La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/1983 | FRANCE | N°28850;30971

France | France, Conseil d'État, Section, 06 mai 1983, 28850 et 30971


Requête n° 28-850 de la société Distrelec tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme un jugement du 2 octobre 1980 par lequel le tribunal administratif de Paris lui a refusé les intérêts d'intérêts moratoires, dus sur les remboursements d'impôts ;
2° accorde ces intérêts à compter du 12 janvier 1970 ;
Recours n° 30-971 du ministre du budget tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement ci-dessus en ce qu'il rejette la demande reconventionnelle du directeur des services fiscaux, tendant à la réformation de la décision du 22 avril 1976 p

ar laquelle celui-ci avait fixé à 9,5 % le taux des intérêts moratoires dus à la so...

Requête n° 28-850 de la société Distrelec tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme un jugement du 2 octobre 1980 par lequel le tribunal administratif de Paris lui a refusé les intérêts d'intérêts moratoires, dus sur les remboursements d'impôts ;
2° accorde ces intérêts à compter du 12 janvier 1970 ;
Recours n° 30-971 du ministre du budget tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement ci-dessus en ce qu'il rejette la demande reconventionnelle du directeur des services fiscaux, tendant à la réformation de la décision du 22 avril 1976 par laquelle celui-ci avait fixé à 9,5 % le taux des intérêts moratoires dus à la société Distrelec et à la fixation de ce taux à 4 % et en ce qu'il retient 13 % ;
2° réforme la décision ci-dessus ;
3° ordonne le renversement par la société d'une somme de 458 550,79 F ;
Vu le décret-loi du 8 août 1935 ; la loi du 11 juillet 1975 ; le code civil ; le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant ... jonction ; . .
Sur le recours : Cons. que le litige porte sur le taux des intérêts qui auraient dû, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux par sa décision du 31 octobre 1975 susmentionnée, être versés à la société " Coq-France " le 12 janvier 1970 en même temps que le principal de sa créance ; qu'il résulte des motifs, inséparables sur ce point du dispositif, de cette décision que ces intérêts devaient être calculés au taux prévu à l'article 401 de l'annexe II au code général des impôts ; que, dans sa rédaction en vigueur en 1970, cet article dispose que les intérêts " sont liquidés au taux du droit civil, fixé par l'article 1er, 1er alinéa, du décret du 8 août 1935 " et que " le taux applicable est celui en vigueur au moment du paiement des intérêts " ; qu'il suit de là que les intérêts dont il s'agit auraient dû être calculés au taux de 4 % prévu à l'article 8 du décret du 8 août 1935, seul en vigueur en 1970 ; qu'ainsi, le ministre du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu un taux de 13 % ;
Cons., toutefois, que le directeur départemental, à qui il appartenait, s'il s'y croyait tenu, de réviser sa décision du 22 avril 1976 fondée sur un taux de 9,5 %, n'était pas recevable à demander aux premiers juges, ainsi qu'il l'a fait en l'espèce par voie reconventionnelle, de réduire la somme qu'il avait lui-même allouée à la société ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que le ministre du budget est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en ce qu'il fixe le montant des intérêts dus à la société à une somme supérieure à celle que le directeur avait fixée et la condamnation de la société à reverser la différence, soit 178 628,45 F, mais qu'il n'est pas fondé à se plaindre du rejet de la demande reconventionnelle présentée par le directeur ;
Sur la requête : Cons. que les dispositions de l'article 1154 du code civil ont pour seul objet de limiter la capitalisation des intérêts échus au cours de la période durant laquelle, le principal de la créance n'ayant pas encore été payé, les intérêts continuent de courir ; qu'elles sont sans application dans le cas, qui est celui de l'espèce, où le débiteur s'acquitte de sa dette en principal, interrompant ainsi le cours des intérêts, mais ne paye pas en même temps la somme des intérêts dont il est alors redevable, obligeant ainsi le créancier à former une nouvelle demande tendant au paiement de cette somme ; que, dans ce cas, les intérêts qui étaient dus au jour du paiement du principal forment eux-mêmes une créance productive d'intérêts dans les conditions de l'article 1153 du code civil selon lequel " les intérêts sont dus à compter du jour de la sommation de payer " ;
Cons. qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir reçu le 12 janvier 1970 le remboursement de taxes qui lui était dû, la société Coq-France a demandé, le 15 du même mois, les intérêts afférents à la somme remboursée ; que cette demande a constitué une sommation de payer et, sans que l'administration puisse utilement faire valoir qu'elle ne répondait pas aux conditions de l'article 1154 du code civil, a fait courir, en vertu de l'article 1153 du même code, les intérêts au taux légal, sur la somme due à ce titre, jusqu'au paiement de celle-ci le 4 mai 1976 ; que les intérêts qui ont couru durant cette période doivent être calculés, en application du décret du 8 août 1935, puis de la loi du 11 juillet 1975, à raison d'un taux de 4 % du 15 janvier 1970 au 14 juillet 1975, d'un taux de 9,5 % jusqu'au 31 décembre 1975 et d'un taux de 8 % jusqu'au 4 mai 1976 ; que la créance productive de ces intérêts, qui doit elle-même être calculée sur la base d'un taux de 4 % ainsi qu'il a été dit plus haut, s'élève à 203 862,95 F ; que, dès lors et dans cette mesure, les conclusions de la requête de la société Distrelec tendant à l'allocation d'intérêts doivent être accueillies ;

