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15/01/1982 | FRANCE | N°10303

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 15 janvier 1982, 10303


Requête de la Société anonyme X... tendant :
1° à l'annulation d'un jugement du 12 juillet 1977 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande principale en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1968 et 1969 et sa demande subsidiaire en réduction des intérêts de retard qui lui ont été appliqués au titre de l'année 1967 ;
2° à la décharge des cotisations susmentionnées, ou à défaut la réduction des intérêts de retard litigieux ;
Vu le code général des impôts

; l'ordonnance du 31 juillet 1945 ensemble le décret du 30 septembre 1953 ;
Considéran...

Requête de la Société anonyme X... tendant :
1° à l'annulation d'un jugement du 12 juillet 1977 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande principale en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1968 et 1969 et sa demande subsidiaire en réduction des intérêts de retard qui lui ont été appliqués au titre de l'année 1967 ;
2° à la décharge des cotisations susmentionnées, ou à défaut la réduction des intérêts de retard litigieux ;
Vu le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 ensemble le décret du 30 septembre 1953 ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a, premièrement, rejeté les conclusions de la société anonyme X... tendant à être déchargée de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1968 et 1969 à raison de profits réalisés à l'occasion de la cession d'emballage consignés, ces profits ayant été regardés comme concourant à la formation des résultats ordinaires d'exploitation et non comme des plus-values de cession d'éléments de l'actif immobilisé, deuxièmement, prononcé une réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées par la requérante au titre des années 1970, 1971 et 1972 pour tenir compte de ce que le rattachement aux bénéfices des exercices clos en 1968 et 1969 de la totalité des profits réalisés au cours de ces exercices sur les emballages consignés impliquait que fussent exclues des bases d'imposition au titre de 1970, 1971 et 1972 les sommes que la requérante avait regardées initialement comme des plus-values à court terme et qu'elle avait rattachées à ces trois années d'imposition sur le fondement des dispositions de l'article 39 quaterdecies au code général des impôts, troisièmement, rejeté les conclusions de la société relatives aux intérêts de retard mis à sa charge au titre de l'année 1967 ; que la société reprend en appel ses conclusions relatives aux modalités d'imposition des profits réalisés au cours des exercices clos en 1968 et 1969 sur les emballages consignés ainsi que ses conclusions relatives aux intérêts de retard ; que le ministre du budget conclut à titre principal au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, relève que les prétentions de la requérante relatives aux profits sur emballages consignés reposent, en appel comme en première instance, sur la thèse selon laquelle ces profits auraient le caractère de plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé, que c'est cette thèse qui était à la base des déclarations souscrites et des impositions spontanément acquittées par la société au titre des années 1968 à 1972 et qu'ainsi il existe en l'espèce entre ces cinq années d'imposition une corrélation telle que, si le Conseil d'Etat entend accueillir les prétentions de la requête, il devra nécessairement prononcer, en même temps que la réduction demandée en ce qui concerne les impositions établies au titre de 1968 et de 1969, le rétablissement intégral des impositions dues au titre de 1970, 1971 et 1972 et dont les premiers juges ont accordé une réduction ; que l'existence d'une telle corrélation n'est pas contestée par la société requérante et ne peut qu'être admise ;
Sur l'imposition des profits réalisés sur les emballages consignés : Cons. que la société X...vends des liquides qu'elle livre dans des tonnelets, fûts et bidons ; que ces emballages, non identifiables, sont consignés à la clientèle ; qu'au cours des exercices vérifiés, un pourcentage de ces emballages, pouvant être déterminé pour chaque exercice par voie statistique avec une précision suffisante, n'était pas restitué par la clientèle ; qu'il n'est pas contesté que ce pourcentage était de 7 % ; que, pour retracer ces opérations dans ses écritures, la société X... a, en premier lieu, porté à l'actif, en le rangeant dans ses immobilisations amortissables, le prix de revient des emballages consignés et porté au passif, comme constituant des créances de tiers, le montant des consignations reçues ; qu'elle a, en second lieu, lors de l'établissement de ses bilans au 31 décembre 1968 et au 31 décembre 1969, tiré les conséquences de la non-restitution, tenue pour certaine, d'une partie des emballages consignés, d'une part en réduisant le montant de la dette inscrite au passif en proportion du nombre des consignations qui ne seraient jamais remboursées, d'autre part en réduisant le poste d'actif afférent aux emballages consignés ; que cette opération, du fait que le montant unitaire des consignations était supérieur au prix de revient unitaire des emballages, a dégagé des profits que la société a regardés comme des plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé relevant du régime d'imposition défini aux articles 39 duodecies et suivants du code ;
