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05/11/1982 | FRANCE | N°19413

France | France, Conseil d'État, Section, 05 novembre 1982, 19413


Requête de la société Propétrol tendant à :
1° l'annulation du jugement du 21 juin 1979 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser une somme de 359 695,56 F, augmentée des intérêts légaux, à l'office public d'habitations à loyer modéré de la communauté urbaine de Strasbourg à la suite de la résilitation par celui-ci, aux torts exclusifs de la société Propétrol, du contrat de fournitures de fuel-oil conclu entre eux et de la passation, aux risques de cette société, d'un marché de substitution ;
2° au rejet de la demande présenté

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Requête de la société Propétrol tendant à :
1° l'annulation du jugement du 21 juin 1979 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser une somme de 359 695,56 F, augmentée des intérêts légaux, à l'office public d'habitations à loyer modéré de la communauté urbaine de Strasbourg à la suite de la résilitation par celui-ci, aux torts exclusifs de la société Propétrol, du contrat de fournitures de fuel-oil conclu entre eux et de la passation, aux risques de cette société, d'un marché de substitution ;
2° au rejet de la demande présentée par l'office public d'habitations à loyer modéré de la communauté urbaine de Strasbourg devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance : Considérant qu'alors même qu'il lui appartenait d'émettre un état exécutoire pour le recouvrement de la créance qu'il prétend avoir sur la société Propétrol, l'office public d'habitations à loyer modéré de la communauté urbaine de Strasbourg était recevable à demander au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la société à lui payer le montant de cette créance, qui trouve son fondement dans un contrat ;
Au fond : Cons. qu'aux termes de l'article 56 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché conclu le 16 mai 1972 entre l'office et la société pour la fourniture du fuel-oil domestique ... " il peut être pourvu par la collectivité à l'exécution de la fourniture aux frais et risques du titulaire, soit en cas d'inexécution, par ce dernier, d'une livraison qui, par nature ne peut souffrir aucun retard, soit en cas de résiliation du marché prononcée en vertu de l'article précédent " ;
Cons. qu'il résulte de l'instruction que par lettre du 23 juillet 1973 la société Propétrol a fait part à l'office de sa décision de cesser " en toute hypothèse " ses livraisons à compter du 23 août 1973 et lui a demandé " de se mettre en quête d'un nouveau fournisseur " ; qu'elle a effectivement refusé d'effectuer une livraison le 28 septembre 1973 ; que par décision du 5 octobre 1973, le président de l'office a prononcé la résiliation du marché aux torts exclusifs du titulaire et décidé de passer un marché de substitution, qui a été conclu le 8 octobre 1973 ;
Cons. que la circonstance que la résiliation du marché conclu avec la société Propétrol aurait été prononcée à la suite d'une procédure irrégulière est sans influence sur la validité du marché de substitution, qui, en application de l'article 56 précité du cahier des clauses administratives générales pouvait, indépendamment de toute résiliation, être conclu pour l'ensemble des livraisons restant à effectuer, dès lors que la société avait définitivement mis fin à l'exécution du marché ;
Cons. que si la hausse survenue à partir du mois de mai 1973 sur le marché international du fuel-oil domestique était de nature, en l'absence d'une augmentation du tarif officiel servant de base à la détermination du prix contractuel, à rendre plus onéreuse l'exécution du marché, cette circonstance ne constituait pas un cas de force majeure mettant la société dans l'impossibilité d'effectuer les fournitures prévues au contrat ; qu'étant par ailleurs indépendante du fait de l'administration partie au contrat, elle aurait seulement autorisé la société, si elle avait continué à remplir ses obligations contractuelles, à présenter, le cas échéant, une demande d'indemnité fondée sur l'existence d'un fait imprévisible ayant provoqué un déficit d'exploitation de nature à entraîner un bouleversement de l'économie du contrat ; que l'office n'avait, en revanche, aucune obligation de conclure avec la société Propétrol un nouveau marché comportant des prix plus élevés que ceux du marché initial et, en présence de la défection de son fournisseur, était en droit de passer, comme il l'a fait, un marché de substitution avec un autre fournisseur ;
Cons. qu'en vertu de l'article 5 du cahier des prescriptions spéciales, le supplément de prix résultant du marché de substitution doit être supporté par le titulaire défaillant ; qu'il résulte de l'instruction que la somme de 359 695,56 F que le tribunal administratif a condamné la société Propétrol à verser à l'office, correspondant uniquement au supplément de prix résultant de ce que le marché de substitution ne comportait pas de rabais et ne tient pas compte des augmentations du tarif officiel que l'office aurait dû subir même si l'exécution du marché initial s'était poursuivie ; qu'en concluant un marché de substitution sans rabais, l'office n'a pas commis une faute lourde, qui aurait seule été de nature à permettre à la société de demander une réduction des sommes mises à sa charge en application de l'article 5 susrappelé du cahier des prescriptions spéciales ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Propétrol n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

rejet .


