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03/02/2011 | CEDH | N°40298/08

CEDH | AFFAIRE ILIOPOULOS ET AUTRES c. GRÈCE


PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE ILIOPOULOS ET AUTRES c. GRÈCE
(Requête no 40298/08)
ARRÊT
STRASBOURG
3 février 2011
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Iliopoulos et autres c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un comité composé de :
Elisabeth Steiner, présidente,   Sverre Erik Jebens,   George Nicolaou, juges,  et de André Wampach, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 13 janvier

2011,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se tr...

PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE ILIOPOULOS ET AUTRES c. GRÈCE
(Requête no 40298/08)
ARRÊT
STRASBOURG
3 février 2011
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Iliopoulos et autres c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un comité composé de :
Elisabeth Steiner, présidente,   Sverre Erik Jebens,   George Nicolaou, juges,  et de André Wampach, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 13 janvier 2011,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 40298/08) dirigée contre la République hellénique et dont vingt-neuf ressortissants de cet Etat, dont les noms figurent en annexe (« les requérants »), ont saisi la Cour le 28 juillet 2008 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Les requérants sont représentés par Mes Z. Tsiliouka-Mousmoula, avocate à Athènes. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les délégués de son agent, Mme G. Papadaki, assesseure auprès du Conseil juridique de l’Etat, et Mme Z. Hadjipavlou, auditrice auprès du Conseil juridique de l’Etat.
3.  Le 16 novembre 2009, la présidente de la première section a décidé de communiquer les griefs tirés des articles 6 § 1 (durée de la procédure) et 13 de la Convention au Gouvernement. En application du Protocole no 14, la requête a été attribuée à un Comité.
EN FAIT
I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
4.  Les requérants font partie du Système national de santé (Εθνικό Σύστημα Υγείας) en qualité de médecins, au grade de directeur, et sont ou étaient employés par l’hôpital public « Evangelismos ».
1.  La procédure introduite le 10 février 1995
5.  Le 10 février 1995, les requérants saisirent le tribunal administratif d’Athènes d’un recours en annulation du refus de l’hôpital de leur payer une indemnité pour des heures supplémentaires, fixée au pourcentage de 1/65e de leur salaire de base par décision du 14 juin 1991 du ministre de l’Economie, alors qu’ils n’avaient reçu, entre le 1er juillet 1991 et le 31 décembre 1993, qu’une somme correspondant à 1/100e de leur salaire, sur base d’une décision du 29 juillet 1991 du même ministre. Cette dernière excluait les médecins de l’ESY de l’augmentation de l’indemnité.
L’audience, initialement fixée au 27 mai 1996, fut reportée à deux reprises à la demande des requérants et eut lieu le 31 mars 1997.
6.  Par un jugement avant-dire droit du 30 juin 1997, le tribunal administratif demanda au ministère de l’Economie de lui faire savoir si la décision du ministre du 29 juillet 1991 avait été notifiée aux organismes concernés. Par un jugement avant-dire droit du 31 décembre 1998, le tribunal administratif réitéra la même demande. Par un troisième jugement avant-dire droit du 30 avril 2001, le tribunal administratif demanda au ministère de l’Economie de l’informer si la décision du 14 juin 1991 avait en réalité été appliquée aux fonctionnaires de l’Etat, des collectivités locales et à d’autres personnes morales de droit public.
7.  Par un jugement du 25 octobre 2005 (signifié aux requérants le 16 février 2006), le tribunal administratif débouta les requérants. Il jugea que la décision ministérielle du 14 juin 1991 devait être considérée comme non avenue, comme l’avait déjà considérée le Conseil d’Etat dans d’autres cas, car les formalités pour sa publication n’avaient pas été respectées. Par conséquent, elle ne pouvait pas servir de base légale pour satisfaire la demande des requérants.
8.  Le 4 avril 2006, les requérants interjetèrent appel contre ce jugement devant la cour administrative d’appel d’Athènes. L’audience, initialement fixée au 10 janvier 2007, fut reportée au 3 décembre 2008, dans l’attente de l’arrêt de la Grande Chambre de la Cour européenne dans l’affaire Arvanitaki-Roboti c. Grèce (no 27278/03) qui fut rendu le 15 février 2008. Par un arrêt du 12 février 2009, la cour d’appel rejeta l’appel.
