Le Conseil constitutionnel,
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu l'ordonnance du 13 octobre 1958 relative à l'élection des députés à l'Assemblée nationale ;
Vu le Code électoral ;
Vu : 1° la requête présentée par le sieur Vergés, demeurant 87, rue Pasteur, à Saint-Denis (la Réunion), ladite requête enregistrée le 26 novembre 1962 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
2° la requête présentée par le sieur Moreau, demeurant à Saint-Benoît (la Réunion) ;
3° la requête présentée par le sieur de Villeneuve, demeurant rue Monseigneur-de-Beaumont, à Saint-Denis (la Réunion), lesdites requêtes enregistrées, les deux premières le 26 novembre 1962 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, la dernière le 29 novembre 1962 à la préfecture de la Réunion, et tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 18 novembre 1962 dans la 1er circonscription du département de la Réunion pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense présentées par le sieur Macé, député, lesdites observations enregistrées le 2 janvier 1963 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu le mémoire ampliatif présenté pour le sieur Macé, ledit mémoire enregistré le 9 janvier 1963 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu les procès-verbaux de l'élection ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;
1. Considérant que les trois requêtes susvisées des sieurs Vergés, Moreau et de Villeneuve sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
2. Considérant qu'à la suite de troubles graves ayant comporté, notamment l'enlèvement ou le bris d'urnes par des manifestants, les maires des communes de Sainte-Suzanne, de Saint-André, de Bras-Panon et de Saint-Benoît ont décidé d'interrompre le déroulement du scrutin dans tous les bureaux de vote de ces localités ; qu'ainsi les suffrages des 22221 électeurs inscrits dans ces communes n'ont pu être recueillis ni décomptés ; qu'en ajoutant, conformément à un principe constant, ce nombre d'électeurs aux 21353 suffrages exprimés dans les autres communes de cette circonscription, le total des suffrages exprimés doit être fixé à 43 574, ce qui porte à 21788 le chiffre de la majorité absolue; que le candidat proclamé élu dès le premier tour n'a obtenu que 13542 voix, c'est-à-dire un nombre de voix inférieur audit chiffre ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens contenus dans les requêtes, l'élection contestée ne peut être maintenue ;
Décide :
Article premier :
L'élection législative à laquelle il a été procédé le 18 novembre 1962 dans la 1er circonscription de la Réunion est annulée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 19 février 1963.