de ce titre instaure une obligation d'assurance de responsabilité civile professionnelle, imposée aux médecins par l'article 656 de la loi en question. La doctrine estime que cette loi a apporté à la responsabilité du personnel médical un fondement juridique nouveau, de nature objective, cette responsabilité étant désormais liée aux risques de l'exercice de la profession et pouvant être engagée non seulement à raison d'actions ou d'omissions imputables aux personnel médical, mais aussi à raison d'actions ou d'omissions qui ne leur sont pas imputables, y compris dans les cas où la survenance du dommage était imprévisible à la lumière des connaissances médicales de l'époque. Les médecins doivent répondre de tous les préjudices qu'ils causent à leurs patients du fait qu'ils assument les risques de leur profession. Tout préjudice causé à la vie et/ou la santé des patients engage la responsabilité des médecins, même en l'absence de faute de ces derniers.
EN DROIT
I.  OBSERVATION PRÉLIMINAIRE
55.  Le Gouvernement fait valoir, à titre préliminaire, que le formulaire de requête n'a pas été signé par la requérante, raison pour laquelle il doute qu'elle ait véritablement eu la volonté de saisir la Cour. Pour sa part, l'intéressée admet avoir commis une erreur en omettant de signer sa première communication avec la Cour, mais affirme y avoir remédié dans sa correspondance ultérieure. A cet égard, elle fait valoir que toutes les autres lettres expédiées en son nom portent la signature de l'avocat auquel elle a donné pouvoir de la représenter aux fins de la procédure suivie devant la Cour.
56.  La Cour rappelle que, en vertu de l'article 45 du règlement de la Cour, toute requête introduite sur le fondement de l'article 33 ou de l'article 34 de la Convention doit être présentée par écrit et signée par le requérant ou son représentant. Lorsqu'un requérant est représenté, son ou ses représentants doivent produire une procuration ou un pouvoir écrit.
57.  En l'espèce, s'il est vrai que la dernière page du formulaire de requête joint à la première communication de l'intéressée que le greffe a reçue le 2 septembre 2005 était dépourvue de signature, la communication en question était néanmoins accompagnée d'un formulaire de pouvoir signé tant par la requérante que par son avocat, et ledit pouvoir avait précisément pour objet la représentation de celle-ci dans la procédure suivie devant la Cour. De plus, la deuxième communication de l'intéressée, adressée au greffe à la demande de celui-ci, était dûment signée par le représentant de la requérante et indiquait expressément qu'elle visait à compléter la requête initiale. Enfin, toutes les lettres que l'intéressée a adressées ultérieurement au greffe de sa propre initiative ou à la demande de celui-ci ont dûment été signées par le représentant de la requérante.
58.  Dès lors qu'il a été amplement remédié à l'omission initiale au cours des phases ultérieures de la procédure suivie devant la Cour, rien ne permet de douter, comme le fait le Gouvernement, de la volonté réelle de la requérante d'introduire une requête auprès de la Cour en vertu de l'article 34 de la Convention.
II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 2 DE LA CONVENTION
59.  La requérante se plaint du décès de son fils, qu'elle impute à des dysfonctionnements des services médicaux de l'hôpital de Deva, ainsi que de la manière dont les autorités ont conduit l'enquête ouverte à la suite de sa plainte pénale. Elle invoque l'article 6 de la Convention.
60.  La Cour rappelle que, maîtresse de la qualification juridique des faits de la cause, elle ne se considère pas comme liée par celle que leur attribuent les requérants ou les gouvernements. En vertu du principe jura novit curia, elle a, par exemple, examiné d'office des griefs sous l'angle d'un article ou paragraphe que n'avaient pas invoqué les parties. Un grief se caractérise par les faits qu'il dénonce et non par les simples moyens ou arguments de droit invoqués (voir, mutatis mutandis, Guerra et autres c. Italie du 19 février 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-I, p. 223, § 44, et Berktay c. Turquie, no 22493/93, § 167, 1er mars 2001). A la lumière de ces principes, la Cour considère nécessaire, dans les circonstances de l'espèce, d'examiner l'ensemble de ce grief sous l'angle de l'article 2 de la Convention, ainsi libellé dans ses parties pertinentes :
« 1.  Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque (...) »
A.  Sur la recevabilité
61.  Le Gouvernement excipe de l'irrecevabilité de la requête pour non-épuisement des voies de recours internes. Il souligne que la requérante n'a fait usage que de deux des voies de droit existantes et accessibles en droit roumain, à savoir les voies disciplinaire et pénale, et qu'elle n'a pas introduit parallèlement d'action civile qui aurait pu aboutir à la réparation du préjudice qu'elle allègue avoir subi du fait du décès de son fils. Il précise que la faute la plus légère suffit en principe à engager la responsabilité civile délictuelle de son auteur tandis que les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale sont plus strictes.