9.  Le 17 juin 2009, les requérants saisirent le Conseil d’Etat devant lequel la procédure est encore pendante.
2.  La procédure introduite le 29 décembre 1998
10.  Le 29 décembre 1998, les requérants saisirent le tribunal administratif d’Athènes d’une action identique à la précédente mais pour la période allant du 1er janvier 1994 au 31 juillet 1996.
11.  Initialement fixée au 26 janvier 2000, l’audience fut ajournée à cinq reprises, dont trois à la demande des requérants et deux à la demande de la partie adverse. Elle eut lieu le 19 septembre 2001.
12.  Par un jugement du 30 novembre 2001, le tribunal administratif débouta les requérants. Il jugea que tant la décision ministérielle du 14 juin 1991 que celle du 29 juillet 1991 n’avaient pas fait l’objet d’un affichage comme cela était prévu par la loi. Par conséquent, comme elles avaient été publiées en violation des prescriptions de la loi, elles devaient être considérées comme non avenues. Le tribunal administratif releva, en outre, que la décision du 29 juillet 1991 avait été annulée par un arrêt du Conseil d’Etat, statuant en formation plénière, car elle était édictée ultra petita.
13.  Le 9 mai 2002, les requérants saisirent la cour administrative d’appel d’Athènes, qui rejeta l’appel le 28 mai 2004.
14.  Le 26 janvier 2005, les requérants se pourvurent en cassation devant le Conseil d’Etat. L’audience, initialement fixée au 16 janvier 2006, fut ajournée d’office au 30 janvier 2006, puis aux 29 mai, 6 novembre 2006, 23 avril, 10 décembre 2007, 7 avril, 22 septembre et 8 décembre 2008 où elle eut lieu. La procédure est encore pendante.
3.  La procédure introduite le 20 décembre 2001
15.  Le 20 décembre 2001, les requérants saisirent également le tribunal administratif d’Athènes d’une action en dommages-intérêts contre l’hôpital et l’Etat. L’objet de l’action était le même que celui des deux précédentes, mais pour la période allant du 1er juillet 1991 au 31 juillet 1996.
L’audience, initialement prévue au 26 avril 2004, fut reportée aux 27 septembre, 13 décembre 2004 et 30 mai 2005 quand elle eut lieu.
16.  Par un jugement du 27 octobre 2005, le tribunal administratif rejeta l’action.
17.  L’appel des requérants contre ce jugement devait être examiné par la cour administrative d’appel le 24 septembre 2008, après deux ajournements, l’un demandé par les requérants dans l’attente de l’arrêt de la Cour dans l’affaire Arvanitaki-Roboti précitée et l’autre en raison d’une grève des avocats et des greffes. Par un arrêt du 5 février 2009, la cour d’appel débouta les requérants au motif qu’ils n’avaient pas payé le timbre fiscal requis.
II.  LE DROIT INTERNE PERTINENT
18.  Selon l’article 33 du décret 341/1978 en vigueur à la date de la saisine du tribunal administratif d’Athènes par les requérants, le président du tribunal pouvait à n’importe quel moment fixer l’audience à une date plus rapprochée que celle fixée initialement, soit d’office soit à la demande de l’une des parties.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
19.  Les requérants se plaignent de la durée de la procédure devant les juridictions administratives. Ils invoquent l’article 6 § 1 de la Convention, dont la partie pertinente se lit ainsi :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
A.  Sur la recevabilité
20.  Le Gouvernement soutient que c’est à tort que les requérants ont introduit la deuxième et troisième procédures car leur cause était déjà tranchée par le jugement du tribunal administratif du 25 octobre 2005 et il existait une jurisprudence du Conseil d’Etat qui leur était défavorable.
