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03/04/1987 | FRANCE | N°77061

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 03 avril 1987, 77061


Vu 1°, sous le n° 77 061, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mars 1986 et 21 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Michel B..., tête de liste de la liste "Rassemblement pour le Val-de-Marne" aux éléctions régionales du 16 mars 1986 dans le département du Val-de-Marne, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 1986 dans le département du Val-de-Marne pour l'élection des conseillers régionaux de la région Ile-de-France ;

Vu 2°, sous

le n° 77 062, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés l...

Vu 1°, sous le n° 77 061, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mars 1986 et 21 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Michel B..., tête de liste de la liste "Rassemblement pour le Val-de-Marne" aux éléctions régionales du 16 mars 1986 dans le département du Val-de-Marne, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 1986 dans le département du Val-de-Marne pour l'élection des conseillers régionaux de la région Ile-de-France ;

Vu 2°, sous le n° 77 062, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mars 1986 et 21 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michelle X..., demeurant ... 94300 , M. Roland C..., demeurant ... à Saint-Maur des Fossés 94100 , et M. D... GARANT, demeurant ... à La Varenne Saint-Hilaire 94210 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 1986 dans le département du Val-de-Marne pour l'élection des conseillers régionaux de la région Ile-de-France, par les mêmes moyens que ceux précédemment exposés dans la requête n° 77 061 présentée par M. Michel B... ;

Vu 3°, sous le n° 77 063, la requête enregistrée le 26 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Michel B..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 1986 dans le département du Val-de Marne pour l'élection des conseillers régionaux de la région Ile-de-France ;

Vu 4°, sous le n° 77 064, la requête enregistrée le 26 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Michelle X..., M. Roland C... et M. D... GARANT, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 1986 dans le département du Val-de-Marne pour l'élection des conseillers régionaux d'Ile-de-France ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lambron, Auditeur,
- les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n°s 77 061 et 77 063 de M. B... et les requêtes n°s 77 062 et 77 064 de Mme X... et autres sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour faire l'objet d'une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes :
En ce qui concerne le déroulement des opérations électorales dans les communes de Villeneuve-le-Roi, Arcueil, Orly, Vitry-sur-Seine et Champigny-sur-Marne :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'articl R.46 du code électoral, dont les dispositions ont été rendues applicables aux délégués titulaires et suppléants par l'article R.47 du même code : "Les noms, prénoms, date et lieu de naissance et adresse des assesseurs désignés par les candidats des listes en présence, ainsi que l'indication du bureau de vote où ils sont affectés, sont notifiés au maire, par pli recommandé, au plus tard l'avant-veille du scrutin à 18 heures" ; qu'il résulte de l'instruction que la liste "Rassemblement pour le Val-de-Marne" n'a notifié au maire d'Arcueil, par pli recommandé, le nom des assesseurs et délégués qu'elle désignait pour siéger lors des opérations électorales en cause que le samedi 15 mars, veille du scrutin ; qu'ainsi, et nonobstant les recommandations contenues dans une circulaire préfectorale qui invitait à régulariser les notifications tardives, le maire d'Arcueil n'était pas tenu de comprendre, dans la composition des bureaux de vote, les assesseurs et délégués désignés par la liste susmentionnée ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que les conditions dans lesquelles s'est déroulé le scrutin dans les 4ème et 10ème bureaux de la commune de Villeneuve-le-Roi, et notamment la circonstance que 84 émargements ont été portés sur les listes alors qu'ils se rapportent à des électeurs décédés ou ne s'étant pas présentés au bureau de vote, révèlent l'existence d'une manoeuvre de nature à altérer le résultat du vote ; que les requérants sont, par suite, fondés à demander l'annulation des opérations électorales dans ces deux bureaux ;
Considérant, en troisième lieu, que dans une dizaine de bureaux de vote des communes d'Arcueil, Orly, Vitry-sur-Seine et Champigny-sur-Marne, un écart a été constaté, portant au total sur 109 suffrages, entre le nombre des émargements et le nombre des enveloppes trouvées dans les urnes ; qu'en raison de l'existence de ces votes irréguliers et dans l'impossibilité de savoir à qui ceux-ci ont été attribués, il y a lieu de retrancher hypothétiquement 109 unités tant du nombre des suffrages exprimés que de celui des voix attribuées à chacune des listes ayant obtenu des élus ;
Considérant, en quatrième lieu, que dans les 2°, 9° et 27° bureaux de la commune de Vitry-sur-Seine, le nombre des émargements a été supérieur au nombre des enveloppes trouvées dans l'urne, respectivement de 1, 2 et 4 unités ; qu'il a de même été constaté dans les 1er et 10° bureaux de la commune d'Arcueil que le nombre d'émargements dépassait d'une unité le nombre d'enveloppes ; que cette circonstance, alors qu'il n'est pas établi qu'elle ait été la conséquence d'une manoeuvre ou d'une fraude, est sans incidence sur le résultat du scrutin en cause ;

