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27/01/2000 | FRANCE | N°2000-1

France | France, Conseil constitutionnel, 27 janvier 2000, 2000-1


Le Conseil constitutionnel a été saisi, par recours enregistré au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 7 janvier 2000, présenté par le président de la province des îles Loyauté, dans les conditions prévues à l'article 104 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, de la conformité à la Constitution de la loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution et notamment ses articles 76 et 77 ;

Vu la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires

et préparatoires à l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998 ;

Vu la...

Le Conseil constitutionnel a été saisi, par recours enregistré au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 7 janvier 2000, présenté par le président de la province des îles Loyauté, dans les conditions prévues à l'article 104 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, de la conformité à la Constitution de la loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution et notamment ses articles 76 et 77 ;

Vu la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998 ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu l'avis du Conseil d'Etat en date du 23 novembre 1999, transmis au Conseil constitutionnel en application de l'article 100 de la loi organique susvisée ;

Vu les observations, enregistrées comme ci-dessus le 14 janvier 2000, présentées par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

Vu les observations, enregistrées comme ci-dessus le 17 janvier 2000, présentées par le président de l'assemblée de la province Sud ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que, le 7 décembre 1999, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté une loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services ; qu'à la demande de quatorze membres du congrès, et conformément aux articles 103 et 104 de la loi organique susvisée, ce texte a fait l'objet d'une nouvelle délibération, intervenue le 28 décembre 1999 ; que l'auteur de la saisine critique exclusivement la procédure d'adoption de cette loi du pays ;

- SUR LE MOYEN TIRÉ DU DÉFAUT DE CONSULTATION DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL :

2. Considérant que le requérant soutient que la loi du pays déférée constitue une loi du pays à caractère économique ; qu'en application de l'article 155 de la loi organique du 19 mars 1999 susvisée, son adoption par le congrès aurait dû être précédée de la consultation du conseil économique et social de la Nouvelle-Calédonie, institué par l'article 153 de cette loi organique ; que le conseil économique et social n'a pas été désigné "dans les trois mois suivant la première réunion des assemblées de province" comme l'exigeaient les dispositions transitoires du IV de l'article 232 de la même loi ; que, si le comité économique et social institué par l'article 59 de la loi susvisée du 9 novembre 1988 a été consulté le 25 octobre 1999, il n'avait plus compétence, selon les requérants, pour rendre un avis sur le projet de loi du pays à la date à laquelle celui-ci lui a été soumis ;

3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 155 de la loi organique du 19 mars 1999 susvisée : "Le conseil économique et social est consulté sur les projets et propositions de loi du pays... à caractère économique ou social..." ;

4. Considérant que la loi du pays déférée au Conseil constitutionnel, qui modifie le code des impôts applicable en Nouvelle-Calédonie, a exclusivement pour objet de créer une nouvelle imposition assise sur les prestations de services effectuées à titre onéreux ; que cette imposition est destinée à abonder le budget de la Nouvelle-Calédonie ; qu'ainsi, la loi du pays contestée ne revêt pas un "caractère économique" au sens de l'article 155 précité ; que, par suite, son adoption par le congrès ne devait pas être nécessairement précédée de la consultation du conseil économique et social de la Nouvelle-Calédonie ;

- SUR LE MOYEN TIRÉ DU DÉFAUT DE CONSULTATION DU COMITÉ DES FINANCES LOCALES :

5. Considérant que le requérant fait valoir qu'en vertu de l'article 48 de la loi organique du 19 mars 1999 susvisée, l'adoption par le congrès de la loi du pays déférée aurait également dû être précédée de la consultation du comité des finances locales ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 48 précité : "Le comité des finances locales composé de représentants de l'Etat, de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et des communes est consulté par le gouvernement sur tout projet ou proposition de loi du pays... relatif aux relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes de Nouvelle-Calédonie..." ;

7. Considérant que, comme il a été dit, la loi du pays déférée a pour objet exclusif d'instituer un nouvel impôt au bénéfice du budget de la Nouvelle-Calédonie ; qu'un tel objet ne concerne pas les relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes ; que, par suite, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie n'était pas tenu de consulter le comité des finances locales sur le projet de loi du pays ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les deux griefs exposés par la saisine doivent être rejetés ;

9. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, d'examiner d'office aucune question de conformité à la Constitution ;

Décide :

Article premier :

La loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution.

