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26/10/1984 | FRANCE | N°50838

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 26 octobre 1984, 50838


Requête de M. René Y..., tendant :
1° à l'annulation du jugement du 14 mars 1983 du tribunal administratif de Nice le condamnant à verser à M. Daniel X... une indemnité de 62 977,68 F et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes une indemnité de 191 993,68 F en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait de l'accident dont M. X... a été victime le 22 avril 1975, alors qu'il circulait à cyclomoteur à Nice ;
2° à ramener à 121 517,51 F provision déduite le montant total de la condamnation mise à la charge du requérant et décider que celui-ci

ne peut être tenu qu'au versement des arrérages à échoir de la rente de M....

Requête de M. René Y..., tendant :
1° à l'annulation du jugement du 14 mars 1983 du tribunal administratif de Nice le condamnant à verser à M. Daniel X... une indemnité de 62 977,68 F et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes une indemnité de 191 993,68 F en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait de l'accident dont M. X... a été victime le 22 avril 1975, alors qu'il circulait à cyclomoteur à Nice ;
2° à ramener à 121 517,51 F provision déduite le montant total de la condamnation mise à la charge du requérant et décider que celui-ci ne peut être tenu qu'au versement des arrérages à échoir de la rente de M. X... au fur et à mesure de leur échéance et non au paiement du capital constitutif de ces arrérages ;
3° au rejet du surplus des demandes de première instance ;
Vu la loi du 28 pluviôse, An VIII ; le code des tribunaux administratifs ; le code de la sécurité sociale ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant que par un jugement du 21 octobre 1982 devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a déclaré l'entreprise Y... responsable de l'accident dont M. Daniel X... a été victime à Nice, le 22 avril 1975, ordonné une expertise à l'effet de déterminer le préjudice indemnisable et alloué à la victime une provision de 2 000 F ; que M. René Y... conteste le montant des réparations mises à sa charge, au profit de M. X... et de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, par le jugement rendu le 14 mars 1983 par le même tribunal ;
Sur l'évaluation du préjudice : Cons. qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'état de M. X..., âgé de 47 ans au jour de l'accident, a été consolidé le 15 avril 1977 ; qu'il reste atteint de séquelles d'un traumatisme neurologique provoquant une gêne de fonctionnement de l'épaule droite et de la main droite, lui occasionnant une incapacité permanente partielle de 18 % à raison de laquelle une rente d'accident du travail lui est versée par la caisse primaire d'assurance maladie ; que pour évaluer le montant global de l'indemnité qui doit être mise à la charge de l'entreprise Y..., il y a lieu non pas d'additionner comme l'a fait à tort le tribunal administratif, les créances respectives de M. X... et de la caisse primaire, cette dernière étant calculée en fonction des règles propres à la législation des accidents du travail, mais d'évaluer, selon les règles de droit commun, le dommage causé par l'accident ; qu'à cet égard, la victime ne subissant plus, depuis la consolidation de son état, de perte de salaire, l'incapacité permanente partielle dont il reste atteint ne lui ouvre droit qu'à la compensation des troubles qu'il subit dans ses conditions d'existence, lesquels incluent, le cas échéant, le préjudice dit d'agrément ;
Cons. que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une juste appréciation des troubles de toutes natures subis par la victime en lui allouant de ce chef, une indemnité de 50 000 F, dont la moitié répare des troubles physiologiques ; qu'il y a lieu d'ajouter à cette somme, celle de 5 000 F à titre de réparation du dommage afférent aux souffrances physiques, qualifiées de modérées par l'expert, qui ont été provoquées par l'accident et ses séquelles, une somme de 78 517,51 F correspondant au montant des indemnités journalières et aux frais de soins pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie pendant la période d'incapacité temporaire totale, ainsi qu'une somme de 54 977,86 F égale aux pertes de rémunérations, non couvertes par les indemnités journalières, que M. X... a subies pendant la même période d'incapacité et dont il a justifié l'existence et le montant par des attestations suffisamment précises de son employeur ; qu'en revanche, M. X... ne justifie pas d'un préjudice esthétique lui ouvrant droit à réparation ; qu'ainsi, le préjudice total dont la réparation doit être mise à la charge de l'entreprise Y... s'élève à la somme de 188 495,37 F ;
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes : Cons. qu'aux termes de l'article L. 470 alinéa 3 du code de la sécurité sociale applicable aux accidents du travail dans sa rédaction résultant de la loi du 27 décembre 1973 : " Si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et du préjudice esthétique et d'agrément ... " ;
Cons. que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes a droit, dans les limites ainsi indiquées, au remboursement, d'une part, des indemnités journalières, des prestations en nature et des arrérages échus au 14 novembre 1982 dernière date à laquelle la caisse a indiqué ce montant de la rente versée à M. X... et, d'autre part, non pas, en l'absence d'accord de M. Y..., du capital constitutif de la rente correspondant aux arrérages à échoir, comme l'a jugé à tort de tribunal administratif, mais seulement au remboursement, au fur et à mesure de leurs échéances, des arrérages d'une rente, déterminée par application des barêmes fixant le capital représentatif d'une rente d'accident du travail, dont le capital constitutif ne peut être supérieur à la différence entre la part d'indemnité mise à la charge de l'entreprise Y... sur laquelle peut s'exercer la créance de la caisse et le montant des sommes versées par la caisse au 14 novembre 1982 ;
Cons. que la caisse primaire d'assurance maladie justifie de débours s'élevant à 78 517,51 F au titre des indemnités journalières et prestations en nature et à 28 917,82 F au titre des arrérages échus au 14 novembre 1982 de la rente d'accident du travail qu'elle verse à M. X..., soit au total : 107 435,33 F ; que le total de cette dernière somme et du capital constitutif de la rente qui s'élève à 84 558,35 F, est supérieur à la somme de 158 495,37 F sur laquelle peut s'exercer la créance de cette caisse ; que, dès lors, celle-ci a droit, d'une part, au remboursement de la somme de 107 435,33 F et, d'autre part, au remboursement, au fur et à mesure de leurs échéances postérieures au 14 novembre 1982, des arrérages d'une rente dont le capital constitutif, calculé comme il est dit ci-dessus, sera de 51 060 F ; qu'il y a lieu de réformer en conséquence le jugement attaqué ;
Sur les droits de M. X... : Cons. que les droits de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes ci-dessus déterminés, absorbant l'intégralité de la somme de 158 495,37 F sur laquelle peut s'exercer la créance de la caisse, M. X... ne peut prétendre qu'au paiement de la somme de 25 000 F correspondant à la part de l'indemnité pour troubles dans les conditions d'existence ne réparant pas des troubles physiologiques et de la somme de 5 000 F qui lui est allouée en compensation de la souffrance physique, sous déduction de la provision de 2 000 F qui lui a été accordée par le jugement du tribunal administratif en date du 21 octobre 1982, soit la somme de 28 000 F ; qu'il y a lieu de ramener à cette somme la condamnation prononcée à son profit par le jugement attaqué ; condamnation de l'entreprise Y... à payer à M. Daniel X... une somme ramenée de 62 977,86 F à 28 000 F ; condamnation de l'entreprise Y... à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, aux lieu et place de la condamnation prononcée par le jugement attaqué, d'une part, une indemnité de 107 435,33 F et d'autre part, au fur et à mesure de leurs échéances postérieures au 14 novembre 1982, les arrérages d'une rente d'accident du travail dont le capital constitutif est fixé à 51 060 F ; réformation ; rejet du surplus .


