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19/01/1983 | FRANCE | N°30868

France | France, Conseil d'État, 10/ 4 ssr, 19 janvier 1983, 30868


Requête de la société d'intérêt collectif agricole Gravir tendant :
1° à l'annulation du jugement du 11 décembre 1980 du tribunal administratif de Toulouse annulant à la demande de la Fédération générale de l'agriculture C.F.D.T., de MM. Y..., X..., Fuentes, Cayrol, Valatz, Carme et Guittard, la décision du 25 juin 1979 du ministre de l'agriculture rejetant le recours hiérarchique formulé le 12 février 1978 contre une décision du chef de service départemental du travail et de la protection sociale agricole du Tarn autorisant le licenciement de 27 salariés de la S.I.C.A

. Gravir à Rabastens dont un délégué syndical et 8 autres salariés pro...

Requête de la société d'intérêt collectif agricole Gravir tendant :
1° à l'annulation du jugement du 11 décembre 1980 du tribunal administratif de Toulouse annulant à la demande de la Fédération générale de l'agriculture C.F.D.T., de MM. Y..., X..., Fuentes, Cayrol, Valatz, Carme et Guittard, la décision du 25 juin 1979 du ministre de l'agriculture rejetant le recours hiérarchique formulé le 12 février 1978 contre une décision du chef de service départemental du travail et de la protection sociale agricole du Tarn autorisant le licenciement de 27 salariés de la S.I.C.A. Gravir à Rabastens dont un délégué syndical et 8 autres salariés protégés ;
2° au rejet de la demande présentée par la Fédération générale de l'agriculture C.F.D.T., et par MM. Y..., X..., Fuentes, Cayrol, Valatz, Carme et Guittard devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; le code du travail ; le code de commerce ; l'arrêté du 31 juillet 1978 portant extension d'avenants à la convention collective nationale de travail concernant les caves coopératives vinicoles et leurs unions et élargissement de ces avenants aux sociétés d'intérêt collectif agricole vinicole ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant que par une décision du 25 juin 1979, le ministre de l'agriculture a autorisé la société d'intérêt collectif agricole Gravir à licencier pour motif économique 27 salariés ; que, par le jugement attaqué en date du 11 décembre 1980, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé, à la demande de la fédération générale de l'agriculture C.F.D.T. et de certains salariés concernés, l'annulation de cette décision, au motif que la société n'avait pas régulièrement suivi la procédure d'information et de concertation prévue par les accords contractuels applicables avant de présenter à l'autorité administrative une demande d'autorisation de licenciement ; que la société d'intérêt collectif agricole Gravir fait appel de ce jugement ;
Cons. que l'article L. 321-8 du code du travail dispose que " l'employeur ne peut saisir l'autorité administrative compétente d'une demande de licenciement collectif dans les cas prévus à l'article L. 321-3 ... qu'au terme de la procédure d'information et de consultation telle qu'elle est organisée par les articles L. 321-4 et L. 321-5 et éventuellement précisée par des accords contractuels " ;
Cons. que l'article 10 de la convention collective sur la sécurité de l'emploi dans la coopération agricole, applicable en l'espèce en vertu de l'arrêté d'extension du 31 juillet 1978 prévoit qu'" en vue d'assurer une information complète du comité d'entreprise ou d'établissement et de lui permettre de jouer effectivement son rôle consultatif, tel qu'il est défini par la loi ", la direction communique à ce comité " le projet de plan social qu'elle devra avoir établi ", que cet article ajoute que " lorsque le plan n'aura pu être établi, il sera fait appel au concours de la commission paritaire régionale de l'emploi compétente " ;
Cons. qu'il ressort des pièces versées au dossier qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Toulouse, la direction de la société d'intérêt collectif agricole Gravir n'a pas communiqué au comité d'entreprise le plan social prévu par ces stipulations avant d'adresser à l'administration une demande d'autorisation de licenciement ; qu'elle a toutefois, par une lettre du 25 octobre 1978, saisi du projet de licenciement la commission paritaire de l'emploi compétente ; que la société appelante soutient qu'en procédant à cette saisine, au lieu de communiquer un plan social au comité d'entreprise, elle a choisi, comme la convention collective précitée l'y autorisait, l'une des branches de l'alternative que cette convention aurait ouverte ; que le syndicat et les salariés demandeurs de première instance font au contraire valoir d'une part que l'employeur, loin d'avoir le choix entre la communication au comité d'entreprise ou d'établissement d'un plan social et la saisine de la commission paritaire d'emploi, ne peut recourir à cette saisine que s'il se trouve dans l'impossibilité, dûment établie, de rédiger un plan social, d'autre part que la saisine du comité paritaire de l'emploi doit avoir pour objet l'établissement de ce plan ; que la question ainsi débattue présente une difficulté réelle d'interprétation des stipulations de l'article 10 de la convention collective sur la sécurité de l'emploi dans la coopération agricole ; que l'autorité judiciaire est seule compétente pour trancher cette question ;
Cons., toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de s'assurer, avant de surseoir à statuer sur la requête, qu'aucun des autres moyens soulevés en première instance ne justifierait la solution d'annulation retenue par le tribunal administratif ;
Sur la consultation du comité d'entreprise : Cons. qu'il ressort des constatations de fait qui constituent le support de l'arrêt d'acquittement rendu le 6 novembre 1979 par la cour d'appel de Toulouse que le comité d'entreprise de la société d'intérêt collectif agricole Gravir a été régulièrement convoqué, lorsqu'il a été consulté sur le projet de licenciement litigieux, et que ses membres ont reçu communication des documents mentionnés à l'article L. 321-4 du code du travail ; qu'aucune irrégularité n'entachait dans ces conditions la consultation de ce comité ;
Sur les motifs du licenciement :
En ce qui concerne les salariés investis d'un mandat représentatif : Cons. qu'il ressort des pièces versées au dossier que les difficultés économiques rencontrées par la société d'intérêt collectif agricole Gravir justifiaient le licenciement de ces salariés ; qu'il n'est pas établi que ce licenciement aurait été, en ce qui les concerne, en rapport avec l'exercice de leur mandat ;
En ce qui concerne les autres salariés : Cons. que la décision d'autoriser le licenciement de ces salariés ne repose sur aucune erreur manifeste d'appréciation ;
Cons. que, de tout ce qui précède, il résulte que la solution du litige dépend en définitive du point de savoir si la société d'intérêt collectif agricole Gravir a ou non fait une correcte application de l'article 10 de la convention collective sur la sécurité de l'emploi dans la coopération agricole ; qu'il y a lieu par suite pour le Conseil d'Etat de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction compétente de l'ordre judiciaire ait donné, sur les deux points précédemment mentionnés qui font l'objet d'une contestation entre les parties, l'interprétation des stipulations de cet article ;
sursis à statuer sur la requête .


