Vu la requête enregistrée le 6 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION, dont le siège est ... à Paris 75015 , représenté par son directeur en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 31 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé à la demande de MM. Y... et Z... l'état exécutoire émis le 10 mars 1982 à leur encontre par le directeur de l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION au titre du versement de la contribution spéciale due, en vertu de l'article L. 341-7 du code du travail, à raison de l'emploi illégal d'un travailleur étranger ;
2° rejette la demande présentée par MM. Y... et Z... devant le tribunal administratif de Paris,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi du 4 août 1981 portant amnistie ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Ronteix, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Van Ruymbeke, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 341-6 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date des faits de l'espèce, "il est interdit à toute personne d'engager ou de conserver à son service un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, lorsque la possession de ce titre est exigée en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux" ; qu'aux termes de l'article L. 341-7 du même code, "sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être intentées à son encontre, l'employeur qui aurait occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6 premier alinéa sera tenu d'acquitter une contribution spéciale au bénéfice de l'office national d'immigration ... " ;
Considérant que si, aux termes de l'article 13 de la loi du 4 août 1981 : "Sont amnistiés les faits commis antérieurement au 22 mai 1981 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles", la contribution spéciale prévue à l'article L. 341-7 précité n'est ni une sanction disciplinaire ni une sanction professionnelle au sens de l'article 13 précité ; que, dès lors, l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif s'est fondé pour annuler l'état exécutoire émis à l'encontre de MM. Y... et Z... en vue du recouvrement de la contribution spéciale prévue à l'article L. 341-7 sur ce que les faits à raison desquels cette contribution leur a été réclamée auraient été amnistiés en vertu dudit article 13 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'ppel, d'examiner les autres moyens soulevés par MM. Y... et Z... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que, si les faits constatés par le juge pénal saisi de poursuites pour infraction à l'article L. 341-6 du code du travail, et qui commandent nécessairement de dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée s'imposent à l'administration comme au juge administratif, la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tiré de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité ; qu'il appartient dans ce cas à l'autorité administrative d'apprécier si les mêmes faits sont suffisamment établis et, dans l'affirmative, s'ils justifient l'application de la contribution spéciale prévue à l'article L. 341-7 du même code ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier et notamment du procès-verbal de police établi le 17 mai 1979 que MM. Y... et Z..., qui exploitent à Paris un commerce d'alimentation générale, ont employé un ressortissant tunisien, M. X..., dépourvu de titre l'autorisant à travailler en France, que la violation des dispositions de l'article L. 341-6 précité du code du travail est établie et justifiait ainsi l'assujettissement de MM. Y... et Z... à la contribution spéciale visée à l'article L. 341-7 ; que la circonstance que le tribunal de grande instance de Paris a, par un jugement devenu définitif en date du 14 novembre 1979, relaxé M. Y... des fins de la poursuite engagée contre lui pour l'emploi irrégulier de M. X..., au motif "qu'aucun élément du dossier ne permet d'infirmer qu'il s'agissait, en l'espèce, d'une aide bénévole de courte durée qui ne peut être assimilée à un travail salarié" ne fait pas obstacle à ce que la contribution spéciale susmentionnée puisse être légalement mise à la charge de MM. Y... et Z... dès lors que les faits retenus à leur encontre sont établis ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'état exécutoire émis le 10 mars 1982 à l'encontre de MM. Y... et Z... ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 17 mai 1983 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par MM. Y... et Z... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION, à MM. Y... et Z... et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.