21.  En outre, le Gouvernement souligne que certains requérants ne peuvent pas se prétendre « victimes » : la requérante no 17 n’était pas partie à la première procédure ; la requérante no 23 n’était pas partie ni à la deuxième ni à la troisième procédure ; les requérants no 7, 19, 23 et 29 n’ont pas participé à l’appel et au pourvoi dans le cadre de la deuxième procédure ; le requérant no 7 a vu son action être déclarée irrecevable par le tribunal administratif dans la troisième procédure. Enfin, les héritiers du requérant no 8, décédé en février 2005, ne se sont pas substitués à lui dans la troisième procédure.
22.  Les requérants soulignent que tous les requérants ont participé à toutes les procédures et sont toutes « victimes » au sens de l’article 34 de la Convention.
23.  La Cour rappelle qu’elle ne peut être saisie qu’après épuisement des voies de recours internes et dans un délai de six mois à partir de la date à laquelle l’intéressé a pris connaissance de la décision interne définitive. En outre, il ne lui appartient pas d’évaluer les chances de succès des requérants lorsqu’ils décident d’épuiser les voies de recours internes. Il convient donc d’écarter l’objection du Gouvernement selon laquelle l’affaire des requérants n’avait aucune chance de succès à compter du jugement du tribunal administratif du 25 octobre 2005.
24.  De plus, concernant les requérants mentionnés par le Gouvernement, la Cour note que divers documents de la procédure indiquent que ceux-ci ont participé à tous les stades des trois procédures et le Gouvernement ne l’a pas contesté dans ses observations en réponse à celles des requérants. Par conséquent, la Cour écarte l’objection initiale du Gouvernement à cet égard.
25.  Enfin, il convient de disjoindre la cause de MM. Athanasios Kranidis (no 6) et Georgios Tsoukalas (no 25), qui se sont désistés, de celle des autres requérants et de la rayer du rôle.
26.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 de la Convention. La Cour relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B.  Sur le fond
27.  En ce qui concerne la première procédure, la période à considérer a débuté le 10 février 1995, avec la saisine du tribunal administratif d’Athènes, et est encore pendante devant le Conseil d’Etat. Elle a donc duré jusqu’à présent plus de quinze ans pour trois degrés de juridiction. La deuxième procédure a débuté le 29 décembre 1998, avec la saisine du tribunal administratif, et est encore pendante devant le Conseil d’Etat. Elle a donc duré jusqu’à présent douze ans environ pour trois degrés de juridiction. La troisième procédure a débuté le 20 décembre 2001, avec la saisine du tribunal administratif, et a pris fin le 5 février 2009, avec l’arrêt de la cour administrative d’appel. Elle a donc duré sept ans et deux mois environ pour deux degrés de juridiction.
28.  Le Gouvernement justifie la durée de la procédure par le nombre de demandeurs, la complexité de l’affaire, le manque de diligence des requérants et les reports d’audience qu’ils ont sollicités. Il souligne, en outre, que l’enjeu de l’affaire n’était pas important pour les requérants et que celle-ci était en réalité déjà tranchée par le jugement du 25 octobre 2005.
29.  Les requérants soutiennent que l’affaire n’était pas complexe car elle ne concernait que l’interprétation d’une seule disposition législative. Quant au problème posé par le grand nombre des demandeurs, invoqué par le Gouvernement, il ne concerne que le greffe du tribunal et non les magistrats du siège. Ils affirment que les dispositions qui permettent d’accélérer la procédure sont rarement appliquées, seulement dans certains cas exceptionnels, comme les pensions des personnes lourdement handicapées.
30.  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement des requérants et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).
31.  En ce qui concerne la première procédure, la Cour note que la durée de celle-ci n’est pas raisonnable : il lui suffit de constater que la procédure devant le tribunal administratif a duré onze ans (du 10 février 1995 au 16 février 2006) et que l’affaire est toujours pendante devant le Conseil d’Etat. Il en va de même de la deuxième procédure, introduite le 29 décembre 1998 et encore pendante devant le Conseil d’Etat. Enfin, au sujet de la troisième procédure, la Cour note que la grève des avocats et des greffes n’a pas contribué à rallonger beaucoup la procédure devant la cour administrative d’appel, car cette période inclut aussi les vacances judiciaires (du 12 mars au 24 septembre 2008) ; par contre, suite au premier ajournement demandé par le requérant le 15 novembre 2006, l’audience a été fixée le 12 mars 2008, ce dont les autorités judiciaires portent la responsabilité.
