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30/12/1996 | FRANCE | N°96-386

France | France, Conseil constitutionnel, 30 décembre 1996, 96-386


Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 20 décembre 1996, par MM Jean-Louis Beaumont, Léon Aimé, Jean-Marie André, Pierre Bachelet, Gilbert Barbier, Alain Barrès, Jean Bégault, Didier Béguin, Jean-Louis Bernard, Pierre Bernard, Léon Bertrand, Raoul Béteille, Yves Bonnet, Lucien Brenot, Jean Briane, Jean-Marc Chartoire, Georges Chavanes, Daniel Colin, Raymond Couderc, André Damien, Xavier Deniau, Jean-Jacques Descamps, Laurent Dominati, Georges Durand, Gilbert Gantier, René Garrec, Claude Gatignol, Georges Gorse, Mme Marie-Fanny Gournay, MM Alain Griotteray, François d'Harcourt

, Pierre Hellier, Amédée Imbert, Mme Bernadette Isaac-Sibille...

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 20 décembre 1996, par MM Jean-Louis Beaumont, Léon Aimé, Jean-Marie André, Pierre Bachelet, Gilbert Barbier, Alain Barrès, Jean Bégault, Didier Béguin, Jean-Louis Bernard, Pierre Bernard, Léon Bertrand, Raoul Béteille, Yves Bonnet, Lucien Brenot, Jean Briane, Jean-Marc Chartoire, Georges Chavanes, Daniel Colin, Raymond Couderc, André Damien, Xavier Deniau, Jean-Jacques Descamps, Laurent Dominati, Georges Durand, Gilbert Gantier, René Garrec, Claude Gatignol, Georges Gorse, Mme Marie-Fanny Gournay, MM Alain Griotteray, François d'Harcourt, Pierre Hellier, Amédée Imbert, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM Yvon Jacob, Gérard Jeffray, Didier Julia, Gabriel Kaspereit, Roger Lestas, Alain Levoyer, Christian Martin, Pierre Micaux, Mme Louise Moreau, MM Georges Mesmin, Jean-Marc Nesme, Hervé Novelli, Jean-Pierre Pont, Bruno Retailleau, Pierre Quillet, Georges Richard, Jean Rigaud, Yves Rousset-Rouard, Jean Royer, Guy Teissier, Christian Vanneste, le 23 décembre 1996, par MM Jacques Baumel, Renaud Dutreil, Jacques Féron, Jean-Louis Masson et le 24 décembre 1996 par MM Jean-Jacques Guillet et Charles de Courson, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi de finances rectificative pour 1996 ;

