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03/11/1986 | FRANCE | N°49763

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 03 novembre 1986, 49763


Vu la requête enregistrée le 5 avril 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X..., demeurant ... à Paris 75014 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme un jugement, en date du 17 janvier 1983 en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de celles des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il avait été assujetti au titre des années 1973, 1974 et 1976 et à la majoration exceptionnelle de 1973 mises à sa charge dont il ne lui a pas été accordé dégr

èvement en cours d'instance ;
2° lui accorde la décharge des impositions...

Vu la requête enregistrée le 5 avril 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X..., demeurant ... à Paris 75014 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme un jugement, en date du 17 janvier 1983 en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de celles des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il avait été assujetti au titre des années 1973, 1974 et 1976 et à la majoration exceptionnelle de 1973 mises à sa charge dont il ne lui a pas été accordé dégrèvement en cours d'instance ;
2° lui accorde la décharge des impositions contestées ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu la loi du 29 décembre 1977 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Teissier du Cros, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Celice, avocat de M. Albert X...,
- les conclusions de M. Racine, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions en décharge des impositions contestées établies à la suite de la notification de redressements du 22 décembre 1977 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur, issue de la loi du 29 décembre 1977 et applicable à des impositions mises en recouvrement après le 1er janvier 1978 : "2. Les notifications de redressement doivent être motivées de manière à mettre le contribuable en état de pouvoir formuler ses observations ou faire connaître son acception. L'administration invite en même temps l'intéressé à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de cette notification. - Si le redevable donne son accord dans le délai prescrit ou si des observations présentées dans ce délai sont reconnues fondées, l'administration procède à l'établissement d'un rôle ou à l'émission d'un avis de mise en recouvrement sur la base acceptée par l'intéressé. - A défaut de réponse ou d'accord dans le délai prescrit, l'administration fixe la base de l'imposition et calcule le montant de l'impôt exigible, sous réserve du droit de réclamation du redevable après l'établissement du rôle ou l'émission d'un avis de mise en recouvrement" ;
Considérant qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de la société à responsabilité limitée "CENTRAPAP", l'inspecteur chargé de cette vérification s'est présenté au siège de la société le 22 décembre 1977 et a remis directement à M. X..., son gérant, les notifications de redressement, dune part, des bénéfices déclarés par l'entreprise au titre notamment des exercices clos en 1973, 1974 et 1976 et, d'autre part, des revenus déclarés personnellement par M. X... au titre des mêmes années à raison des bénéfices sociaux regardés comme lui ayant été distribués ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'une attestation en date du 23 mai 1981, dont l'exactitude n'est pas contestée, émanant du représentant d'un cabinet comptable qui était alors présent, que le vérificateur "a refusé à M. X... le délai légal de réponse d'un mois et l'assistance d'un conseil fiscal de son choix" et "qu'il l'a menacé, en cas de non-acceptation immédiate des bénéfices notifiés, de redressements encore plus élevés" pouvant mettre en péril l'existence même de l'entreprise ; que, dans ces conditions, le contribuable doit être regardé comme apportant la preuve d'une part, que l'acceptation qu'il a donnée sur le champ des redressements concernant son imposition personnelle a été viciée par les pressions exercées par le vérificateur et a retiré toute portée à celle-ci et, d'autre part, dans les circonstances particulières de l'affaire, que lesdites pressions ont été de nature à l'empêcher de revenir sur son acceptation dans le délai de trente jours qui lui était imparti en vertu des dispositions précitées de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts ; que les menaces dont a été assortie la remise des notifications de redressement ont également été de nature à priver le contribuable des garanties de la procédure contradictoire instituées par les dispositions de l'article 1649 quinquies A3 du code selon lesquelles le contribuable peut demander que son désaccord avec l'administration soit soumis à la commission départementale des impôts ; que le requérant est, dès lors, fondé à soutenir que la procédure d'imposition consécutive à la notification de redressements du 22 décembre 1977 a été irrégulière et à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à la décharge des impositions contestées qui
procèdent de ladite notification ;
Sur les conclusions en décharge des impositions contestées établies à la suite de la notification de redressements du 18 janvier 1978 :
Considérant qu'il ressort des mentions de la notification de redressements effectuée le 18 janvier 1978 que, par cette notification, le vérificateur s'est borné à rectifier une erreur de calcul en ce qui concerne le montant de l'imposition supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à la charge de la société à responsabilité limitée "CENTRAPAP" au titre de l'année 1976 à raison du rehaussement du bénéfice envisagé par la notification susmentionnée du 22 décembre 1977 et, corrélativement, une erreur identique en ce qui concerne le montant déductible de l'excédent de distribution imposé entre les mains de M. X... ; que la notification en cause étant ainsi liée de façon indissociable à la procédure sur laquelle ont été établis les redressements primitifs notifiés le 22 décembre 1977, lesquels doivent être regardés, ainsi qu'il a été dit, comme nuls et de nul effet, le requérant est, par voie de conséquence, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à la décharge des impositions correspondant à cette seconde notification ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les agissements du vérificateur au cours de la procédure d'imposition auraient fait subir à M. X... un préjudice moral, de nature à lui ouvrir droit à réparations ;
Sur les conclusions tendant au remboursement de frais de procédure :