62.  La requérante conteste cette thèse. Elle soutient qu'elle a fait un usage normal des recours effectifs que lui offrait le droit roumain. Elle signale, en particulier, qu'elle s'est constituée partie civile à la procédure pénale dirigée contre C. Quant à l'introduction d'une action civile séparée, elle soutient qu'une telle action aurait été non seulement très onéreuse en raison du montant extrêmement élevé des taxes judiciaires, mais aussi très aléatoire car les juridictions pénales n'ont retenu aucune faute d'ordre médical à la charge de C. Elle souligne que les juridictions civiles ont pour pratique de ne pas donner gain de cause à la partie qui demande des dommages-intérêts dans le cas où la partie adverse a été exonérée de toute faute par une décision définitive d'une juridiction pénale.
63.  La Cour relève que les arguments avancés par le Gouvernement à l'appui de l'exception préliminaire formulée par lui sont étroitement liés à la substance du grief tiré de l'article 2 de la Convention. Dès lors, il y a lieu de joindre l'exception au fond. Par ailleurs, la Cour constate que ce grief n'est pas manifestement mal fondé au sens de l'article 35 § 3 de la Convention et qu'il ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B.  Sur le fond
1.  Arguments des parties
64.  La requérante considère que le décès de son fils est dû à des dysfonctionnements des services médicaux de l'hôpital de Deva. Elle estime que les médecins de cet hôpital ont manqué à leur obligation d'agir avec célérité pour sauver la vie de son fils. Elle allègue que le système judiciaire de son pays ne lui a pas permis d'obtenir un examen effectif de la cause du décès de son fils. Critiquant la manière dont les autorités ont conduit l'enquête ouverte à la suite de sa plainte pénale, elle se plaint des renvois successifs de l'affaire entre les différents parquets, ainsi que du refus – à ses yeux injustifié – des parquets hiérarchiquement inférieurs au parquet près la cour d'appel d'Alba-Iulia de se conformer aux indications et décisions de ce dernier en vue de l'élucidation des causes du décès et de l'établissement des responsabilités des médecins qui, selon elle, ont manqué à leurs devoirs.
65.  Le Gouvernement considère que le décès du fils de l'intéressée n'est pas dû à des actions ou à des omissions des autorités publiques. Il en veut pour preuve que les avis extrajudiciaires de différents spécialistes de la médecine ont conclu à l'absence de faute médicale dans la prise en charge d'urgence du fils de la requérante. Rappelant que la Convention ne comprend pas le droit pour un requérant de faire poursuivre ou condamner pénalement des tiers ou une obligation de résultat supposant que toute poursuite doit se solder par une condamnation, il estime que l'enquête menée par les autorités à la suite du décès du fils de la requérante a été complète et effective, tous les moyens de preuve potentiellement utiles ayant été produits sur ordre du parquet et rapportés au dossier afin que la situation de fait soit complètement établie. Il soutient que l'article 28 du règlement d'application de l'OG no 1/2000 autorisait l'Institut « Mina Minovici » à refuser de procéder à une nouvelle expertise sollicitée par les autorités judiciaires. Il renvoie sur ce point à une lettre en date du 6 septembre 2007, par laquelle le directeur de cet institut « Mina Minovici » a confirmé avoir agi en conformité avec cette disposition dans cette affaire. Enfin, il avance que la requérante aurait pu faire usage de la procédure de contrôle suivie devant les commissions mixtes instituées par l'OG no 1/2001 et leur soumettre les éventuels délits commis par les signataires des différents avis médico-légaux.
2.  Appréciation de la Cour
66.  La Cour rappelle que la première phrase de l'article 2, qui se place parmi les articles primordiaux de la Convention en ce qu'il consacre l'une des valeurs fondamentales des sociétés démocratiques qui forment le Conseil de l'Europe (voir par exemple McCann et autres c. Royaume-Uni, arrêt du 27 septembre 1995, série A no 324, pp. 45-46, § 147), impose à l'Etat l'obligation non seulement de s'abstenir de donner la mort « intentionnellement », mais aussi de prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie des personnes relevant de sa juridiction (L.C.B. c. Royaume-Uni, arrêt du 9 juin 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-III, § 36 ; Calvelli et Ciglio c. Italie [GC], no 32967/96, § 48, CEDH 2002-I ). Ces principes s'appliquent aussi dans le domaine de la santé publique, où les obligations positives énoncées ci-dessus impliquent la mise en place par l'Etat d'un cadre réglementaire imposant aux hôpitaux, qu'ils soient publics ou privés, l'adoption de mesures propres à assurer la protection de la vie de leurs malades (voir notamment Šilih c. Slovénie [GC], no 71463/01, § 192, 9 avril 2009 ; Calvelli et Ciglio  précité, § 49, Byrzykowski c. Pologne, no 11562/05, § 104, 27 juin 2006 ; Erikson c. Italie (déc.), no 37900/97, 26 octobre 1999 ; et Powell c. Royaume-Uni (déc.), no 45305/99, CEDH 2000-V).
