La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/07/1983 | FRANCE | N°83-162

France | France, Conseil constitutionnel, 20 juillet 1983, 83-162


Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 1er juillet 1983, d'une part, par MM Etienne Dailly, André Bohl, Alfred Gérin, Alphonse Arzel, Yves le Cozannet, Georges Lombard, Adolphe Chauvin, Maurice Prévoteau, Pierre Vallon, Auguste Chupin, Raoul Vadepied, Jean-Marie Bouloux, Marcel Lemaire, Pierre Salvi, André Rabineau, Jean Francou, Charles Bosson, Henri Le Breton, Paul Pillet, François Dubanchet, Daniel Hoeffel, Jacques Mossion, Roger Boileau, Jean Gravier, Marcel Daunay, Roger Poudonson, Pierre Lacour. Octave Bajeux, Paul Séramy, Jean Cauchon, Pierre Ceccaldi-Pavard, Jean Colin, Lou

is Jung, Jean-Marie Rausch, René Jager, Pierre Schiélé,...

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 1er juillet 1983, d'une part, par MM Etienne Dailly, André Bohl, Alfred Gérin, Alphonse Arzel, Yves le Cozannet, Georges Lombard, Adolphe Chauvin, Maurice Prévoteau, Pierre Vallon, Auguste Chupin, Raoul Vadepied, Jean-Marie Bouloux, Marcel Lemaire, Pierre Salvi, André Rabineau, Jean Francou, Charles Bosson, Henri Le Breton, Paul Pillet, François Dubanchet, Daniel Hoeffel, Jacques Mossion, Roger Boileau, Jean Gravier, Marcel Daunay, Roger Poudonson, Pierre Lacour. Octave Bajeux, Paul Séramy, Jean Cauchon, Pierre Ceccaldi-Pavard, Jean Colin, Louis Jung, Jean-Marie Rausch, René Jager, Pierre Schiélé, René Tinant, Georges Treille, Raymond Bouvier, Edouard Le Jeune, Louis Virapoullé, Charles Ferrant, Raymond Poirier, Charles Zwickert, Jacques Genton, Charles Pasqua, François O Collet, Roger Romani, Henri Belcour, Georges Repiquet, Yvon Bourges, Edmond Valcin, Jean Chamant, Paul Kauss, Paul Malassagne, Adrien Gouteyron, Geoffroy de Montalembert, Jean Amelin, Henri Portier, Charles de Cuttoli, Pierre Carous, Marcel Fortier, Louis Souvet, Jean-François Le Grand, Sosefo Makape Papilio, Michel Alloncle, Marc Bécam, Michel Maurice-Bokanowski, Jacques Valade, Jean Natali. Jean Chérioux, Paul d'Ornano, Lucien Gautier, Jacques Chaumont, Jacques Delong, Bernard Hugo, Michel Giraud, Michel Chauty, Raymond Brun, Jacques Braconnier, Maurice Lombard, Philippe François, Henri Collette, Philippe de Bourgoing, Jacques Descours Desacres, Michel Miroudot, Louis Boyer, Jacques Ménard, Guy Petit, Louis de la Forest, Pierre-Christian Taittinger, Bernard Barbier, Guy de La Verpillière, Serge Mathieu, Frédéric Wirth, Roland Ruet, Jean Puech, Roland du Luart, Louis Lazuech, Marc Castex, Jean-Pierre Fourcade, Pierre Louvot, Pierre Croze, Jean-Marie Girault, Jules Roujon, Michel d'Aillières, Louis Martin, Lionel Cherrier, Michel Crucis, Jean Bénard-Mousseaux, Jacques Larché, Jacques Pelletier, Paul Girod, Raymond Soucaret, Joseph Raybaud, André Morice, Jean-Pierre Cantegrit, Mme Brigitte Gros, MM Max Lejeune, Guy Besse, Jacques Moutet, Pierre Jeambrun, Henri Collard, sénateurs, et d'autre part, par MM Claude Labbé, Jean Falala, Jacques Chaban-Delmas, Jacques Marette, Philippe Séguin, Michel Barnier, Etienne Pinte, Jacques Toubon, Mme Hélène Missoffe, MM Emmanuel Aubert, Roger Corrèze, Gabriel Kaspereit, Jean-Louis Goasduff, Pierre Mauger, Bernard Pons, Marc Lauriol, Mme Nicole de Hauteclocque, MM Robert-André Vivien, Bruno Bourg-Broc, Christian Bergelin, Michel Cointat, Roland Vuillaume, Jacques Godfrain, Michel Noir, Serge Charles, Claude-Gérard Marcus, Gérard Chasseguet, Pierre Gascher, Pierre-Charles Krieg, Jean de Lipkowski, Daniel Goulet, Jean-Louis Masson, Georges Tranchant, Camille Petit, Benjamin Brial, Didier Julia, Robert Wagner, Michel Debré, Yves Lancien, Jean-Paul de Rocca Serra, Alain Peyrefitte, Georges Gorse, Pierre Bachelet, François Fillon, Charles Miossec, Jacques Lafleur, Jean Foyer, Jean-Claude Gaudin, Charles Millon, Pascal Clément, Michel d'Ornano, Jean Brocard, Philippe Mestre, Jean-Pierre Soisson, Gilbert Gantier, Jean Rigaud, Francisque Perrut, Roger Lestas, Jacques Fouchier, Jean Bégault, Yves Sautier, Jean Briane, Jean-Marie Caro, Olivier Stirn, René Haby, Jacques Dominati, Georges Mesmin, Jacques Proriol, Claude Wolff, Maurice Dousset, François d'Aubert, Alain Madelin, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi relative à la démocratisation du secteur public.

Le Conseil constitutionnel,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment les articles figurant au chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Le rapporteur ayant été entendu