Article 2 :

La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 janvier 2000, présidée par M. Yves GUÉNA et où siégeaient : MM. Georges ABADIE, Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Alain LANCELOT, Mme Noëlle LENOIR, M. Pierre MAZEAUD et Mme Simone VEIL.


Synthèse
Numéro de décision : 2000-1
Date de la décision : 27/01/2000
Loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services
Sens de l'arrêt : Conformité
Type d'affaire : Contrôle de constitutionnalité des lois du pays de Nouvelle-Calédonie

Saisine

Le soussigné Robert XOWIE, Président de la Province des Iles Loyautés.

A l'honneur de déférer à votre censure la loi du Pays adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie en sa séance du 28 décembre 1999.

Plaise au Conseil

I - RAPPEL DES FAITS

Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté le 7 décembre 1999 une loi du Pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services.

A la demande de 14 Conseillers de la Nouvelle-Calédonie dont 11 du Groupe F.L.N.K.S., et conformément à l'article 103 de la Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, cette loi était soumise à une nouvelle délibération du Congrès.

La délibération était donc à nouveau étudiée le 28 décembre 1999 et adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie.

L'adoption de cette loi du Pays a violé le bloc de constitutionnalité et en particulier, l'Accord de Nouméa et la Loi organique du 19 mars 1999.

II - EN DROIT

L'accord sur la Nouvelle-Calédonie signé le 5 mai 1998 et intégré dans la Constitution par le Congrès réuni à Versailles a prévu la création d'un Conseil Economique et Social représentant les principales institutions économiques et sociales de la Nouvelle-Calédonie.

Aux termes de l'article 2-1-4 de cet Accord, il était stipulé que le Conseil Economique et Social : " sera obligatoirement consulté sur les délibérations à caractère économique et social du Congrès ".

Ces dispositions sont reprises à l'article 155 de la Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 qui stipule également que le Conseil Economique et Social est consulté sur " les projets et propositions de Loi du Pays et de délibération du Congrès à caractère économique et social ".

La loi du Pays prévoyant l'instauration d'une taxe générale sur les services a, à l'évidence, un caractère économique, puisqu'il s'agit de la création d'un nouvel impôt.

La consultation préalable du Conseil Economique et Social de la Nouvelle-Calédonie s'imposait donc.

Or, il était stipulé à l'article 232-4° de la Loi organique du 19 mars 1999 qu'il serait procédé à la désignation du Conseil Economique et Social dans les trois mois suivant la première réunion des Assemblées de Province.

Jusqu'à la réunion du Conseil c'est le Comité Economique et Social, institué par l'article 59 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988, qui devait exercer ses attributions.

La fonction " d'intérim " assurée par le Comité Economique et Social avait donc une durée strictement limitée dans le temps à trois mois à compter de la première réunion des Assemblées de Province.

Celle-ci ayant eu lieu le 14 mai 1999, le Conseil Economique et Social devait être désigné au plus tard le 14 août 1999.

La notion " d'intérim " dévolue au Comité Economique et Social par l'article 232-4° précité prenait donc nécessairement fin à cette date également.

Or, le Comité Economique et Social a pourtant été consulté le 2 novembre 1999, soit postérieurement au 14 août 1999, sur le projet de Loi du Pays relatif à l'instauration de la taxe générale sur les services.

Le Conseil Economique et Social n'avait pas compétence à donner un avis sur ce projet de loi du pays car il s'agit d'une nouvelle catégorie d'actes prévue par l'Accord de Nouméa, consacrant ainsi le pouvoir législatif autonome accordé à la Nouvelle-Calédonie et exercé par le Congrès.

En conséquence, la procédure de consultation préalable prévue tant par l'Accord sur la Nouvelle-Calédonie que par la Loi organique n'a pas été respectée.

L'article 48 de la Loi Organique n° 99-209 du 19 mars 1999 stipule également que " le Comité des Finances locales, composé de représentants de l'Etat, de la Nouvelle-Calédonie, des Provinces et des Communes est consulté par le Gouvernement sur tout projet ou proposition de loi du Pays ou de délibération du Congrès relatif aux relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les Provinces et les Communes de Nouvelle-Calédonie ".