67.  La Cour relève que la requérante n'allègue pas que son fils a été tué intentionnellement par les médecins de l'hôpital public chargés de le soigner la nuit où il est décédé. En revanche, sous l'angle du volet matériel de l'article 2 précité, l'intéressée soutient que les médecins mis en cause ont manqué aux devoirs de leur profession en ne prenant pas les mesures urgentes qui s'imposaient pour sauver son fils lorsqu'il se trouvait entre leurs mains. Compte tenu des principes énoncés au paragraphe 66 ci-dessus, l'article 2 trouve à s'appliquer.
68.  La Cour ne saurait exclure que les actes et omissions des autorités dans le cadre des politiques de santé publique peuvent, dans certaines circonstances, engager leur responsabilité sous l'angle du volet matériel de l'article 2. Toutefois, elle a déjà jugé que, dès lors qu'un Etat contractant a fait ce qu'il fallait pour assurer un haut niveau de compétence chez les professionnels de la santé et garantir la protection de la vie des patients, on ne peut admettre que des questions telles qu'une erreur de jugement de la part d'un professionnel de la santé ou une mauvaise coordination entre des professionnels de la santé dans le cadre du traitement d'un patient en particulier suffisent en elles-mêmes à obliger un Etat contractant à rendre des comptes en vertu de l'obligation positive de protéger le droit à la vie qui lui incombait aux termes de l'article 2 de la Convention (Byrzykowski, précité, § 104 ; Erikson (déc.) précitée ; et Powell (déc.) précitée).
69.  En l'espèce, l'existence de dysfonctionnements dans la coordination des services médicaux de l'hôpital public de Deva a été constatée par certains des rapports et des décisions rendus par les services médico-légaux et les organes disciplinaires appelés à exprimer un avis sur les causes du décès d'Adrian, au nombre desquels figurent le laboratoire de médecine légale de Deva (paragraphe 8 ci-dessus), l'Institut de médecine légale de Timişoara (paragraphe 9 ci-dessus) et le Conseil national de l'ordre des médecins (paragraphe 13 ci-dessus).
70.  Si l'existence de tels défauts de coordination dans un hôpital public semble tout à fait préoccupante, la Cour ne saurait toutefois spéculer sur les causes du décès du fils de la requérante. Elle estime qu'il convient plutôt d'examiner les événements qui ont conduit à la mort tragique de celui-ci et l'éventuelle responsabilité des professionnels de la santé impliqués dans cette affaire en recherchant si les voies de recours qui auraient pu permettre de faire la lumière sur le cours de ces événements au niveau national et de soumettre les faits de la cause à un contrôle public ont revêtu un caractère adéquat (voir, mutatis mutandis, Powell (déc.) précitée).
71.  A cet égard, elle attache une importance particulière à l'obligation procédurale contenue implicitement dans l'article 2 de la Convention qui, dans les circonstances de l'espèce, s'étend à la nécessité, pour l'Etat, d'instaurer un système judiciaire efficace et indépendant permettant d'établir la cause du décès d'un individu qui se trouvait sous la responsabilité de professionnels de la santé – qu'ils relèvent du secteur public ou du secteur privé – et, le cas échéant, de les obliger à répondre de leurs actes (voir notamment Calvelli et Ciglio  précité, § 49, Byrzykowski précité § 104 ; Erikson (déc.) précitée ; et Powell (déc.) précitée). Il s'agit là d'une obligation non de résultat, mais de moyens (Paul et Audrey Edwards c. Royaume-Uni, no 46477/99, § 71, CEDH 2002­II).