Cons. que l'administration se borne à contester la qualification ainsi donnée à ces profits qui, selon elle, constitueraient des bénéfices ordinaires d'exploitation imposables à l'impôt sur les sociétés dans les conditions du droit commun ;
Cons. que la société X..., eu égard à la nécessité où elle se trouvait, pour poursuivre son exploitation, de mettre en oeuvre en permanence une certaine quantité de tonnelets, fûts et bidons consignés à sa clientèle, a pu à bon droit faire figurer à un compte d'immobilisation les emballages récupérables dont il s'agit, ce mode de prise en compte étant d'ailleurs envisagé à l'article 38 ter de l'annexe III au code général des impôts ;
Cons. que, lorsqu'une société cesse légitimement, pour un motif déterminé, de faire figurer à son bilan un élément d'actif immobilisé et que, pour le même motif, elle a perçu une somme ou acquis une créance, même ne présentant pas le caractère d'un prix, ou encore a vu diminuer corrélativement le montant de son passif à l'égard des tiers, elle doit être regardée, contrairement à ce que soutient l'administration dans la présente espèce, comme réalisant une plus-value ou une moins-value assimilable à une plus-value ou à une moins-value de cession de cet élément d'actif ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête relatives aux modalités d'imposition des profits réalisés sur les emballages consignés doivent être accueillies et qu'il y a lieu en conséquence non seulement de décharger la société requérante des suppléments d'impôt qui lui ont été assignés à ce titre pour les années 1968 et 1969, mais aussi, corrélativement, de rétablir les impositions initialement acquittées pour 1970, 1971 et 1972 et dont le tribunal administratif a prononcé, à tort, la réduction ;
Sur les intérêts de retard dont ont été assortis les droits en principal au titre de 1967 : Cons. qu'aux termes de l'article 223 sexies du code général des impôts : " 1. Lorsque les produits distribués par une société sont prélevés sur des sommes à raison desquelles elle n'a pas été soumise à l'impôt sur les sociétés au taux de 50 %, cette société est tenue d'acquitter un précompte ... " ;
Cons. que l'administration a rattaché aux résultats ordinaires de l'exercice clos en 1967 les profits réalisés au cours de cet exercice sur les emballages consignés ; que la société, estimant ne pas être assujettie à l'impôt sur les sociétés au taux de 50 %, au titre de ces opérations, avait spontanément acquitté, conformément à l'article 223 sexies précité, le précompte relatif à ces profits ; que la société ne conteste pas les droits en principal mis à sa charge au titre de l'année 1967, mais soutient qu'il doit être tenu compte du paiement de ce précompte pour le calcul des intérêts de retard dont a été assorti le redressement dont s'agit ;
Cons. que, dès lors que les profits dont il s'agit étaient soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de 50 % sans que le contribuable le conteste, le précompte n'était pas dû et avait donc été indument acquitté ; que le service l'a admis, mais, au lieu de rembourser à la société le montant du précompte ainsi versé à tort, il en a effectué l'imputation sur les droits en principal rappelés au titre de l'impôt sur les sociétés ; qu'eu égard à cette manière de faire, la somme versée par la société et non remboursée ayant été regardée comme valant paiement, à due concurrence, des droits supplémentaires d'impôt sur les sociétés, la société requérante est fondée à soutenir qu'il y a lieu d'asseoir les intérêts de retard sur la seule différence entre les droits mis à sa charge au titre de l'impôt sur les sociétés et le montant du précompte qu'elle a spontanément acquitté, cette réduction de la base de calcul des intérêts de retard ne devant toutefois être admise, conformément à l'article 1734 du code général des impôts, qu'à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel la société a effectivement acquitté le précompte ... décharge des cotisations supplémentaires de l'I.S. pour 1968 et 1969, remise à la charge de la S.A. X... des réductions d'I.S. accordées par le T.A. de Paris pour 1970 à 1972, réduction de la base de calcul des intérêts de retard pour 1967 et décharge de la différence, réformation du jugement en ce sens, rejet du surplus .