1. Considérant que les députés et les sénateurs, respectivement auteurs des saisines par lesquelles la loi sur la démocratisation du secteur public est déférée au Conseil constitutionnel, font valoir à l'encontre des dispositions de cette loi des griefs tantôt communs à l'une et à l'autre saisines, tantôt propres à l'une d'elles ;
. Sur les articles 1er à 4 relatifs au champ d'application de la loi :
2. Considérant que le champ d'application de la loi est défini par le titre 1er comprenant les articles 1 à 4 ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi : "Sont régies par les dispositions de la présente loi les entreprises suivantes :
"1° Etablissements publics industriels et commerciaux de l'État, autres que ceux dont le personnel est soumis à un régime de droit public ; autres établissements publics de l'État qui assurent tout à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial lorsque la majorité de leur personnel est soumise aux règles du droit privé ;
"2° Sociétés mentionnées à l'annexe I de la présente loi ;
"3° Entreprises nationales, sociétés nationales, sociétés d'économie mixte ou sociétés anonymes dans lesquelles l'État détient directement plus de la moitié du capital social ainsi que les sociétés à forme mutuelle nationalisées ;
"4° Sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, depuis plus de six mois, à lui seul par l'un des établissements ou sociétés mentionnés au présent article, et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200 ;
"5° Autres sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, depuis plus de six mois, conjointement par l'État, ses établissements publics ou les sociétés mentionnés au présent article et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois et au moins égal à 200" ;
4. Considérant que les articles 2 et 3 de la loi ont pour objet d'exclure la prise en compte pour le calcul de la majorité du capital social visée aux 4 et 5 de l'article 1er de certaines participations ou actions ;
5. Considérant que l'article 4 de la loi dispose : "Les établissements publics et sociétés mentionnés aux 1 et 3 de l'article 1er dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est inférieur à 200 et qui ne détiennent aucune filiale au sens du 4 de l'article 1er, ainsi que les établissements publics et sociétés énumérés à l'annexe II de la présente loi, sont exclus du champ d'application des dispositions du chapitre Ier du titre II. Toutefois, les conseils d'administration ou de surveillance de ces établissements publics et sociétés comprennent des représentants des salariés élus dans les conditions prévues au chapitre II. Un décret fixe le nombre de ces représentants ; il peut prévoir, si les spécificités de l'entreprise le justifient, la représentation de catégories particulières de salariés au moyen de collèges électoraux distincts. Les dispositions du chapitre III sont applicables à tous les représentants des salariés. En outre les établissements et entreprises publics énumérés à l'annexe III de la présente loi sont exclus du champ d'application de l'ensemble des dispositions du titre II" ;
. En ce qui concerne les 4 et 5 de l'article 1er :
6. Considérant qu'il est reproché aux dispositions des 4 et 5 de l'article 1er, par les sénateurs auteurs de l'une des saisines, d'avoir inclus dans le champ d'application de la loi non seulement les entreprises publiques proprement dites dans lesquelles l'État détient directement plus de la moitié du capital social, et qui sont visées au 3 de l'article 1er, mais encore des sociétés dont la majorité du capital social n'est aux mains de la puissance publique que de façon indirecte ;
7. Considérant que la détermination du champ d'application d'une loi est, dans le respect de la Constitution, librement opérée par le législateur lui-même ;
8. Considérant que, sans doute, il convient de réserver le point de savoir si chacune des prescriptions de la loi est conforme à la Constitution à l'égard de chacune des catégories d'entreprise ou de chacune des entreprises entrant dans le champ d'application ainsi défini ; que cet examen résultera de l'analyse des critiques dirigées par les auteurs des saisines contre les dispositions des titres II, III et IV de la loi et du jugement qu'appellent ces critiques ;
9. Considérant qu'ainsi les dispositions des 4 et 5 de l'article 1er de la loi ne sont pas contraires à la Constitution ;
En ce qui concerne le 2 de l'article 1er, l'article 4 et les annexes I, II et III de la loi :
10. Considérant que les députés et les sénateurs respectivement auteurs de chacune des deux saisines font valoir qu'après avoir donné du champ d'application de la loi des critères généraux, le législateur y a dérogé, soit en incluant dans ce champ, aux termes du 2 de l'article 1er, des entreprises nominativement désignées dans une annexe I et ne répondant pas à ces critères généraux, soit en en excluant, au moins partiellement, aux termes de l'article 4, d'autres entreprises répondant à ces critères généraux et nominativement désignées dans les annexes II et III ;
11. Considérant que, toutes les dispositions législatives ayant la même force juridique, aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit au législateur, après avoir adopté une règle générale, d'y faire exception ou d'y déroger fût-ce par voie de disposition particulière ;
12. Considérant cependant que ce pouvoir du législateur trouve ses limites dans le respect du principe d'égalité ; que, précisément, les auteurs de l'une et l'autre saisines font valoir que les dérogations apportées au critère général définissant le champ d'application de la loi, par le 2 de l'article 1er renvoyant à l'annexe I et par l'article 4 renvoyant aux annexes II et III, seraient contraires à ce principe ; que ces dérogations conduiraient à des inégalités contraires à la Constitution au détriment de certaines entreprises, de leurs actionnaires et de leurs salariés ;
13. Considérant que l'inclusion dans le champ d'application de la loi des entreprises visées par le 2 de l'article 1er renvoyant à la liste de l'annexe I n'enfreindrait le principe d'égalité que s'il était établi que ces entreprises ne présentent pas de caractéristiques particulières les différenciant objectivement des sociétés du secteur non public ; qu'au contraire, il apparaît que, concrètement, ces sociétés ne peuvent être regardées comme identiques ou analogues aux sociétés commerciales du secteur privé ;
14. Considérant que l'exclusion partielle du champ d'application de la loi des entreprises visées à l'article 4 et aux annexes II et III ne serait contraire au principe d'égalité que si ces entreprises ne présentaient point de caractéristiques particulières par rapport à celles auxquelles la loi est totalement applicable ; qu'aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle ne s'opposait à ce que le législateur module les effets de la loi en tenant compte, par exemple, du nombre de salariés des entreprises considérées, des équilibres déjà établis dans certaines entreprises entre les intérêts locaux, professionnels ou catégoriels, de la spécificité de certaines activités, des engagements précédemment pris par l'État ;
15. Considérant, enfin, de façon générale qu'avant même le vote de la présente loi, le secteur public constituait un ensemble divers et complexe, de telle sorte que l'emploi de critères généraux définissant ce secteur et de règles générales s'y appliquant devait nécessairement s'accompagner de dérogations et d'exceptions qui, loin d'être contraires au principe d'égalité, permettaient de traiter de façon spécifique des situations différentes ne pouvant entrer dans un cadre uniforme ;
. En ce qui concerne la deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'article 4 :
16. Considérant que les députés auteurs de l'une des saisines soutiennent que la deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'article 4 de la loi est contraire à l'article 34 de la Constitution ;
17. Considérant qu'après avoir, dans son alinéa 1er, exclu du champ d'application des dispositions du chapitre Ier du titre II certaines entreprises, l'article 4 précité, dans son alinéa 2, prévoit que leurs conseils d'administration ou de surveillance comprendront obligatoirement des représentants des salariés ; que le début de la deuxième phrase de l'alinéa 2 dispose : "Un décret fixe le nombre de ces représentants... " ;
18. Considérant que la fixation de l'importance de la représentation des salariés met en cause des principes fondamentaux touchant soit au droit du travail, soit aux obligations civiles et commerciales que l'article 34 de la Constitution réserve à la loi ; qu'il n'était donc pas loisible au législateur d'abandonner totalement au pouvoir discrétionnaire du Gouvernement cette fixation ; que, par suite, doit être déclaré contraire à la Constitution le membre de la deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'article 4 de la loi ainsi conçu : "Un décret fixe le nombre de ces représentants" ; que la suite de la phrase, rédigée comme suit : "il peut prévoir, si les spécificités de l'entreprise le justifient, la représentation de catégories particulières de salariés au moyen de collèges électoraux distincts", qui ne comporte en elle-même aucun chef d'inconstitutionnalité, n'est qu'une disposition accessoire de celle contenue dans les premiers mots de la phrase dont elle ne saurait être séparée ; que, pour cette raison, elle est atteinte par la déclaration d'inconstitutionnalité qui concerne la disposition principale contenue en début de phrase ;
. Sur le principe de la représentation des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance, posé par les articles 5 et 6 de la loi :
19. Considérant que les articles 5 et 6 de la loi présentement examinée déterminent la composition des conseils d'administration ou de surveillance des entreprises entrant dans le champ d'application de la loi ; qu'il ressort de ces dispositions que tous les conseils d'administration ou de surveillance desdites entreprises comportent des représentants des salariés élus par ces derniers ;
20. Considérant que les sénateurs auteurs de l'une des deux saisines contestent, dans son principe même, la représentation des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance des sociétés commerciales comprenant des actionnaires privés et entrant dans le champ d'application de la loi ; qu'ils soutiennent que les dispositions imposant dans ces conseils la présence de représentants élus des salariés portent atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre et doivent donc être déclarées non conformes à la Constitution ;
21. Considérant qu'au soutien de ce grief, la saisine fait valoir que "la propriété d'une action, à la différence des obligations, confère en effet à son titulaire le droit de participer à la vie de la société, principalement par la désignation ou la révocation de ses dirigeants" et que, de façon générale, "le droit de vote est un attribut essentiel de l'action" ; que "les actionnaires privés seront tenus à l'écart de la désignation des représentants des salariés puisque ces derniers ne seront pas élus par l'assemblée générale, mais par les salariés eux-mêmes" ; que "les actionnaires privés seront en quelque sorte "expropriés" de ce droit au profit des salariés" ; qu'ainsi "les dispositions de la présente loi violent le droit de propriété comme la liberté d'entreprendre en ce qu'elles retirent, sans aucune indemnisation, aux actionnaires privés le droit de participer à la désignation de la totalité ou d'une partie du conseil d'administration ou du conseil de surveillance des sociétés concernées" ;
22. Considérant que les actionnaires des sociétés commerciales entrant dans le champ d'application de la loi présentement examinée conservent la propriété de leurs actions, qui ne sont frappées d'aucune indisponibilité, ainsi que le droit au partage des bénéfices sociaux et, éventuellement, les droits qui naîtraient pour eux de la liquidation de la société dont ils sont actionnaires ; que la restriction apportée à leur droit de vote ne concerne que la désignation de certains des dirigeants sociaux ; que, d'ailleurs, les règles du droit des sociétés relatives à la protection des actionnaires minoritaires contre les abus de majorité demeurent applicables ; qu'ainsi les dispositions des articles 5 et 6 de la loi présentement examinée relatives à la représentation des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance n'opèrent aucune privation de propriété qui tomberait sous le coup de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui n'implique nullement que les lois ne puissent restreindre l'exercice du droit de propriété sans une indemnisation corrélative ;
- Sur la composition des conseils d'administration ou de surveillance telle qu'elle résulte des articles 5 et 6 de la loi :