72.  En l'espèce, la Cour relève que l'intéressée a d'abord – et principalement – fait usage d'un recours interne de nature pénale pour se plaindre de ce qu'elle qualifiait de manquement des médecins de l'hôpital de Deva à leur obligation d'agir avec célérité pour sauver la vie de son fils. La Cour examinera tout d'abord si les investigations menées par les autorités à la suite de la plainte pénale de la requérante répondent aux exigences de promptitude, d'effectivité et de diligence raisonnable découlant du volet procédural de l'article 2. Elle se penchera ensuite sur la question de savoir si le système judiciaire national offrait à l'intéressé, le cas échéant, d'autres types de recours propres à permettre, dans les circonstances de l'espèce, l'établissement de l'éventuelle responsabilité des médecins en question.
a)  Sur le recours pénal exercé par la requérante
i.  La durée de l'enquête pénale menée par les autorités
73.  La Cour relève que l'instruction de l'affaire ouverte à la suite de la plainte pénale de la requérante a duré près de quatre ans. Dans son jugement du 15 octobre 2004, où il a âprement critiqué la manière dont les poursuites pénales avaient été menées par les parquets qui avaient connu de l'affaire, le tribunal de Deva a estimé inadmissible que les poursuites pénales se fussent étendues sur une durée aussi longue et que plusieurs décisions de reprise des poursuites ordonnant un supplément d'enquête eussent été ignorées en dépit de leur caractère obligatoire (paragraphe 34 ci-dessus).
74.  La Cour ne peut que souscrire à ce constat. Elle rappelle à cet égard que, pour les affaires de négligences médicales relevant de l'article 2, une exigence de promptitude et de diligence raisonnable est implicite. S'il peut arriver que des obstacles ou difficultés empêchent une enquête de progresser dans une situation particulière, il reste que la prompte réaction des autorités est capitale pour maintenir la confiance du public et son adhésion à l'état de droit et pour prévenir toute apparence de tolérance d'actes illégaux ou de collusion dans leur perpétration (Silih précité, § 195 ; Paul et Audrey Edwards, précité, § 72). La connaissance des faits et des erreurs éventuellement commises dans l'administration de soins médicaux est essentielle pour permettre aux établissements concernés et au personnel médical de remédier aux défaillances potentielles et de prévenir des erreurs similaires. Le prompt examen de telles affaires est donc important pour la sécurité des usagers de l'ensemble des services de santé (Silih précité, § 196 ; Byrzykowski, précité, § 117).
75.  La Cour relève que la procédure critiquée s'est étalée sur environ quatre ans et cinq mois au total pour deux degrés de juridiction, et que l'enquête menée par le parquet a duré à elle seule près de quatre ans. Elle estime que cette durée ne satisfait pas à l'exigence d'un examen prompt et sans retard inutile de l'affaire.
ii.  L'effectivité de l'enquête pénale menée par les autorités
1.  Manque de coopération des experts médico-légaux avec les organes d'enquête
76.  Malgré la longueur de la période pendant laquelle l'affaire est demeurée pendante devant différents parquets, il apparaît que les organes d'enquête ont été incapables d'apporter une réponse cohérente et scientifiquement fondée aux questions qui se posaient. A cet égard, la Cour relève que celles formulées par le parquet près la cour d'appel d'Alba-Iulia – qui avait estimé, le 15 août 2002, que les avis des différents établissements médico-légaux étaient confus et contradictoires et que le déroulement des faits n'avait pas été suffisamment établi pour que l'éventuelle responsabilité des médecins pût être appréciée en toute connaissance de cause (paragraphe 20 ci-dessus) – sont restées sans réponse. En particulier, les autorités n'ont jamais répondu à la question, essentielle en l'occurrence, de savoir si l'asphyxie à l'origine du décès d'Adrian était survenue accidentellement pendant la trachéotomie, fait de nature à exclure la faute médicale, ou si elle résultait du retard apporté à la réalisation de cette opération, circonstance qui pouvait avoir des conséquences importantes, voire décisives, sur le plan de la responsabilité pénale du personnel médical mis en cause.
77.  La Cour note que les parquets ont essayé à plusieurs reprises d'éclaircir ces questions essentielles, comme le leur permettaient – au moins en théorie – les articles 124 et 125 du CPP (paragraphe 50 ci-dessus). Toutefois, toutes leurs tentatives se sont heurtées à la résistance des établissements médico-légaux, lesquels ont refusé de répondre à leurs questions en renvoyant aux dispositions spéciales du règlement d'application de l'OG no 1/2000 qui, à leurs yeux, les empêchaient d'accepter de nouvelles missions d'expertise ordonnées par le parquet dès lors qu'un avis avait été rendu par l'autorité nationale suprême en matière d'expertise médico-légale et/ou qu'aucun élément nouveau n'était apparu (paragraphes 21-24 et 28-29 ci-dessus).
