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24/10/1968 | FRANCE | N°68-539

France | France, Conseil constitutionnel, 24 octobre 1968, 68-539


Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le Code électoral ;
Vu le code de la santé publique, et notamment ses articles L. 333 et L. 352 ;
Vu le décret du 2 février 1852 et notamment son article 18 ;
Vu le décret n° 58-1042 du 31 octobre 1958 ;
Vu la requête présentée par M. Gilbert Millet, demeurant au Vigan (Gard), ladite requête enregistrée à la préfecture du Gard, le 10 juillet 1968, et tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionn

el statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 23 et 30 ju...

Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le Code électoral ;
Vu le code de la santé publique, et notamment ses articles L. 333 et L. 352 ;
Vu le décret du 2 février 1852 et notamment son article 18 ;
Vu le décret n° 58-1042 du 31 octobre 1958 ;
Vu la requête présentée par M. Gilbert Millet, demeurant au Vigan (Gard), ladite requête enregistrée à la préfecture du Gard, le 10 juillet 1968, et tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 23 et 30 juin 1968 dans la quatrième circonscription du département du Gard, pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense, présentées par M. Pierre Jalu député, lesdites observations enregistrées le 25 juillet 1968 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations en réplique présentées pour M. Millet lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 10 août 1968 ;
Vu les observations en duplique présentées par M. Jalu, les dites observations enregistrées comme ci-dessus le 10 septembre 1968 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;

