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17/01/1986 | FRANCE | N°55625

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 17 janvier 1986, 55625


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 décembre 1983 et 3 avril 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société BROSSETTE, société anonyme dont le siège est ... , représentée par ses dirigeants en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement, du 21 octobre 1983, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre du travail sur le recours hiéra

rchique que la société requérante lui a adressé le 2 septembre 1982, qui ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 décembre 1983 et 3 avril 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société BROSSETTE, société anonyme dont le siège est ... , représentée par ses dirigeants en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement, du 21 octobre 1983, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre du travail sur le recours hiérarchique que la société requérante lui a adressé le 2 septembre 1982, qui tendait à l'annulation d'une décision de l'inspecteur du travail des Bouches-du-Rhône, 1ère section, en date du 11 août 1982 lui refusant l'autorisation de licencier, pour faute lourde, huit salariés protégés de son établissement situé ..., MM.Chapiteau, Y..., Z..., Grand, B..., E..., Mme F... et M. G... ;
2° annule pour excès de pouvoir ces décisions,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lambertin, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la Société Brossette,
- les conclusions de M. Boyon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, lorsque le licenciement d'un salarié investi d'un mandat de représentant du personnel ou des fonctions de délégué syndical est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi de la demande d'autorisation de licenciement et, en cas de recours hiérarchique, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier la mesure projetée, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat ou des fonctions dont il est investi ;
Considérant que, du 9 juin au 16 juillet 1982, date à laquelle il a été procédé en vertu d'une ordonnance de référé du 14 juin 1982 et avec le concours de la force publique à son expulsion, une fraction minoritaire du personnel d'un établissement de vente de la Société BROSSETTE, situé à Marseille boulevard Capitaine-Gèze, a occupé les lieux et interdit les accès, faisant ainsi obstacle tant à la liberté du travail dans cet établissement du personnel non gréviste qu'à la fréquentation normale dudit établissement par la clientèle et à la livraison des marchandises ; que, comme uite à ces faits, la Société BROSSETTE a demandé à l'inspecteur du travail de Marseille d'abord, puis au ministre du travail, de l'autoriser à licencier pour faute les huit salariés protégés qui avaient participé à la grève ; qu'elle fait appel du jugement du tribunal administratif de Marseille refusant d'annuler les décisions par lesquelles les deux autorités susmentionnées ont refusé d'autoriser les licenciements sollicités ;
Sur le refus d'autoriser le licenciement de M. Y... et de M. B... :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., délégué syndical, délégué du personnel et représentant syndical au comité d'entreprise, a joué un rôle dirigeant dans la prolongation de l'occupation des lieux plus d'un mois après qu'eut été signifiée aux salariés grévistes l'ordonnance d'expulsion rendue en référé ; que lui-même et M. Kpebe C..., délégué du personnel suppléant, sont à l'origine des injures et voies de fait, qui ont été infligées au directeur de l'établissement lorsque celui-ci a tenté, au début du conflit, d'empêcher la fermeture du portail d'entrée ; que de tels comportements ne sauraient être regardés comme se rattachant à l'exécution normale des mandats dont MM. Y... et B... étaient investis et constituent, contrairement à ce qu'ont estimé l'autorité administrative puis le tribunal, des fautes d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement des intéressés ; que, dans ces conditions, la société requérante est fondée à demander l'annulation du refus d'autorisation de licencier MM. Y... et B... qui lui a été opposé ;
Sur le refus d'autoriser le licenciement des 6 autres salariés protégés :
Considérant qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que les six autres salariés protégés aient eu un rôle personnel et actif dans les excès susévoqués, ni qu'ils se soient rendus coupables d'autres agissements de même nature ; que, dans ces conditions, et compte tenu du fait que leur simple participation à la grève ne saurait être regardée comme constituant une faute d'une gravité suffisante pour justifier qu'une atteinte soit portée au mandat des intéressés, la Société BROSSETTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a refusé d'annuler le refus d'autoriser le licenciement des six salariés protégés autres que MM. Y... et B... qui lui a été opposé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la Société BROSSETTE n'est fondée à demander l'annulation du jugement et des décisions attaquées qu'en tant, seulement, que lesdites décisions et ledit jugement emportent refus d'autoriser le licenciement de MM. Y... et B... ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 21 octobre 1983 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de la Société BROSSETTE dirigéescontre le refus d'autorisation de licenciement de MM. Y... et C....

Article 2 : La décision de l'inspecteur du travail des Bouches-du-Rhône, 1ère section, en date du 11 août 1982, refusant à la Société BROSSETTE l'autorisation de licencier huit salariés protégés de son établissement situé boulevard Capitaine-Gèze à Marseille, et le rejet implicite, par le ministre du travail, du recours hiérarchique formé contre cette décision, le 2 septembre 1982, par la Société BROSSETTE sont annulés en tant que lesdites décisions refusent à la Société BROSSETTE l'autorisation de licencierM. Y... et M. B....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la Société BROSSETTE est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Société BROSSETTE, à MM. Y..., B..., X..., Z...
A..., E..., D...
F..., M. G... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL - LICENCIEMENT - SALARIES PROTEGES


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 17 jan. 1986, n° 55625
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Lambertin
Rapporteur public ?: Boyon

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 17/01/1986
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 55625
Numéro NOR : CETATEXT000007706991 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1986-01-17;55625 ?
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