reversement à l'Etat par la société d'une somme égale à la différence entre, d'une part, la somme de 178 628,45 F qui lui a été allouée à tort par les premiers juges et, d'autre part, le montant d'intérêts calculés, aux taux de 4 % du 15 janvier 1970 au 14 juillet 1975, de 9,5 % du 15 juillet au 31 décembre 1975 et de 8 % du 1er janvier au 4 mai 1976, sur une somme de 203 862,95 F ; réformation du jugement en ce sens ; rejet du surplus des conclusions de la requête et du recours .N
1 Cf. S., Hôpital-hospice d'Aunay-sur-Odon, 15 juill. 1964, p. 410 ; Comp. S., ANIFOM c/ Suteau, 23 janv. 1976, p. 58.
2 Ab. jur., S., Ministre de l'intérieur c/ consorts X... ; 19 mars 1976, p. 170 ; Société " entreprise industrielle ", 16 avr. 1982, n° 18049 ; Ministre de l'Education c/ Société Dumez, 30 avr. 1982, p. 146.


Synthèse
Formation : Section
Numéro d'arrêt : 28850;30971
Date de la décision : 06/05/1983
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 PROCEDURE - POUVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - CONCLUSIONS - Conclusions reconventionnelles - Irrecevabilité - Demande d'une autorité administrative tendant à ce que le juge prenne une décision qu'elle peut prononcer elle-même [1].

54-07-01-03 Demande d'une société tendant à ce que le tribunal administratif augmente les intérêts moratoires qui lui ont été versés par le directeur départemental des services fiscaux après remboursement des sommes acquittées au titre de la T.V.A. et ayant fait l'objet d'un dégrèvement. Le directeur départemental des services fiscaux, à qui il appartenait, s'il s'y croyait tenu, de réviser sa décision fondée sur un taux de 9,5 %, n'est pas recevable à demander au tribunal administratif par voie reconventionnelle de réduire la somme qu'il a lui-même allouée à la société [1].

- RJ2 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - MODALITES DE LA REPARATION - INTERETS - Capitalisation des intérêts [art - 1154 du code civil] - Cas où le principal a été versé sans les intérêts - Intérêts formant créance productive d'intérêts [2].

60-04-04-04 Les dispositions de l'article 1154 du code civil ont pour seul objet de limiter la capitalisation des intérêts échus au cours de la période durant laquelle, le principal de la créance n'ayant pas encore été payé, les intérêts continuent à courir. Elles sont en revanche sans application dans le cas où le débiteur s'acquitte de sa dette au principal, interrompant ainsi le cours des intérêts, mais ne paye pas en même temps la somme des intérêts dont il est alors redevable, obligeant ainsi le créancier à former une nouvelle demande tendant au paiement de cette somme. Dans ce cas, les intérêts qui étaient dus au jour du paiement du principal forment eux-mêmes une créance productive d'intérêts dans les conditions de l'article 1153 du code civil selon lequel "les intérêts sont dus à compter du jour de la sommation de payer" [2].


Références :

CGIAN2 401
Code civil 1153
Code civil 1154
Décret du 08 août 1935 art. 8
LOI 75-619 du 11 juillet 1975

1. cf. S., Hôpital-hospice d'Aunay-sur-Odon, 1964-07-15, p. 410 ;

COMP. S., ANIFOM c/ Suteau, 1976-01-23, p. 58. 2. AB.JUR. S., Ministre de l'intérieur c/ consorts Danel; 1976-03-19, p. 170 ;

société "entreprise industrielle", 1982-04-16, n° 18049 ;

Ministre de l'Education c/ société Dumez, 1982-04-30, p. 146


Publications
Proposition de citation : CE, 06 mai. 1983, n° 28850;30971
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasry
Rapporteur ?: M. Quandalle
Rapporteur public ?: M. Verny

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1983:28850.19830506
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award