. En ce qui concerne la représentation de l'État et des actionnaires dans les sociétés entrant dans le champ d'application de l'alinéa 1er de l'article 5 de la loi :
23. Considérant que l'alinéa 1er de l'article 5 de la loi concerne : "les établissements publics mentionnés au 1 de l'article 1er, d'une part, et, d'autre part, ... les entreprises mentionnées au 3 du même article dont plus de 90 p 100 du capital est détenu par des personnes morales de droit public ou par des sociétés mentionnées à l'article 1er, ainsi que les sociétés centrales de groupes d'entreprises nationales d'assurance, les sociétés à forme mutuelle nationalisées, la Banque française du commerce extérieur et la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur" ;
24. Considérant qu'aux termes des alinéas suivants du même article le conseil d'administration ou de surveillance de chacune de ces entreprises comprend :
"1° Des représentants de l'État et, le cas échéant, des actionnaires, nommés par décret ;
"2° Des personnalités choisies, soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit en raison de leur connaissance des aspects régionaux, départementaux ou locaux des activités en cause, soit en raison de leur connaissance des activités publiques et privées concernées par l'activité de l'entreprise, soit en raison de leur qualité de représentant des consommateurs ou des usagers, nommées par décret pris, le cas échéant, après consultation d'organismes représentatifs desdites activités ;
"3° Des représentants des salariés élus dans les conditions prévues au chapitre II" ;
25. Considérant que, selon les sénateurs auteurs de l'une des saisines, ces dispositions auraient pour effet, dans les sociétés visées à l'alinéa 1er de l'article 5, d'exclure les actionnaires privés de la désignation des membres des conseils d'administration ou de surveillance, directement nommés par l'État, et donc de les priver du droit de participer à la nomination et à la révocation des administrateurs de la société, ce qui, selon une thèse déjà exposée, équivaudrait à une expropriation sans indemnité ;
26. Considérant que, compte tenu de la nature des entreprises visées à l'alinéa 1er de l'article 5, dans lesquelles l'importance des capitaux publics est très largement prépondérante, la désignation directe de représentants de l'État, d'ailleurs souvent prévue par la législation antérieure, si elle déroge au droit commun des sociétés commerciales, ne retire en fait aux actionnaires privés, très étroitement minoritaires, aucun avantage, alors d'ailleurs qu'ils se voient assurer, "le cas échéant", c'est-à-dire quand il existe de tels actionnaires privés, une représentation propre qui ne leur aurait pas été garantie par le jeu normal de l'élection des dirigeants sociaux par l'assemblée générale ;
27. Considérant, en revanche, que la disposition prévoyant la désignation par décret, "le cas échéant", des représentants des actionnaires n'est pas conforme à la Constitution ; qu'en effet, la détermination des conditions dans lesquelles est assurée la représentation d'une personne privée pour l'exercice de ses droits patrimoniaux met en cause un principe fondamental du droit de propriété et des obligations civiles et commerciales relevant, aux termes de l'article 34 de la Constitution, du domaine de la loi ; que, dès lors, il n'appartenait pas au législateur de conférer purement et simplement au Gouvernement le pouvoir discrétionnaire d'assigner des représentants à des actionnaires privés ;
28. Considérant qu'il y a donc lieu de déclarer non conformes à la Constitution les mots "nommés par décret" figurant au 1° de l'article 5 ;
. En ce qui concerne l'alinéa 5 de l'article 5 de la loi :
29. Considérant que l'alinéa 5 de l'article 5 de la loi est ainsi conçu : "Dans les établissements publics de l'État mentionnés à l'article 1er, le nombre des représentants de chacune de ces catégories est déterminé par décret, le nombre des représentants des salariés devant être égal au moins au tiers du nombre des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance" ;
30. Considérant que les députés auteurs de l'une des deux saisines soutiennent que ces dispositions sont contraires à la Constitution ; qu'en effet, selon eux, si elles assignent à la représentation des salariés une proportion minimale, elles ne lui assignent aucune proportion maximale et permettent ainsi au Gouvernement de mettre en cause un principe fondamental du droit du travail, relevant en vertu de l'article 34 de la Constitution, du domaine de la loi ;
31. Considérant que, si le grief ainsi fait aux dispositions précitées n'est pas inexact dans son principe, il est inopérant ; qu'en effet, s'agissant d'établissements publics, tels que ceux visés à l'article 1er de la loi, en dehors des cas où la proportion des représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance est déjà fixée à un taux sensiblement supérieur au tiers, l'élévation sensiblement supérieur au tiers, l'élévation du nombre des représentants du personnel à une telle proportion aboutirait à la création d'une ou de plusieurs nouvelles catégories d'établissements publics, matière réservée par l'article 34 au législateur, qui n'a point, dans la loi présentement examinée, entendu autoriser une telle création ; qu'ainsi les pouvoirs conférés à l'autorité réglementaire par les dispositions présentement examinées relatives à la proportion des représentants des salariés, demeurent dans des limites répondant aux exigences de l'article 34 de la Constitution ;
. En ce qui concerne les quatre premiers alinéas de l'article 6 :
32. Considérant que les quatre premiers alinéas de l'article 6 de la loi présentement examinée sont ainsi conçus : "Dans les entreprises non visées à l'article 5, le conseil d'administration ou de surveillance compte dix-huit membres lorsque la majorité du capital social est détenue par l'État et de neuf à dix-huit membres dans les autres cas. Toutefois, dans les banques, le nombre des membres des conseils d'administration ne peut excéder quinze. Dans tous les cas, le conseil comprend des représentants des salariés élus dans les conditions prévues au chapitre II. Dans les entreprises mentionnées aux 4 et 5 de l'article 1er dont l'effectif est compris entre 200 et 1000 salariés à l'exclusion des banques nationalisées par la loi du 11 février 1982 précitée, le nombre de ces représentants est de deux. Dans les autres entreprises, ces représentants constituent le tiers des membres du conseil" ;
33. Considérant que les députés auteurs de l'une des saisines soutiennent que ces dispositions permettent au Gouvernement de faire varier à son gré la proportion des représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance ; qu'en effet, pour les entreprises visées à l'alinéa 3 de l'article 6 le nombre des représentants des salariés est fixé à deux, cependant qu'en vertu de l'alinéa 1er, le nombre total des membres du conseil d'administration ou de surveillance peut varier de neuf à dix-huit, de telle sorte que les deux représentants des salariés dans ces entreprises peuvent constituer soit un neuvième, soit deux neuvièmes, soit une proportion comprise entre ces deux fractions, de l'effectif total du conseil considéré ;
34. Considérant que, selon la même saisine, s'agissant de la mise en cause d'un principe fondamental du droit du travail, le législateur ne pouvait, en vertu de l'article 34 de la Constitution, laisser à une autre autorité que lui-même le soin de moduler l'importance de la proportion des représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance ;
35. Considérant que le législateur, dans le cas particulier présentement examiné, a fixé lui-même indirectement mais certainement à un neuvième et à deux neuvièmes la proportion minimale et la proportion maximale des représentants des salariés et a ainsi déterminé avec une précision suffisante les conditions dans lesquelles devait être mis en oeuvre le principe de la participation des salariés ; qu'il a ainsi satisfait aux exigences de l'article 34 de la Constitution ;
. En ce qui concerne le dernier alinéa de l'article 6 de la loi :
36. Considérant que le dernier alinéa de l'article 6 de la loi dispose : "Les autres membres desdits conseils sont désignés, dans les entreprises constituées en forme de sociétés, par l'assemblée générale des actionnaires conformément aux dispositions de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 modifiée sur les sociétés commerciales, sous réserve, le cas échéant, des représentants de l'État, qui sont nommés par décret... " ;
37. Considérant que les sénateurs auteurs de l'une des deux saisines font valoir que ces dispositions paraissent ouvrir la possibilité à l'égard des sociétés entrant dans le champ d'application de l'article 6, de la nomination d'administrateurs par décret et non par l'assemblée générale des actionnaires ; que, selon un raisonnement déjà exposé, l'atteinte portée par là aux droits des actionnaires constituerait une expropriation sans indemnité entachée d'inconstitutionnalité ;
38. Considérant que les termes "sous réserve, le cas échéant, des représentants de l'État qui sont nommés par décret" ne formulent aucune prescription de caractère positif ou négatif et, selon leur lettre même, réservent seulement l'éventualité de dispositions particulières, de nature législative, réglementaire ou statutaire, en vigueur ou à intervenir, qui assureraient à l'État, dans certaines sociétés visées par l'article 6, une représentation propre au sein des conseils d'administration ou de surveillance ;
39. Considérant qu'ainsi le dernier alinéa de l'article 6, qui ne préjuge ni la validité de telles dispositions ni l'appréciation qui pourrait être portée par les autorités ou juridictions compétentes sur leur régularité, ne saurait être regardé comme contraire à la Constitution ;
En ce qui concerne l'ensemble des articles 5 et 6 :
40. Considérant qu'indépendamment des critiques qui viennent d'être examinées, les députés auteurs de l'une des deux saisines reprochent aux articles 5 et 6 de la loi de créer des inégalités considérables dans la représentation des salariés au sein des conseils d'administration ou de surveillance ; qu'en effet, que ce soit en valeur absolue, ou que ce soit en valeur proportionnelle, les nombres exprimant l'importance de la représentation des salariés varient considérablement selon les catégories d'entreprises visées ; que cette atteinte au principe d'égalité entacherait d'inconstitutionnalité la loi déférée à l'examen du Conseil constitutionnel ;
41. Considérant qu'aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'exige que le nombre ou la proportion de représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance des entreprises du secteur public soient les mêmes pour toutes les entreprises ; qu'en tenant compte, pour déterminer l'importance de la représentation des salariés, de caractéristiques telles que la forme juridique des entreprises, la nature de leur activité, le nombre de leurs salariés ou la répartition de leur capital, le législateur n'a procédé à aucune discrimination arbitraire contraire à la Constitution ;
. Sur l'article 12 de la loi relatif à la révocation des membres des conseils d'administration ou de surveillance :
42. Considérant que l'article 12 de la loi dispose : "Il peut être mis fin à tout moment par décret au mandat des représentants de l'État dans les conseils d'administration ou de surveillance des entreprises mentionnées à l'article 1er, nommés par décret. En cas de faute grave, il peut être mis fin par décret au mandat des personnalités choisies comme membres desdits conseils au titre du 2° de l'article 5 ci-dessus. L'assemblée générale ordinaire des sociétés mentionnées à l'article 1er peut révoquer à tout moment les membres des conseils d'administration ou de surveillance qu'elle a nommés. Les représentants des salariés peuvent être révoqués individuellement pour faute grave dans les conditions prévues à l'article 25" ;
43. Considérant que les députés auteurs de l'une des deux saisines font valoir diverses critiques à l'égard des dispositions précitées ;
. En ce qui concerne l'alinéa 1er de l'article 12 relatif à la révocation des représentants de l'État :
44. Considérant qu'il est reproché aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 12 d'être contraires au principe d'autonomie de gestion des entreprises publiques en ce qu'elles placeraient les représentants de l'État dans les conseils d'administration ou de surveillance sous la dépendance du Gouvernement et au principe d'égalité en ce qu'elles institueraient, pour ces représentants, un régime de révocation différent de celui applicable aux autres membres des conseils ;