Pour sa part, la juridiction ayant statué en dernier ressort a ajouté foi à l'avis rendu par la Commission supérieure – bien que les juges de première instance l'eussent estimé incomplet et sollicité un nouvel avis (paragraphe 40 ci-dessus) – au motif que ce document émanait de la plus haute autorité nationale en matière d'expertise médico-légale et que celle-ci, dans les circonstances de l'espèce, se trouvait empêchée, par la loi spéciale régissant l'activité des instituts médico-légaux, de réaliser une nouvelle expertise en l'absence d'éléments nouveaux (paragraphes 36 et 37 ci­dessus).
78.  Il résulte nécessairement du raisonnement suivi par cette dernière juridiction qu'un élément de preuve acquiert force probante dès lors que l'on ne peut y substituer un élément nouveau ou que l'on ne peut le combattre par un autre élément de preuve de même valeur scientifique. Pareille conclusion est en totale contradiction avec l'obligation procédurale contenue implicitement dans l'article 2 de la Convention, qui impose précisément aux autorités nationales de prendre des mesures pour assurer l'obtention des preuves propres à fournir un compte-rendu complet et précis des faits et une analyse objective des constatations cliniques, notamment de la cause du décès. Toute déficience de l'enquête affaiblissant sa capacité à établir la cause du décès ou les responsabilités risque de faire conclure qu'elle ne répond pas à cette norme (voir, mutatis mutandis, Slimani c. France, no 57671/00, § 32, CEDH 2004-IX (extraits) ; McKerr c. Royaume-Uni, no 28883/95, § 113, CEDH 2001-III et Paul et Audrey Edwards précité, § 71).
79.  Certes, en vertu du principe de la libre appréciation des preuves qui régit la procédure pénale roumaine (paragraphe 51 ci-dessus), il est loisible aux tribunaux d'écarter une preuve qui ne leur semble pas crédible ou concluante. Une telle possibilité resterait néanmoins purement théorique s'il était interdit aux instances judiciaires d'ordonner la réalisation d'une expertise en dehors du réseau d'instituts médico-légaux habilités par la loi et dont les avis sont les seuls admissibles comme éléments de preuve dans le cadre d'un procès pénal (paragraphe 45 ci-dessus), ou de demander à ces établissements de reconsidérer leur conclusions lorsqu'elles leur paraissent incomplètes ou insuffisamment claires pour leur permettre de faire un choix éclairé et aider à prendre leurs décisions.
80.  Que la présente affaire constitue un cas isolé ou qu'elle reflète une pratique courante de l'Institut médico-légal « Mina Minovici » consistant à se soustraire aux demandes que lui adressent les autorités judiciaires en vue d'obtenir les informations dont elles ont besoin pour prendre en toute connaissance de cause des décisions objectivement fondées, la Cour estime que l'existence même, dans la législation nationale, de dispositions autorisant les établissements médico-légaux compétents pour rendre des avis à éluder les demandes des autorités judiciaires et refuser ainsi de coopérer avec elles à chaque fois que l'exigent les besoins de l'enquête ne se concilie guère avec le devoir primordial de l'Etat de garantir le droit à la vie en mettant en place un cadre juridique et administratif efficace, propre à établir la cause du décès d'un individu qui se trouvait sous la responsabilité de professionnels de la santé (Powell (déc.) précitée ; Byrzykowski, précité, § 104, 27 juin 2006 ; et Erikson (déc. ), précitée).
2.  Absence de motivation des avis médico-légaux
81.  Au niveau national, les avis rendus par les cabinets et les services de médecine légale départementaux peuvent être soumis, à la demande des organes judiciaires, aux contrôles successifs des autres instituts médico-légaux hiérarchiquement supérieurs et, en dernier ressort, à la Commission supérieure (paragraphe 45 ci-dessus). Il n'appartient pas à la Cour d'apprécier in abstracto l'effectivité d'une telle structure publique verticale et hiérarchisée. Si l'intérêt d'une bonne administration de la justice peut justifier que la réalisation d'expertises soit confiée à des institutions publiques spécialisées dans les affaires portant sur des allégations d'atteinte au droit à la vie, il n'en reste pas moins que le cadre législatif mis en place par l'Etat pour réglementer l'exercice de la médecine légale doit comporter des garanties contre l'arbitraire suffisantes pour renforcer la confiance des justiciables dans l'action de la justice et la crédibilité du système en son ensemble.
