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31/10/1986 | FRANCE | N°56612

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 31 octobre 1986, 56612


Vu, 1° sous le n° 56 612, le recours enregistré le 27 janvier 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'urbanisme et du logement, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 18 novembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Marseille a déclaré l'Etat responsable des conséquences dommageables de l'inondation de l'Huveaune et l'a condamné à verser à la Société EMCO la somme de 286 915,18 F en réparation du préjudice subi ;
Vu, 2° , sous le n° 56 737 la requête sommaire et le mémoire complémentair

e enregistrés les 2 février 1984 et 4 juin 1984 au secrétariat du Conten...

Vu, 1° sous le n° 56 612, le recours enregistré le 27 janvier 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'urbanisme et du logement, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 18 novembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Marseille a déclaré l'Etat responsable des conséquences dommageables de l'inondation de l'Huveaune et l'a condamné à verser à la Société EMCO la somme de 286 915,18 F en réparation du préjudice subi ;
Vu, 2° , sous le n° 56 737 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 février 1984 et 4 juin 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société EMCO, Société Anonyme dont le siège social est ... Bouches-du-Rhône , représentée par son président directeur général en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 18 novembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Marseille a laissé à sa charge 80 % du préjudice causé par l'inondation de l'Huveaune à cette entreprise ;
- déclare l'Etat, le syndicat intercommunal de l'Huveaune et la ville de Marseille responsables en totalité des dommages subis par la société EMCO et les condamne à lui verser une somme de 1 464 575,90 F à titre de dommages intérêts avec intérêts de droit ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code rural ;
Vu le code des communes ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Wahl, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Desaché, Gatineau, avocat de la société E.M.C.O. et de Me Coutard, avocat de la ville de Marseille,
- les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du ministre de l'urbanisme et la requête de la société EMCO sont dirigés contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires les y contraignant, l'Etat et les communes n'ont pas l'obligation d'assurer la protection des propriétés voisines des cours d'eau navigables ou non navigables contre l'action naturelle des eaux ; qu'il ressort au contraire des articles 33 et 34 de la loi du 16 septembre 1807 que cette protection incombe aux propriétaires intéressés ; que, toutefois, la responsabilité des collectivités publiques peut être engagée lorsque les dommages subis ont été provoqués ou aggravés, soit par l'existence ou le mauvais état d'entretien d'ouvrages publics, soit par une faute commise par l'autorité administrative dans l'exercice de la mission qui lui incombe, en vertu des articles 103 et suivants du code rural, d'exercer la police des cours d'eau non domaniaux et de prendre toutes dispositions pour assurer le libre cours des eaux ;
Considérant que si le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit par arrêté du 26 octobre 1932, modifié par un arrêté du 13 janvier 1961, le curage de l'Huveaune, il s'est abstenu ultérieurement de prendre les dispositions nécessaires pour prévenir les conséquences dommageables des crues fréquentes dudit cours d'eau ; que, dès lors, le ministre de l'urbanisme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a mis à sa charge 20 % des conséquences dommageables de la crue de l'Huveaune qui s'est produite à la suite de pluies importantes les 16 et 17 janvier 1978 et qui a inondé les établissements de la société EMCO y provoquant de graves dégâts ; que la société EMCO n'est pas davantage fondée à demander sur ce point la réformation du jugement attaqué ;

Considérant que si le syndicat intercommunal de l'Huveaune, qui avait à l'origine pour seul objet l'exécution de travaux de défense contre les inondations et l'entretien du lit de la rivière, a étendu son objet en 1967 au "nettoyage de la rivière aux points les plus sensibles", et à la surveillance des berges afin d'empêcher les dépôts clandestins, cette circonstance n'est pas de nature à engager sa responsabilité dès lors qu'il appartenait à l'Etat de prendre les dispositions utiles pour veiller au curage du cours d'eau ; qu'il suit de là que la société EMCO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Marseille a mis hors de cause le syndicat intercommunal de l'Huveaune ;
Considérant que si la demande de reconnaissance de responsabilité de la ville de Marseille sur le fondement de la faute commise dans l'exercice du pouvoir de police du maire présentée pour la première fois en appel par la société EMCO est constitutive d'une demande nouvelle et n'est par suite pas recevable, cette dernière est en revanche fondée à soutenir comme elle l'avait fait en première instance, que les dommages qu'elle a subis sont dus pour partie à l'entretien insuffisant par la ville de Marseille des ponts situés sur l'Huveaune, et à demander en conséquence sur ce point la réformation du jugement attaqué qui a mis la ville de Marseille hors de cause ; qu'il sera fait une exacte appréciation des faits de l'espèce en attribuant à la ville de Marseille 20 % de la responsabilité des dommages dont s'agit ;

Considérant que le surplus des dommages dont le montant n'est pas contesté doit être laissé à la charge de la société EMCO en raison tant de l'implantation de ses établissements qui exposait son activité d'imprimerie aux crues dudit cours d'eau qu'au fait qu'elle n'avait pris aucune mesure spécifique de protection ;
Sur les intérêts :
Considérant que la société EMCO a droit aux intérêts au taux légal afférents à l'indemnité de 573 830,36 F à compter du 9 juillet 1981 date d'enregistrement de sa demande introductive d'instance devant le tribunal administratif ;
Article 1er : La ville de Marseille est condamnée à verserà la société EMCO la somme de 286 915,18 F.

Article 2 : La somme de 286 915,18 F que l'Etat a été condamné àverser à la société EMCO par le jugement du tribunal administratif deMarseille et celle d'un égal montant que la ville de Marseille est condamnée à verser à la même société par la présente décision porteront intérêt au taux légal à compter du 9 juillet 1981.

Article 3 : Le recours du ministre de l'urbanisme, et le surplusdes conclusions de la requête de la société EMCO sont rejetés.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 18 novembre 1983 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports, à la société EMCO, à la ville de Marseille et au syndicatintercommunal de l'Huveaune.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

67-03 TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 31 oct. 1986, n° 56612
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Wahl
Rapporteur public ?: Vigouroux

Origine de la décision
Formation : 2 / 6 ssr
Date de la décision : 31/10/1986
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 56612
Numéro NOR : CETATEXT000007689991 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1986-10-31;56612 ?
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