La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/01/1978 | FRANCE | N°77-91

France | France, Conseil constitutionnel, 18 janvier 1978, 77-91


Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 22 décembre 1977 par MM Louis Mexandeau, Roger Duroure, André Billoux, Raymond Forni, Jean-Pierre Cot, Antoine Gayraud, Charles-Emile Loo, Jacques Huyghues des Etages, André Laurent, André Desmulliez, Marcel Massot, Francis Leenhardt, Alain Savary, Maurice Legendre, Yves Allainmat, André Lebon, André Gravelle, Henri Lavielle, Jean Bastide, André Chandernagor, Alain Bonnet, René Gaillard, Georges Frêche, Jean Bernard, Claude Delorme, Joseph Franceschi, Gaston Defferre, Lucien Pignion, Maurice Brugnon, Jean-Pierre Chevènement, Gérard Houteer, Ar

sène Boulay, Jean Masse, Arthur Cornette, Antonin Ver, Raoul ...

Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 22 décembre 1977 par MM Louis Mexandeau, Roger Duroure, André Billoux, Raymond Forni, Jean-Pierre Cot, Antoine Gayraud, Charles-Emile Loo, Jacques Huyghues des Etages, André Laurent, André Desmulliez, Marcel Massot, Francis Leenhardt, Alain Savary, Maurice Legendre, Yves Allainmat, André Lebon, André Gravelle, Henri Lavielle, Jean Bastide, André Chandernagor, Alain Bonnet, René Gaillard, Georges Frêche, Jean Bernard, Claude Delorme, Joseph Franceschi, Gaston Defferre, Lucien Pignion, Maurice Brugnon, Jean-Pierre Chevènement, Gérard Houteer, Arsène Boulay, Jean Masse, Arthur Cornette, Antonin Ver, Raoul Jarry, Nicolas Alfonsi, Pierre Lagorce, Fernand Berthouin, Henri Deschamps, Jacques-Antoine Gau, Raoul Bayou, Louis Darinot, Edmond Vacant, Hubert Dubedout, Jean Poperen, Jean Antagnac, Robert Aumont, Jean Laborde, André Guerlin, Guy Beck, Louis Besson, Louis Philibert, Georges Fillioud, Alex Raymond, Henri Michel, André Delehedde, Dominique Dupilet, Pierre Joxe, Daniel Benoist, André Delelis, Albert Denvers et Henri Darras, députés à l'Assemblée nationale, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2 de la Constitution, du texte de la loi complémentaire à la loi n° 60-791 du 2 août 1960 et relative aux rapports entre l'Etat et l'enseignement agricole privé, telle qu'elle a été adoptée par le Parlement ;

Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;

1. Considérant que l'irrecevabilité opposable en vertu de l'article 40 de la Constitution à une proposition de loi dont l'adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique frappe cette proposition dans son ensemble lorsque les dispositions qu'elle énonce forment un tout indissociable ;
2. Considérant que l'article 1er de la loi déférée au Conseil constitutionnel, article provenant du texte initial de la proposition dont est issue la loi dont il s'agit, crée, parmi les établissements d'enseignement agricole privés reconnus par l'État en application de l'article 7 de la loi du 2 août 1960, la catégorie nouvelle des établissements dits agréés ; que, l'objet essentiel de cet agrément étant de procurer aux établissements appelés à en bénéficier une aide financière accrue de l'État selon les règles définies à l'article 2 de cette proposition, l'article 1er de celle-ci ne pouvait qu'être regardé comme indissociable de l'article 2 ; qu'ainsi, c'est en méconnaissance de l'article 40 de la Constitution que l'irrecevabilité qui a été retenue à l'encontre de l'article 2 de la proposition ne l'a pas été à l'encontre de l'article 1er ; que, par suite, l'article 1er de la loi a été adopté dans des conditions non conformes à la Constitution ;
3. Considérant que l'article 1er de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel est inséparable de l'ensemble de celle-ci ; que, dès lors, cette loi doit être déclarée non conforme à la Constitution.

Décide :
Article premier :
La loi complémentaire à la loi n° 60-791 du 2 août 1960 et relative aux rapports entre l'Etat et l'enseignement agricole privé est déclarée non conforme à la Constitution.
Article 2 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.


Loi complémentaire à la loi du 2 août 1960 et relative aux rapports entre l'Etat et l'enseignement agricole privé
Sens de l'arrêt : Non conformité totale
Type d'affaire : Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Saisine

Conformément au deuxième. alinéa de l'article 61 de la Constitution, nous avons l'honneur de déférer au Conseil constitutionnel la loi complémentaire à la loi n° 60-791 du 2 août 1960 et relative aux rapports entre l'Etat et l'enseignement agricole privé.

