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28/11/2002 | FRANCE | N°2002-2658

France | France, Conseil constitutionnel, 28 novembre 2002, 2002-2658


Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Bernard BIRSINGER demeurant à Bobigny (Seine-Saint-Denis), enregistrée le 25 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 5ème circonscription du département de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu le mémoire en défense présenté par M. Jean-Christophe LAGARDE, député, enregistré comme ci-dessus le 30 juillet 2002 ;
Vu les mém

oires en réplique présentés par M. BIRSINGER, enregistrés comme ci-dessus les 8 octobre e...

Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Bernard BIRSINGER demeurant à Bobigny (Seine-Saint-Denis), enregistrée le 25 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 5ème circonscription du département de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu le mémoire en défense présenté par M. Jean-Christophe LAGARDE, député, enregistré comme ci-dessus le 30 juillet 2002 ;
Vu les mémoires en réplique présentés par M. BIRSINGER, enregistrés comme ci-dessus les 8 octobre et 27 novembre 2002 ;
Vu les observations du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 17 septembre 2002 ;
Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques en date du 10 octobre 2002 approuvant, après réformation, le compte de campagne de M. LAGARDE ;
Vu les procès-verbaux des opérations électorales et les documents annexés ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;

SUR LE COMPTE DE CAMPAGNE DE M. LAGARDE :
1. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le transport d'électeurs désireux de se rendre dans les bureaux de vote de la commune de Drancy, au moyen d'un véhicule de cette commune et conduit par l'un de ses agents, ait été organisé dans le but de favoriser l'élection de M. LAGARDE ; qu'en admettant même que M. LAGARDE ait utilisé des clichés photographiques appartenant à la commune de Drancy pour l'illustration de son journal de campagne, ni la nature, ni le montant de cet avantage ne justifieraient le rejet de son compte ;
2. Considérant, en second lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que les candidatures de MM. David LENNE et Ali GHARBI auraient procédé de manoeuvres de la part de M. LAGARDE en vue de contourner les règles du financement des campagnes électorales ;
- SUR LES CONCLUSIONS TENDANT À L'ANNULATION DES OPÉRATIONS ÉLECTORALES :
. En ce qui concerne les griefs tirés d'irrégularités commises pendant la campagne électorale :
3. Considérant que M. BIRSINGER fait grief à M. LAGARDE d'avoir exercé sur les locataires de l'Office public d'habitations à loyer modéré de Drancy des pressions consistant, d'une part, dans l'organisation entre le 27 mai et le 3 juin 2002 de réunions au cours desquelles il a pu prendre la parole de manière privilégiée en qualité de vice-président de cet office et, d'autre part, dans le maintien dans les halls d'immeubles d'une affiche comportant sa photographie ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que, lors des réunions de locataires susmentionnées, M. LAGARDE ait mis en cause ses adversaires ou que ses propos relatifs aux loyers, par leur ton ou leur contenu, aient constitué une pression sur les électeurs ; que, par ailleurs, les affiches apposées dans les halls des immeubles de l'Office public d'habitations à loyer modéré de Drancy se bornaient à faire connaître les heures de la permanence qu'il tient en sa qualité de maire et ne présentaient donc pas un caractère électoral ; que, par suite, le grief tiré d'une rupture de l'égalité entre les candidats ne peut être retenu ;
4. Considérant que le requérant n'établit pas que les partisans de M. LAGARDE auraient procédé, le matin du jour du second tour de scrutin, à une distribution massive de tracts en faveur de celui-ci, ni que d'autres tracts, distribués par les partisans de M. BIRSINGER, auraient été systématiquement enlevés des boîtes à lettres dans lesquelles ils avaient été déposés ;
5. Considérant que M. BIRSINGER fait grief à M. LAGARDE de s'être prévalu abusivement du soutien de personnes qui, en réalité, ne lui étaient pas favorables ; que, toutefois, des démentis ont pu être publiés et diffusés en temps utile par ces personnes ; que, s'agissant du soutien de la candidate investie par le mouvement " Pôle Républicain " dans cette circonscription, il résulte de l'instruction que cette candidate a effectivement apporté son soutien à M. LAGARDE et que M. BIRSINGER disposait du temps nécessaire pour faire connaître aux électeurs la position prise en sa faveur par les instances nationales du mouvement politique dont elle se réclamait ;
6. Considérant que le requérant soutient que M. LAGARDE a porté contre lui et son parti politique, au cours de la campagne électorale, des accusations de caractère diffamatoire ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que M. BIRSINGER a été en mesure de répliquer à ces accusations en invoquant le jugement condamnant M. LAGARDE pour diffamation rendu le 7 juin 2002 par le tribunal de grande instance de Bobigny ;