Synthèse
Formation : Section
Numéro d'arrêt : 19413
Date de la décision : 05/11/1982
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION TECHNIQUE DU CONTRAT - Inexécution d'une livraison par le titulaire d'un marché de fourniture - Possibilité pour la collectivité de passer un marché de substitution [art - 56 du C - C - A - G - ] - [1] Irrégularité de la résiliation du marché sans influence sur la validité du marché de substitution - [2] Obligation du titulaire défaillant de supporter les frais résultant du marché de substitution - Atténuation - Faute lourde commise par la collectivité.

39-03[1], 39-03-02-02, 39-04-02 O.P.H.L.M. ayant conclu en mai 1972 avec une société un contrat de fourniture de fuel-oil puis, à la suite de la décision de la société, notifiée en juillet 1973, de cesser ses livraisons et de son refus d'effectuer une livraison en septembre 1973, ayant prononcé en octobre 1973 la résiliation du marché aux torts exclusifs du titulaire et décidé de passer un marché de substitution en application de l'article 56 du C.C.A.G..

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION TECHNIQUE DU CONTRAT - ALEAS DU CONTRAT - FORCE MAJEURE - Absence - Hausse sur le marché international du fuel-oil domestique à partir de mai 1973.

39-03[1], 39-04-02 La circonstance que la résiliation du marché aurait été prononcée à la suite d'une procédure irrégulière est sans influence sur la validité du marché de substitution qui, en application de l'article 56 du C.C.A.G., pouvait, indépendamment de toute résiliation, être conclu pour l'ensemble des livraisons restant à effectuer, dès lors que la société avait définitivement mis fin à l'exécution du contrat.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION TECHNIQUE DU CONTRAT - ALEAS DU CONTRAT - IMPREVISION - Droit à indemnité - Absence - Co-contractant ayant cessé de remplir ses obligations contractuelles.

39-03-02-01 Si la hausse survenue à partir du mois de mai 1973 sur le marché international du fuel-oil domestique était de nature, en l'absence d'une augmentation du tarif officiel servant de base à la détermination du prix contractuel, à rendre plus onéreuse l'exécution du marché de fourniture de fuel-oil domestique passé en mai 1972 entre un O.P.H.L.M. et une société, cette circonstance ne constituait pas un cas de force majeure mettant la société dans l'impossibilité d'effectuer les fournitures prévues au contrat.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION TECHNIQUE DU CONTRAT - ALEAS DU CONTRAT - FAIT DU PRINCE - Absence - Circonstance indépendante du fait de l'administration partie au contrat.

39-03-02-02 Si la hausse survenue à partir du mois de mai 1973 sur le marché international du fuel-oil domestique, sans que soit augmenté le tarif officiel servant de base à la détermination du tarif officiel, autorisait la société, si elle avait continué à remplir ses obligations contractuelles, à présenter, le cas échéant, une demande d'indemnité fondée sur l'existence d'un fait imprévisible ayant provoqué un déficit d'exploitation de nature à entraîner un bouleversement de l'économie du contrat, elle ne permettait pas à la société, en l'absence de cas de force majeure, de cesser ses livraisons et n'obligeait pas non plus l'office à conclure avec la société un nouveau marché comportant des prix plus élevés que ceux du marché initial.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FIN DES CONTRATS - RESILIATION - Résiliation prononcée en cas d'inexécution d'une livraison par le co-contractant [art - 56 du C - C - A - G - ] - Irrégularité sans influence sur la validité du marché de substitution.

39-03[2], 60-01-02-02-03 Dans le cas où la collectivité, à la suite de la défaillance de son co-contractant, passe un marché de substitution en application de l'article 56 du C.C.A.G., seule une faute lourde commise par la collectivité dans la conclusion de ce marché de substitution est de nature à diminuer la condamnation du titulaire défaillant à supporter les frais résultant de ce marché.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE POUR FAUTE - FAUTE LOURDE - Conclusion par une collectivité d'un marché de substitution à la suite de l'inexécution d'une livraison par le co-contractant [art - 56 du C - C - A - G - ].

39-03-02-03 Contrat de fourniture de fuel-oil domestique conclu en mai 1972 entre un O.P.H.L.M. et une société. La hausse survenue à partir du mois de mai 1973 sur le marché international du fuel-oil domestique, sans que soit augmenté le tarif officiel servant de base à la détermination du prix contractuel, étant indépendante du fait de l'administration partie au contrat, elle ne peut être regardée comme un "fait du prince".


Publications
Proposition de citation : CE, 05 nov. 1982, n° 19413
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Heumann
Rapporteur ?: M. Schneider
Rapporteur public ?: M. Labetoulle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1982:19413.19821105
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