Le Conseil constitutionnel,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 modifiée portant loi organique relative aux lois de finances ;
Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code de la mutualité ;
Vu les observations présentées par le Gouvernement, enregistrées le 24 décembre 1996 ;
Vu les observations de M Beaumont enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 27 décembre 1996 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 61 de la Constitution : " Les lois organiques, avant leur promulgation, et les règlements des assemblées parlementaires avant leur mise en application, doivent être soumis au Conseil constitutionnel qui se prononce sur leur conformité à la Constitution.
Aux mêmes fins, les lois peuvent être déférées au Conseil constitutionnel, avant leur promulgation, par le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat ou soixante députés ou soixante sénateurs..." ; que l'article 18 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel précise que : "Lorsqu'une loi est déférée au Conseil constitutionnel à l'initiative de parlementaires, le Conseil est saisi par une ou plusieurs lettres comportant au total les signatures d'au moins soixante députés ou soixante sénateurs." ;
2. Considérant qu'en vertu de cette dernière disposition, il incombe aux auteurs des saisines de permettre, par une signature manuscrite, l'authentification des requêtes qu'ils entendent adresser au Conseil constitutionnel ; que celui-ci a effectivement été saisi en l'espèce par soixante et une requêtes émanant de députés et portant une signature manuscrite ayant permis leur authentification ;
3. Considérant que plusieurs députés ont, par courrier adressé au Conseil constitutionnel, déclaré soit qu'ils avaient signé "par erreur" le document émanant d'eux, soit qu'ils entendaient "retirer" leur signature ou ne plus figurer sur la liste des signataires ;
4. Considérant toutefois qu'en vertu des dispositions précitées de la Constitution et de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée, la saisine du Conseil constitutionnel par les membres du Parlement résulte indivisiblement d'une ou plusieurs lettres signées par au moins soixante députés ou soixante sénateurs ; que l'effet de cette saisine est de mettre en oeuvre, avant la clôture de la procédure législative, la vérification par le Conseil constitutionnel de toutes les dispositions de la loi déférée y compris de celles qui n'ont fait l'objet d'aucune critique de la part des auteurs de la saisine ; qu'aucune disposition de la Constitution non plus que de la loi organique relative au Conseil constitutionnel ne permet aux autorités ou parlementaires habilités à déférer une loi au Conseil constitutionnel de le dessaisir en faisant obstacle à la mise en oeuvre du contrôle de constitutionnalité engagé ; que dès lors, hormis les cas d'erreur matérielle, de fraude ou de vice du consentement, le Conseil constitutionnel ne saurait prendre en compte des déclarations exprimées en ce sens ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le consentement des députés concernés ait été vicié ou que ces derniers aient commis une erreur matérielle en saisissant le Conseil constitutionnel ; qu'ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, les signatures de ces soixante et un députés ont pu être authentifiées ;
6. Considérant que dès lors il incombe au Conseil constitutionnel d'assurer le contrôle de constitutionnalité dont l'exercice lui est confié par la Constitution ;
7. Considérant que les députés auteurs de la saisine défèrent au Conseil constitutionnel la loi de finances rectificative pour 1996 en contestant en particulier la conformité de l'article 14 de la loi à la Constitution ;
- SUR L'ARTICLE 14 DE LA LOI :
8. Considérant que l'article 14 de la loi déférée insère après l'article L. 253 quinquies du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, un article L. 253 sexies aux termes duquel : "Ont vocation à la qualité de combattant dans les conditions prévues à l'article R. 227 les Français ayant pris une part effective à des combats aux côtés de l'armée républicaine espagnole entre le 17 juillet 1936 et le 27 février 1939." ;
9. Considérant que les auteurs de la saisine soutiennent en premier lieu que le contenu de l'article 14, qui résulte de l'adoption par le Parlement d'un amendement présenté par le gouvernement, est étranger au domaine des lois de finances ; qu'ils font valoir en second lieu qu'il existerait une tradition législative en application de laquelle seuls des combattants appartenant à des troupes françaises et ayant combattu dans des opérations décidées par le gouvernement français pourraient se voir attribuer la carte du combattant ; que de celle-ci procéderait un principe fondamental reconnu par les lois de la République lequel aurait été violé en l'espèce ;
10. Considérant, en premier lieu, que d'une part il résulte des dispositions des articles L. 253 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que des droits et avantages sont attachés à la qualité d'ancien combattant ; qu'en particulier, il est institué au bénéfice des titulaires de la carte du combattant une retraite annuelle attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 du même code ; que d'autre part en application du code de la mutualité, les titulaires de la carte du combattant peuvent bénéficier d'une rente mutualiste majorée par l'État ; qu'enfin en application de l'article 195 du code général des impôts, les contribuables célibataires, divorcés ou veufs n'ayant pas d'enfant à leur charge, âgés de plus de soixante-quinze ans et titulaires de la carte du combattant, ont droit à une demi-part supplémentaire pour le calcul de l'impôt sur le revenu, et les contribuables mariés bénéficient par ailleurs d'une demi-part supplémentaire de quotient familial en application du même article lorsque l'un des conjoints est âgé de plus de soixante-quinze ans et est titulaire de la carte du combattant ;
11. Considérant que dès lors l'article critiqué a une incidence directe sur les charges de l'État et entre ainsi dans le champ des dispositions de l'article premier de l'ordonnance organique susvisée du 2 janvier 1959 ;
12. Considérant en second lieu que si la carte du combattant a été créée par l'article 101 de la loi du 19 décembre 1926 portant fixation du budget général de l'exercice de 1927, cette disposition se bornait à en accorder le bénéfice aux personnes ayant le droit de recourir à l'aide de l'office national du combattant en renvoyant à un règlement d'administration publique le soin de fixer les conditions d'attribution de cette carte ; que le décret du 28 juin 1927 fixant les attributions et le fonctionnement de l'office national des combattants, pris en application de la loi précitée, a précisé les conditions d'attribution de la carte du combattant ; que dès lors les requérants ne sont pas fondés à invoquer cette disposition législative ;
13. Considérant qu'en permettant à des Français ayant participé à des combats aux côtés de l'armée républicaine espagnole entre le 17 juillet 1936 et le 27 février 1939 d'obtenir dans certaines conditions la carte du combattant, le législateur n'a méconnu aucun principe fondamental reconnu par les lois de la République ;
- SUR L'ARTICLE 55 DE LA LOI :
14. Considérant que l'article 55 de la loi soumise au Conseil constitutionnel modifie la rédaction de l'article L. 791-10 du code de la santé publique ; que cette disposition ouvre à l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé la faculté de recruter des agents contractuels de droit privé pour occuper des fonctions permanentes ou occasionnelles de caractère scientifique ou technique ; que cette disposition ne concerne pas la détermination des ressources et charges de l'État ; qu'elle n'a pas pour but d'organiser l'information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ou d'imposer aux agents des services publics des responsabilités pécuniaires ; qu'elle n'a pas davantage le caractère d'une disposition d'ordre fiscal ; qu'enfin elle n'entraîne ni création ni transformation d'emplois au sens du cinquième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée ; qu'ainsi l'article 55 est étranger à l'objet des lois de finances ; qu'il suit de là que cet article a été adopté selon une procédure contraire à la Constitution ;
- SUR L'ARTICLE 59 DE LA LOI :
15. Considérant que l'article 59 de la loi a pour objet de valider, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, la délibération n° 94-142 du 8 décembre 1994 de l'assemblée territoriale de la Polynésie française portant institution de la contribution de solidarité territoriale et les impositions perçues par le territoire de la Polynésie française en application de ladite délibération en tant que leur régularité serait mise en cause sur le fondement de cette dernière ;
16. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 74 de la Constitution : "Les statuts des territoires d'outre-mer sont fixés par des lois organiques qui définissent, notamment, les compétences de leurs institutions propres, et modifiés, dans la même forme, après consultation de l'assemblée territoriale intéressée." ;
17. Considérant que si le législateur avait la faculté, comme il est seul habilité à le faire, de valider sous réserve du respect des décisions de justice passées en force de chose jugée et de l'existence d'un but d'intérêt général, des dispositions prises par une autorité du territoire, il ne pouvait en tout état de cause, en application des dispositions précitées de la Constitution, le faire que par la voie d'une loi organique, s'agissant d'un régime d'impositions ressortissant à la compétence des autorités territoriales en application des articles 5 et 6 de la loi susvisée du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; que dès lors l'article 59 de la loi a été adopté selon une procédure contraire à la Constitution ;
18. Considérant qu'en l'espèce il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever d'office d'autres questions de conformité à la Constitution ;