Synthèse
Formation : 10/ 4 ssr
Numéro d'arrêt : 30868
Date de la décision : 19/01/1983
Sens de l'arrêt : Sursis à statuer question prejudicielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

COMPETENCE - COMPETENCES CONCURRENTES DES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - CONTENTIEUX DE L'INTERPRETATION - CAS OU UNE QUESTION PREJUDICIELLE S'IMPOSE - Interprétation d'une convention collective - Procédure d'information et de concertation préalable à une demande d'autorisation de licenciement économique collectif.

17-04-01-01, 66-07-02-01-02 La solution du litige soulevé par l'appel de la société X. contre le jugement par lequel le tribunal administratif a annulé l'autorisation accordée à cette société de licencier pour motif économique 27 salariés dépend de la question de savoir si la société a régulièrement suivi la procédure d'information et de concertation prévue par la convention collective applicable avant de présenter à l'autorité administrative sa demande d'autorisation de licenciement. L'interprétation des stipulations de la convention collective posant une difficulté réelle, que l'autorité judiciaire est seule compétente pour résoudre, le Conseil d'Etat surseoit à statuer en attendant que le juge judiciaire ait donné, sur les points faisant l'objet d'une contestation entre les parties, l'interprétation de ces stipulations.

TRAVAIL - LICENCIEMENT - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - PROCEDURE PREALABLE A L'AUTORISATION ADMINISTRATIVE - LICENCIEMENT COLLECTIF - Procédure d'information et de consultation prévue par un accord contractuel - Difficulté d'interprétation - Question préjudicielle au juge judiciaire.


Références :

Arrêté du 31 juillet 1978 Decision attaquée
Code du travail L321-8 Code du travail L321-4
Décision du 25 juin 1979 Agriculture


Publications
Proposition de citation : CE, 19 jan. 1983, n° 30868
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Gazier
Rapporteur ?: M. Ronteix
Rapporteur public ?: M. Stirn

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1983:30868.19830119
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