Considérant, en cinquième lieu, que si les requérants soutiennent d'une part que des enveloppes auraient été frauduleusement introduites dans les urnes du 5° bureau de la commune d'Arcueil et du 15° bureau de la commune de Champigny-sur-Marne, d'autre part que dans ce dernier bureau un assesseur aurait effectué des doubles émargements, ces allégations ne sont étayées d'aucun élément de preuve de nature à établir l'existence d'une fraude ; qu'il n'est pas davantage établi que les opérations électorales se seraient déroulées dans la commune d'Arcueil en l'absence de tout contrôle de représentants des listes d'opposition ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R.61 du code électoral : "Le vote de chaque électeur est constaté par la signature ou le paraphe de l'un des membres du bureau, apposé à l'encre sur la liste d'émargement en face du nom du votant. En même temps, la carte électorale ou l'attestation d'inscription en tenant lieu est estampillée au moyen d'un timbre portant la date du scrutin. Les opérations visées au présent article sont réparties entre les assesseurs désignés par les candidats ou listes en présence conformément aux dispositions de l'article R.44. En cas de désaccord sur cette répartition, il est procédé par voie de tirage au sort à la désignation du ou des assesseurs chargés respectivement desdites opérations" ; que les requérants soutiennent que le président du 19° bureau de vote de la commune de Champigny-sur-Marne a refusé de confier par rotation la tenue de la liste d'émargement aux divers membres du bureau ; que si, malgré l'existence d'un désaccord au sens de l'article R.61 du code électoral précité, le président a maintenu son refus et n'a pas fait procéder au tirage au sort, cette irrégularité n'est pas de nature à vicier les opérations du scrutin dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle ait été constitutive d'une manoeuvre susceptible d'altérer les résultats dudit scrutin ;
En ce qui concerne le déroulement des opérations électorales dans la commune d'Ivry-sur-Seine :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la liste "Rassemblement pour le Val-de-Marne n'a notifié par pli recommandé au maire d'Ivry-sur-Seine le nom des assesseurs et délégués qu'elle désignait pour siéger lors des opérations électorales que le samedi 16 mars 1986, veille du scrutin, alors que les articles R.46 et R.47 du code électoral précités prévoient que cette notification doit intervenir au plus tard l'avant-veille du scrutin à 18 heures ; que si les requérants soutiennent que M. Y... a déposé lui-même à la mairie la liste prévue aux articles R.46 et R.47 le vendredi à 15 h 30, ce dépôt n'a fait l'objet d'aucun récépissé et sa réalité même n'est pas établie ; qu'ainsi, le maire d'Ivry-sur-Seine n'était pas tenu de comprendre, dans la composition des bureaux de vote visés par les requérants, les assesseurs et délégués désignés par la liste susmentionnée ;
Considérant, en second lieu, que si dans le 31ème bureau 7 électeurs n'ont pas produit de pièce d'identité avant de voter, cette circonstance est sans influence sur la régularité des opérations électorales dès lors qu'il n'est apporté aucun commencement de preuve tendant à établir que des électeurs aient pu, de ce fait, voter sous une fausse identité ; que si le procès-verbal du 34° bureau mentionne que le scrutin y a commencé avec un léger retard, il n'est pas allégué que cette circonstance ait empêché les électeurs de se rendre aux urnes ; qu'elle est, par suite, sans incidence sur les résultats du scrutin ;
Considérant, en troisième lieu, que dans les 26° et 29° bureaux le nombre des bulletins trouvés dans l'urne a été supérieur respectivement de 8 et de 26 au nombre d'émargements ; que, par suite, il y a lieu de retrancher hypothétiquement 34 unités tant du nombre de suffrages exprimés que de celui des voix attribuées à chacune des listes ayant obtenu des élus ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'examen des feuilles de pointage des bureaux n° 5, 13 et 35, que les résultats portés sur certaines de ces feuilles ont été frauduleusement modifiés ; que ladite fraude a consisté à attribuer à la liste conduite par M. A... des voix obtenues par d'autres listes en présence, à raison de 17 voix pour le 5° bureau, de 20 voix pour le 13° bureau et de 18 voix pour le 35° bureau ; qu'il y a lieu de déduire 55 voix du nombre des suffrages obtenus dans le département par la liste susmentionnée et de rajouter respectivement 38 voix et 17 voix aux résultats des listes conduites par M. E... et M. B... ; qu'en revanche, la circonstance que sur 3 feuilles de pointage des 23°, 24° et 28° bureaux les barres décomptant les voix n'aient pas été inscrites est sans incidence sur la régularité du scrutin dès lors qu'y