45. Considérant que, pour établir qu'il existe un principe d'autonomie de gestion des entreprises publiques ayant valeur constitutionnelle, la saisine présentement examinée invoque les dispositions du Préambule de 1946, selon lesquelles "tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait doit devenir la propriété de la collectivité", desquelles il résulterait implicitement "que les entreprises publiques sont la propriété non pas du Gouvernement, mais la propriété de la Nation et qu'en conséquence le Gouvernement qui a nommé les administrateurs au sein des conseils d'administration des entreprises publiques n'est pas en droit de les révoquer librement sans invoquer à leur encontre une quelconque faute grave" ;
46. Considérant que l'existence d'un principe ou d'une règle de valeur constitutionnelle ne saurait procéder de telles déductions ;
47. Considérant, d'autre part, que, si les conditions dans lesquelles peuvent être révoqués les représentants de l'État sont différentes de celles concernant la révocation des autres membres des conseils d'administration ou de surveillance, cette différence qui s'applique à des situations elles-mêmes différentes ne constitue pas une atteinte au principe d'égalité ;
. En ce qui concerne l'alinéa 2 de l'article 12 de la loi :
48. Considérant qu'il est reproché à l'alinéa 2 de l'article 12 de la loi de permettre, en cas de faute grave, la révocation par décret des personnalités choisies comme membres des conseils au titre du 2° de l'article 5, alors que la révocation des représentants des salariés ne peut, aux termes de l'article 25 de la loi, auquel renvoie le dernier alinéa de l'article 12, être prononcée que par l'autorité judiciaire sur la demande de la majorité du conseil d'administration ou de surveillance intéréssé ; qu'ainsi l'alinéa 2 de l'article 12 méconnaîtrait le principe d'égalité ;
49. Considérant que les procédures de révocation de membres procédant les uns de la nomination par le Gouvernement, les autres de l'élection par les salariés peuvent être différentes sans qu'il soit porté atteinte au principe d'égalité ;
- Sur l'article 13 relatif à certaines mesures de révocation en cas de dissensions graves entravant l'administration de la société :
50. Considérant que, selon les députés auteurs de l'une des saisines, les dispositions de l'article 13 ouvrant la possibilité de certaines révocations de membres des conseils d'administration ou de surveillance en cas de dissensions graves entravant l'administration de la société seraient contraires au principe de l'autonomie de gestion des entreprises publiques ;
51. Considérant que, comme il a été dit plus haut, il n'existe pas de principe de l'autonomie de gestion des entreprises publiques ayant valeur constitutionnelle ;
- Sur l'article 14 de la loi :
52. Considérant que l'article 14 de la loi dispose : "Les représentants des salariés sont élus par les salariés qui remplissent les conditions suivantes :
"- dans chacune des entreprises mentionnées aux 1, 2, 3 et 5 de l'article 1er de la présente loi, remplir les conditions requises pour être électeur au comité d'entreprise ou à l'organe en tenant lieu, soit dans l'entreprise elle-même, soit dans l'une de ses filiales au sens du 4 dudit article 1er, dont le siège social est fixé sur le territoire français ;
"- dans chacune des entreprises entrant dans la catégorie définie au 4 de l'article 1er, remplir les conditions requises pour être électeur au comité d'entreprise" ;
53. Considérant que les députés auteurs de l'une des saisines reprochent aux dispositions de l'article 14 précité concernant les entreprises mentionnées aux 1, 2, 3 et 5 de l'article 1er de conférer l'électorat pour la désignation des représentants de l'une de ces entreprises aux salariés, même étrangers, d'une filiale dont le siège social est fixé sur le territoire français et a contrario de le refuser aux salariés, même français, des filiales dont le siège social est fixé hors du territoire national ; qu'il y aurait là une atteinte au principe d'égalité ;
54. Considérant que la différence de traitement ainsi établie, en ce qui concerne le droit de vote, entre les salariés des filiales dont le siège social est fixé sur le territoire français et ceux des filiales dont le siège social est fixé à l'étranger se justifie par la différence de situation juridique de l'entreprise qui, dans un cas, est soumise aux règles du droit français et, dans l'autre cas, est soumise à des règles de droit non françaises ;
- Sur l'article 15, alinéa 1er, de la loi :
55. Considérant que l'alinéa 1er de l'article 15 de la loi dispose : "Sont éligibles au conseil d'administration ou de surveillance d'une des entreprises mentionnées à l'article 1er les électeurs âgés de dix-huit ans accomplis, travaillant dans cette entreprise ou l'une de ses filiales au sens du 4 de l'article 1er, et ayant travaillé pendant une durée d'au moins deux ans au cours des cinq dernières années soit dans ladite entreprise, soit dans l'une de ses filiales, soit dans une société dont ladite entreprise est une filiale, soit dans une société ayant fusionné avec elle" ;
56. Considérant qu'il est fait grief à cette disposition de permettre l'élection de personnes travaillant dans une filiale située hors du territoire national, et, de ce fait, n'ayant pas, aux termes de l'article 14 de la loi, la qualité d'électeur ; qu'ainsi serait méconnu un principe de droit électoral ayant valeur constitutionnelle liant inconditionnellement la qualité d'éligible à la qualité d'électeur ;
57. Considérant que, sans qu'il soit besoin de rechercher si un tel principe existe et qu'elle en serait la valeur, il suffit de relever qu'aux termes mêmes du texte précité "Sont éligibles... les électeurs... " ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
- Sur l'article 15, alinéa 2, de la loi relatif aux conditions d'éligibilité des représentants des salariés :
58. Considérant que, pour définir l'une des conditions d'éligibilité concernant les représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance, l'article 15, alinéa 2, de la loi dispose : "Est réputé travailler ou avoir travaillé dans une entreprise le salarié de cette entreprise qui exerce ou a exercé des fonctions de permanent syndical avec ou sans suspension du contrat de travail" ;
59. Considérant qu'il est fait grief à cette disposition d'ouvrir les fonctions de représentants des salariés dans les organismes gérant les entreprises à des personnes qui ne peuvent être regardées comme répondant aux exigences du principe posé par le Préambule de 1946 selon lequel "tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises" ; qu'en effet, la qualité de représentant syndical qui correspond à une fonction de défense des intérêts des salariés, étrangère à la gestion même de l'entreprise, ne saurait à elle seule ouvrir vocation à la qualité de délégué en vue de la participation la gestion ;
60. Considérant que, sans qu'il soit besoin de rechercher si la disposition du Préambule invoquée par les auteurs de la saisine revêt la portée que ceux-ci lui prêtent, il ressort des termes mêmes de l'article 15, alinéa 2 précité, que les représentants syndicaux ne sont éligibles que s'ils sont ou ont été titulaires d'un contrat de travail avec l'entreprise concernée ; que la suspension du contrat de travail ne rompt point les liens entre le titulaire de celui-ci et l'entreprise ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
- Sur l'alinéa 2 de l'article 16 de la loi relatif à la représentation des ingénieurs, chefs de service et cadres :
61. Considérant que les deux premiers alinéas de l'article 16 de la loi sont ainsi conçus : "L'élection a lieu au scrutin secret de liste, avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne et sans panachage. Toutefois, dans les entreprises mentionnées aux 1, 2 et 3 de l'article 1er et dans les entreprises mentionnées aux 4 et 5 du même article dont le nombre de salariés est au moins égal à 1000 ou dont le nombre de cadres est au moins égal à 25, un siège est réservé aux ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification et est attribué à la liste ayant obtenu le plus de voix dans cette catégorie, sous réserve que cette liste comporte au moins un candidat appartenant à ladite catégorie. Ce siège est, le cas échéant, imputé sur le ou les sièges déjà obtenus par la liste bénéficiaire" ;
62. Considérant que les députés auteurs de l'une des deux saisines reprochent aux dispositions de l'alinéa 2 précité de méconnaître le principe d'égalité à plusieurs points de vue : par une discrimination entre les cadres des entreprises mentionnées aux 1, 2 et 3 de l'article 1er et ceux des entreprises mentionnées aux 4 et 5 de cet article ; par une discrimination dans l'ensemble de ces dernières entreprises entre les cadres de celles qui remplissent certaines conditions d'effectifs et les autres ; par l'inégale représentation des cadres d'entreprise à entreprise puisque, quel que soit le nombre de sièges à pourvoir, un seul siège leur est réservé ;
63. Considérant que le législateur a pu, sans manquer au principe d'égalité, dans les cas où il prévoyait une représentation des cadres, fixer uniformément à un siège la part faite à cette représentation, en raison notamment des difficultés arithmétiques qu'aurait entraînées une formule respectant strictement la proportionnalité entre le nombre de sièges réservés aux cadres et le nombre total de sièges revenant aux représentants des salariés ;
64. Considérant, en revanche, qu'il n'apparaît pas de différence de situation entre les cadres par la seule référence, d'une part, aux entreprises visées aux 1, 2 et 3 de l'article 1er de la loi et, d'autre part, aux entreprises visées aux 4 et 5 de ce même article ; qu'il était donc contraire au principe d'égalité de limiter par des conditions d'effectifs la représentation des cadres des entreprises visées aux 4 et 5, alors que cette limitation n'existe pas pour les cadres des entreprises visées aux 1, 2 et 3 ;
65. Considérant que, par suite, dans l'alinéa 2 de l'article 16 doivent être déclarés non conformes à la Constitution les mots : "dont le nombre de salariés est au moins égal à 1000 ou dont le nombre de cadres est au moins égal à 25" ;
- Sur l'alinéa 6 de l'article 16 de la loi concernant les bulletins portant des ratures :
66. Considérant que l'alinéa 6 de l'article 16 de la loi est ainsi conçu : "Lorsque le nom d'un candidat a été raturé, les ratures ne sont pas prises en compte si leur nombre est inférieur à 10 p 100 des suffrages valablement exprimés en faveur de la liste sur laquelle figure ce candidat ; dans ce cas, et sous réserve de l'application éventuelle du 2° alinéa du présent article, les candidats sont déclarés élus dans l'ordre de présentation" ;
67. Considérant que, selon les députés auteurs de la saisine, les dispositions de l'alinéa 6 précité constitueraient une "violation manifeste des principes de la démocratie électorale" ; que serait également méconnu le principe formulé par le Préambule de 1946, aux termes duquel "tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises", principe qui "implique que, seuls, les délégués effectivement élus par les travailleurs doivent siéger au sein des organes compétents pour la gestion des entreprises" :
68. Considérant que, à supposer que certains principes constitutionnels régissant les élections politiques soient applicables à la matière faisant l'objet de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel, aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit au législateur ayant choisi un système de représentation proportionnelle au scrutin de liste et sans panachage d'exclure toute possibilité pour les électeurs de modifier la composition et l'ordre de chaque liste ; qu'il lui est donc d'autant plus loisible, par atténuation de cette rigueur, d'ouvrir une telle possibilité quand un pourcentage de ratures dépasse un seuil déterminé ; que, dès lors, le grief fait à l'alinéa 6 de l'article 16 n'est pas fondé ;
- Sur l'article 22 de la loi relatif au statut des représentants des salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance :
69. Considérant que l'article 22 de la loi présentement examinée dispose : "Le mandat de membre du conseil d'administration ou de surveillance des représentants des salariés est gratuit, sans préjudice du remboursement par l'entreprise des frais exposés pour l'exercice dudit mandat. Lorsque leur responsabilité d'administrateur est mise en cause, elle s'apprécie en tenant compte du caractère gratuit de leur mandat. En aucun cas, ils ne peuvent être déclarés solidairement responsables avec les administrateurs représentant les actionnaires. Lorsque leur responsabilité de membre du conseil de surveillance est mise en cause, elle s'apprécie en tenant compte du caractère gratuit de leur mandat" ;
