Vu la requête enregistrée le 4 février 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Pierre X..., demeurant ... à Paris 75009 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 2 décembre 1981 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes et, pour 1976, sa réclamation au directeur transmise par celui-ci au tribunal, et tendant les premières comme la seconde à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti, respectivement au titre des années 1973, 1974, 1975, 1976 et au titre des années 1973 et 1975, dans les rôles de la ville de Paris mis en recouvrement les 31 mars 1978, 31 juillet 1978, 31 mars 1979, 30 avril 1979 et 31 mai 1979,
2° lui accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'article 93-II de la loi du 29 décembre 1983 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Toutée, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Latournerie, Commissaire du gouvernement ;
Sur les impositions relatives à l'année 1973 :
Considérant que M. X..., médecin, était placé, pour l'année 1973, sous le régime de l'évaluation administrative de ses bénéfices non commerciaux ; que l'administration, estimant, par application de l'article 102 bis du code général des impôts, que cette évaluation était caduque à la suite de l'inexactitude des renseignements fournis par le contribuable, a adressé au requérant une nouvelle évaluation du bénéfice imposable, qui a été acceptée ; que M. X... soutient que la procédure de vérification a été entachée de diverses irrégularités et que la nouvelle évaluation faite par l'administration est exagérée ;
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les opérations de vérification que l'administration a effectuées en 1977 au sujet de la situation fiscale du requérant se sont déroulées avant l'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 29 décembre 1977 ; qu'à cette époque aucune disposition n'exigeait que la vérification de la situation fiscale d'un contribuable soit précédée d'un avis adressé à l'intéressé ; qu'un tel avis a néanmoins été adressé à M. X... le 13 avril 1977, les irrégularités dont cet avis ou sa notification ont pu être entachés n'ont pu vicier la procédure d'imposition ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. X... avait, le 16 avril 1977, donné pouvoir à un conseil pour le représenter "pour tout ce qui concerne l'examen de sa situation fiscale" et qu'il a été effectivement représenté par ce conseil ; qu'en outre, il ne conteste pas avoir demandé personnellement que son activité professionnelle ne soit pas troubléepar les contrôles du vérificateur ; qu'il n'est, dès lors, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que les opérations de vérification ont été entachées d'irrégularité faute d'un débat oral et contradictoire entre lui-même et le vérificateur ;
Considérant, en troisième lieu, que, si M. X... soutient que le délai fixé par l'article 1649 septies F, alors en vigueur, du code général des impôts pour les opérations de vérification sur place des livres et documents comptables aurait été dépassé, il ne résulte pas de l'instruction que la vérification ait comporté un examen sur place de livres et documents comptables ;
Considérant, enfin, que, si le requérant soutient que la notification de la nouvelle évaluation administrative de ses recettes professionnelles de l'année 1973, qui lui a été faite le 11 octobre 1977, constituerait un faux dès lors qu'elle est datée du "11 octobre 1974", il résulte de l'instruction que la mention manuscrite du "11 octobre 1974" qui figure sur la notification est entachée d'une simple erreur matérielle, qui n'a eu aucune influence sur la régularité de la notification, reçue par le requérant le 12 octobre 1977, ni sur celle de la notification du 28 octobre 1977 qui s'y réfère ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant que M. X..., qui a formellement accepté, le 28 octobre puis le 3 novembre 1977, la nouvelle évaluation administrative de ses bénéfices non commerciaux se borne à soutenir, devant le juge de l'impôt, qu'il n'exerçait pas à plein temps à titre libéral ; qu'il n'apporte pas ainsi la preuve, qui lui incombe, d'une exagération de cette évaluation ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à demander la décharge des cotisations d'impôt résultant de ladite évaluation ;
Sur les impositions relatives aux années 1974, 1975 et 1976 :
Considérant que M. X... a déclaré comme relevant du régime de l'évaluation administrative ses bénéfices non commerciaux des années 1974, 1975 et 1976 ; que l'administration, estimant que les recettes qu'il a perçues ont excédé le seuil de 175 000 F au-delà duquel, en vertu de l'article 96 du code général des impôs, les bases d'imposition doivent être établies selon le régime de la déclaration contrôlée, a évalué d'office ces bénéfices en se fondant sur la circonstance que M. X... n'avait pas souscrit la déclaration à laquelle sont tenus, en vertu de l'article 97 du même code, les contribuables soumis à ce régime ; que les impositions en résultant ont été mises en recouvrement les 31 juillet 1978, 31 mars, 30 avril et 31 mai 1979 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 29 décembre 1977 : "II. Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la seule notification de redressement adressée au requérant, le 11 octobre 1977, ne comportait aucun élément lui permettant de connaître les éléments retenus par l'administration pour fixer les bases d'imposition ; qu'ainsi, l'impôt ne pouvait être régulièrement établi, comme il l'a été, postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 1977, sans qu'eût été adressé au contribuable une nouvelle notification contenant les précisions exigées par les dispositions précitées de la loi du 29 décembre 1977 ; que, par suite, la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité ; que le requérant est fondé, par ce motif, à demander la décharge des impositions établies au titre des années 1974, 1975 et 1976 ;
Article ler : Il est accordé à M. X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti, respectivement au titre des années 1974, 1975 et 1976, d'une part, etau titre de l'année 1975, d'autre part.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de l'économie, des finances et du budget.