La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/01/2011 | FRANCE | N°2010-87

France | France, Conseil constitutionnel, 21 janvier 2011, 2010-87


Le Conseil constitutionnel a été saisi le 21 octobre 2010 par la Cour de cassation (troisième chambre civile, arrêt n° 1348 du 21 octobre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jacques S., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 13-13 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi orga

nique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code de l'expropriation pour caus...

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 21 octobre 2010 par la Cour de cassation (troisième chambre civile, arrêt n° 1348 du 21 octobre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jacques S., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 13-13 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 19 novembre 2010 ;

Vu les observations produites pour le requérant par Me André Maubleu, avocat au barreau de Grenoble, enregistrées le 26 novembre 2010 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu à l'audience publique du 6 janvier 2011 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 13-13 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique les indemnités allouées à raison d'une expropriation pour cause d'utilité publique « doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation » ;

2. Considérant que, selon le requérant, en excluant la réparation du préjudice moral résultant de l'expropriation, cette disposition méconnaît l'exigence d'une juste indemnisation du bien exproprié ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; qu'afin de se conformer à ces exigences constitutionnelles, la loi ne peut autoriser l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers que pour la réalisation d'une opération dont l'utilité publique a été légalement constatée ; que la prise de possession par l'expropriant doit être subordonnée au versement préalable d'une indemnité ; que, pour être juste, l'indemnisation doit couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation ; qu'en cas de désaccord sur la fixation du montant de l'indemnité, l'exproprié doit disposer d'une voie de recours appropriée ;

4. Considérant que l'article L. 13-13 précité met en œuvre le droit à la réparation intégrale du préjudice matériel subi du fait de l'expropriation ; qu'à ce titre, le caractère intégral de la réparation matérielle implique que l'indemnisation prenne en compte non seulement la valeur vénale du bien exproprié mais aussi les conséquences matérielles dommageables qui sont en relation directe avec l'expropriation ;

5. Considérant qu'aucune exigence constitutionnelle n'impose que la collectivité expropriante, poursuivant un but d'utilité publique, soit tenue de réparer la douleur morale éprouvée par le propriétaire à raison de la perte des biens expropriés ; que, par suite, l'exclusion de la réparation du préjudice moral ne méconnaît pas la règle du caractère juste de l'indemnisation de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la disposition contestée n'est pas contraire à l'article 17 de la Déclaration de 1789 ; qu'elle n'est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,

DÉCIDE :

Article 1er.- L'article L. 13-13 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est conforme à la Constitution.

Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 janvier 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

Rendu public le 21 janvier 2011.


M. Jacques S. [Réparation du préjudice résultant de l'expropriation]
Sens de l'arrêt : Conformité
Type d'affaire : Question prioritaire de constitutionnalité

Références :

QPC du 21 janvier 2011 sur le site internet du Conseil constitutionnel
QPC du 21 janvier 2011 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Disposition législative (type)


Publications
Proposition de citation: Cons. Const., décision n°2010-87 QPC du 21 janvier 2011

RTFTélécharger au format RTF
Origine de la décision
Date de la décision : 21/01/2011
Date de l'import : 02/11/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro de décision : 2010-87
Numéro NOR : CONSTEXT000023476372 ?
Numéro NOR : CSCX1101966S ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.constitutionnel;qpc;2011-01-21;2010.87 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award