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17/02/2011 | CEDH | N°5144/06

CEDH | AFFAIRE REVUNETS c. UKRAINE


CINQUIÈME SECTION
AFFAIRE REVUNETS c. UKRAINE
(Requête no 5144/06)
ARRÊT
STRASBOURG
17 février 2011
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Revunets c. Ukraine,
La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en un Comité composé de :
Mark Villiger, président,   Karel Jungwiert,   Isabelle Berro-Lefèvre, juges,  et de Stephen Phillips, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 25 janvier 2011,
Rend lâ

€™arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (...

CINQUIÈME SECTION
AFFAIRE REVUNETS c. UKRAINE
(Requête no 5144/06)
ARRÊT
STRASBOURG
17 février 2011
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Revunets c. Ukraine,
La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en un Comité composé de :
Mark Villiger, président,   Karel Jungwiert,   Isabelle Berro-Lefèvre, juges,  et de Stephen Phillips, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 25 janvier 2011,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 5144/06) dirigée contre l’Ukraine et dont un ressortissant de cet Etat, M. Mykola Viktorovych Revunets (« le requérant »), a saisi la Cour le 12 janvier 2006 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Le gouvernement ukrainien (« le Gouvernement ») a été représenté par ses agents V. Lutkovska et Y. Zaytsev, du ministère de la Justice.
3.  Le 8 février 2010, le président de la cinquième section a décidé de communiquer le grief tiré de la durée de la procédure au Gouvernement. En application du Protocole 14, la requête a été attribuée à un Comité de trois juges.
EN FAIT
LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
4.  Le requérant est né en 1945 et réside à Ruzhyn.
5.  En septembre 1999 le requérant saisit le tribunal de Ruzhyn (ci-après le « tribunal ») d’une action en dédommagement à l’encontre d’une société privée. Le 28 septembre 1999, une banque privée joignit la procédure en tant que codéfendeur.
6.  Le 10 avril 2000, le tribunal accueillit la demande du requérant. Le 12 juillet 2000 la cour de la région de Zhitomyr (depuis juin 2001 – cour d’appel de la région de Zhitomyr, ci-après la « cour d’appel ») annula ce jugement et renvoya l’affaire pour réexamen devant le tribunal qui, le 4 décembre 2000, accueillit partiellement la demande du requérant. Le 24 janvier 2001, la cour d’appel annula le jugement entrepris et renvoya l’affaire devant le tribunal qui, le 2 octobre 2001, accueillit partiellement la demande du requérant. Le 27 février 2002, la cour d’appel confirma ce jugement. Le 13 novembre 2002 la Cour Suprême cassa les décisions entreprises et renvoya l’affaire de nouveau devant le tribunal.
7.  Ce dernier rejeta la demande par un jugement du 22 juillet 2003 qui était confirmé en appel le 30 octobre 2003. Par au arrêt du 31 août 2005, la Cour suprême confirma l’arrêt de la cour d’appel.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
8.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
9.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
10.  La période à considérer a débuté en septembre 1999 et pris fin le 31 août 2005. Elle a donc duré cinq ans et onze mois, pour trois instances.
A.  Sur la recevabilité
11.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 de la Convention. Elle relève en outre qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B.  Sur le fond
12.  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).
13.  La Cour a traité à maintes reprises d’affaires soulevant des questions semblables à celle du cas d’espèce et a constaté la violation de l’article 6 § 1 de la Convention (voir, par. ex, Chubakova c. Ukraine, no 17674/05, § 16, 18 février 2010).
14.  Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n’a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente dans le cas présent. Compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES
15.  Le requérant se plaint enfin de l’iniquité de la procédure en question, invoquant à cet égard les articles 6 § 1 et 17 de la Convention.
16.  La Cour, après avoir examiné l’ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, n’a décelé aucun indice d’iniquité dans la procédure. Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
III.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
17.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
18.  Le requérant réclame 12728,97 hrivnyas ukrainiens (UAH) (1267,69 euros (EUR1)) au titre du préjudice matériel qu’elle aurait subi. Il réclame en outre 10000 EUR au titre du dommage moral.
19.  Le Gouvernement conteste ces prétentions.
20.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, elle estime qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 600 EUR au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
21.  Le requérant demande également 3245,98 UAH (323, 27 EUR) pour les frais et dépens engagés devant la Cour, dont 180 UAH (18 EUR) les dépenses de traduction, 65,98 UAH (6,57 EUR) les dépenses postales et 3000 UAH (298,77 EUR) pour les honoraires d’avocat.
22.  Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Cour en ce qui concerne les dépenses de traduction et les dépenses postales. Le Gouvernement conteste les prétentions en ce qui concerne les honoraires d’avocat, indiquant à cet égard qu’aucun pouvoir de représentation n’est versé au dossier, ni un acte d’acceptation des services rendus.
23.  Compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 600 EUR tous frais confondus et l’accorde au requérant.
C.  Intérêts moratoires
24.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR À L’UNANIMITÉ,
1.  Déclare la requête recevable quant au grief tiré de la durée excessive de la procédure et irrecevable pour le surplus ;
2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
3.  Dit
a)  que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, 600 EUR (six cent euros) pour dommage moral, et 600 EUR (six cent euros) pour frais et dépends, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, à convertir dans la monnaie de l’Etat défendeur au taux applicable à la date du règlement ;
b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
4.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 17 février 2011, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Stephen Phillips Mark Villiger   Greffier adjoint Président
1.  100 EUR = 1004,10 UAH au 9 septembre 2010.
ARRÊT REVUNETS c. UKRAINE
ARRÊT REVUNETS c. UKRAINE 


Synthèse
Formation : Cour (cinquième section comité)
Numéro d'arrêt : 5144/06
Date de la décision : 17/02/2011
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 6-1

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE PENALE, (Art. 6-1) PROCES EQUITABLE


Parties
Demandeurs : REVUNETS
Défendeurs : UKRAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2011-02-17;5144.06 ?

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