Les relations financières couvrent le domaine fiscal eu égard à l'extension du domaine de compétence de la Nouvelle-Calédonie réalisée par la loi organique notamment au terme des articles 22-1°, 21-6°, 27, 99-2° et 99-11° de la loi organique.

L'instauration d'une taxe générale sur les services intéresse donc les relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les Provinces et les Communes.

Conformément à la loi organique, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie devait dès lors préalablement consulter le Comité des Finances locales sur le projet de loi du Pays relatif à l'institution d'une taxe générale sur les services.

Dès lors, que l'élaboration de cette loi n'a pas respecté la procédure de consultation prévue par l'Accord de Nouméa et par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, cette loi du Pays ne saurait leur être déclarée conforme.

En conséquence, votre Conseil déclarera cette Loi du Pays non conforme au bloc de constitutionnalité et en particulier à l'Accord sur le Nouvelle-Calédonie du 21 avril 1998 et à la Loi Organique n° 99-209 du 19 mars 1999.

PAR CES MOTIFS

Par application des articles 104 et 105 de la Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, déclarer non conforme à la Constitution, la Loi du Pays n° 99-003 relative à l'institution d'une taxe générale sur les services.Monsieur le Président,

J'ai l'honneur d'accuser réception de votre courrier en date du 7 janvier 2000 me transmettant, en application de l'article 104 de la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie, le déféré devant le Conseil constitutionnel de M. XOWIE portant sur la loi du pays n° 99-3 du 7 décembre 1999 relative à la taxe générale sur les services.

Le déféré soulève deux vices de procédure, la consultation du comité économique et social et la non consultation du comité des finances locales.

1) Sur la consultation du comité économique et social.

Il est fait grief au Congrès d'avoir consulté le comité économique et social issu de la loi référendaire du 8 novembre 1988 et non le conseil économique et social institué par la loi organique du 19 mars 1999 alors même que l'article 232-4° de la loi organique prévoit la désignation du nouvel organisme dans un délai de trois mois à compter de la mise en place des provinces.

Mais la jurisprudence a, de longue date, statué sur les délais contraignants et les délais non contraignants. En l'espèce, il s'agit d'un délai non contraignant. Même si le texte de la loi organique prévoit la désignation des membres du conseil économique et social dans un certain délai, il n'impose pas ce délai à peine de forclusion. Il invite simplement les autorités compétentes à se déterminer dans ce délai mais elles peuvent toujours prendre leur décision après l'expiration du délai. En effet, puisque la loi prévoit l'intervention d'actes complémentaires pour son application, il serait absurde que, faute de les avoir adopté dans le délai indicatif prévu par la loi, ils ne puissent plus l'être. C'est précisément à l'occasion des décrets d'application des lois que la jurisprudence a, de longue date, dégagé cette solution de délais non contraignants (CE 6 déc. 1907 Chemin de fer de l'Est, rec. p .913)°, 7 avril 1933, Caisse régionale de crédit agricole du Sud-Est, rec. p. 437).

C'est donc à bon droit que le Congrès a eu recours aux dispositions de la deuxième phrase du IV de l'article 232 de la loi qui disposent que jusqu'à la réunion du conseil, le comité économique et social institué par l'article 59 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988 exerce ses attributions.

2) Sur la non consultation du comité des finances locales

Le requérant fait également grief au Congrès de ne pas avoir requis l'avis du comité des finances locales institué par l'article 48 de la loi organique.

Ce moyen appelle deux réponses :

a) à titre principal, il convient de juger que le comité consultatif des finances locales n'avait pas à être consulté à raison de l'objet du projet de délibération.

En effet, il ressort clairement de l'esprit de la loi organique que le législateur n'a confié à ce comité qu'un pouvoir limité aux seuls projets relatifs aux relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes. Le comité des finances locales n'a pas de raison d'être consulté sur les textes fiscaux du territoire. Son homologue métropolitain n'est d'ailleurs pas consulté sur les projets de loi à caractère fiscal : il n'est concerné que par les textes relatifs aux dotations. Le rapport à l'Assemblée nationale n° 1275 du 21 décembre 1998 est très clair sur ce point : « Par rapport au comité des finances locales régi par le titre Ier du livre II du Code général des collectivités territoriales, cet organisme a des compétences restreintes. En particulier, le projet de loi organique ne lui donne pas une capacité d'expertise globale ... Le comité des finances locales de la Nouvelle-Calédonie sera donc consulté sur la répartition des dotations versées aux provinces ».

