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23/01/1987 | FRANCE | N°86-224

France | France, Conseil constitutionnel, 23 janvier 1987, 86-224


Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 24 décembre 1986, par MM. Pierre Joxe, Lionel Jospin, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Christian Goux, Jean-Pierre Michel, Henri Fiszbin, Alain Richard, Jean-Claude Chupin, Olivier Stirn, Mme Gisèle Stiévenard, MM. André Clert, François Loncle, Pierre Ortet, André Billardon, Charles Pistre, Robert Le Foll, Edmond Hervé, Augustin Bonrepaux, Joseph Menga, Mme Jacqueline Osselin, M Georges Le Baill, Mme Marie-France Lecuir, MM. Jean-Hugues Colonna, Jacques Santrot, Mme Odile Sicard, MM. Jean-Claude Portheault, Jean-Paul Durieux, Jean-Michel Bouchero

n (Charente), Louis Darinot, Pierre Garmendia, Jean-Mich...

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 24 décembre 1986, par MM. Pierre Joxe, Lionel Jospin, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Christian Goux, Jean-Pierre Michel, Henri Fiszbin, Alain Richard, Jean-Claude Chupin, Olivier Stirn, Mme Gisèle Stiévenard, MM. André Clert, François Loncle, Pierre Ortet, André Billardon, Charles Pistre, Robert Le Foll, Edmond Hervé, Augustin Bonrepaux, Joseph Menga, Mme Jacqueline Osselin, M Georges Le Baill, Mme Marie-France Lecuir, MM. Jean-Hugues Colonna, Jacques Santrot, Mme Odile Sicard, MM. Jean-Claude Portheault, Jean-Paul Durieux, Jean-Michel Boucheron (Charente), Louis Darinot, Pierre Garmendia, Jean-Michel Boucheron (Ille-et-Vilaine), Gérard Welzer, Claude Bartolone, Philippe Puaud, Charles Metzinger, Bernard Derosier, André Ledran, Mme Catherine Lalumière, MM. Guy Malandain, Alain Barrau, Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Yvette Roudy, MM. Jean-Jack Queyranne, Jean Auroux, Nicolas Alfonsi, Jean Anciant, Pierre Bérégovoy, Alain Calmat, Jean-Claude Cassaing, Guy Chanfrault, Daniel Chevallier, Jean-Pierre Chevènement, Michel Coffineau, Michel Crépeau, Gérard Fuchs, Michel Sapin, Jean-Pierre Fourré, Roland Florian, Job Durupt, Jean-Claude Dessein, Mme Marie Jacq, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du conseil de la concurrence.

Le Conseil constitutionnel,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment les articles figurant au chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'en application de l'article 38 de la Constitution la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986, publiée au Journal officiel du 3 juillet 1986, a autorisé le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnances diverses mesures d'ordre économique et social ; que cette autorisation était donnée pour une durée de six mois à compter de la publication de la loi ; que le projet de loi portant ratification des ordonnances devait être déposé devant le Parlement au plus tard le 31 décembre 1986 ;

2. Considérant que, sur le fondement de ladite loi, sont intervenues diverses ordonnances, notamment l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ; que, le 21 décembre 1986, le Gouvernement a déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale un projet de loi portant ratification de huit ordonnances dont celle du 1er décembre 1986 ; qu'à ce jour le Parlement n'a pas statué sur ce projet de loi ;

3. Considérant que l'ordonnance du 1er décembre 1986 crée un conseil de la concurrence ; qu'au nombre des attributions dudit conseil figure le pouvoir de prendre deux sortes de mesures à l'encontre des entreprises ou des personnes auxquelles seraient reprochées des pratiques anticoncurrentielles ;

4. Considérant en premier lieu que l'article 12 de l'ordonnance dispose que le conseil de la concurrence peut prendre des mesures conservatoires pouvant comporter une suspension de la pratique concernée ainsi que l'injonction aux intéressés de revenir à l'état antérieur ; que le quatrième alinéa de l'article 12 prévoit que ces mesures "peuvent faire l'objet d'un recours en référé devant le président de la section du contentieux du Conseil d'État" ;

5. Considérant en second lieu que l'article 13 de l'ordonnance confère au conseil de la concurrence le pouvoir d'ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou d'imposer des conditions particulières ainsi que celui d'infliger des sanctions pécuniaires applicables soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions ; que le montant maximum de ces sanctions pécuniaires est de 5 % du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos ou, si le contrevenant n'est pas une entreprise, de 10 millions de francs ; que l'article 14 dispose que, en outre, de telles sanctions pécuniaires peuvent être prises si les mesures et injonctions prévues aux articles 12 et 13 ne sont pas respectées ;

