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27/07/1984 | FRANCE | N°30119

France | France, Conseil d'État, 10/ 5 ssr, 27 juillet 1984, 30119


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 janvier 1981, présentée pour la commune de Saint-Marcel Saône-et-Loire , représentée par son maire en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : - annule le jugement, en date du 18 novembre 1980, par lequel le tribunal administratif de Dijon l'a condamnée, conjointement et solidairement avec l'entreprise Gerland-Route, à verser une indemnité de 53646 F et respectivement 3714 F aux consorts X... et à M. Y..., en réparation du préjudice par eux subis du fait des travaux de réfection du rés

eau d'égouts communal, et a réparti pour moitié la charge de cet...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 janvier 1981, présentée pour la commune de Saint-Marcel Saône-et-Loire , représentée par son maire en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : - annule le jugement, en date du 18 novembre 1980, par lequel le tribunal administratif de Dijon l'a condamnée, conjointement et solidairement avec l'entreprise Gerland-Route, à verser une indemnité de 53646 F et respectivement 3714 F aux consorts X... et à M. Y..., en réparation du préjudice par eux subis du fait des travaux de réfection du réseau d'égouts communal, et a réparti pour moitié la charge de cette condamnation entre la commune et l'entreprise ; - par la voie de l'évocation, condamne l'entreprise Gerland Route à garantir la commune de la totalité des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, et mette les frais de l'expertise à la charge exclusive de l'entreprise ; - subsidiairement, réduise à 60470 F le montant du préjudice subi par les consorts Z..., en en laissant la moitié à la charge de ces derniers, et réduise à 1714 F le montant de l'indemnité due à M. Y... ;
Vu le décret n° 80-438 du 17 juin 1980 ; Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; Vu le code des tribunaux administratifs ; Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la régularité en la forme du jugement attaqué : Considérant qu'aux termes de l'article R. 116 du code des tribunaux administratifs, dans sa rédaction issue du décret susvisé du 17 juin 1980, applicable aux procédures en cours à sa date d'entrée en vigueur, "Lorsque l'affaire est en état d'être portée à l'audience ... , le rapporteur prépare un rapport. Le dossier est ensuite transmis au Président de la formation de jugement" ; qu'en vertu de l'article R. 167 du même code, dans sa rédaction issue du même décret, "Le Commissaire du Gouvernement donne ses conclusions dans toutes les affaires dont les dossiers lui ont été transmis par le Président de la formation du jugement" ; qu'en vertu de l'article R. 172, alinéa 4, du même code, le jugement mentionne, s'il y a lieu, que le Commissaire du Gouvernement a été entendu ;
Considérant qu'il ne résulte pas des dispositions susénoncées, ni d'aucune autre, que le tribunal administratif soit tenu de faire figurer dans son jugement une mention relative à l'absence de transmission du dossier au Commissaire du Gouvernement lorsque le président de la formation du jugement n'a pas transmis le dossier au Commissaire et que ce dernier n'a pas prononcé de conclusions ; que, dès lors, la commune de Saint-Marcel n'est pas fondée à soutenir que le jugement susvisé du 18 novembre 1980 serait entaché d'un vice de forme de nature à entraîner son annulation ;
Sur la responsabilité : Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif de Dijon, que les désordres qui ont affecté l'immeuble des consorts X... à partir du 9 février 1978 ont eu pour origine les travaux de réfection du réseau d'égouts, effectués par l'entreprise Gerland-Route pour le compte de la commune de Saint-Marcel ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu la responsabilité solidaire de la commune et de l'entreprise envers les consorts X... et leur locataire, M. Y..., qui avaient la qualité de tiers par rapport aux travaux publics dont l'exécution a entraîné des dommages ;
Considérant, toutefois, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'importance des dégâts ait été aggravée par la faiblesse des fondations ou la vétusté antérieure de l'immeuble ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions de la commune de Saint-Marcel, et les conclusions d'appel provoqué de l'entreprise Gerland-Route qui tendent à ce que soit augmentée la part des conséquences dommageables des travaux que le jugement attaqué a laissée à la charge des consorts X..., et d'accueillir l'appel incident des consorts X..., en ce qu'il tend à ce que la commune soit condamnée à supporter la totalité de la réparation ; qu'en revanche, les conclusions incidentes des consorts X..., tendant aux mêmes fins, et dirigées contre l'entreprise Gerland-Route, ont le caractère de conclusions d'intimé à intimé présentées après l'expiration du délai de recours contentieux ; que ces conclusions ne sont pas recevables, dès lors que la présente décision n'a pas pour effet d'aggraver la situation des consorts X... ;