Sur 1e grief tiré d'irrégularités dans la propagande électorale :
1. Considérant, d'une part, que si des affiches en faveur de M. Jalu ont été apposées en dehors des panneaux électoraux qui lui étaient affectés, que si certaines affiches de M. Millet ont été recouvertes par des affiches de l'U. D. R., si des inscriptions en faveur du candidat élu ont été tracées sur la voie publique et si des tracts, dont il n'est pas allégué qu'ils aient comporté des mentions diffamatoires à l'égard du requérant, ont été jetés dans les rues au cours de la nuit qui a précédé l'élection, il ressort des pièces du dossier que de nombreuses irrégularités de même nature ont été commises au profit de M. Millet ; que, dans ces conditions, les abus de propagande qu'invoque le requérant n'ont pas altéré la sincérité du scrutin ;
2. Considérant, d'autre part, qu'il n'est pas établi que le député élu ait pris personnellement, ou par personne interposée, une part quelconque dans l'élaboration et la distribution d'un tract anonyme présenté comme émanant d'un groupe de militants du parti socialiste et des jeunesses socialistes dont le contenu montre d'ailleurs qu'il était destiné à une autre circonscription électorale ;
Sur le grief tiré de ce qu'une erreur aurait été commise lors de 1a distribution à certains électeurs des professions de foi et bulletins de vote :
3. Considérant que si, à la suite d'une erreur matérielle commise par 1a commission de propagande, certains électeurs de la quatrième circonscription ont reçu, pour le premier tour de scrutin, des documents destinés à la troisième circonscription, le requérant n'établit pas que la même erreur ait été commise au deuxième tour ; que le grief sus-énoncé doit, dès lors, être écarté ;
En ce qui concerne la régularité des votes par correspondance :
4. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que si la demande de vote par correspondance prévue par les articles L. 79 et R. 81 du Code électoral, présentée par neuf pensionnaires d'une maison de santé de la commune de Pompignan, a été signée non par ces électeurs mais par la directrice de cet établissement, il est constant que les documents électoraux ont été adressés individuellement à chacun de ces électeurs ; qu'il n'est établi ni qu'une pression ait été exercée lors de l'émission du vote des pensionnaires dudit établissement ni que la transmission des suffrages n'ait pas été conforme aux prescriptions du Code électoral ; que cette irrégularité, qui a échappé à l'attention des services municipaux, n'a concerné que l'établissement de la seule demande de vote par correspondance et n'a pas, en l'absence de tout autre vice, et si particulièrement regrettable qu'elle ait été, constitué une manoeuvre de nature à porter atteinte à la liberté et à la sincérité du vote ;
5. Considérant que deux électrices et un électeur dont les noms sont cités par le requérant ont été admis à voter par correspondance dans la commune de Saint-Hyppolyte-du-Fort après avoir justifié de leur qualité respective de titulaire d'une pension de vieillesse ou d'invalidité bénéficiant de la majoration pour aide d'une tierce personne et de celle de grand invalide de guerre titulaire d'une pension égale ou supérieure à 85% ; que le décret du 31 octobre 1958 pris pour l'application de l'article R. 83 du Code électoral n'impose pas aux électeurs appartenant à ces deux catégories de personnes de produire un certificat médical à l'appui de leur demande d'admission au vote par correspondance ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que faute par les intéressés d'avoir produit un certificat médical leur inscription serait irrégulière ;
6. Considérant que si le requérant soutient qu'un vote par correspondance admis par le bureau de Pompignan n'aurait pas été adressé à ce bureau sous pli recommandé, ainsi que le prescrit l'article R. 87 du Code électoral, il n'indique pas le nom de l'électeur dont le suffrage est contesté ; que le moyen ne saurait dès lors être accueilli ;
En ce qui concerne la régularité des opérations de vote et des opérations de dépouillement du scrutin :
7. Considérant que tout électeur régulièrement inscrit sur la liste électorale, non frappé d'incapacité juridique et qui n'a pas fait l'objet d'une décision de placement dans un établissement d'aliénés en application des articles L.. 333 à L. 352 du Code de la santé publique, peut régulièrement exprimer son vote ; que, par suite, si quarante-huit pensionnaires d'une maison de santé ont pris part au scrutin, cette circonstance, alors que ces personnes n'entrent dans aucune des catégories visées par l'article 18 (alinéa 2), du décret du 2 février 1852, ne saurait être de nature à entacher leur vote d'irrégularité ; qu'ainsi le grief sus-analysé doit être rejeté ;
8. Considérant que le moyen tiré de ce que la feuille de dépouillement des votes du bureau de Brignon ne serait pas jointe au procès-verbal des opérations électorales de cette commune manque en fait ;
9. Considérant qu'en vertu de l'article L. 66 du Code électoral les bulletins blancs et nuls ainsi que les enveloppes vides doivent être annexés au procès-verbal et contresignés par les membres du bureau de vote et qu'au cas où l'annexion de ce document ne serait pas faite, cette circonstance n'entraîne l'annulation des opérations électorales qu'autant qu'il est établi qu'elle a eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
10. Considérant que le moyen tiré de ce que les bulletins nuls ne seraient pas joints au procès-verbal du dépouillement des votes du bureau de la Cadière et ne seraient pas régulièrement paraphés manque en fait ;
11. Considérant que si, contrairement aux dispositions du Code électoral rappelées ci-dessus, les enveloppes vides et bulletins nuls ne sont pas annexés au procès-verbal des bureaux de Massanes, d'Orthoux et de Cambo, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner l'annulation de l'élection dès lors qu'il n'est pas établi ni même allégué que ce fait résulte d'une intention frauduleuse ; que si les enveloppes vides et bulletins nuls annexés aux procès-verbaux des deux bureaux de vote de Ribaute-les-Tavernes, ne sont pas paraphés ou ne le sont que par le président du bureau, ces procès-verbaux ne Portent la mention d'aucune réclamation concernant la validité des votes déclarés nuls et les documents qui y sont joints correspondent à la description qui y est faite ; que, dès lors, lesdits documents doivent être tenus pour authentiques ;
12. Considérant qu'un bulletin déchiré portant le nom de M. Jalu a été compté comme valable par le bureau de vote de la commune de Montardier bien que la validité de ce vote ait fait l'objet d'une réserve mentionnée au procès-verbal ; qu'il résulte de l'examen du bulletin litigieux, régulièrement annexé au procès-verbal et paraphé par le président et les assesseurs, que ce bulletin porte une déchirure irrégulière susceptible de constituer un signe de reconnaissance ; que ce vote doit être tenu pour nul et une voix défalquée tant du nombre des suffrages valablement exprimés qui se trouve ainsi ramené à 37 430, que du nombre des voix obtenues par M. Jalu qui passe de 18 723 à 18 722 ;
13. Considérant, en revanche, que si l'une des enveloppes annexées au procès-verbal du bureau d'Arre et comptée dans ce procès-verbal comme suffrage nul au motif que l'enveloppe contient plusieurs bulletins en faveur de candidats différents, ne contient qu'un seul bulletin régulier au nom de M. Millet, le procès-verbal ne porte parmi les observations aucune réserve à ce sujet et le bulletin restant est paraphé par le président et les assesseurs du bureau de vote ; que, dans ces circonstances, les mentions du procès-verbal ne peuvent être tenues pour inexactes ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à réclamer le bénéfice d'une voix supplémentaire ;
14. Considérant que de tout ce qui précède, il résulte qu'au deuxième tour du scrutin, M. Jalu ayant régulièrement obtenu 18.722 voix conserve ainsi la majorité sur M. Millet, qui a obtenu 18 708 voix ; que la requête susvisée doit, dès lors, être rejetée,

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Millet est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 octobre 1968, où siégeaient : MM. Gaston PALEWSKI, président, CASSIN, MONNET, WALINE, ANTONINI, SAINTENY, DUBOIS, CHATENET et LUCHAIRE.


Synthèse
Numéro de décision : 68-539
Date de la décision : 24/10/1968
A.N., Gard (4ème circ.)
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Élections à l'Assemblée nationale

Références :

AN du 24 octobre 1968 sur le site internet du Conseil constitutionnel

Texte attaqué : Élection à l'Assemblée nationale (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°68-539 AN du 24 octobre 1968
Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:1968:68.539.AN
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