70. Considérant que les députés, auteurs de l'une des deux saisines, soutiennent que l'atténuation de la responsabilité des membres des conseils d'administration ou de surveillance représentant les salariés qui résulte des dispositions précitées et qui, en fait, équivaudrait à une suppression de toute responsabilité, confère à ces représentants par rapport aux autres membres desdits conseils un "privilège exorbitant" contraire tout à la fois au principe d'égalité, au principe de responsabilité, au principe de réparation et qui ne se justifie par aucun motif d'intérêt général ;
71. Considérant qu'avant d'en venir à l'examen de ces critiques il convient d'observer que, contrairement aux allégations de la saisine, le mandat des représentants des salariés est gratuit, car il ne comporte aucune rémunération, le remboursement des frais exposés n'ayant pas un tel caractère ; que, si les articles 26 et 27 de la loi mettent à la charge de l'entreprise le paiement, au titre du salaire, des heures de travail consacrées à l'exercice du mandat, ces dispositions, qui ne font qu'éviter un manque à gagner pour le salarié, ne confèrent à celui-ci aucun avantage ayant le caractère d'une rémunération spécifique ;
72. Considérant qu'il convient encore d'observer que, contrairement aux allégations de la saisine, les dispositions de l'article 22 ne concernent à l'évidence que la responsabilité civile des représentants des salariés et non leur responsabilité pénale qui ne pourrait être soustraite au droit pénal commun que par un texte législatif spécifique déterminant, de manière précise, les effets de l'atténuation de responsabilité sur les conditions constitutives des infractions ou sur l'application de l'échelle des peines ;
73. Considérant enfin que l'atténuation de responsabilité résultant des termes de l'article 22 de la loi, visiblement inspirée de l'alinéa 2 de l'article 1992 du code civil, n'équivaut ni en droit ni en fait à la suppression de toute responsabilité ;
- En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité :
74. Considérant que le fait que le régime de responsabilité civile applicable aux membres des conseils d'administration ou de surveillance représentant les salariés n'est pas identique à celui des membres des conseils représentant l'État ne méconnaît pas le principe d'égalité ; qu'en effet, l'État répond des fautes commises par ses agents dans l'exercice de leurs fonctions et ne peut mettre en cause la responsabilité personnelle de ceux-ci qu'en cas de faute personnelle de leur part ; que le respect du principe d'égalité au regard des représentants des salariés dont la responsabilité n'est couverte par aucune autre personne physique ou morale justifie au contraire leur soumission à un régime de responsabilité moins rigoureux ;
75. Considérant que, si le régime de la responsabilité civile applicable aux membres des conseils d'administration ou de surveillance représentant les salariés est différent de celui des membres élus par les actionnaires, cette différence n'est pas contraire au principe d'égalité, étant donné qu'à l'inverse des seconds, les premiers exercent gratuitement leur mandat et n'ont point part aux bénéfices sociaux ;
- En ce qui concerne le moyen tiré du "principe de responsabilité" :
76. Considérant que, selon les auteurs de la saisine, il existerait un principe de responsabilité de valeur constitutionnelle, consacré par la Déclaration de 1789 et reconnu par les lois de la République, notamment par le code civil et par le code pénal ; que ce principe qui imposerait à l'auteur de toute faute d'en répondre civilement, serait méconnu par l'article 22 de la loi ;
77. Considérant que, sans qu'il soit besoin de rechercher si un tel principe a valeur constitutionnelle, il suffit d'observer qu'en tout état de cause, il ne s'opposerait pas à l'aménagement de régimes de responsabilité spéciaux moins rigoureux que le régime de droit commun, comme en témoigne d'ailleurs l'alinéa 2 de l'article 1992 du code civil qui, comme il a été dit, a visiblement inspiré la rédaction de l'article 22 de la loi ;
- En ce qui concerne le moyen tiré du "principe du droit à réparation" :
78. Considérant que, selon les auteurs de la saisine, il existerait un "principe de réparation" de valeur constitutionnelle ouvrant à toute victime d'une faute le droit d'en obtenir réparation, soit de la part de l'auteur de cette faute, soit de la part d'un tiers qui lui serait substitué ;
79. Considérant que, sans qu'il soit besoin de rechercher si un tel principe a valeur constitutionnelle, il suffit d'observer que s'il s'oppose au refus absolu de toute réparation sans égard à la gravité de la faute, il ne s'oppose pas, comme en témoigne d'ailleurs l'alinéa 2 de l'article 1992 du code civil, à certaines exonérations de responsabilité pour des fautes présumées excusables ; qu'en un tel cas, d'ailleurs, la loi n'exclut pas l'action éventuelle des victimes contre d'autres administrateurs ou contre la société elle-même ;
- En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le législateur aurait inexactement apprécié l'intérêt général justifiant le régime de responsabilité applicable aux membres des conseils d'administration ou de surveillance représentant les salariés :
80. Considérant que les députés auteurs de l'une des deux saisines soutiennent que la méconnaissance du principe d'égalité par les dispositions de l'article 22 de la loi ne saurait être justifiée par des motifs d'intérêt général ;
81. Considérant que, sans qu'il soit besoin de rappeler que, sous réserve du respect des règles et principes de valeur constitutionnelle, l'appréciation de l'intérêt général appartient au législateur, il ressort de ce qui précède que les dispositions de l'article 22 de la loi ne méconnaissent en rien le principe d'égalité, étant donné qu'elles sont justifiées par les différences existant entre les situations respectives des diverses catégories des membres des conseils d'administration ou de surveillance ; qu'il n'y a donc pas lieu de rechercher si l'intérêt général pouvait justifier une atteinte au principe d'égalité ;
82. Considérant au total que l'article 22 de la loi n'est pas contraire à la Constitution ;
- Sur l'article 33 de la loi (nouvel article L. 412-23 du code du travail) :
83. Considérant que l'article 33 de la loi introduit dans le code du travail de nouvelles dispositions applicables aux établissements et entreprises mentionnés à l'article 1er de la loi relative à la démocratisation du secteur public ; que l'une de ces dispositions figurant au nouvel article L. 412-23 du code du travail prévoit que la négociation que l'employeur doit engager avec les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise sur des modalités complémentaires d'exercice du droit syndical doit porter notamment sur "les conditions dans lesquelles pourra être facilitée la collecte des cotisations syndicales" ;
84. Considérant qu'il est fait grief à cette disposition de permettre aux organisations syndicales de faire pression sur les salariés de l'entreprise en vue de leur adhésion à un syndicat ou du maintien de celle-ci, en violation du principe de la liberté syndicale formulé par le Préambule de 1946 ;
85. Considérant que la seule éventualité d'abus contraires à la Constitution dans l'application d'une disposition législative n'entraîne pas l'inconstitutionnalité de celle-ci ; que la disposition critiquée ne saurait permettre que soit imposé en droit ou en fait, directement ou indirectement, l'adhésion ou le maintien de l'adhésion des salariés d'une entreprise à une organisation syndicale ; qu'il appartiendrait à la direction des entreprises intéressées de refuser de souscrire à toute clause tendant à un tel résultat et, le cas échéant, aux juridictions compétentes, d'en prononcer la nullité ou d'en interdire l'application ;
86. Considérant que, sous le bénéfice de ces observations, le moyen ne saurait être retenu ;
- Sur l'article 35 de la loi (nouveau troisième alinéa de l'article L. 432-5 du code du travail) :
87. Considérant que le troisième alinéa ajouté à l'article L. 432-5 du code du travail par l'article 35 de la loi est ainsi rédigé : "Toutefois, dans les sociétés mentionnées à l'article 1er de la loi n° du relative à la démocratisation du secteur public, à l'exception de celles qui figurent aux annexes II et III de ladite loi, la représentation du comité d'entreprise auprès du conseil d'administration ou de surveillance est assurée par le secrétaire du comité d'entreprise ou de l'organe qui en tient lieu" ;
88. Considérant que les députés auteurs de l'une des saisines reprochent à ces dispositions d'instituer, dans la matière qu'elles traitent, une dérogation concernant les entreprises figurant aux annexes II et III de la loi, dérogation qui serait contraire au principe d'égalité ;
89. Considérant que la dérogation ainsi critiquée n'est que la conséquence du régime spécial établi par la loi pour les entreprises figurant aux annexes II et III, dont la conformité à la Constitution a été plus haut reconnue par la présente décision ; qu'ainsi la critique faite à l'article 33 ne saurait être retenue ;
- Sur le quatrième alinéa de l'article 37 de la loi relatif aux modalités de participation des salariés des houillères de bassin à l'élection des représentants des salariés au conseil d'administration des Charbonnages de France :
90. Considérant que l'alinéa 4 de l'article 37 de la loi est ainsi conçu : "Par dérogation aux dispositions de l'article 14 de la présente loi, un décret en Conseil d'État déterminera les modalités de participation des salariés des Houillères de bassin à l'élection des représentants des salariés au conseil d'administration des Charbonnages de France " ;
91. Considérant que les députés auteurs de l'une des deux saisines critiquent ces dispositions au motif que la loi aurait dû prévoir elle-même "un minimum de représentation des salariés au sein des conseils d'administration" ;
92. Considérant que l'objet du texte critiqué n'est pas de fixer le nombre des représentants des salariés dans les conseils d'administration des Houillères de bassin ou dans le conseil d'administration des Charbonnages de France, qui résulte d'autres dispositions de la loi, mais d'organiser, compte tenu de la structure particulière du secteur public de production de charbon, les conditions de participation des salariés des Houillères de bassin à l'élection des représentants des salariés au conseil d'administration de l'établissement public central ; qu'il était loisible au législateur de renvoyer le règlement de cette question à un décret en Conseil d'État ;
- Sur l'article 41, alinéa 2, de la loi relatif à certaines informations données par l'employeur :
93. Considérant que l'article 41, alinéa 2, de la loi prévoit que, lorsque l'employeur prend l'initiative de la négociation en vue de la conclusion des accords prévus aux articles L 412-23 et L 462-3 du code du travail, "il en informe toutes les organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise" ;
94. Considérant qu'il est reproché à cette disposition de faire échec à la liberté syndicale en privant les salariés n'adhérant pas à des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise d'informations essentielles ;
95. Considérant que la liberté syndicale n'est pas méconnue du fait que la loi prévoit que, lorsque l'employeur entend engager une négociation avec les organisations syndicales dans l'entreprise, il en informe ces organisations sans être obligé d'étendre cette information au-delà du cercle de ses partenaires ; qu'ainsi le moyen ne saurait être retenu ;
- Sur diverses dispositions qui méconnaîtraient l'article 37 de la Constitution :
96. Considérant que, selon les députés auteurs de la saisine, certaines dispositions de la loi figurant dans les articles 7, 8, 9, 11 et 18 ne relèvent pas du domaine législatif et ont donc été votées en violation de l'article 37 de la Constitution ;
97. Considérant que les dispositions des articles 34 et 37, alinéa 1er, de la Constitution ne sauraient être interprétées indépendamment de celles des articles 41 et 37, alinéa 2 ; qu'il résulte du rapprochement de ces divers textes que, par les articles 34 et 37, alinéa 1er, la Constitution n'a pas entendu frapper d'inconstitutionnalité une disposition de nature réglementaire contenue dans une loi, mais a voulu, à côté du domaine réservé à la loi, reconnaître à l'autorité réglementaire un domaine propre et conférer au Gouvernement, par la mise en oeuvre des procédures spécifiques des articles 37, alinéa 2 et 41, le pouvoir d'en assurer la protection contre d'éventuels empiètements de la loi ; que, dans ces conditions, les députés auteurs de la saisine ne sauraient se prévaloir de ce que le législateur serait intervenu dans le domaine réglementaire pour soutenir que les dispositions ainsi critiquées seraient contraires à la Constitution ;
- Sur l'ensemble de la loi :
98. Considérant qu'en l'espèce, il n'y a lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution en ce qui concerne les autres dispositions de la loi soumises à son examen ;

