La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/1982 | FRANCE | N°82-145

France | France, Conseil constitutionnel, 10 novembre 1982, 82-145


Le Conseil constitutionnel,

Saisi le 15 octobre 1982 par MM Jacques Larché, Philippe de Bourgoing, Albert Voilquin, Pierre Louvot, Michel Crucis, Guy Petit, Lionel Cherrier, Paul Guillard, Roland Ruet, Marcel Lucotte, Michel Sordel, Pierre Croze, Guy de La Verpillière, Hubert Martin, Louis Martin, Robert Schmitt, Pierre-Christian Taittinger, Jacques Ménard, Serge Mathieu, Richard Pouille, Louis Boyer, François Schleiter, Modeste Legouez, Bernard Barbier, Michel Miroudot, Jean Puech, Louis Lazuech, Paul Guillaumot, Jean Bénard Mousseaux, Louis de la Forest, Alphonse Arzel, René Bal

layer, Jean-Pierre Blanc, Roger Boileau, Raymond Bouvier, L...

Le Conseil constitutionnel,

Saisi le 15 octobre 1982 par MM Jacques Larché, Philippe de Bourgoing, Albert Voilquin, Pierre Louvot, Michel Crucis, Guy Petit, Lionel Cherrier, Paul Guillard, Roland Ruet, Marcel Lucotte, Michel Sordel, Pierre Croze, Guy de La Verpillière, Hubert Martin, Louis Martin, Robert Schmitt, Pierre-Christian Taittinger, Jacques Ménard, Serge Mathieu, Richard Pouille, Louis Boyer, François Schleiter, Modeste Legouez, Bernard Barbier, Michel Miroudot, Jean Puech, Louis Lazuech, Paul Guillaumot, Jean Bénard Mousseaux, Louis de la Forest, Alphonse Arzel, René Ballayer, Jean-Pierre Blanc, Roger Boileau, Raymond Bouvier, Louis Caiveau, Jean Cauchon, Pierre Ceccaldi-Pavard, Adolphe Chauvin, Auguste Chupin, Jean Cluzel, Jean Colin, François Dubanchet, Charles Ferrant, Daniel Hoeffel, René Jager, Pierre Lacour, Edouard Le Jeune, Georges Lombard, Jean Madelain, Daniel Millaud, Jacques Mossion, Roger Poudonson, Maurice Prévoteau, Pierre Salvi, Paul Séramy, Raoul Vadepied, Pierre Vallon, Charles Zwickert, Yves Le Cozannet, Marcel Lemaire, Alfred Gérin, Henri Le Breton, sénateurs, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, du texte de la loi relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail, telle qu'elle a été adoptée par le Parlement, et notamment de son article 10 ;

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment les articles figurant au chapitre II du titre II de cette ordonnance ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

1. Considérant que l'article 10 de la loi déférée à l'examen du Conseil constitutionnel a pour objet d'introduire dans le code du travail un article L 153-1, ainsi rédigé : "Lorsqu'en vertu d'une disposition législative expresse dans une matière déterminée, une convention ou un accord collectif étendu déroge à des dispositions législatives ou réglementaires, les infractions aux stipulations dérogatoires sont passibles des sanctions qu'entraînerait la violation des dispositions législatives ou réglementaires en cause" ;

2. Considérant qu'il est allégué par les sénateurs auteurs de la saisine que les dispositions de ce texte peuvent avoir pour effet de rendre passibles de peines correctionnelles ou contraventionnelles les personnes qui auraient méconnu certaines des stipulations figurant dans des conventions ou accords qui, même ayant fait l'objet de mesures d'extension, ne demeurent pas moins des conventions de droit privé ; que l'on ne saurait admettre que soit ainsi instituée une source conventionnelle du droit pénal ; que, d'ailleurs, le texte critiqué aboutit à ce que certains des éléments constitutifs de délits ou de contraventions se trouvent définis non par la loi ou par le règlement, mais par des stipulations émanant de personnes privées ; qu'enfin, les dispositions en question conduiraient à appliquer un régime de peines unique à des obligations variables et serait ainsi contraire au principe de l'égalité des citoyens devant la loi ;

3. Considérant que si, aux termes de l'article 34 de la Constitution, "la loi fixe les règles concernant la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables", aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit au législateur d'ériger en infractions le manquement à des obligations qui ne résultent pas directement de la loi elle-même ; que la méconnaissance par une personne des obligations résultant d'une convention ayant force obligatoire à son égard peut donc faire l'objet d'une répression pénale ;