b) à titre subsidiaire, si le juge devait considérer que le comité des finances locales devait être consulté à raison de l'objet du projet de loi, le moyen soulevé par le requérant devrait néanmoins être rejeté. En effet, le texte devant fixer les modalités d'organisation et de fonctionnement dudit comité est encours de rédaction. Il y a donc lieu de faire application de la règle de procédure impossible appliquée précisément dans les cas où l'organisme consultatif n'a pas encore été constitué à la date où la décision doit être prise. (CE sect. 12 octobre 1956 Baillet p. 356 ; 1er mars 1957 comm. de Port-Louis, p. 134).

Mais il est clair que le souci du requérant n'est pas le respect du droit par le congrès dont il est membre. Ainsi que les représentants du FLNKS l'ont, à plusieurs reprises exprimé publiquement, il s'agit pour eux d'un moyen politicien de protester contre la façon de fonctionner du gouvernement. Malheureusement, tout retard dans l'entrée en vigueur de la nouvelle taxe a pour conséquence réelle et concrète de mettre en difficulté les finances de la Nouvelle-Calédonie, des communes et des provinces.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma haute considération.

Sur le recours

Contre la loi du pays n° 99-003 du 7 décembre 1999 relative à l'institution d'une taxe générale sur les services en Nouvelle-Calédonie.

Déposé par Monsieur Robert Xowie, président de la province des îles Loyauté de la Nouvelle-Calédonie.

Présenté par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie représenté par son président 19, Avenue du Maréchal Foch - B.P M2 - 98849 - Nouméa cedex.

Par un recours enregistré au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 7 janvier 2000, Monsieur Robert Xowie, président de la province des îles Loyauté, défère au Conseil constitutionnel la loi du pays n° 99-003 adoptée en seconde lecture par le congrès de la Nouvelle-Calédonie le 28 décembre 1999, relative à l'institution d'une taxe générale sur les services aux fins de déclarer ladite loi non conforme à la Constitution, à la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, ainsi qu'à l'accord sur la Nouvelle-Calédonie du 21 avril 1998.

Les arguments développés par le requérant seront discutés ci-après (II).

Pour la bonne connaissance de cette affaire, cette discussion sera précédée d'un bref rappel chronologique (I).

I/ Rappel des faits

A la suite de la déclaration de politique générale du gouvernement, présentée par son président devant le congrès le 17 septembre 1999, la nécessité de trouver des ressources nouvelles pour le budget de la Nouvelle-Calédonie, apparue lors des travaux préparatoires du budget, a conduit le gouvernement à élaborer un projet de loi du pays, instaurant une taxe générale sur les services.

Conformément aux dispositions de la loi organique, ce projet de loi du pays a été soumis à l'avis du Conseil d'Etat le 25 octobre 1999 qui a rendu un avis le 23 novembre 1999.

Alors qu'il n'y était pas formellement tenu, le gouvernement a également saisi le comité économique et social le 25 octobre 1999, qui a rendu un avis le 2 novembre 1999.

Tenant compte des observations du Conseil d'Etat, le projet initial est arrêté par le gouvernement en sa séance du 25 novembre 1999.

Ce texte est alors transmis au congrès qui l'adopte en première lecture le 7 décembre 1999.

Cependant, le groupe Front de libération national Kanak et socialiste (FLNKS) au congrès demande le 15 décembre 1999 une seconde lecture. En sa séance du 28 décembre 1999, le congrès adopte de nouveau cette loi du pays.

C'est le texte qui est déféré à la censure du Conseil constitutionnel.

II / Discussion des moyens de la requête

Il est exposé que la loi du pays susmentionnée aurait été adoptée à l'issue d'une procédure non conforme à la loi organique et aurait violé le bloc de constitutionnalité.

Cette procédure est celle qui concerne la consultation du comité économique et social, d'une part, et celle, d'autre part, du comité des finances locales.