82.  En l'espèce, la Cour relève que le laboratoire de médecine légale de Deva, qui exerce ses activités à proximité du lieu du décès, a clairement constaté dans son rapport qu'il y avait eu des dysfonctionnements dans le protocole d'assistance médicale d'urgence de l'hôpital de Deva et qu'il en était résulté un retard dans la réalisation de l'intervention chirurgicale. Cette conclusion semble avoir été confirmée, au moins en partie, à l'issue du contrôle effectué par l'Institut de médecine légale du centre universitaire de Timişoara. Toutefois, la Commission supérieure, dont la mission consiste à émettre des avis sur la seule base des rapports des instituts de rang inférieur sans se transporter sur les lieux (paragraphe 45 ci-dessus), s'est contentée d'écarter cette conclusion sans en préciser les raisons (paragraphe 10 ci­dessus). Comme l'a relevé à juste titre le tribunal de première instance de Deva (paragraphe 36 et 37 ci-dessus), elle s'est bornée à décrire le protocole médical applicable dans le cas dont elle avait à connaître et à exonérer de toute responsabilité les médecins mis en cause. Or, il s'agissait là d'un avis décisif pour l'élucidation des causes du décès d'Adrian et l'établissement des responsabilités des médecins, la commission en question étant l'autorité nationale suprême en matière médico-légale.
83.  Sans mettre en cause la compétence professionnelle des douze médecins composant la Commission supérieure, lesquels doivent jouir d'une vaste expérience de la médecine aux termes de la loi (paragraphe 45 ci-dessus), la Cour considère que seul un rapport approfondi scientifiquement étayé, comportant une solution motivée par rapport aux éventuelles contradictions entre les avis des instituts de rang inférieur et répondant aux questions posées par le parquet aurait été de nature à inspirer aux justiciables confiance dans l'action de la justice et à assister les organes judiciaires dans l'exercice de leurs fonctions (mutatis mutandis, Tysiąc c. Pologne, no 5410/03, § 117, CEDH 2007-IV).
La Cour relève que ni l'OG no 1/2000 ni les règles sur la procédure de réalisation des expertises médicales et des autres travaux médico-légaux ne contiennent de précisions quant à d'éventuelles informations obligatoires que ces avis devraient contenir (paragraphe 46 ci-dessus). A supposer que les règles du CPP sur les conditions de forme des rapports d'expertise soient applicables aux avis en question par l'effet du renvoi général à ce texte opéré par une disposition de l'OG no 1/2000 (paragraphes 46 et 48 ci-dessus), force est de constater que, dans l'avis qu'elle a rendu en l'espèce, la Commission supérieure n'a pas reproduit les questions auxquelles elle devait répondre, n'a pas décrit les opérations effectuées dans le cadre de son contrôle et n'a pas précisé les motifs concrets sur lesquels elle s'est appuyée pour parvenir à ses conclusions. Si l'obligation de motiver les actes médico-légaux n'incombait qu'aux établissements compétents pour dresser les premiers constats et rapports d'expertise et non aux instances de contrôle, cette garantie visant à renforcer la crédibilité des avis et l'effectivité de l'ensemble du système national d'expertise médico­légale resterait vaine puisque celles-ci ont le pouvoir de modifier en totalité les conclusions des établissements en question (paragraphe 46 ci­dessus).
84.  La Cour considère que l'obligation de motiver les avis scientifiques était d'autant plus importante en l'espèce que, selon les dispositions internes régissant l'expertise médico-légale, la formulation d'un avis par l'autorité nationale suprême en la matière – l'Institut « Mina Minovici » – empêche les instituts de rang inférieur de procéder à de nouvelles expertises et de compléter celles qu'ils ont réalisées (paragraphes 21-24 et 28-29 ci-dessus). A cela s'ajoute le fait que les juridictions nationales et les justiciables ayant, à l'instar de la requérante, la qualité de partie à une procédure pénale portant sur des allégations d'atteinte au droit à la vie ne pouvaient – et ne peuvent toujours pas – se prévaloir, à titre d'élément de preuve, d'avis scientifiques délivrés par des établissements indépendants autres que les institutions publiques médico-légales énumérées par l'OG no 1/2000. A ce dernier égard, la Cour observe que la question de savoir s'il convient d'étendre la compétence en matière de réalisation d'actes médico-légaux aux établissements privés et/ou à d'autres experts indépendants bénéficiant d'une habilitation légale a été soulevée au niveau interne (paragraphe 48 ci­dessus).
85.  Certes, il n'entre pas dans les attributions de la Cour d'intervenir dans ces débats en marquant sa préférence pour l'une ou l'autre des solutions possibles. Il n'en demeure pas moins, au vu des circonstances de la présente affaire, que le régime interne de l'expertise médico-légale doit s'entourer de garanties suffisantes, propres à préserver sa crédibilité et son efficacité, notamment en obligeant les experts – qu'ils relèvent du secteur public ou du secteur privé – à motiver leurs avis et à coopérer avec les organes judiciaires à chaque fois que les besoins de l'enquête l'exigent.
b)  Sur les autres types de recours existants à l'époque des faits au niveau national
86.  Le Gouvernement allègue qu'il était loisible à la requérante de demander aux commissions mixtes du ministère de la Justice et du ministère de la Santé de vérifier les avis délivrés par les instituts médico-légaux, celles-ci étant compétentes pour contrôler la légalité de tels actes. Par ailleurs, il indique que l'intéressée aurait pu exercer contre C. une action indemnitaire séparée sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle (paragraphes 52 et 61 ci-dessus).
