Vu la requête enregistrée le 14 novembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le Préfet, Commissaire de la République du département d'Indre-et-Loire et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 30 août 1983 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation :
1° de la délibération du 25 mai 1982 par laquelle le Conseil municipal de Chinon a prononcé le surclassement de la commune dans la catégorie démographique supérieure,
2° de l'arrêté du 2 juin 1982 du maire de Chinon nommant M. Y..., directeur des services techniques,
3° de deux arrêtés du 3 juin 1982 du maire de Chinon reclassant M. Y... dans l'échelle incidiaire des directeurs des services techniques des communes de 10 000 à 20 000 habitants, d'une part, et M. X... dans l'échelle incidiaire des secrétaires généraux des communes de 10 000 à 20 000 habitants d'autre part ;
2° annule pour excès de pouvoir ladite délibération et lesdits arrêtés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, modifiée par la loi n° 82-623 du 22 juillet 1982 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Terquem, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Desaché, Gatineau, avocat de la ville de Chinon et de MM. Y... et X...,
- les conclusions de M. Massot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le conseil municipal de Chinon Indre-et-Loire , ville comptant moins de 10 000 habitants selon les résultats du dernier recensement, se fondant sur les dispositions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 22 juin 1946 relatives aux traitements et indemnités des fonctionnaires, agents et ouvriers communaux qui prévoient que les communes touristiques, balnéaires et climatiques connaissant un surcroît saisonnier de population peuvent bénéficier exceptionnellement d'un classement dans une catégorie démographique supérieure à celle dont elles relèvent normalement, et ayant estimé que la population de Chinon pouvait dans ces conditions être évaluée à 10 031 habitants, a décidé, par délibération du 25 mai 1982, de "surclasser" la commune dans la catégorie des villes de 10 000 à 20 000 habitants ; qu'à la suite de cette délibération, le maire de Chinon, par un premier arrêté du 2 juin 1982, a nommé un directeur des services techniques puis, par deux arrêtés du 3 juin 1982, procédé au reclassement indiciaire de celui-ci et du secrétaire général de la ville ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R.114-2 du code des communes, contre lesquelles ne sauraient prévaloir les dispositions invoquées de la circulaire du 22 juin 1946 du ministre de l'intérieur, que le chiffre de la population municipale est celui qui résulte du reensement général de la population ; que les opérations de recensement relèvent de la responsabilité de l'Etat et que leurs résultats sont authentifiés par décret ; que, par suite, le conseil municipal de Chinon n'était pas compétent pour modifier le chiffre de sa population tel qu'il résultait du dernier recensement et décider de classer la commune dans une catégorie démographique supérieure ; que le Commissaire de la République du département d'Indre-et-Loire est, dès lors, fondé à soutenir que ladite délibération est entachée d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L.413.3, L.413.8 et L.413.9 du code des communes que, si l'arrêté ministériel qui dresse à titre indicatif le tableau type des emplois communaux ne s'impose pas par lui-même aux conseils municipaux, ceux-ci, lorsqu'ils décident de créer l'un des emplois compris dans l'arrêté qui fixe les échelles de traitement et dont ils sont tenus de respecter les dispositions, sont par là-même tenus de respecter les dispositions correspondantes qui, dans le tableau des emplois, donnent la définition desdits emplois ; que les arrêtés susmentionnés du maire de Chinon en date des 2 et 3 juin 1982, qui, se fondant sur le chiffre de population arrêté par la délibération du 25 mai 1982, ont procédé à la nomination d'un directeur des services techniques, emploi réservé aux communes de plus de 10 000 habitants, et au reclassement indiciaire de celui-ci et du secrétaire général de la ville dans les échelles de traitement des directeurs des services techniques et des secrétaires généraux des villes de 10 000 à 20 000 habitants, ont été pris en violation des dispositions de l'arrêté ministériel du 3 novembre 1958 portant tableau indicatif des emplois communaux et de l'arrêté ministériel du 5 novembre 1959 modifié fixant le classement indiciaire des emplois communaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Commissaire de la République du département d'Indre-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement en date du 30 août 1983, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération et des arrêtés municipaux attaqués ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 30 août 1983, ensemble la délibération du conseil municipal de Chinon Indre-et-Loire en date du 25 mai 1982 portant surclassement de la ville de Chinon dans la catégorie des villes de 10 000 à 20 000 habitants, l'arrêté du maire de Chinon du 2 juin 1982nommant M. Y... en qualité de directeur des services techniques dela ville et les arrêtés du maire de Chinon du 3 juin 1982 portant reclassement indiciaire de M. Y... et de M. X..., secrétaire général de la ville de Chinon, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la ville de Chinon, au Commissaire de la République du département d'Indre-et-Loire et au ministre de l'intérieur.