- Sur le premier moyen

Le requérant fait valoir que la consultation du conseil économique et social s'imposait en l'espèce au lieu du comité économique et social, s'agissant d'un texte à caractère économique et qu'en tout état de cause, le comité économique et social n'était plus compétent à la date du 2 novembre 1999 pour rendre un avis sur la saisine émanant du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

En ces deux branches, ce moyen n'est pas fondé.

- Contrairement à la qualification que le président de la province des îles Loyauté donne à la loi du pays portant taxe générale sur les services, cette loi n'a pas la nature d'un texte économique mais celle d'un texte purement fiscal.

En effet, l'objectif visé par la loi du pays est strictement fiscal. La taxe générale sur les services est destinée à assurer l'équilibre du budget de la Nouvelle-Calédonie compte tenu des dispositions de la loi organique. Il aurait pu en être autrement si l'objectif recherché était principalement d'ordre incitatif au développement économique de tel ou tel secteur d'activité.

La consultation du conseil économique et social n'était donc pas obligatoire.

Le comité économique et social a donc été saisi, à titre facultatif, en raison notamment des obligations nouvelles résultant pour les entreprises concernées de l'instauration de cet impôt et pour recueillir l'avis des représentants des acteurs de la vie économique, sociale et culturelle de la Nouvelle-Calédonie sur un projet important du nouvel exécutif élu de cette collectivité.

Par ailleurs, la consultation du conseil économique et social, qui n'était pas désigné, était une formalité impossible à accomplir à la date où le comité économique et social a été saisi pour avis.

L'absence de consultation du conseil n'a donc pu, en tout état de cause, entacher la constitutionnalité de cette loi du pays.

- En second lieu et contrairement à l'argumentation de requérant, le comité économique et social était encore compétent, selon l'article 232-IV - 2ème phrase - de la loi organique pour exercer les attributions du conseil économique et social jusqu'à la réunion de cette nouvelle institution.

Le délai de trois mois mentionné à la 1ère phrase dudit article 232-IV est un délai sans sanction, qui était destiné, selon les débats parlementaires sur le projet de loi organique, à ajuster au mieux le début du mandat des nouveaux conseillers sur celui des élus aux assemblées de province.

Tant que le conseil économique et social n'a pas été désigné et ne s'est pas réuni, le comité économique et social exerce ses attributions.

Ce premier moyen sera donc écarté.

- Sur le deuxième moyen

Il est fait grief au gouvernement de Nouvelle-Calédonie de n'avoir pas saisi le comité des finances locales, mentionné à l'article 48 de la loi organique, au motif que la taxe générale sur les services relève du domaine des « relations financières » au sens de l'article 48 de la loi organique.

Ce moyen est également non fondé en droit, le requérant ayant méconnu la portée de l'article 48 cité ci-dessus.

En effet, il résulte des travaux préparatoires de la loi organique que les relations financières visées audit article 48 ne concernent que les dispositions nouvelles à caractère fiscal devant régir la création et l'affectation d'impôts et taxes au profit de fonds destinés aux collectivités territoriales (article 22-1°) ainsi que les textes qui fixeront le régime comptable et financier (article 27), au cas où cette compétence serait transférée et enfin les décisions éventuelles à intervenir pour la répartition des dotations aux provinces (article 99-11°).

La création d'un impôt perçu au bénéfice de la Nouvelle-Calédonie n'est donc pas au nombre des questions dont ledit comité doit connaître ;

Par ailleurs, ledit comité ne pouvait être consulté dans la mesure où le congrès de la Nouvelle-Calédonie n'a pas encore délibéré sur ses modalités d'organisation et de fonctionnement. La consultation d'un organisme dont l'organisation et le fonctionnement n'ont pas encore été fixés constitue une formalité impossible.

Ce moyen sera donc également rejeté.

Au regard des ces observations, il apparaît que la loi du pays qui vous est déférée n'est en aucune manière contraire à la Constitution.

Par ces motifs, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sollicite qu'il plaise au Conseil constitutionnel,

- juger la requête du président de la province des îles Loyauté non fondée,

- déclarer la loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services en Nouvelle-Calédonie conforme à la Constitution.

Nouméa, le 4 janvier 2000


Références :

LP du 27 janvier 2000 sur le site internet du Conseil constitutionnel
LP du 27 janvier 2000 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Loi du pays (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°2000-1 LP du 27 janvier 2000
Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:2000:2000.1.LP
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