32.  La Cour estime donc que les procédures litigieuses ne répondent pas à l’exigence du « délai raisonnable ». Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 13 DE LA CONVENTION
33.  Invoquant l’article 13 de la Convention, les requérants se plaignent de l’absence d’un recours effectif pour se plaindre de la durée de la procédure.
34.  Le Gouvernement conteste cette thèse. Il soutient que les requérants pouvaient, d’une part, demander la fixation de l’audience à une date plus rapprochée que celle fixée initialement et, d’autre part, introduire une action en dommages-intérêts sur le fondement de l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil.
35.  La Cour relève que ce grief est lié à celui examiné ci-dessus et doit donc aussi être déclaré recevable.
36.  Elle rappelle qu’elle a déjà eu l’occasion de constater que l’ordre juridique hellénique n’offrait pas aux intéressés un recours effectif au sens de l’article 13 de la Convention leur permettant de se plaindre de la durée d’une procédure (voir, parmi beaucoup d’autres, Fraggalexi c. Grèce, no 18830/03, 9 juin 2005, §§ 18-23 et Tsoukalas c. Grèce, no 12286/08, 22 juillet 2010). La Cour ne distingue en l’espèce aucune raison de s’écarter de cette jurisprudence, d’autant plus que le Gouvernement n’affirme pas que l’ordre juridique hellénique a, entre-temps, été doté d’une telle voie de recours.
37.  Il y a donc eu violation de l’article 13 en l’espèce.
III.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1
38.  Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, les requérants se plaignent d’avoir été privés d’une partie de l’indemnité au titre des heures supplémentaires effectuées, à laquelle ils prétendaient avoir droit.
39.  La Cour note qu’étant tous médecins et travaillant pour un hôpital public, les requérants avaient engagé ces actions devant le tribunal administratif pour se voir payer un complément d’indemnité fixée à un certain pourcentage de leur salaire, au titre des heures supplémentaires effectuées, en se fondant sur une décision ministérielle du 14 juin 1991. Le tribunal administratif les débouta, sur le fondement d’une jurisprudence antérieure du Conseil d’Etat déclarant la décision ministérielle sans fondement et non avenue en raison d’un non-respect des formalités de publication.
40.  Le grief des requérants dans cette affaire est similaire à celui invoqué dans deux affaires du même type : les arrêts Arvanitaki-Roboti c. Grèce (no 27278/03, 18 mai 2006) et Avdelidis et autres c. Grèce (no 15938/06, 10 avril 2008), dans lesquels la Cour s’était prononcée comme suit :
« La Cour estime que la prétendue créance des requérants ne peut passer pour un « bien » au sens de l’article 1 du Protocole no 1, puisque elle n’a pas été constatée par une décision judiciaire ayant force de chose jugée. Telle est pourtant la condition pour qu’une créance soit certaine et exigible et, partant, protégée par l’article 1 du Protocole no 1 (voir notamment, Raffineries Grecques Stran et Stratis Andreadis c. Grèce, 9 décembre 1994, § 59, série A, no 301-B). En particulier, la Cour note que, tant que leur affaire était pendante devant les juridictions internes, leur action ne faisait naître, dans le chef des requérants, aucun droit de créance, mais uniquement l’éventualité d’obtenir pareille créance. Dès lors, l’arrêt nº 3049/2005 du Conseil d’Etat ayant débouté les requérants de leurs demandes n’a pu avoir pour effet de les priver d’un bien dont ils étaient titulaires. »
41.  En l’espèce, la Cour ne voit pas de raison de s’écarter de cette conclusion.
42.  Il s’ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée comme étant manifestement mal fondée, en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
IV.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
43.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
44.  Les requérants réclament chacun 18 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu’ils auraient subi.
45.  Le Gouvernement souligne que les requérants tentent d’obtenir au titre du dommage moral les sommes qu’ils auraient eues si les juridictions grecques avaient accueilli leurs actions. Ceci ressort clairement du fait que dans leur requête, ils réclamaient initialement 18 000 EUR pour dommage matériel et 1 800 EUR pour dommage moral.