figure le nombre de voix obtenues par chaque liste et qu'aucune réclamation n'a été consignée sur les procès-verbaux ; que si les requérants prétendent que des traces de gommage apparaissent sur les feuilles de pointage de plusieurs autres bureaux, il résulte de l'examen desdits documents que cette circonstance, dans les cas où elle est établie, n'est pas par elle-même de nature à révéler l'existence d'une fraude ; que l'allégation selon laquelle les procès-verbaux de trois bureaux auraient été remplis avant la fin du décompte des voix n'est assortie d'aucun élément de preuve qui permettrait de la tenir pour établie ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article R.67 du code électoral : "Immédiatement après la fin du dépouillement le procès-verbal des opérations électorales est rédigé par le secrétaire dans la salle de vote, en présence des électeurs. Il est établi en deux exemplaires, signés de tous les membres du bureau. Les délégués des candidats ou listes en présence sont obligatoirement invités à contresigner ces deux exemplaires ..." ; qu'aux termes de l'article R.69 du même code : "Lorsque les collèges électoraux sont répartis en plusieurs bureaux de vote, le dépouillement du scrutin est d'abord opéré par bureau et les procès-verbaux sont établis conformément aux dispositions de l'article R.67. Le président et les membres de chaque bureau remettent ensuite les deux exemplaires du procès-verbal et les annexes au premier bureau, constitué en bureau centralisateur et chargé d'opérer le recensement général des votes en présence des présidents des autres bureaux. Les résultats arrêtés par chaque bureau et les pièces annexes ne peuvent en aucun cas être modifiés. Un procès-verbal récapitulatif est établi en présence des électeurs en double exemplaire. Il est signé par les membres du premier bureau, les délégués des candidats ou des listes dûment habilités auprès de celui-ci et les présidents des autres bureaux ..." ; que si, d'une part, les requérants soutiennent que la rédaction de procès-verbaux des opérations de vote s'est faite en l'absence de toute possibilité de contrôle et, par suite, en violation des dispositions de l'article R.67 précité, cette allégation n'est pas assortie de précisions quant aux bureaux de vote où les électeurs auraient été empêchés d'exercer leur contrôle sur les opérations de dépouillement, ni d'éléments de preuve permettant de regarder les faits invoqués comme établis ; que si, d'autre part, les requérants affirment que lors de l'établissement du procès-verbal récapitulatif, un représentant de la liste "Rassemblement pour le Val-de-Marne" et plusieurs membres de la commission de contrôle n'ont pu accéder au bureau centralisateur,
cette violation, à la supposer établie, de l'article R.69 du code précité, n'est pas dans les circonstances de l'espèce, de nature à entraîner l'annulation des opérations électorales, dès lors qu'il résulte des pièces du dossier que les procès-verbaux des bureaux de vote de la commune d'Ivry-sur-Seine et celui du bureaucentralisateur portent des résultats identiques et que le procès-verbal dudit bureau centralisateur a été signé sans réclamation des représentants des différentes listes ;
Considérant que l'annulation des résultats des 4ème et 10ème bureaux de la commune de Villeneuve-le-Roi ainsi que la déduction des voix opérée comme il a été indiqué ci-dessus tant pour les bureaux de vote des communes d'Arcueil, Orly, Vitry-sur-Seine et Champigny-sur-Marne que pour ceux de la commune d'Ivry-sur-Seine restent sans influence sur la répartition des sièges, les listes conduites par MM. E..., B..., GERMA, GRIOTTERAY et d'ORMESSON obtenant toujours respectivement 7, 5, 4, 4 et 3 sièges ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les protestations présentées par M. B... et Mme X... et autres doivent être rejetées ;
Article 1er : Les requêtes susvisées de M. B... et de Mme X..., M. C... et M. Z... sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B..., à Mme X..., à M. C..., à M. Z..., à M. A... et au ministrede l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 77061
Date de la décision : 03/04/1987
Type d'affaire : Administrative

Analyses

28-07-02 ELECTIONS - ELECTIONS DIVERSES - ELECTIONS REGIONALES - [1] Composition des bureaux de vote - Désignation des assesseurs [2] Opérations électorales - Rédaction des procès-verbaux - Manoeuvres de nature à altérer le résultat du scrutin.


Références :

Code électoral R46, R47, R61, R67 et R69


Publications
Proposition de citation : CE, 03 avr. 1987, n° 77061
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Lambron
Rapporteur public ?: Mme Hubac

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:77061.19870403
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