6. Considérant que l'article 15 de l'ordonnance dispose : "Les décisions du conseil de la concurrence sont communiquées aux intéressés et au ministre chargé de l'économie qui peuvent, dans les deux mois, former un recours de pleine juridiction devant le Conseil d'État.- Les décisions sont publiées au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Le ministre chargé de l'économie veille à leur exécution.- Le recours n'est pas suspensif." ;

7. Considérant que les députés auteurs de la saisine défèrent au Conseil constitutionnel la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du conseil de la concurrence, définitivement votée le 20 décembre 1986 ;

8. Considérant que ladite loi dispose : "Article 1er.- Le quatrième alinéa de l'article 12 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrece est ainsi rédigé : "La décision du conseil peut faire l'objet d'un recours, dans les dix jours suivant sa notification, devant la cour d'appel de Paris qui statue dans les quinze jours de sa saisine".- Article 2.- Le premier alinéa de l'article 15 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 précitée est ainsi rédigé : "Les décisions du conseil de la concurrence sont notifiées aux intéressés et au ministre chargé de l'économie qui peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la cour d'appel de Paris" ;

9. Considérant que les députés auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Constitution de la loi précitée, notamment en tant qu'elle transfère à une juridiction de l'ordre judiciaire la mission de statuer sur les recours formés contre les décisions du conseil de la concurrence ;

10. Considérant que les auteurs de la saisine font en outre valoir que, en modifiant certains articles de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les dispositions de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel impliquent ratification législative des autres articles de l'ordonnance et qu'il appartient dès lors au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Constitution des mesures ainsi ratifiées ;

11. Considérant ainsi qu'il convient pour le Conseil d'examiner, en premier lieu, la conformité à la Constitution de la procédure législative ayant abouti à la loi qui lui est déférée, en second lieu, la conformité à la Constitution des dispositions transférant à la cour d'appel de Paris le contrôle des décisions du conseil de la concurrence, enfin l'existence et, le cas échéant, la conformité à la Constitution de la ratification implicite par le législateur de tout ou partie des dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

- SUR LA PROCEDURE LEGISLATIVE :

12. Considérant que la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel modifie les articles 12 et 15 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prise, dans le cadre de l'article 38 de la Constitution, en vertu de la loi du 2 juillet 1986, alors que cette dernière loi accordait au Gouvernement l'autorisation de statuer par voie d'ordonnances jusqu'à une date postérieure à celle à laquelle la loi présentement examinée a été votée ;

13. Considérant que l'article 41 de la Constitution dispose : "S'il apparaît au cours de la procédure législative qu'une proposition ou un amendement n'est pas du domaine de la loi ou est contraire à une délégation accordée en vertu de l'article 38, le Gouvernement peut opposer l'irrecevabilité.- En cas de désaccord entre le Gouvernement et le Président de l'assemblée intéressée, le Conseil constitutionnel, à la demande de l'un ou de l'autre, statue dans un délai de huit jours" ;

14. Considérant qu'au cours de la discussion devant le Parlement de la proposition de loi qui est à l'origine de la loi présentement examinée, le Gouvernement n'a opposé aucune irrecevabilité comme il aurait eu la faculté de le faire ; qu'ainsi la procédure législative suivie n'a comporté aucune méconnaissance de la Constitution ;

- SUR LE TRANSFERT A LA JURIDICTION JUDICIAIRE DU CONTROLE DES DECISIONS DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE :

15. Considérant que les dispositions des articles 10 et 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III qui ont posé dans sa généralité le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires n'ont pas en elles-mêmes valeur constitutionnelle ; que, néanmoins, conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des "principes fondamentaux reconnus par les lois de la République" celui selon lequel, à l'exception des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l'annulation ou la réformation des décisions prises, dans l'exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle ;

16. Considérant cependant que, dans la mise en oeuvre de ce principe, lorsque l'application d'une législation ou d'une réglementation spécifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se répartiraient, selon les règles habituelles de compétence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au législateur, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'unifier les règles de compétence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intéressé ;