Sur l'évaluation des préjudices : Considérant, en premier lieu, que les désordres ont rendu nécessaire la démolition partielle de l'immeuble et la réalisation de travaux confortatifs sur la partie restante ; que ces opérations ont eu pour effet de priver le logement antérieurement loué par les consorts X... de deux de ses quatre pièces, compromettant ainsi son utilisation à des fins locatives ; que, par suite, ni la commune, ni l'entreprise Gerland-Route, par ses conclusions d'appel provoqué, ne sont fondées à réclamer que l'évaluation du préjudice sur ce point soit ramenée de 50000 F à 30000 F ; qu'en outre, c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas accueilli la demande des consorts X... tendant à l'actualisation de l'indemnité représentative des travaux confortatifs au jour du paiement effectif des travaux, dès lors que les consorts X... n'établissent pas qu'ils aient été dans l'impossibilité d'assurer l'exécution des travaux à la date du dépôt du rapport de l'expert, date à laquelle la cause des dommages avait pris fin et leur étendue était connue ; que les conclusions incidentes des consorts X... ne peuvent qu'être écartées sur ce point ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer l'évaluation du préjudice retenue par le tribunal administratif, soit 80470 F ;
Considérant, en second lieu, qu'à la suite des désordres occasionnés à l'immeuble, M. Y... a été contraint de quitter le logement dont il était locataire et dans lequel il avait procédé à des travaux d'aménagement avant le sinistre ; que le préjudice subi de ce chef présente avec les travaux publics un lien de cause à effet de nature à ouvrir droit à réparation ; que, dès lors, la commune de Saint-Marcel et l'entreprise Gerland-Route ne sont pas fondées à demander que le montant global de l'indemnité accordée à M. Y... soit réduit à concurrence de la somme allouée, par les premiers juges, du chef des travaux d'aménagement réalisés par celui-ci ;
Sur la répartition de la charge des condamnations : Considérant qu'en l'absence de stipulations contractuelles sur ce point, la répartition de la charge définitive de la condamnation solidaire prononcée contre l'entreprise et la commune doit s'opérer à raison des parts respectives que leurs fautes ont prises dans la survenance des dommages ; qu'à cet égard, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que l'entreprise Gerland-Route a creusé une tranchée à proximité immédiate de l'immeuble des consorts X..., sans procéder à des sondages préalables pour vérifier la profondeur des fondations et la consistance du terrain, et sans disposer des moyens lui permettant de réaliser un blindage suffisant de la tranchée ; qu'à supposer même que la poursuite des travaux, après les premiers désordres constatés le 9 février 1978, lui ait été imposée par le maire, il appartenait à l'entreprise de prendre des précautions supplémentaires pour limiter l'aggravation ultérieure des désordres. Qu'ainsi, l'entreprise a commis une faute de nature à justifier qu'une partie des condamnations solidaires prononcées par le tribunal administratif soit laissée à sa charge ; que, si la commune a elle-même contribué à la réalisation des dommages en négligeant de signaler à l'entreprise les dangers inhérents à la consistance du sol et à la fragilité des constructions, cette faute ne pouvait toutefois, eu égard notamment à la faiblesse des moyens et compétences techniques de la commune, justifier qu'elle fût appelée à supporter 50 % de la charge des condamnations solidaires ; qu'il y a lieu de porter à 75 % la part des condamnations prononcées par le tribunal administratif qui demeure à la charge de l'entreprise ; que, par suite les conclusions incidentes présentées sur ce point par l'entreprise ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE : Article 1er : L'indemnité due par la commune de Saint-Marcel aux consorts X... est portée de 53646 F à 80470 F. Article 2 : La charge définitive des condamnations solidaires prononcées par le tribunal administratif de Dijon sera supportée à hauteur de 75 % par l'entreprise Gerland-Route et de 25 % par la commune de Saint-Marcel. Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Dijon est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Saint-Marcel, et des conclusions des consorts X..., ensemble les conclusions de l'entreprise Gerland-Route, sont rejetés. Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Saint-Marcel, aux consorts X..., à M. Y..., à l'entreprise Gerland-Route et au ministre de l'intérieur et de la décentralisation.


Synthèse
Formation : 10/ 5 ssr
Numéro d'arrêt : 30119
Date de la décision : 27/07/1984
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-06-04 PROCEDURE - JUGEMENTS - REDACTION DES JUGEMENTS -Mention obligatoire - Absence - Mention de la non transmission du dossier au commissaire du gouvernement en cas d'absence de conclusions [Article R.172, 4ème alinéa, du code des tribunaux administratifs].

54-06-04 Il ne résulte ni des dispositions des articles R.116, R.167 et R.172 du code des tribunaux administratifs, ni d'aucune autre disposition, que le tribunal administratif doive faire figurer dans son jugement une mention relative à l'absence de transmission au commissaire du gouvernement, lorsque le président de la formation de jugement n'a pas transmis le dossier au commissaire et que celui-ci n'a pas prononcé de conclusions.


Références :

Code des tribunaux administratifs R116, R167, R172 al. 4
Décret 80-438 du 17 juin 1980


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 1984, n° 30119
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. de Bresson
Rapporteur ?: M. Marimbert
Rapporteur public ?: M. Delon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1984:30119.19840727
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