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20/06/1984 | FRANCE | N°35889

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 20 juin 1984, 35889


Requête de la S.A.R.L. Manoel, tendant à :
1° l'annulation du jugement du 11 mai 1981, du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 1971 et 1972 ;
2° la réduction des impositions litigieuses ;
Vu le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ; la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Considérant

qu'à la suite du décès de son époux, survenu le 26 octobre 1971, Mme veuve X... ...

Requête de la S.A.R.L. Manoel, tendant à :
1° l'annulation du jugement du 11 mai 1981, du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 1971 et 1972 ;
2° la réduction des impositions litigieuses ;
Vu le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ; la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Considérant qu'à la suite du décès de son époux, survenu le 26 octobre 1971, Mme veuve X... a repris la gérance de la société à responsabilité limitée Manoel, qui exploite, à Alfortville, un fonds de transformation de papier ; que cette société a alloué à Mme X..., qui travaillait jusqu'alors comme représentant salarié à carte unique, une indemnité de 168 000 F, en contrepartie de l'abandon à son profit de la clientèle que celle-ci avait constituée ; que la société Manoel, qui a fait l'objet, à la suite d'une vérification de comptabilité, de divers redressements de ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1971 et 1972, s'est bornée à contester la réintégration, dans les bénéfices sociaux de ces deux années, des versements annuels de 84 000 F qu'elle avait faits à Mme X..., en règlement de l'indemnité susmentionnée, et qu'elle avait regardés comme des charges déductibles ; qu'elle fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des impositions supplémentaires correspondantes ;
Sur l'application de la loi fiscale . Cons., que, si la société Manoel soutient que l'indemnité litigieuse représenterait l'indemnité qu'elle a dû verser à Mme X..., à raison de la résiliation de son contrat de représentant salarié, il est constant que l'intéressée a mis librement un terme à ce contrat, pour prendre, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la gérance de la société, et ne pouvait, dès lors, se prévaloir d'aucun préjudice indemnisable ;
Cons., en revanche, que, comme la société requérante l'admet elle-même, le versement de la somme de 168 000 F à Mme X... a eu pour contrepartie, pour cette société, l'acquisition de la clientèle que celle-ci avait progressivement créée, et qui est ainsi devenue un élément incorporel de son actif immobilisé ; que ce versement avait, par suite, le caractère d'une dépense en capital qui, en vertu des dispositions combinées des articles 38-2 et 204 du code général des impôts ne pouvait être regardée comme une charge déductible de ses bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 1971 et 1972 ;
Sur les moyens tirés sur le fondement de l'article 1649-quinquies-E du code général des impôts, de réponses ministérielles à des parlementaires : Cons. que la société requérante invoque, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, applicables en l'espèce, une réponse du ministre des finances à une question écrite d'un parlementaire, en date du 19 octobre 1957, selon laquelle l'indemnité de clientèle versée au représentant de commerce dans les conditions prévues à l'article L. 751-9 du code du travail présenterait, pour son bénéficiaire, le caractère de dommages-intérêts et pourrait, à ce titre, être comprise parmi les charges déductibles pour le calcul de l'impôt sur les sociétés ; que, toutefois, cette interprétation administrative ne trouve à s'appliquer, ainsi d'ailleurs que le rapporte la société requérante elle-même, qu'aux situations juridiques visées à l'article L. 751-9 du code du travail, c'est-à-dire en cas de résiliation d'un contrat par le fait de l'employeur ou dans le cas de cessation du contrat par suite d'accident ou de maladie entraînant une incapacité permanente totale du voyageur, représentant et placier ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il résulte de l'instruction que Mme X... a mis librement un terme à son activité de représentant pour prendre la gérance de la société Manoel ; que son contrat n'a donc pas été résilié dans les conditions prévues à l'article L. 751-9 susmentionné du code du travail ; que, par suite, la société ne saurait se prévaloir de l'interprétation administrative dont elle fait état ; qu'elle n'est pas davantage fondée à invoquer celle qui est exprimée dans une réponse ministérielle à un parlementaire, en date du 7 mars 1958, et qui concerne les clientèles prospectées par des représentants non salariés, dès lors qu'il est constant que Mme X... était salariée de l'entreprise ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que la société à responsabilité limitée Manoel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujette au titre des années 1971 et 1972 ;

rejet .


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 35889
Date de la décision : 20/06/1984
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-09 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - B.I.C. - DETERMINATION DU BENEFICE NET - CHARGES DIVERSES -Charges non déductibles - Dépenses ayant pour contrepartie un accroissement de l'actif - Somme versée pour l'achat d'une clientèle.

19-04-02-01-04-09 La somme versée par une entreprise à une ancienne salariée, représentant à carte unique, devenue gérante de ladite entreprise, pour l'acquisition de la clientèle progressivement créée par elle, qui est ainsi devenue un élément incorporel de l'actif immobilisé de l'entreprise, a le caractère d'une dépense en capital qui, en vertu des dispositions combinées des articles 38-2 et 204 du C.G.I. ne peut être regardée comme une charge déductible des bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés. La somme en question ne peut non plus, sur le fondement de la doctrine administrative exprimée dans une réponse ministérielle à une question écrite d'un parlementaire, en date du 19 octobre 1957 être regardée comme représentative de dommages intérêts, puisque l'intéressée a mis librement un terme à son activité de représentant, alors que l'interprétation administrative susmentionnée ne trouva à s'appliquer qu'aux situations juridiques visées à l'article L.751-9 du code du travail, c'est à dire en cas de résiliation d'un contrat par le fait de l'employeur ou dans le cas de cessation du contrat par suite d'accident ou de maladie entraînant une incapacité permanente totale du voyageur, représentant et placier.


Références :

CGI 1649 quinquies E
CGI 204
CGI 38 2
Code du travail L751 9


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jui. 1984, n° 35889
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. de Bresson
Rapporteur ?: M. Querenet
Rapporteur public ?: Mme Latournerie

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1984:35889.19840620
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