17. Considérant que, si le conseil de la concurrence, organisme administratif, est appelé à jouer un rôle important dans l'application de certaines règles relatives au droit de la concurrence, il n'en demeure pas moins que le juge pénal participe également à la répression des pratiques anticoncurrentielles sans préjudice de celle d'autres infractions intéressant le droit de la concurrence ; qu'à des titres divers le juge civil ou commercial est appelé à connaître d'actions en responsabilité ou en nullité fondées sur le droit de la concurrence ; que la loi présentement examinée tend à unifier sous l'autorité de la cour de cassation l'ensemble de ce contentieux spécifique et ainsi à éviter ou à supprimer des divergences qui pourraient apparaître dans l'application et dans l'interprétation du droit de la concurrence ;

18. Considérant dès lors que cet aménagement précis et limité des règles de compétence juridictionnelle, justifié par les nécessités d'une bonne administration de la justice, ne méconnaît pas le principe fondamental ci-dessus analysé tel qu'il est reconnu par les lois de la République ;

19. Mais considérant que la loi déférée au Conseil constitutionnel a pour effet de priver les justiciables d'une des garanties essentielles à leur défense ;

20. Considérant en effet que le troisième alinéa de l'article 15 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dispose que le recours formé contre une décision du conseil de la concurrence "n'est pas suspensif" ; que cette disposition n'aurait pas fait obstacle à ce que, conformément à l'article 48 de l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945 et au décret n° 63-766 du 30 juillet 1963, le Conseil d'État pût, à la demande du requérant, accorder un sursis à l'exécution de la décision attaquée si son exécution risquait d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissaient sérieux et de nature à justifier l'annulation de la décision attaquée ;

21. Considérant au contraire, que la cour d'appel de Paris, substituée par la loi présentement examinée au Conseil d'État, saisie d'un recours contre une décision du conseil de la concurrence, ne pourrait prononcer aucune mesure de sursis à exécution ; qu'en effet, la loi a laissé subsister dans son intégralité le troisième alinéa de l'article 15 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et n'a pas donné à la cour d'appel le pouvoir de différer l'exécution d'une décision de caractère non juridictionnel frappée d'un recours auquel est dénié tout effet suspensif, et ceci quelle que soit la gravité des conséquences de l'exécution de la décision et le sérieux des moyens invoqués contre celle-ci ;

22. Considérant que, compte tenu de la nature non juridictionnelle du conseil de la concurrence, de l'étendue des injonctions et de la gravité des sanctions pécuniaires qu'il peut prononcer, le droit pour le justiciable formant un recours contre une décision de cet organisme de demander et d'obtenir, le cas échéant, un sursis à l'exécution de la décision attaquée constitue une garantie essentielle des droits de la défense ;

23. Considérant dès lors que les dispositions de l'article 2 de la loi présentement examinée ne sont pas conformes à la Constitution ; que, les dispositions de l'article 1er n'en étant pas séparables, la loi doit, dans son ensemble, être regardée comme non conforme à la Constitution ;

- SUR LES DISPOSITIONS DE L'ORDONNANCE DU 1er DECEMBRE 1986 :

24. Considérant qu'en principe il n'est pas exclu que la ratification de tout ou partie des dispositions d'une des ordonnances visées à l'article 38 de la Constitution puisse résulter d'une loi qui, sans avoir cette ratification pour objet direct, l'implique nécessairement ; que, saisi d'une loi de cette nature, il appartiendrait au Conseil constitutionnel de dire si la loi comporte effectivement ratification de tout ou partie des dispositions de l'ordonnance en cause et, dans l'affirmative, si les dispositions auxquelles la ratification confère valeur législative sont conformes à la Constitution ;

25. Mais, considérant en l'espèce que la déclaration de non conformité à la Constitution qui doit, pour les raisons sus-énoncées, être prononcée à l'encontre de la loi présentement examinée prive celle-ci d'effet ; que, dès lors, en tout état de cause, l'ordonnance du 1er décembre 1986 est et demeure dans sa totalité, jusqu'à l'intervention d'une loi la ratifiant, un texte de valeur réglementaire dont la régularité juridique ne peut être appréciée par le Conseil constitutionnel ;

Décide :
Article premier :
La loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du conseil de la concurrence est contraire à la Constitution.
Article 2 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.


Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence
Sens de l'arrêt : Non conformité totale
Type d'affaire : Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Saisine

Monsieur le président, Messieurs les conseillers,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, nous avons l'honneur de déférer au Conseil constitutionnel la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du conseil de la concurrence telle qu'elle a été adoptée définitivement par le Parlement.

I : Cette loi modifie le premier alinéa de l'article 15 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence et elle a pour objet de créer au profit du juge judiciaire un bloc de compétence nouveau.

