Requête de la société X... tendant à :
1° l'annulation du jugement, du 22 avril 1981 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande en réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle due par les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie, au titre, respectivement, de l'année 1973 et de l'année 1974 ;
2° la réduction des impositions contestées ;
Vu le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu'à la clôture de son exercice arrêté le 31 août 1973, la société anonyme X... qui exploite à Y... une entreprise de fabrication et de vente en gros de bijouterie et de petite joaillerie en or et argent, a prélevé sur le bénéfice dudit exercice et porté, en franchise d'impôt, au passif de son bilan une " provision pour fluctuation des cours ", d'un montant de 348 990 F, à raison de son " stock de base " d'or, cette matière première ayant été ajoutée par un décret du 20 juillet 1972 à la liste des matières pouvant donner lieu à la constitution d'une telle provision ; qu'elle a, d'autre part, reconduit au passif du même bilan le reliquat, s'élevant à 28 300 F, d'une " provision pour hausse des prix " figurant au bilan d'ouverture de l'exercice, également relative à son stock d'or, et qu'elle avait initialement dotée à la clôture de son exercice arrêté le 31 août 1969 ; qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de la société portant notamment sur l'exercice clos le 31 août 1973, l'administration a rapporté au bénéfice imposable de cet exercice le montant de la " provision pour hausse des prix ", en se fondant sur l'article 10 octies de l'annexe III au code général des impôts, aux termes duquel les entreprises ne peuvent constituer de " provisions pour hausse de prix " qu'à raison des " matières, produits ou approvisionnements, autres que ceux pouvant donner lieu à la constitution de provisions pour fluctuation des cours, qui existent en stock à la clôture de chaque exercice " ; que le bien-fondé de cette réintégration est contesté par la requérante ;
Cons. qu'en vertu des dispositions de l'article 39-1-5°, deuxième alinéa, du code général des impôts ainsi que des articles 3 à 10 septies de l'annexe III audit code, les entreprises dont l'activité consiste principalement à transformer directement des matières premières acquises sur les marchés internationaux ou dont les prix sont étroitement liés aux variations des cours internationaux peuvent, en période de hausse de ces prix et à condition de les prélever sur des bénéfices, constituer, en franchise d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés, des " provisions pour fluctuation des cours " calculées en fonction de la plus-value acquise par leur " stock de base " desdites matières ; que ces " provisions " sont destinées à permettre à ces entreprises de faire face, ultérieurement, à la perte de valeur qu'à l'inverse, pourra subir le même " stock de base " en cas de baisse des cours ; qu'aux termes de l'article 39-1-5°, troisième alinéa et suivants, du code : " Les entreprises peuvent, d'autre part, en ce qui concerne les variations de prix postérieures au 30 juin 1959, pratiquer en franchise d'impôt une provision pour hausse des prix lorsque, pour une matière ou un produit donné, il est constaté, au cours d'une période ne pouvant excéder deux exercices successifs clos postérieurement à cette date, une hausse de prix supérieure à 10 pour 100. La provision pratiquée à la clôture d'un exercice en application de l'alinéa précédent est rapportée de plein droit aux bénéfices imposables de l'exercice en cours à l'expiration de la sixième année suivant la date de cette clôture ... Un décret fixe les modalités d'application des deux alinéas qui précédent " ; que l'objet des " provisions pour hausse des prix " est de faciliter le maintien ou la reconstitution, par les entreprises, des stocks de toutes matières ou produits nécessaires à leur fonctionnement, en période de hausse de leurs prix ; que, si les " provisions pour fluctuation des cours " et les " provisions pour hausse des prix " sont, les unes et les autres, constituées à raison du renchérissement des matières ou produits auxquels elles s'appliquent, elles répondent ainsi à des fins distinctes ; qu'elles sont, en outre, soumises à des règles de constitution, de calcul et de réintégration distinctes ; que, notamment, si le contribuable est tenu de réintégrer une provision pour hausse du prix aux résultats du 6e exercice suivant celui à la clôture duquel elle a été constituée, il est en droit de la reconduire dans les bilans des cinq exercices clos auparavant, sans avoir à justifier, comme il y serait tenu pour toute autre catégorie de provisions, que ladite provision n'est pas devenue sans objet ; qu'il ne ressort pas, enfin, des dispositions précitées de l'article 39-1-5°, alinéas troisième et suivants, du code, issues de l'article 32-III de la loi du 28 décembre 1959, que le législateur aurait entendu limiter de quelque manière le champ d'application, très généralement défini, des " provisions pour hausse des prix " ;
qu'il suit de là qu'en disposant, à l'article 1er du décret du 24 juillet 1961, repris sous l'article 10 octies de l'annexe III au code général des impôts, que les " provisions pour hausse des prix " peuvent être constituées " à raison des matières, produits ou approvisionnements, autres que ceux pouvant donner lieu à la constitution de provisions pour fluctuation des cours ", le gouvernement a apporté au texte législatif une restriction que le renvoi, fait à un décret, du soin d'en fixer les seules " modalités d'application " n'autorisait pas, et a, ce faisant, excédé les limites de sa compétence ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède qu'en reconduisant dans son bilan de l'exercice clos en 1973, la provision pour hausse du prix qu'elle avait initialement constituée en 1969, la société n'avait fait qu'user du droit qu'elle tenait des dispositions précitées de l'article 39-1-5° du code général des impôts et que c'est à tort que l'administration a rapporté cette provision au bénéfice imposable au titre de 1973 en se fondant sur la disposition précitée de l'article 10 octies de l'annexe III au code général des impôts, qui n'est pas opposable à la requérante, et sur la circonstance que la société avait pour la même matière première et au même bilan, constitué une provision pour fluctuations des cours ; que l'administration n'est pas davantage fondée à soutenir que la constitution de cette dernière provision impliquait nécessairement la perte d'objet de la première, laquelle aurait, par suite, été de plein droit rapportable au bénéfice de l'exercice, en application des dispositions du septième alinéa de l'article 39-1-5° du code ; que, dès lors, la société anonyme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que le redressement contesté a été effectué et que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle due par les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre, respectivement, de l'année 1973 et de l'année 1974 ;
annulation du jugement, réduction de l'impôt sur les sociétés et de la contribution exceptionnelle à concurrence des droits correspondant à la réintégration dans les bénéfices de l'exercice clos le 31 août 1973, d'une provision de 28 300 F .N
1 Cf. Plén., 47.403, 28 nov. 1964, p. 605.