Décide :
Article premier :
Sont déclarés contraires à la Constitution :
- la deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'article 4 de la loi relative à la démocratisation du secteur public ainsi conçue : "Un décret fixe le nombre de ces représentants ; il peut prévoir, si les spécificités de l'entreprise le justifient, la représentation de catégories particulières de salariés au moyen de collèges électoraux distincts" ;
- dans le premier alinéa de l'article 5 le membre de phrase formé par les mots "nommés par décret" ;
- dans l'alinéa 2 de l'article 16 le membre de phrase formé par les mots "dont le nombre de salariés est au moins égal à mille ou dont le nombre de cadres est au moins égal à vingt-cinq".

Article 2 :
Les autres dispositions de la loi relative à la démocratisation du secteur public sont conformes à la Constitution.

Article 3 :
Les dispositions déclarées contraires à la Constitution ne sont pas inséparables de l'ensemble de la loi.

Article 4 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.


Synthèse
Numéro de décision : 83-162
Date de la décision : 20/07/1983
Loi relative à la démocratisation du secteur public
Sens de l'arrêt : Non conformité partielle
Type d'affaire : Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Saisine

Conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, les sénateurs soussignés ont l'honneur de déférer au Conseil constitutionnel le texte de la loi relative à la démocratisation du secteur public, telle qu'elle a été définitivement adoptée le 30 juin 1983.