4. Considérant que l'article L 153-1 du code du travail tel qu'il résulte de l'article 10 de la loi déférée au Conseil constitutionnel définit de façon précise et complète les éléments constitutifs des infractions qu'il vise ; que, si le contenu des obligations dont la méconnaissance est pénalement sanctionnée peut évidemment différer d'un cas à l'autre, cette circonstance, qui concerne la variété des faits pouvant être l'occasion de la répression pénale, sans altérer l'unité de la définition légale des infractions, n'a ni pour objet ni pour effet de transférer à des particuliers la détermination des infractions et des peines qui leur sont attachées ;

5. Considérant que, loin de violer le principe de l'égalité devant la loi, les dispositions en question en assurent au contraire l'exacte application ; qu'en effet, en l'absence de telles dispositions, les personnes valablement soustraites dans les conditions visées par loi à l'application du droit commun par l'effet de clauses dérogatoires se verraient exempter de toute répression pénale en cas de manquement aux obligations résultant desdites clauses et bénéficieraient ainsi, par rapport aux personnes soumises au droit commun, d'un privilège pénal dont on chercherait vainement la justification ;

6. Considérant, qu'en l'espèce, il n'y a lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution en ce qui concerne les autres dispositions de la loi soumise à son examen,

Décide :

Article premier :

La loi relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail est déclarée conforme à la Constitution.

Article 2 :

La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.


Loi relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail
Sens de l'arrêt : Conformité
Type d'affaire : Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Saisine

Les sénateurs soussignés, conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution défèrent au Conseil Constitutionnel la loi relative à la négociation collective et aux conflits collectifs du travail, adoptée définitivement par le Parlement le 15 octobre 1982.

Considérant que le texte proposé par l'article 10 de cette loi pour l'article L. 153-1 du Code du Travail prévoit que les infractions aux stipulations conventionnelles étendues, dérogatoires aux dispositions législatives et réglementaires, en vertu d'une disposition législative expresse dans une matière déterminée, sont passibles de sanctions analogues à celles qu'entraînerait la violation desdites dispositions,

Considérant que le texte proposé pour l'article L. 153-1 du Code du Travail ne précise pas la nature, civile ou pénale, des sanctions qu'il prévoit,

Considérant qu'il ne saurait conduire à instituer une source conventionnelle du Droit pénal,

Considérant à cet égard que la convention collective, même étendue, demeure un acte contractuel, soumis au contrôle du juge judiciaire et que l'arrêté d'extension est rendu caduc par la dénonciation de l'accord par les organisations signataires,

Considérant que la législation pénale est d'interprétation stricte,

Considérant que certaines infractions aux dispositions du Code du Travail sont considérées comme des délits, dont la détermination, ainsi que les peines qui leur sont applicables, relèvent de la loi en vertu du cinquième alinéa de l'article 34 de la Constitution,

Considérant que des conventions collectives peuvent ou pourraient déroger, en vertu d'une disposition législative expresse, à des dispositions sanctionnées dans les conditions précédemment indiquées,

Considérant donc que le texte proposé pour l'article L. 153-1 du Code du Travail autoriserait la détermination, même indirecte, par des personnes privées, d'infractions pénales dont la définition relève, dans certains cas, de la loi et dans tous les cas du règlement,

Considérant enfin qu' un tel dispositif conduirait à appliquer un régime de peines unique à des obligations variables et serait ainsi contraire au principe de l'égalité des citoyens devant la loi,

Demandent au Conseil Constitutionnel de déclarer non conforme à la Constitution le texte proposé par l'article 10 de la loi précitée pour l'article L. 153-1 du Code du Travail.


Références :

DC du 10 novembre 1982 sur le site internet du Conseil constitutionnel

Texte attaqué : Loi relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail (Nature : Loi ordinaire, Loi organique, Traité ou Réglement des Assemblées)


Publications
Proposition de citation: Cons. Const., décision n°82-145 DC du 10 novembre 1982

RTFTélécharger au format RTF
Origine de la décision
Date de la décision : 10/11/1982
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro de décision : 82-145
Numéro NOR : CONSTEXT000017667391 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.constitutionnel;dc;1982-11-10;82.145 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award