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 50838
Date de la décision : 26/10/1984
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - Accident - Evaluation selon les règles de droit commun.

60-04-03 Pour évaluer le montant global de l'indemnité mise à la charge de la personne condamnée à réparer les conséquences dommageables d'un accident il y a lieu, non d'additionner les créances respectives de la victime et de la caisse primaire d'assurance maladie - la créance de cette dernière étant calculée selon les règles propres à la législation des accidents du travail - mais d'évaluer selon les règles de droit commun le dommage causé par l'accident.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DEBITEURS DE L'INDEMNITE - AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SECURITE SOCIALE - DROITS DES CAISSES DE SECURITE SOCIALE - Versement en capital d'une rente - Imputation des droits de la caisse.

60-05-04 Séquelles d'un accident consolidé occasionnant à la victime une incapacité permanente partielle à raison de laquelle lui est versée une rente par la caisse primaire d'assurance maladie. A défaut de l'accord de la personne condamnée à réparer les conséquences de l'accident, la caisse primaire a droit non pas au capital constitutif de la rente correspondant aux arrérages à échoir, mais seulement au remboursement, au fur et à mesure de leurs échéances, des arrérages d'une rente dont le capital constitutif ne peut être supérieur à la différence entre la part de l'indemnité mise à la charge de la personne condamnée sur laquelle peut, en vertu de l'article L.470 [3ème alinéa] du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 27 décembre 1973, s'exercer la créance de la caisse et le montant total des sommes déjà versées du fait de l'accident.


Références :

Code de la sécurité sociale L470 al. 3
Loi 73-1194 du 27 décembre 1973


Publications
Proposition de citation : CE, 26 oct. 1984, n° 50838
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Gazier
Rapporteur ?: M. Wiltzer
Rapporteur public ?: M. Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1984:50838.19841026
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