La loi de nationalisation n° 82-155 du 11 février 1982 a transféré à l'Etat la propriété de cinq sociétés industrielles, de trente-neuf banques et de deux compagnies financières qui venaient ainsi s'ajouter aux entreprises nationalisées en 1936 et 1937 et au lendemain de la seconde guerre mondiale.

Pour les sociétés qu'elle nationalisait, ladite loi a prévu des règles relatives à la composition du Conseil d'administration et à la désignation de ses membres mais seulement à titre transitoire, "en attendant l'entrée en vigueur de la loi sur l'organisation et la démocratisation du secteur public" (art. 7, 22 et 35). Quant à l'article 51 de cette loi du 11 février 1982, il a renvoyé à cette même loi ultérieure relative à l'organisation et à la démocratisation du secteur public "le soin de déterminer, après consultation des organisations syndicales les plus représentatives, l'exercice des nouvelles responsabilités des travailleurs dans l'ensemble des entreprises du secteur public, notamment au niveau de l'atelier, des fonctions syndicales, des comités d'entreprise, des comités centraux d'entreprise, des comités de groupes d'entreprises et des conseils d'administration ".

C'est en se fondant sur cette disposition que le gouvernement a présenté son projet de loi comme une suite indissociable de la loi de nationalisation. Or cette présentation, maintes fois reprise au cours des travaux parlementaires, ne correspond pas à la réalité, car la comparaison entre les deux textes montre que la loi relative à la démocratisation du secteur public a un champ d'application beaucoup plus vaste que la loi du 11 février 1982 ou les lois de nationalisation précédentes.

Les dispositions de la loi que les sénateurs soussignés ont l'honneur de déférer au Conseil constitutionnel régiront en effet non seulement les établissements publics et les sociétés appartenant exclusivement à l'Etat, mais aussi des sociétés dont une partie du capital est demeurée la propriété d'actionnaires privés.

La démocratisation du secteur public sera ainsi étendue :

- à la Société nationale Elf-Aquitaine et à Air Inter (annexe I rattachée au paragraphe 2 de l'article 1er),

- aux sociétés d'économie mixte ou sociétés anonymes dans lesquelles l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social (art. 1er, paragraphe 3),

- aux sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue directement ou indirectement, depuis plus de six mois, à lui seul par l'un des établissements ou sociétés mentionnés à l'article 1er, et dont le nombre des salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200 (art. 1er, paragraphe 4),

- enfin aux autres sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue directement ou indirectement depuis plus de six mois, conjointement par l'Etat, ses établissements publics ou les sociétés mentionnées au même article 1er, et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200 (art. 1er , paragraphe 5).

Ces sociétés seront ainsi soumises à des règles exorbitantes du droit des sociétés commerciales ou du droit du travail, qu'il s'agisse de la "démocratisation" des organes d'administration ou de surveillance ou qu'il s'agisse des droits nouveaux des salariés.

Pour les sénateurs soussignés, l'application de ces règles d'exception à des sociétés non nationalisées et comprenant encore des actionnaires privés constitue d'une part une atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre, d'autre part une atteinte au principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi garantie par la Constitution.

I. - Une atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre. Dans sa décision en date du 16 janvier 1982 sur la première loi de nationalisation, le Conseil constitutionnel a consacré la "pleine valeur constitutionnelle" du droit de propriété, tel qu'il a été proclamé par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dans ses articles II et XVII et réaffirmé à deux reprises par le peuple français lors des référendums constitutionnels du 13 octobre 1946 et du 28 septembre 1958. Le Conseil constitutionnel a par ailleurs considéré que " la liberté qui, aux termes de l'article IV de la Déclaration, consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, ne saurait elle-même être préservée si des restrictions arbitraires ou abusives étaient apportées à la liberté d'entreprendre ".

Or pour les sénateurs soussignés, les dispositions de la présente loi violent le droit de propriété comme la liberté d'entreprendre en ce qu'elles retirent, sans aucune indemnisation, aux actionnaires privés le droit de participer à la désignation de la totalité ou d'une partie des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance des sociétés concernées.

Dans les entreprises mentionnées au paragraphe 3 de l'article 1er et dont plus de 90 p. 100 du capital est détenu par des personnes morales de droit publie ou des sociétés mentionnées audit article, les actionnaires privés et d'une manière plus large l'assemblée générale ordinaire ou extraordinaire de la société seront tenus à l'écart de la désignation des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance.

Il résulte en effet des termes de l'article 5 de la loi que dans ces entreprises, le conseil d'administration ou le conseil de surveillance comprendra :

- des représentants de l'Etat et " le cas échéant " (sic) des actionnaires nommés par décret (art. 5, paragraphe 1er),

- des personnalités réputées compétentes ou qualifiées nommées par décret (art. 5, paragraphe 2),

- des représentants des salariés, élus par ces derniers, selon les conditions prévues au chapitre II du titre Ier de la loi (art. 5, paragraphe 3).

Bien que la Cour de cassation dans son arrêt du 7 avril 1932 ait affirmé, dès cette date, que le droit de vote est un attribut essentiel de l'action et bien que ce principe ait été confirmé par l'article 174 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, les administrateurs ou les membres du conseil de surveillance seront ainsi nommés soit par le Gouvernement, soit par les salariés, les actionnaires privés étant exclus de cette procédure de désignation. Les actions de ces derniers deviendront ainsi, par le seul fait de la loi qui vous est déférée, des actions sans droit de vote mais ne bénéficieront pas pour autant du dividende prioritaire prévu à l'article 177-1 de la loi du 24 juillet 1966 précitée, et cela sans que, de surcroît, leur propriétaire ait reçu la juste et préalable indemnité prévue à l'article XVII de la Déclaration des droits.

Pour les autres sociétés mentionnées à l'article 1er et non visées à l'article 5 susmentionné, les dispositions de l'article 6 prévoient que le conseil d'administration ou de surveillance comprendra des représentants des salariés et des représentants de l'assemblée générale des actionnaires conformément au droit des sociétés commerciales, " sous réserve, le cas échéant, des représentants de l'Etat qui sont nommés par décret ".

Quelle que soit son imprécision normative, cette " réserve " signifie que certains membres de l'organe d'administration ou de surveillance seront nommés non pas par l'assemblée générale de la·société mais directement par l'Etat, et d'ailleurs que ce dernier soit ou non actionnaire de la société. De même, les actionnaires privés seront tenus à l'écart de la désignation des représentants des salariés puisque ces derniers ne seront pas élus par l'assemblée générale mais par les salariés eux-mêmes.

De telles dispositions doivent être regardées comme portant atteinte au droit de propriété des actionnaires.

La propriété d'une action, à la différence des obligations, confère en effet à son titulaire le droit de participer à la vie de la société, principalement par la désignation ou la révocation de ses dirigeants. Or les actionnaires seront en quelque sorte " expropriés " de ce droit au profit du Gouvernement ou au profit des salariés. Il s'agit là d'une modification du contrat de société puisque ces actionnaires n'en seront pas moins appelés à contribuer, le cas échéant, aux pertes de la société et cela sans avoir pu exercer la moindre influence sur le choix des dirigeants sociaux.

En prévoyant la désignation des organes sociaux par l'Etat gui pourra, au surplus, choisir des personnes totalement extérieures à l'entreprise et leur donner ses directives qui, même si elles s'inspirent de préoccupations économiques ou financières s'inscrivant dans sa politique générale, peuvent être tout à fait étrangères à celles de la société et ne pas coïncider du tout avec l'intérêt de l'entreprise, la présente loi semble méconnaître le droit de propriété des actionnaires. Leurs prérogatives seront en effet profondément amoindries sans que leur ait été accordée la juste et préalable indemnité prévue par l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Pour être conforme à la Constitution, la loi aurait dû, à tout le moins, offrir aux actionnaires un droit de rachat de leurs actions, le prix de rachat étant fixé par expert.

Dans sa décision du 16 janvier 1982, le Conseil constitutionnel a par ailleurs estimé que la situation juridique des actionnaires minoritaires des filiales ne se trouvait pas modifiée par le seul fait de la nationalisation de la société mère, "en ce qui concerne leurs droits au regard du ou des actionnaires majoritaires ". Tel ne sera plus le cas si la loi relative à la démocratisation du secteur public doit s'étendre à certaines filiales des entreprises publiques.

Dans la mesure où leur droit de participer à la désignation des dirigeants sociaux sera soit diminué soit supprimé purement et simplement, la situation des actionnaires minoritaires - pour reprendre les termes mêmes de la décision susvisée - se trouvera modifiée en ce qui concerne leurs droits au regard du ou des actionnaires majoritaires, ce qui constitue par ailleurs une atteinte au principe de l'égalité devant la loi.