En elle-même, cette mesure suscite des interrogations quant à la constitutionnalité d'un tel transfert. Mais il est par ailleurs à noter qu'elle attribue directement compétence à la cour d'appel de Paris. Or à supposer que le législateur puisse retirer aux décisions du conseil de la concurrence le caractère d'actes administratifs, en les faisant relever du contrôle du juge judiciaire, cela ne ferait pas pour autant du conseil une juridiction. Et dès lors qu'il ne semble pas s'agir d'une juridiction, la question peut se poser de savoir si ses décisions peuvent relever du contrôle direct de la cour d'appel.

II. : Si cette loi a pour objet de créer un bloc de compétence juridictionnelle, elle a également pour effet de ratifier implicitement les autres dispositions de l'ordonnance concernée.

Que soit possible la ratification implicite d'une ordonnance prise en vertu de l'article 38 de la Constitution, c'est ce que le Conseil constitutionnel a formellement consacré dans sa décision n° 72-73 L du 29 février 1972.

L'ordonnance concernée demeure jusqu'à sa ratification un acte de forme réglementaire, susceptible à ce titre de recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative. Mais dès lors que la ratification est acquise, l'ordonnance acquiert valeur législative, ne peut plus être modifiée que par une loi et, en conséquence, échappe au contrôle du juge de l'excès de pouvoir.

S'il est vrai que le Conseil d'Etat a, depuis plusieurs années, une jurisprudence plus sévère à l'égard des validations législatives (CE 28 mai 1971, Barrat et autres, Rec. p 387), il reste dans l'évidente obligation, dès lors qu'une ordonnance prise en vertu de l'article 38 a été ratifiée explicitement ou implicitement, d'en considérer les dispositions comme échappant à sa juridiction (CE 10 juillet 1972, Compagnie Air Inter, Rec. p 537).

En l'espèce, il ne fait aucun doute que l'adoption de la loi déférée a pour effet de ratifier implicitement l'ordonnance qu'elle modifie. D'une part, rien n'interdit qu'une telle ratification intervienne avant l'expiration du délai d'habilitation, surtout lorsque cette ratification est faite avec l'accord du Gouvernement comme en témoigne ici l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour prioritaire. D'autre part, il est de jurisprudence constante que la modification d'un article d'une ordonnance emporte implicitement ratification des autres (CE 10 juillet 1972, précité).

Dans ces conditions, dès la promulgation de la loi déférée, aucun recours pour excès de pouvoir ne sera plus possible contre l'ordonnance du 1er décembre 1986. De ce fait, soit un recours a déjà été déposé et le Conseil d'Etat jugera qu'il n'y a plus lieu à statuer, soit un recours est déposé dans les semaines qui viennent (le délai de recours contentieux expirant au début février 1987) et il sera jugé irrecevable.

Ainsi, quand bien même telle ou telle disposition de cette ordonnance apparaîtrait comme contraire à la Constitution, il ne serait plus au pouvoir d'aucun juge de l'en sanctionner.

En revanche, il semble que le Conseil constitutionnel puisse être appelé à cette occasion à se prononcer sur la conformité d'une ordonnance à la Constitution.

En effet, qu'elle soit explicite ou implicite, ne serait pas conforme à la Constitution la ratification d'une ordonnance contenant elle-même des dispositions contraires à la norme suprême.

La compétence du Conseil constitutionnel pour apprécier, à l'occasion de sa ratification, même implicite, la constitutionnalité d'une ordonnance peut seule éviter que les ordonnances implicitement ratifiées se trouvent être l'unique catégorie d'acte affranchie de tout contrôle constitutionnel.

Aussi appartient-il au Conseil constitutionnel, conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de vérifier la conformité à celle-ci de la ratification implicitement opérée par la loi déférée et, partant, de vérifier la conformité à la Constitution de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence.

C'est pour l'ensemble de ces raisons que les députés soussignés ont l'honneur de vous demander, en application du deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, d'examiner la conformité à celle-ci de la loi qui vous est déférée.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le président, Messieurs les conseillers, l'expression de notre haute considération.


Références :

DC du 23 janvier 1987 sur le site internet du Conseil constitutionnel

Texte attaqué : Loi ordinaire, Loi organique, Traité ou Réglement des Assemblées (type)


Publications
Proposition de citation: Cons. Const., décision n°86-224 DC du 23 janvier 1987

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Origine de la décision
Date de la décision : 23/01/1987
Date de l'import : 02/11/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro de décision : 86-224
Numéro NOR : CONSTEXT000017667494 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.constitutionnel;dc;1987-01-23;86.224 ?
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