Nous estimons, en effet, que cette loi a été délibérée et adoptée par l'Assemblée nationale dans des conditions contraires à la Constitution et au règlement de l'Assemblée et qu'elle doit être, par suite, déclarée non conforme à la Constitution.

Notre requête est fondée sur les motifs suivants :

Ce texte a été discuté et voté par l'Assemblée nationale en méconnaissance de l'article 92 du règlement.

Selon cet article, l'article 40 de la Constitution peut être opposé, à tout moment, et par tout député, aux «propositions, rapports et amendements ».

C'est en vertu de cette disposition que M. Roger Duroure, député, a opposé l'article 40 à l'ensemble de la proposition de loi 3164 et du rapport 3299 au cours de la dernière séance du 15 décembre 1977 (Cf. J.O., Débats A.N., du 16 décembre 1977, n° 120, pages 8818 et 8819, 2e séance, du 15 décembre 1977).

Appréciant alors la recevabilité de la proposition et du rapport, dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 92 susvisé, le Bureau de la commission des finances, statuant à l'unanimité, « a décidé que la recevabilité de la proposition et du rapport pouvait être appréciée article par article ». (Cf. J.O., Débats A.N., du 17 décembre 1977, n° 121, page 8897, 2e séance du 16 décembre 1977).

Or, nous estimons qu'en appréciant la recevabilité article par article, le Bureau de la commission des finances a méconnu à la fois les dispositions de l'article 40 de la Constitution et celles de l'article 92 du règlement.

En effet, ni l'article 40 de la Constitution, ni l'article 92 du règlement, n'autorisent à apprécier la recevabilité financière d'une partie seulement d'une proposition de loi ou d'un rapport sur une proposition de loi. L'article 40 de la Constitution comme l'article 92 du règlement mentionnent les « propositions » ou les « rapports» et non les articles d'une proposition ou d'un rapport.

C'est d'ailleurs cette règle qui a été constamment appliquée, depuis 1958, par le Bureau de l'Assemblée nationale statuant dans les conditions prévues par l'article 81 du règlement. Le 3e alinéa de cet article mentionne d'ailleurs, lui aussi, que lorsque l'irrecevabilité d'une proposition de loi et non d'un ou plusieurs de ses articles - est évidente, son dépôt en est refusé. C'est bien, dans ce cas, l'ensemble de la proposition qui est renvoyé à son ou ses auteurs et non une partie seulement. Or, il ne pourrait y avoir deux manières d'appliquer l'article 40 de la Constitution aux propositions de loi selon que leur recevabilité est examinée par le Bureau de l'Assemblée ou par le Bureau de la commission des finances.

Aussi, nous estimons qu'en ne prononçant l'irrecevabilité de l'article 40 qu'à une partie seulement de la proposition n° 3164 et du rapport n° 3299, le Bureau de la commission des finances a méconnu, les dispositions de l'article 92 du règlement et, par suite, celles de l'article 40 de la Constitution.

Au surplus, il apparaît qu'en ne prononçant pas l'irrecevabilité de l'article 1er de la proposition de loi et du rapport, le Bureau de la commission des finances a également méconnu les dispositions de l'article 40 de la Constitution sur le fond du dispositif lui-même.

En effet, l'article 1er de la proposition et du rapport institue notamment, en faveur des établissements d'enseignement agricole privé, une procédure d'agrément qui aboutit à les placer sous le contrôle de l'Etat. Le vote d'une telle disposition entraîne donc des obligations supplémentaires pour les services qui sont chargés de ce contrôle et elle est donc génératrice, par sa nature même, de charges publiques supplémentaires au sens de l'article 40 de la Constitution. C'est donc à tort que le Bureau de la commission des finances, renonçant d'ailleurs à une jurisprudence constante appliquée depuis 1958 en matière d'amendement, n'a pas appliqué l'article 40 de la Constitution à l'article 1er de la proposition de loi et du rapport.

Pour ces divers motifs, ainsi que pour ceux qui ont été exposés le 16 décembre 1977, par M. Delehedde, député, devant l'Assemblée. nationale (cf. J.O., Débats A.N., du 17 décembre 1977, n° 121, 2e séance du 16 décembre 1977, pages 8897 et 8898), nous vous demandons de bien vouloir déclarer la loi précitée non conforme à la Constitution.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Messieurs les Conseillers, les assurances de notre haute considération.


Références :

DC du 18 janvier 1978 sur le site internet du Conseil constitutionnel

Texte attaqué : Loi ordinaire, Loi organique, Traité ou Réglement des Assemblées (type)


Publications
Proposition de citation: Cons. Const., décision n°77-91 DC du 18 janvier 1978

RTFTélécharger au format RTF
Origine de la décision
Date de la décision : 18/01/1978
Date de l'import : 28/11/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro de décision : 77-91
Numéro NOR : CONSTEXT000017665840 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.constitutionnel;dc;1978-01-18;77.91 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award