Décide :
Article premier :
Les articles 55 et 59 de la loi de finances rectificative pour 1996 sont déclarés contraires à la Constitution.
Article 2 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 30 décembre 1996, où siégeaient : MM Roland DUMAS, président, Maurice FAURE, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Michel AMELLER, Jacques ROBERT, Alain LANCELOT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président, Roland DUMAS


Synthèse
Numéro de décision : 96-386
Date de la décision : 30/12/1996
Loi de finances rectificative pour 1996
Sens de l'arrêt : Non conformité partielle
Type d'affaire : Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Saisine

Observations du Gouvernement en réponse à la saisine du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 1996 par plus de soixante députés :

Le Conseil constitutionnel a été saisi d'un recours dirigé contre la loi de finances rectificative pour 1996, adoptée par le Parlement le 19 décembre 1996.

Les requérants ne critiquent que l'article 14, qui introduit, dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, un article L 253 sexies reconnaissant aux Français ayant participé aux combats au côté de l'armée républicaine espagnole vocation à obtenir la qualité de combattant au titre des dispositions de ce code. Ils font valoir, d'une part, que l'article 14 serait étranger au domaine des loi de finances, d'autre part, que cette disposition méconnaîtrait un principe fondamental reconnu par les lois de la République.

Cette saisine appelle, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.

I : En premier lieu, cette mesure relève bien du domaine des lois de finances.

Les différents avantages matériels liés à la détention de la carte du combattant ont en effet une incidence directe sur les ressources et les charges de l'Etat.

D'une part, cette carte se traduit par la possibilité de bénéficier d'une rente mutualiste majorée par l'Etat et, à partir de soixante-quinze ans, d'une demi-part supplémentaire pour le calcul de l'impôt sur le revenu en vertu du f du 1 de l'article 195 du code général des impôts.

D'autre part, et surtout, la carte du combattant donne droit à la retraite du combattant, calculée sur la base de 33 points d'indice de pension militaire d'invalidité, dont la valeur est fixée à compter du 1er janvier 1996 à 78,04 F, soit 2 575,32 F Cette mesure a donc nécessairement un coût budgétaire imputé sur le chapitre 46-21, article 10, du budget du ministère des anciens combattants.

On estime qu'un millier d'anciens combattants au maximum (sur les 8 000 à 12 000 qui prirent part aux combats) sont susceptibles de bénéficier de cette mesure ; son coût serait, dans cette hypothèse, de l'ordre de 2,5 MF par an. Une hypothèse plus basse conduit à tenir compte de ce qu'une majorité des bénéficiaires détiendrait déjà la carte à un autre titre. Le coût de la mesure pourrait alors être estimé à 0,5 MF si on évalue à 200 le nombre de demandes effectivement présentées.