II. - L'atteinte au principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi.

L'égalité de tous les citoyens devant la loi a été consacrée par l'article VI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : " La loi est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ". Ce principe a été confirmé par l'article 2 de la Constitution de 1958, lequel dispose que " La France assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens ... "

C'est à plusieurs reprises que le Conseil constitutionnel a reconnu la valeur constitutionnelle du principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi. Le Conseil constitutionnel a même précisé la portée de ce principe en considérant qu'il " ne fait pas obstacle à ce qu'une loi établisse des règles non identiques à l'égard de catégories de personnes se trouvant dans des situations différentes ", mais il ne peut en être ainsi que " lorsque cette non-identité est justifiée par la différence de situation et n'est pas incompatible avec la finalité de la loi " (décision du 16 janvier 1982).

Compte tenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, les sénateurs soussignés estiment que la détermination du champ d'application des dispositions prévues par la présente loi est en contradiction avec le principe de l'égalité de tous devant la loi, qu'il s'agisse des actionnaires ou qu'il s'agisse des salariés.

L'atteinte à l'égalité concerne tout d'abord les actionnaires privés des filiales visées à l'article 1er de la loi.

Ces actionnaires devraient en effet supporter une diminution grave de leurs prérogatives au sein de l'assemblée générale, alors même que les filiales du secteur public n'ont pas été nationalisées et alors qu'elles sont par ailleurs soumises à un régime juridique strictement identique à celui de toutes les autres sociétés commerciales dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200.

Cette discrimination, mieux cette inégalité entre actionnaires, se retrouve même à l'intérieur de la société, car l'Etat qui contrôle directement ou indirectement les sociétés visées s'arroge une situation privilégiée en se réservant la possibilité de désigner, et donc de révoquer, par décret, et par conséquent sans même que l'assemblée générale ait à en connaître, la totalité ou une partie des dirigeants sociaux.

Lors des débats parlementaires, le Gouvernement a pu certes faire observer que cette discrimination trouvait sa justification dans l'appartenance des sociétés concernées au secteur public national. Cet argument ne saurait être retenu puisque la loi exclut totalement de son champ d'application un grand nombre d'entreprises publiques, notamment les établissements publics industriels et commerciaux de l'Etat dont le personnel est soumis à un régime de droit public, ainsi que les filiales de ces établissements.

La loi exclut en outre du champ d'application de ses dispositions relatives à la composition des organes d'administration ou de surveillance et à la désignation de leurs membres les établissements et les entreprises publics mentionnés à l'annexe III rattachée à l'article 4. Or ces exclusions, totales ou partielles, ne reposent sur aucune justification et sont même incompatibles avec la finalité de la loi qui est de parvenir à la démocratisation des relations du travail au sein du secteur public national.

A cet égard, on ne comprend pas pourquoi l'Assemblée nationale, lors de la deuxième lecture, a cru pouvoir ajouter la Société Matra et ses filiales. La Société Matra, dont l'Etat possède 51 p. 100 du capital, sera ainsi la seule société détenue majoritairement par l'Etat à être exclue du champ d'application du titre Il de la loi que les sénateurs soussignés défèrent au Conseil. Cette exclusion constitue une violation supplémentaire du principe d'égalité devant la loi.

Mais la discrimination qui résulte de la détermination du champ d'application de la loi frappe également les salariés.

Seront en effet exclus non seulement les salariés du secteur privé, mais encore les salariés des entreprises publiques qui ne sont pas mentionnées à l'article 1er de la loi ou qui sont écartées de son champ·d'application par d'autres de ses dispositions.

C'est précisément pour éviter une telle discrimination que le Sénat, lors de la première lecture, a prévu la participation des salariés au conseil de surveillance de l'ensemble des sociétés commerciales comptant plus de cinq cents salariés. L'Assemblée nationale a cru devoir rejeter une telle innovation qui présentait pourtant au moins l'avantage d'instituer "un critère objectif" aux lieu et place de "l'énumération arbitraire " prévue à l'article 1er de la loi.

Telles sont les raisons pour lesquelles les sénateurs soussignés considèrent que les dispositions ci-dessus évoquées méconnaissent le principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi.

Cette double atteinte au droit de propriété et au principe de l'égalité de tous devant la loi est d'autant moins admissible que les conditions des transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé n'ont toujours pas été soumises par le Gouvernement aux délibérations du Parlement et que, de ce fait, un certain nombre des filiales des sociétés nationalisées par la loi du 11 février 1982 sont encore momentanément dans le secteur public.

Le premier projet de loi de nationalisation comportait en effet une disposition, l'article 33, faisant obligation à la Compagnie financière de Paris et des Pays-Bas, à la Compagnie financière de Suez ainsi qu'à leurs filiales, de restituer, dans le délai d'un an, au secteur privé les participations par elles possédées dans des sociétés dont l'activité ne s'exerce pas dans le domaine bancaire ou n'est pas nécessairement liée à des entreprises du secteur public tel qu'il était élargi par ladite loi.

Cette disposition concrétisait ainsi l'engagement qui avait été pris par M. le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale devant le Parlement, le 8 juillet 1981 :

"Il n'y aura pas de nationalisation indue de l'économie : les participations détenues par les groupes bancaires, ainsi nationalisés, dans des entreprises situées hors du champ du secteur public élargi tel que le définit le Président de la République, seront rendues au secteur privé. Cela s'applique notamment aux participations industrielles multiples détenues en dehors des onze groupes nationalisables par la Compagnie financière de Suez et la Compagnie financière de Paris et des Pays-Bas. Ici encore nous ferons pendant la législature ce que nous avons annoncé, rien de plus, rien de moins, c'est notre engagement..."

Cela n'a pas empêché l'Assemblée nationale de supprimer l'article 33, peut-être pour des motifs d'ordre pratique, mais surtout parce qu'il présentait le défaut majeur de ne pas respecter les termes de l'article 34 de la Constitution, lequel réserve à la loi le soin de fixer 1es règles concernant les transferts de propriétés d'entreprises du secteur public au secteur privé. A cette occasion, le Gouvernement réitérait d'ailleurs son engagement de restituer au secteur privé les participations qui n'étaient pas nécessaires à la nation et cela dans le strict respect de l'article 34 de la Constitution.

C'est pourquoi le Gouvernement a finalement déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, le 28 octobre 1982, le projet de loi qu'il s'était d'ailleurs engagé à déposer dès l'ouverture de la session parlementaire, le 2 avril 1982, définissant les règles des transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé. Force est de constater que ce texte n'a toujours pas été inscrit par le Gouvernement à l'ordre du jour prioritaire des travaux du Parlement, en dépit de l'urgence qu'il affecte encore aujourd'hui de lui attacher.

Il résulte de tout cela que la loi relative à la démocratisation du secteur public s'appliquera de surcroît à des filiales dont le Gouvernement sait déjà qu'elles devront être rendues au secteur privé. On ne voit vraiment pas, dès lors, pour quelle raison ces entreprises devraient être régies par des dispositions dérogatoires au droit commun des sociétés commerciales et qui portent atteinte aux prérogatives normales de leurs actionnaires.

Dans ces conditions, l'appartenance au secteur public de certaines filiales ne saurait constituer non plus un critère de nature à justifier la privation du droit de vote des actionnaires pour la désignation et la révocation des dirigeants sociaux pas plus que la discrimination entre ces actionnaires et ceux des autres sociétés commerciales, telle que cette privation et cette discrimination résultent de la loi qui est déférée au Conseil.

C'est donc parce que cette loi méconnaît le droit de propriété et le principe de l'égalité de tous devant la loi, c'est parce qu'elle ne limite pas son champ d'application aux établissements publics et aux seules sociétés commerciales dont l'Etat détient directement ou indirectement la totalité du capital, c'est en raison de l'ensemble des moyens ci-dessus invoqués et, pour tous autres qu'il plaira au Conseil de retenir que les sénateurs soussignés sollicitent du Conseil constitutionnel qu'il déclare non conformes à la Constitution :

A titre principal :

1. Dans l'annexe I rattachée au paragraphe 2 de l'article 1er, les alinéas "Société nationale Elf·Aquitaine" et "Air Inter" ;

2. Dans le paragraphe 3 de l'article 1er, les mots : " sociétés d'économie mixte ou sociétés anonymes dans lesquelles l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social " ;

3. Les paragraphes 4 et 5 de l'article 1er ;

4. Le dernier alinéa de l'article 4 et l'annexe III rattachée audit article ;

5. Dans l'article 5, les mots : " dont plus de 90 p. 100 du capital est détenu par des personnes morales de droit public ou par des sociétés mentionnées à l'article 1er , ainsi que dans les sociétés centrales de groupes d'entreprises nationales d'assurance ... ".

Subsidiairement et par voie de conséquence :

Toutes les autres dispositions de la loi qui découlent de celles qui précèdent ou se rattachent à elles.


Références :

DC du 20 juillet 1983 sur le site internet du Conseil constitutionnel

Texte attaqué : Loi relative à la démocratisation du secteur public (Nature : Loi ordinaire, Loi organique, Traité ou Réglement des Assemblées)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°83-162 DC du 20 juillet 1983
Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:1983:83.162.DC
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award