46.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué, à supposer qu’il y en ait un, et rejette cette demande. En revanche, elle estime que le prolongement de la procédure litigieuse au-delà du « délai raisonnable » a causé aux requérants un tort moral certain justifiant l’octroi d’une indemnité. Prenant en compte le nombre des requérants, le nombre des procédures, la nature de la violation constatée ainsi que la nécessité de fixer les sommes de façon à ce que le montant global cadre avec sa jurisprudence en la matière et soit raisonnable à la lumière de l’enjeu de la procédure en cause (Arvanitakiб-Roboti et autres c. Grèce [GC], no 27278/03), la Cour alloue à ce titre la somme réclamée à chacun des requérants, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt.
B.  Frais et dépens
47.  Les requérants précisent que pour les frais et dépens devant les juridictions internes ainsi que pour ceux devant la cour, chacun a dû s’acquitter d’une somme de 6 680 EUR. Toutefois, ils demandent seulement une somme de 250 EUR tous frais et dépens confondus.
48.  Le Gouvernement souligne que les requérants ne produisent pas les justificatifs nécessaires des sommes qu’ils réclament.
49.  Compte tenu de l’absence de toute justificatif de la part des requérant et de sa jurisprudence en la matière, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens.
C.  Intérêts moratoires
50.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR À L’UNANIMITÉ,
1.  Disjoint la cause des requérants nos 6 et 25 de celle des autres requérants et la raye du rôle ;
2.  Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés des articles 6 § 1 et 13 de la Convention et irrecevable pour le surplus ;
3.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
4.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 13 de la Convention ;
5.  Dit
a)  que l’Etat défendeur doit verser à chacun des requérants et conjointement aux requérants sous le no 8, dans les trois mois, 18 000 EUR (dix-huit mille euros), pour dommage moral, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt ;
b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
6.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 3 février 2011, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
André Wampach Elisabeth Steiner  Greffier adjoint Présidente
ANNEXE
1. Andreas ILIOPOULOS
2. Eleni ANGELOPOULOU-KARAYIANNI
3. Efstratios APOSTOLAKIS
4. Hariklia YIANNOPOULOU
5. Grivas THEODOROS
6. Athanasios KRANIDIS
7. Epaminondas KYPRIADIS
8. Antonios LOUTSIDIS, décédé et dont les héritiers Eleni LOUTSIDI-HADJIGEORGIOU, Natassa LOUTSIDI et Alexia LOUTSIDI ont continué la procédure
9. Panayiotis MARKIDIS
10. Antonios MARSONIS
11. Spyridon XINOGALOS
12. Nikolaos PAPADIMITRIOU
13. Alekos PAPANDREOU
14. Antonia PAPAHRISTODOULOU
15. Kalliopi PETRAKI
16. Nikolaos RAPTIS
17. Fivi RONDOYIANNI
18. Nikolaos SOLDATOS
19. Ekaterini TARASSI
20. Anna TASSIDOU
21. Haralambos TZATHAS
22. Ioannis TRIANTAFYLLOU
23. Eleni TSIKRITZI-ALEXAKI
24. Antonios TSOUKAS
25. Georgios TSOUKALAS
26. Nikolaos TSOUTSAIOS
27. Maria FAMELI
28. Gerasimos FRANTZIOS
29. Anastasios HALKIS
ARRÊT ILIOPOULOS ET AUTRES c. GRÈCE
ARRÊT ILIOPOULOS ET AUTRES c. GRÈCE 


Synthèse
Formation : Cour (première section comité)
Numéro d'arrêt : 40298/08
Date de la décision : 03/02/2011
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 6-1 ; Violation de l'art. 13

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE PENALE, (Art. 6-1) PROCES EQUITABLE


Parties
Demandeurs : ILIOPOULOS ET AUTRES
Défendeurs : GRÈCE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2011-02-03;40298.08 ?

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