II. : En second lieu, cette disposition ne méconnaît aucun principe qui s'imposerait au législateur.

Les auteurs de la saisine entendent dégager de la loi du 19 décembre 1926 un principe selon lequel l'attribution de la carte du combattant serait réservée à ceux ayant appartenu à des troupes françaises ou ayant combattu dans des opérations décidées par le Gouvernement français.

Il est clair qu'un tel principe ne saurait se voir reconnaître une valeur constitutionnelle.

Seuls, en effet, peuvent être considérés comme principes fondamentaux reconnus par les lois de la République des principes essentiels posés par le législateur républicain, touchant à l'exercice des droits et libertés et qui ont reçu application avec une constance suffisante dans la législation antérieure à la Constitution du 27 octobre 1946.

Tel n'est pas le cas en l'espèce. Le principe en cause ne touche ni à un droit ni à une liberté mais à une reconnaissance de la Nation accordée à certains de ses membres. Il n'a pas fait l'objet d'une application constante avant 1946 puisque l'article 1er de l'actuel code des pensions militaires, qui limite la reconnaissance de la Nation à ceux qui ont assuré le salut de la patrie, date de la loi n° 52-1313 du 11 décembre 1952. Quant à la loi de 1926, elle avait, en effet, dans son article 101, créé une carte du combattant. Mais elle se bornait à préciser que cet avantage serait attribué dans des conditions fixées par voie réglementaire à toutes les personnes ayant le droit de recourir à l'aide de l'Office national du combattant.

Elle n'énonçait nullement le principe que les requérants voudraient faire prévaloir.

Le Conseil constitutionnel ne pourra donc que constater qu'en prenant la mesure critiquée le législateur s'est borné à exercer le pouvoir d'appréciation qui lui appartient.

C'est pourquoi le Gouvernement demande au Conseil de rejeter le recours dont il est saisi.

SAISINE DEPUTES :

Monsieur le président, Madame et Messieurs les conseillers,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, nous avons l'honneur de déférer au Conseil constitutionnel, telle qu'elle a été adoptée par le Parlement, la loi de finances rectificative pour 1996 et tout particulièrement le nouvel article L 253 sexies du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, inséré dans ladite loi.

L'article susvisé a été adopté selon une procédure déjà censurée par votre haute juridiction et viole les règles de valeur constitutionnelle régissant la reconnaissance de la qualité de combattant : 1° Sur la procédure d'adoption

L'article L 253 sexies, adopté sur proposition du Gouvernement, précise qu'ont " vocation à la qualité de combattant, dans les conditions prévues à l'article R 227, les Français ayant pris une part effective à des combats aux côtés de l'armée républicaine espagnole entre le 17 juillet 1936 et le 27 février 1939 ".

L'adoption de cet amendement gouvernemental correspond de façon évidente à un " cavalier budgétaire ", c'est-à-dire à une adjonction à une loi financière sans rapport avec cette loi.

Il s'agit d'une violation caractérisée des articles 1er et 42 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, qui fait partie du bloc de constitutionnalité.

Le Conseil constitutionnel a déjà censuré cette pratique, notamment dans sa décision 94-351 DC du 29 décembre 1994.

2° Sur les règles régissant la reconnaissance de la qualité de combattant

L'attribution de la carte de combattant et de la croix du combattant résulte des dispositions des articles 111 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.

Ces dispositions s'appliquent aux combattants français des deux guerres mondiales et ont été étendues aux combattants d'Algérie et aux militaires qui ont participé à des opérations entreprises dans le cadre d'une action internationale par le Gouvernement français (Liban, guerre du Golfe).

Il s'agit de combattants appartenant à des troupes françaises et ayant combattu dans des opérations décidées par le Gouvernement français.

La rédaction de ces articles remontant à la loi du 19 décembre 1926, on peut considérer qu'il s'agit d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République, principe ayant une nature constitutionnelle au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

La violation de ce principe par une loi ordinaire constitue donc une violation des règles constitutionnelles.

Pour l'ensemble de ces raisons, les députés soussignés ont l'honneur de vous demander, en application du deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de déclarer non conforme à celle-ci l'article L 253 sexies du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, inséré dans la loi de finances rectificative pour 1996.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le président, Madame et Messieurs les conseillers, l'expression de notre haute considération.


Références :

DC du 30 décembre 1996 sur le site internet du Conseil constitutionnel
DC du 30 décembre 1996 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Loi de finances rectificative pour 1996 (Nature : Loi ordinaire, Loi organique, Traité ou Réglement des Assemblées)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°96-386 DC du 30 décembre 1996
Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:1996:96.386.DC
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