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17/04/2012 | CEDH | N°51906/09

CEDH | AFFAIRE HATZIIOANNIDIS c. GRECE


PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE HATZIIOANNIDIS c. GRÈCE
(Requête no 51906/09)
ARRÊT
STRASBOURG
17 avril 2012
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Hatziioannidis c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un Comité composé de :
Anatoly Kovler, président,   Linos-Alexandre Sicilianos,   Erik Møse, juges,  et de André Wampach, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 27 mars 2012,
Rend l’

arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 5...

PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE HATZIIOANNIDIS c. GRÈCE
(Requête no 51906/09)
ARRÊT
STRASBOURG
17 avril 2012
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Hatziioannidis c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un Comité composé de :
Anatoly Kovler, président,   Linos-Alexandre Sicilianos,   Erik Møse, juges,  et de André Wampach, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 27 mars 2012,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 51906/09) dirigée contre la République hellénique et dont un ressortissant de cet Etat, M. Stavros Hatziioannidis (« le requérant »), a saisi la Cour le 7 septembre 2009 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les délégués de son agent, Mme K. Paraskevopoulou, assesseure auprès du Conseil juridique de l’Etat, M. I. Bakopoulos et Mme G. Kotta, auditeurs auprès du Conseil juridique de l’Etat.
3.  Le 18 octobre 2010, la requête a été communiquée au Gouvernement.
EN FAIT
LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
4.  Le requérant est né en 1954 et réside à Skydra, dans la région de Pella.
5.  Soupçonné d’avoir commis des infractions réprimées par la loi sur la protection des antiquités, le requérant fut arrêté le 9 novembre 2002 et placé en détention provisoire le 13 novembre 2002. Le 13 avril 2003, il fut libéré sous condition.
6.  Entre-temps, le 10 novembre 2002, des poursuites pénales furent engagées à son encontre et une procédure d’instruction fut entamée. Par une ordonnance de la chambre d’accusation du tribunal correctionnel d’Edessa, la procédure d’instruction fut prolongée de six mois en raison de la complexité de l’affaire, de la surcharge de travail du juge d’instruction ainsi que du dépôt tardif d’une expertise. La procédure d’instruction prit fin le 30 septembre 2005 et le 16 novembre 2005 le requérant fut renvoyé en jugement devant la cour d’appel criminelle de Thessalonique.
7.  L’audience, initialement fixée au 1er octobre 2007, fut ajournée aux 14 janvier, 5 novembre 2008 et 4 mars 2009 à la demande du requérant. A cette dernière date, la cour d’appel, siégeant à trois membres et comme juridiction de premier degré, condamna le requérant à une peine de quatorze ans et neuf mois de réclusion (jugement no 638/2009). Le requérant interjeta appel.
8.  Par un arrêt du 3 novembre 2009, la cour d’appel criminelle de Thessalonique, siégeant à cinq membres, diminua la peine à onze ans et trois mois de réclusion. Le requérant se pourvut en cassation.
9.  Le 14 octobre 2010, la Cour de cassation déclara le pourvoi irrecevable comme tardif (arrêt no 1639/2010).
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
10.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »
11.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
12.  La période à considérer a débuté le 9 novembre 2002 avec l’arrestation du requérant et s’est terminée le 14 octobre 2010 avec l’arrêt no 1639/2010 de la Cour de cassation. Elle a donc duré huit ans environ pour trois degrés de juridiction.
A.  Sur la recevabilité
13.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention. Elle relève en outre qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B.  Sur le fond
14.  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par la jurisprudence de la Cour, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes (voir, parmi beaucoup d’autres, Pélissier et Sassi c. France [GC], no 25444/94, § 67, CEDH 1999-II).
15.  La Cour a traité à maintes reprises d’affaires soulevant des questions semblables à celle du cas d’espèce et a constaté la violation de l’article 6 § 1 de la Convention (voir Pélissier et Sassi précité).
16.  Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n’a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente dans le cas présent. En particulier, même si on déduit de la durée globale de la procédure les retards attribuables au requérant lors de la procédure devant la cour d’appel criminelle en première instance, celle-ci demeure excessive. La Cour note qu’il a fallu trois ans à partir de l’arrestation du requérant pour que celui-ci soit renvoyé en jugement en première instance. Le Gouvernement ne fournit pas d’explication pertinente pour ce délai. Compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime qu’en l’espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
17.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
18.  Le requérant réclame 7 138,38 euros (EUR) au titre du préjudice matériel. Cette somme correspond à ses dépenses à la prison. Il réclame également 50 000 EUR au titre du préjudice moral qu’il aurait subi.
19.  Le Gouvernement invite la Cour à écarter la demande au titre du dommage matériel. Il affirme en outre que la somme réclamée au titre du préjudice moral est excessive.
20.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, elle estime qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 1 500 EUR au titre du préjudice moral, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt.
B.  Frais et dépens
21.  Le requérant demande également 38 543 EUR pour les frais et dépens engagés devant les juridictions internes.
22.  Le Gouvernement affirme que la somme réclamée n’est pas justifiée et invite la Cour à écarter cette demande.
23.  La Cour rappelle qu’elle a constaté une violation de l’article 6 § 1 en raison du seul dépassement du délai raisonnable de la procédure. Elle note en outre que l’allocation de frais et dépens au titre de l’article 41 présuppose que se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et, de plus, le caractère raisonnable de leur taux (Iatridis c. Grèce (satisfaction équitable) [GC], no 31107/96, § 54, CEDH 2000-XI). Compte tenu de l’absence de tout justificatif de la part de requérant et de sa jurisprudence en la matière, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens.
C.  Intérêts moratoires
24.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR À L’UNANIMITÉ,
1.  Déclare la requête recevable ;
2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
3.  Dit
a)  que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, 1 500 EUR (mille cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;
b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
4.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 17 avril 2012, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
André Wampach Anatoly Kovler   Greffier adjoint Président
ARRÊT HATZIIOANNIDIS c. GRÈCE
ARRÊT HATZIIOANNIDIS c. GRÈCE 


Synthèse
Formation : Cour (première section comité)
Numéro d'arrêt : 51906/09
Date de la décision : 17/04/2012
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure pénale ; Article 6-1 - Délai raisonnable)

Analyses

(Art. 6) DROIT A UN PROCES EQUITABLE, (Art. 6) PROCEDURE PENALE


Parties
Demandeurs : HATZIIOANNIDIS
Défendeurs : GRECE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2012-04-17;51906.09 ?

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