87.  Certes, dans les cas où, comme en l'espèce, l'atteinte au droit à la vie ou à l'intégrité physique n'est pas volontaire, l'obligation procédurale découlant de l'article 2 de mettre en place un système judiciaire efficace n'exige pas nécessairement dans tous les cas un recours de nature pénale (Mastromatteo c. Italie [GC], no 37703/97, § 90, CEDH 2002-VIII). Dans le contexte spécifique des négligences médicales, pareille obligation peut aussi être réputée remplie si, par exemple, le système juridique en cause offre aux intéressés un recours devant les juridictions civiles, seul ou combiné avec un recours devant les juridictions pénales, propre à permettre l'établissement de la responsabilité éventuelle des médecins en cause et, le cas échéant, l'application de toute sanction civile appropriée, tels le versement de dommages-intérêts et/ou la publication de l'arrêt. Des mesures disciplinaires peuvent également être envisagées (Calvelli et Ciglio précité, § 51, et Vo c. France [GC], no 53924/00, § 90, CEDH 2004-VIII).
88.  En l'espèce, la Cour relève que la requérante a exercé un recours disciplinaire contre C., en vain. Elle observe par ailleurs que le tribunal de première instance a purement et simplement annulé la décision par laquelle la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins avait infligé un blâme à C., au motif que l'intéressée aurait dû porter sa plainte devant le Conseil départemental de Hunedoara, à qui il revenait de transmettre les pièces du dossier à l'instance supérieure. Un tel excès de formalisme semble difficilement compréhensible en l'espèce car il ressort clairement des pièces du dossier que la requérante a dûment informé les deux organes disciplinaires du recours qu'elle avait introduit devant la Commission supérieure de discipline du Conseil national de l'ordre des médecins (paragraphe 12 ci-dessus) et que cette instance a statué en parfaite connaissance des pièces du dossier médical, ce qui ressort clairement de la décision, largement motivée, qu'elle a rendue le 19 octobre 2001 (paragraphe 13 ci-dessus).
89.  Quant à l'éventuel recours auprès des commissions mixtes, la Cour relève qu'il s'agit d'instances composées de médecins et de fonctionnaires désignés par le ministère de la Justice, et non d'autorités judiciaires indépendantes et impartiales (paragraphe 43 ci-dessus). Même si la loi donnait à ces commissions le pouvoir de saisir la justice ou le Conseil de l'ordre des médecins à l'issue de leurs vérifications, elle ne prévoyait aucune sanction ni aucune procédure de contrôle en cas de refus de leur part de faire usage de ce pouvoir. De plus, elles ne pouvaient saisir l'autorité judiciaire que dans le cas où elles constataient que la loi avait été méconnue (paragraphe 43 ci-dessus). Dans ces conditions, un recours formé devant ces commissions aurait été dépourvu de toute efficacité puisque la loi elle­même autorisait les établissements médico-légaux à ne pas donner suite aux demandes d'expertise ou de supplément d'enquête formulées par l'autorité judiciaire dès l'instant où la Commission supérieure avait rendu un avis.
90.  S'agissant, enfin, de la voie d'une action civile en dommages-intérêts indiquée par le Gouvernement, il n'est pas contesté qu'une telle action était théoriquement possible sur le fondement des articles 998 et 1999 du Code Civil. Néanmoins, comme la Cour vient de le rappeler, l'obligation de l'Etat au regard de l'article 2 de la Convention ne peut être réputée satisfaite que si les mécanismes de protection prévus en droit fonctionnent effectivement en pratique (Calvelli et Ciglio, précité, § 53 ; Lazzarini et Ghiacci c. Italie (déc.), no 53749/00, 7 novembre 2002 ; et Byrzykowski, précité, § 117).
