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29/05/1987 | FRANCE | N°67286

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 29 mai 1987, 67286


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 mars 1985 et 23 mai 1985 au greffe du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES DE LA MEUSE, représentée par son président en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule un jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 31 janvier 1985, annulant la décision de l'inspecteur du travail en date du 28 juin 1984 autorisant le licenciement de M. Paul X..., délégué syndical,
2° rejette la demande portée par M. Paul X... devan

t le tribunal administratif de Nancy,
Vu les autres pièces du dossie...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 mars 1985 et 23 mai 1985 au greffe du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES DE LA MEUSE, représentée par son président en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule un jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 31 janvier 1985, annulant la décision de l'inspecteur du travail en date du 28 juin 1984 autorisant le licenciement de M. Paul X..., délégué syndical,
2° rejette la demande portée par M. Paul X... devant le tribunal administratif de Nancy,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Leusse, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de la Meuse,
- les conclusions de Mme de Clausade, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.412-18 du code du travail : "Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ou de l'autorité qui en tient lieu", et qu'aux termes de l'article R.436-4 du même code : "L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, saisi le 1er juin 1984 d'une demande de la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES DE LA MEUSE tendant à obtenir l'autorisation de licencier M. X..., délégué syndical, l'inspecteur du travail, chef du service départemental du travail et de la protection sociale agricoles de la Meuse a, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 4 juin 1984, demandé à M. X... de se présenter en ses bureaux le 14 juin suivant en vue d'un entretien, tout en l'invitant à faire connaître si ce lieu et cette date lui convenaient et en précisant qu'il était prêt, si nécessaire, à se rendre au domicile de l'intéressé ; que, selon les indications portées sur l'enveloppe de cette lettre par le service des postes, ladite lettre a été présentée le 12 juin 1984 à l'adresse à laquelle résidait alors M. X..., à Thones, et qu'en l'absence de l'intéressé, un avis de passage lui fut laissé ; qu'une seconde présentation fut effectuée et un second avis de passage déposé le 25 juin ; que si M. X... allègue que son état de santé ne lui permettait pas d'aller retirer cette lettre au bureau de poste, ses affirmations ne sont pas corroborées par les pièces du dossier, dont il ressort que l'intéressé, alors en congé de maladie, était autorisé à sortir et en état d'aller retirer le courrier qui lui était adressé ; que, dans ces conditions, c'est par son fait même que M. X... n'a pu être entendu par l'inspecteur du travail au cours de l'enquête que celui-ci a régulièrement conduite et à l'issue de laquelle il a, par décision en date du 28 juin 1984, autorisé le licenciement de l'intéressé ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé cette décision au motif que M. X... n'avait pas été mis en mesure de bénéficier de la garantie de l'enquête contradictoire prescrite par l'article R.436-4 du code du travail ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif à l'encontre de la décision autorisant son licenciement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L.412-18 du code du travail, les délégués syndicaux bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi ;
Considérant que la demande d'autorisation de licenciement présentée par la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES DE LA MEUSE était motivée par de nombreuses absences au travail non autorisées et non justifiées de M. X..., sa négligence dans l'exécution de ses tâches professionnelles et des retards répétés dans la transmission à son employeur des avis d'arrêt et de prolongation de maladie ; qu'il lui était également reproché d'avoir eu, en tant que gérant d'une société exploitant un établissement qui fut fermé par mesure de police, un comportement personnel incompatible avec ses fonctions de chef du service juridique de la Fédération ; que ces faits, qui ne sont pas matériellement inexacts, étaient d'une gravité suffisante pour justifier légalement l'autorisation de licencier l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES DE LA MEUSE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision de l'inspecteur du travail, chef du service départemental du travail et de la protection sociale agricoles de la Meuse en date du 28 juin 1984 l'autorisant à licencier M. X... ;
Article 1er : Le jugement en date du 31 janvier 1985 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunaladministratif de Nancy est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES DE LA MEUSE, à M. X... et au ministre de l'agriculture.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 67286
Date de la décision : 29/05/1987
Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAIL - LICENCIEMENT - SALARIES PROTEGES - Procédure préalable à l'autorisation administrative - Enquête contradictoire - Convocation du salarié restée sans réponse - Régularité.

TRAVAIL - LICENCIEMENT - SALARIES PROTEGES - LICENCIEMENT POUR FAUTE - FAUTE D'UNE GRAVITE SUFFISANTE - EXISTENCE - Absences non justifiées.


Références :

Code du travail L142-18 et R436-4


Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 1987, n° 67286
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: de Leusse
Rapporteur public ?: Mme de Clausade

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:67286.19870529
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