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08/10/1986 | FRANCE | N°46527

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 08 octobre 1986, 46527


Vu le recours enregistré le 28 octobre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté au nom de l'Etat par le MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, CHARGE DU BUDGET, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 30 juin 1982 en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Poitiers a accordé à M. Z... Arrive la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1972, 1973, 1974 et 1975 dans les rôles de la commune de Gemozac Charente-Mariti

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Vu le recours enregistré le 28 octobre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté au nom de l'Etat par le MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, CHARGE DU BUDGET, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 30 juin 1982 en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Poitiers a accordé à M. Z... Arrive la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1972, 1973, 1974 et 1975 dans les rôles de la commune de Gemozac Charente-Maritime , ainsi que de la majoration exceptionnelle et de la contribution de solidarité mises à sa charge respectivement au titre des années 1973 et 1975 et 1974 et 1975,
2° remette intégralement à la charge de M. Z... Arrive les impositions litigieuses,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Teissier du Cros, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Racine, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que pour prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. Z... Arrive a été assujetti au titre des années 1972, 1973, 1974 et 1975 ainsi que de la majoration exceptionnelle et de la contribution de solidarité qui lui ont été assignées respectivement au titre des années 1973 et 1975 et 1974 et 1975, au motif que le contribuable n'avait pas bénéficié des garanties de procédure auxquelles il aurait été en droit de prétendre, le tribunal administratif de Poitiers, dans le jugement attaqué, s'est fondé sur une instruction, en date du 28 avril 1976, par laquelle l'administration a invité ses agents à étendre aux contribuables faisant l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble, les garanties offertes en cas de vérification de comptabilité ; que le tribunal administratif ne pouvait opposer d'office à l'administration l'interprêtation que contiendrait, selon lui, cette instruction, dont le contribuable ne s'était pas lui-même prévalu ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'instruction susmentionnée pour prononcer la décharge des impositions contestées ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. Z... Arrive devant le tribunal administratif de Poitiers ;
Considérant que pour justifier l'évaluation d'office et en vertu des dispositions combinées des articles 8 et 69 A alors en vigueur du code général des impôts et de l'article 38 sexdécis de l'annexe III audit code, des bénéfices agricoles réalisés par M. Z... Arrive au titre des années 1972, 1973, 1974 et 1975, l'administration se prévaut, de l'existence d'une société de fait qui aurait réuni ce dernier et son frère, M. Y... Arrive, pour l'exploitation d'un domaine agricole sis à Chadeniers et, qui n'aurait pas rempli les obligations déclaratives mises à sa charge par les dispositions précitées ; qu'il appartient à l'administration d'établir l'existence de la société de fait dont s'agit ;

Considérant, en premier lieu, que l'administration se prévaut, pour établir l'existence d'une société de fait pendant les années d'imposition 1972, 1973 et 1974 du maintien entre M. Z... Arrive et son frère d'une indivision successorale remontant à 1954, qui n'a été dissoute que le 30 janvier 1975 ; que si les copropriétaires d'une exploitation indivise partagent en principe, du fait même de l'indivision, la responsabilité et les résultats de l'exploitation et sont de ce fait réputés exploiter les biens indivis en société de fait, ils peuvent cependant justifier de l'absence de société de fait en établissant qu'ils étaient convenus de séparer leurs exploitations avant l'intervention de l'acte mettant fin à l'indivision ; qu'il résulte de l'instruction que les acquisitions de terres réalisées en commun pendant les années litigieuses par MM. Z... et Georges X... avaient en réalité pour objet de réaménager l'exploitation en vue d'une séparation ultérieure ; que, dès le 15 janvier 1973 M. Z... Arrive s'était engagé, par lettre adressée à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural S.A.F.E.R. de la région Poitou-Charentes, à céder à son frère, sa part dans l'exploitation des biens indivis de Chadeniers, s'il était déclaré attributaire d'un terrain appartenant à un tiers ; que, dès la même année 1973, M. Z... Arrive exploitait seul à Bellevue un terrain distinct de l'exploitation indivise de Chadeniers héritée de son père, que son frère M. Y... Arrive poursuivait seul ; que des achats de parcelles survenus entre 1972 et le partage susmentionné ont eu pour objet, notamment par voie d'échange, de restructurer les deux exploitations dont s'agit ; qu'ainsi il peut être regardé comme établi par M. Z... Arrive que, dès 1973 la commune intention des coïndivisaires était de mettre fin à l'indivision ;

Considérant, en second lieu, en ce qui concerne l'année d'imposition 1975, que l'administration, qui ne peut plus se prévaloir du maintien de l'indivision successorale, et qui se borne à faire valoir que la renonciation des deux frères à l'option conjointe qu'ils avaient exercée le 28 janvier 1970 en faveur de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée n'est intervenue que le 1er janvier 1976, n'établit pas ainsi l'existence d'une société de fait ;
Considérant que, l'existence d'une société de fait entre MM. Z... et Georges X... n'étant pas établie l'administration n'était en droit ni d'évaluer d'office les bénéfices agricoles qu'aurait réalisés ladite société de fait, ni en conséquence de réintégrer, à concurrence de ses droits dans l'indivision les résultats globaux d'exploitation dans les bénéfices réalisés par M. Z... Arrive ;
Considérant que de ce qui précède, il résulte, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif, que le ministre n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a fait droit à cette demande
Article ler : Le recours du ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Z... Arrive et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - QUESTIONS COMMUNES - PERSONNES IMPOSABLES - SOCIETES DE FAIT - Charge de la preuve - Cas des exploitants agricoles en indivision.

19-04-01-02-01 Les copropriétaires d'une exploitation agricole indivise partagent en principe, du fait même de l'indivision, la responsabilité et les résultats de l'exploitation et sont de ce fait réputés exploiter les biens indivis en société de fait. Cependant, ils peuvent justifier de l'absence d'une telle société en établissant qu'ils étaient convenus de séparer leurs exploitations avant l'intervention de l'acte mettant fin à l'indivision. Preuve apportée en l'espèce.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - PERSONNES PHYSIQUES IMPOSABLES - Membre d'une exploitation agricole indivise - Conditions de l'existence d'une société de fait.

19-04-01-01-02-02 S'il appartient à l'administration d'établir l'existence d'une société de fait, la preuve est apportée par la seule existence d'une indivision entre copropriétaires d'une exploitation agricole.


Références :

CGI 8, 69 A
CGIAN3 38 sexdeciès


Publications
Proposition de citation: CE, 08 oct. 1986, n° 46527
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. M. Bernard
Rapporteur ?: M. Teissier du Cros
Rapporteur public ?: M. Racine

Origine de la décision
Formation : 9 / 7 ssr
Date de la décision : 08/10/1986
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 46527
Numéro NOR : CETATEXT000007623289 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1986-10-08;46527 ?
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