A cet égard, il est constant qu'à l'époque des faits, la responsabilité médicale revêtait en droit roumain un caractère subjectif et était fondée sur la faute médicale de la personne mise en cause (paragraphes 52 et 53 ci-dessus). Il s'ensuit que l'effectivité de l'enquête réalisée par les parquets et les juridictions internes que la requérante avait saisis pour se plaindre de ce que le médecin C. avait manqué à son obligation d'agir avec célérité en vue de la préservation de la vie de son fils était assurément déterminante pour qu'une telle action ait des chances d'aboutir. Or, la Cour vient de constater que les investigations pénales menées dans la présente affaire ont été incomplètes et insuffisantes en ce qu'elles n'ont pas permis aux autorités de parvenir à une conclusion éclairée sur la question de savoir si une faute médicale avait ou non été commise (voir, notamment, les paragraphes 76-85 ci-dessus). Dans ces conditions, une action civile était sinon vouée à l'échec, du moins très aléatoire. La Cour relève que le Gouvernement n'a produit aucune décision d'une juridiction nationale démontrant que, à l'époque des faits, un professionnel de la santé aurait pu être condamné au payement de dommages-intérêts en l'absence de toute faute médicale de sa part. Il y a donc lieu de rejeter l'exception préliminaire du Gouvernement.
91.  La Cour prend note par ailleurs de l'évolution de la réglementation nationale en matière de santé publique, qui rattache désormais la responsabilité du médecin à la notion de risque lié à l'exercice de la profession (paragraphe 54 ci-dessus), fondement objectif qui constitue le point de départ d'une voie légale plus efficace en vue de la réparation des dommages causés à la vie ou la santé des patients. Elle observe toutefois que les modifications intervenues ne sont pas applicables rétroactivement à la situation de la requérante.
c)  Conclusion
92.  Au vu de l'ensemble de ce qui précède, et, en particulier, de l'incapacité des juridictions nationales à se prononcer en toute connaissance de cause sur les raisons du décès du fils de la requérante et la responsabilité éventuelle des médecins qui l'ont pris en charge la nuit de son décès (paragraphe 76-85 ci-dessus), la Cour conclut qu'il y a eu violation du volet procédural de l'article 2 de la Convention.
III.  SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
93.  Aux termes de l'article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
94.  La requérante réclame 300 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu'elle dit avoir subi.
95.  Le Gouvernement exprime ses regrets pour le décès du fils de l'intéressée. Il considère qu'un constat de violation constituerait une réparation suffisante pour tout préjudice moral subi par la requérante. En tout état de cause, il estime que le montant réclamé par elle au titre du préjudice moral est excessif par rapport aux sommes octroyées par la Cour dans des affaires similaires.
96.  La Cour considère que les faits dénoncés par l'intéressée lui ont causé une souffrance certaine. Compte tenu du constat de violation de l'article 2 auquel elle est parvenue ci-dessus, la Cour, statuant en équité, alloue à la requérante 20 000 EUR au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
97.  La requérante demande également 1 022 nouveaux lei roumains (RON), soit l'équivalent de 296 euros (EUR), pour les frais et dépens engagés devant les commissions supérieures du Conseil national de l'ordre des médecins et de l'Institut « Mina Minovici », ainsi que devant les juridictions internes. Elle produit les quittances des frais en question.
98.  Le Gouvernement ne s'oppose pas à ce qu'une somme soit allouée à l'intéressée pourvu qu'elle corresponde aux frais prouvés, nécessaires et en rapport direct avec l'affaire.
99.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l'espèce, compte tenu des documents en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour estime raisonnable la somme demandée par la requérante et la lui accorde en totalité.
C.  Intérêts moratoires
100.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,
1.  Joint au fond l'exception du Gouvernement tirée du non-épuisement des voies de recours internes et la rejette ;
2.  Déclare la requête recevable ;
3.  Dit qu'il y a eu violation de l'article 2 de la Convention sous son volet procédural ;
4.  Dit
a)  que l'Etat défendeur doit verser à la requérante, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, 20 000 EUR (vingt mille euros) pour dommage moral et 296 EUR (deux cent quatre-vingt-seize euros) pour frais et dépens, à convertir dans la monnaie de l'Etat défendeur au taux applicable à la date du règlement, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt ;
b)  qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ces montants seront à majorer d'un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
5.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 16 février 2010, en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Santiago Quesada Josep Casadevall   Greffier Président
ARRÊT EUGENIA LAZĂR c. ROUMANIE
ARRÊT EUGENIA LAZĂR c. ROUMANIE 


Synthèse
Formation : Cour (troisième section)
Numéro d'arrêt : 32146/05
Date de la décision : 16/02/2010
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Exception préliminaire jointe au fond et rejetée (non-épuisement des voies de recours internes) ; Violation de l'art. 2 (volet procédural) ; Préjudice moral - réparation

Analyses

(Art. 2-1) ENQUETE EFFICACE, (Art. 2-1) VIE


Parties
Demandeurs : EUGENIA LAZAR
Défendeurs : ROUMANIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2010-02-16;32146.05 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award