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 10303
Date de la décision : 15/01/1982
Sens de l'arrêt : Réformation réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATION - Intérêts de retard - Assiette en cas de compensation.

19-02-04-01-06, 19-02-04-08 Société ayant considéré comme des plus plus-values de cession à court terme les recettes provenant de la non restitution d'emballages consignés et les ayant rattachées en application de l'article 39 quaterdecies aux exercices 1970, 1971 et 1972. Administration les ayant considérées comme recettes d'exploitation, les ayant rattachées aux exercices 1968 et 1969 et ayant de ce fait mis à la charge de la société une imposition supplémentaire au titre de l'impôt sur les sociétés pour ces deux années. Jugement de tribunal administratif ayant rejeté les conclusions de la société dirigées contre ces impositions supplémentaires et contestant le caractère de recette d'exploitation des profits en cause mais ayant prononcé une réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées par la société au titre des années 1970, 1971 et 1972 pour tenir compte du rattachement de ces profits aux exerices 1968 et 1969. Société reprenant en appel ses conclusions contre les impositions supplémentaires de 1968 et 1969 et ministre soutenant que dans le cas où les prétentions de la société seraient admises il y aurait lieu de rétablir intégralement les impositions dues au titre de 1970, 1971 et 1972 en raison de la corrélation existant entre les cinq années d'imposition. Corrélation admise. Décharge demandée par la société accordée et rétablissement des cotisations dont la société avait été déchargée par les premiers juges au titre de 1970, 1971 et 1972.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - PROCEDURE CONTENTIEUSE - REQUETES AU CONSEIL D'ETAT - FORMES - CONTENU DE LA REQUETE - Portée des conclusions - Corrélation entre différentes années d'imposition.

19-01-04 Société ayant considéré que des profits qu'elle avait réalisés ne devaient pas être soumis à l'impôt sur les sociétés et ayant spontanément versé le précompte visé par l'article 223 sexies du C.G.I.. Administration ayant au contraire considéré que ces profits devaient être soumis à l'impôt sur les sociétés ayant en conséquence mis à la charge de la société une imposition supplémentaire, mais n'ayant pas remboursé le versement effectué au titre du précompte et l'ayant imputé sur les droits en principal rappelés au titre de l'impôt sur les sociétés. La somme versée par la société non remboursée doit être regardée dans ces conditions comme valant paiement, à due concurrence, des droits supplémentaires. Ainsi, les intérêts de retard ne peuvent porter, à compter du premier jour du mois suivant le versement du précompte que sur la seule différence entre ce versement et la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - PROCEDURE CONTENTIEUSE - REQUETES AU CONSEIL D'ETAT - INCIDENTS - Recours incident - Conclusions du ministre tendant au rétablissement d'impositions au titre d'années postérieures en conséquence de la réduction d'impositions d'années antérieures - Corrélation entre les différentes années d'imposition.


Références :

CGI 1734
CGI 223 sexies
CGI 39 duodecies et suivants
CGI 39 quaterdecies
CGIAN3 38 ter


Publications
Proposition de citation : CE, 15 jan. 1982, n° 10303
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasry
Rapporteur ?: M. André
Rapporteur public ?: M. Verny

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1982:10303.19820115
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