Considérant qu'aux termes de l'article R.207-1 du livre des procédures fiscales : "Lorsqu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie, les frais de signification ainsi que, le cas échéant, les frais d'enregistrement du mandat sont remboursés. Les frais d'expertise sont supportés par la partie qui n'obtient pas satisfaction... Le contribuable ne peut obtenir le remboursement d'autres frais" ; que le requérant, qui n'allègue pas avoir exposé des frais de la nature de ceux que vise le texte précité, n'est en conséquence pas fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui rembourser les frais qu'il aurait exposés pour "défendre ses droits" ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'allocation d'une indemnité et au remboursement de frais de procédure ;
Article 1er : Le jugement en date du 17 janvier 1983 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté lesconclusions de la demande de M. X... à fin de décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti au titre, respectivement des années 1973, 1974 et 1976 et de l'année 1973 et dont il n'a pas été accordé dégrèvement.

Article 2 : M. X... est déchargé des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle restant à sa charge au titre, respectivement, des années 1973, 1974 et 1976 et de l'année 1973.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances etde la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 49763
Date de la décision : 03/11/1986
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-02-02-07 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - NOTIFICATION DE REDRESSEMENT - OBSERVATIONS OU ACCEPTATION DU CONTRIBUABLE -Droit du contribuable de connaître les conséquences de son acceptation - Notion d'acceptation - Absence - Acceptation obtenue par le vérificateur à la suite de pressions sur un contribuable.

19-01-03-02-02-07 Un vérificateur, remettant directement à un contribuable les notifications de redressement, a refusé à celui-ci le délai légal de réponse d'un mois et l'assistance d'un conseil fiscal de son choix et l'a menacé, en cas de non acceptation immédiate des bénéfices notifiés, de redressements encore plus élevés pouvant mettre en péril l'existence même de son entreprise, ainsi que cela ressort d'une attestation dont l'administration ne conteste pas l'exactitude. Ce contribuable doit être regardé comme apportant la preuve d'une part que l'acceptation qu'il a donnée sur le champ des redressements concernant son imposition personnelle a été viciée par les pressions exercées par le vérificateur et a retiré toute portée à celle-ci et d'autre part, dans les circonstances particulières de l'affaire, que ces pressions ont été de nature à l'empêcher de revenir sur son acceptation dans le délai de trente jours dont il disposait en vertu de l'article 1649 quinquiès A du C.G.I.. Enfin les menaces dont il a fait l'objet ont été de nature à le priver des garanties de la procédure contradictoire de l'article 1649 quinquiès A 3 du C.G.I. relatif à la possibilité de saisine de la commission départementale. En conséquence, irrégularité de la procédure d'imposition consécutive à la notification de redressements et décharge des impositions qui procèdent de cette notification.


Références :

CGI 1649 quinquiès A 3
CGI livre des procédures fiscales R207-1
Loi 77-1453 du 29 décembre 1977


Publications
Proposition de citation : CE, 03 nov. 1986, n° 49763
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. M. Bernard
Rapporteur ?: M. Teissier du Cros
Rapporteur public ?: M. Racine

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:49763.19861103
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