7. Considérant que le grief selon lequel les partisans de M. BIRSINGER n'auraient pu librement mener campagne en sa faveur avant le premier tour de scrutin, en raison de l'attitude des forces de l'ordre, est inopérant, dès lors qu'en tout état de cause les difficultés alléguées ne l'ont pas empêché de recueillir un nombre de voix suffisant pour participer au second tour du scrutin ;
8. Considérant que, si M. BIRSINGER est fondé à dénoncer la lacération des affiches électorales apposées sur certains des panneaux qui lui étaient réservés sur le territoire de la commune de Drancy et la dénaturation de ces mêmes affiches par l'adjonction de mentions à caractère injurieux, il résulte de l'instruction que ces agissements n'ont concerné qu'un très petit nombre de panneaux ; qu'ainsi, pour regrettables qu'ils soient, ils n'ont pu exercer aucune influence significative sur l'issue du scrutin ;
. En ce qui concerne les griefs relatifs au déroulement du scrutin :
9. Considérant que le requérant ne saurait invoquer utilement des irrégularités qui auraient, selon lui, entaché le déroulement du premier tour de scrutin dès lors qu'il n'est même pas soutenu que les faits allégués auraient été de nature à modifier l'ordre de préférence exprimé par les électeurs et, par voie de conséquence, les conditions du déroulement du second tour ;
10. Considérant que les griefs tirés des conditions irrégulières dans lesquelles une électrice aurait été admise à voter, de la présence d'affiches comportant la photographie de M. LAGARDE sur les murs d'écoles aménagées en bureaux de vote, de pannes d'ascenseur dans des immeubles de la ville de Bobigny et, enfin, de transports d'électeurs en voiture qu'aurait effectués un membre d'un bureau de vote de Drancy ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ;
11. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le fait qu'une même personne ait siégé aux bureaux de vote n° 16 et 28 de Drancy ait permis une fraude ;
12. Considérant que M. BIRSINGER soutient que M. LAGARDE a été surpris, devant un bureau de vote, le jour du second tour de scrutin, en train de proférer des injures à son égard ; que, toutefois, il ressort de l'attestation produite par le requérant que M. LAGARDE ne s'adressait alors qu'à deux personnes ; que ce comportement n'a donc pu avoir d'influence sur l'issue du scrutin ;
. En ce qui concerne les griefs relatifs au dépouillement :
13. Considérant que, si le procès-verbal centralisateur et certains procès-verbaux des opérations électorales ne portent pas la mention de l'heure de leur signature, ces omissions ne peuvent, à elles seules, être regardées comme ayant eu pour effet de vicier la régularité du scrutin ;
14. Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit d'utiliser, pour le second tour, des bulletins imprimés au nom du candidat pour le premier ; que c'est par suite à bon droit que, dans le bureau de vote n° 30 de Drancy, un bulletin imprimé pour le premier tour au nom de M. LAGARDE a été considéré comme un suffrage valablement exprimé au second tour ; que c'est en revanche à tort que, dans les bureaux de vote n° 1 et n° 19 de Bobigny, deux bulletins du premier tour au nom de M. LAGARDE utilisés pour le second tour ont été déclarés nuls ; qu'il y a lieu, par suite, de majorer de deux voix tant le nombre de suffrages exprimés que le nombre des suffrages obtenus par M. LAGARDE ;
15. Considérant qu'il résulte de l'examen des procès-verbaux des opérations électorales des bureaux de vote n° 2, 6, 13 et 17 de Drancy que le nombre des bulletins et enveloppes trouvés dans les urnes ne correspond pas à celui des émargements ; qu'en pareil cas, il convient de retenir le moins élevé de ces deux nombres ; qu'ainsi il y a lieu de déduire hypothétiquement sept suffrages tant du nombre des suffrages exprimés que du nombre de voix obtenues par M. LAGARDE ;
16. Considérant qu'après les rectifications effectuées ci-dessus, le nombre de suffrages exprimés doit être ramené à 25 385 et le nombre de voix en faveur du candidat élu à 12 701 ; que M. LAGARDE conserve ainsi la majorité des suffrages ;
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. BIRSINGER doit être rejetée,

Décide :
Article premier :
La requête de M. Bernard BIRSINGER est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves GUÉNA, Président, Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Pierre MAZEAUD, Mmes Monique PELLETIER, Dominique SCHNAPPER et Simone VEIL.


A.N., Seine-Saint-Denis (5ème circ.)
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Élections à l'Assemblée nationale

Références :

AN du 28 novembre 2002 sur le site internet du Conseil constitutionnel
AN du 28 novembre 2002 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Élection à l'Assemblée nationale (type)


Publications
Proposition de citation: Cons. Const., décision n°2002-2658 AN du 28 novembre 2002

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Origine de la décision
Date de la décision : 28/11/2002
Date de l'import : 02/11/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro de décision : 2002-2658
Numéro NOR : CONSTEXT000017664496 ?
Numéro NOR : CSCX0206128S ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.constitutionnel;an;2002-11-28;2002.2658 ?
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