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08/07/1987 | FRANCE | N°53700

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 08 juillet 1987, 53700


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 25 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°- réforme le jugement du 2 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la société "Mondial Manutention", société à responsabilité limitée dont le siège est ..., à Maisons-Alfort 94700 , décharge des droits supplémentaires et indemnités de retard qui lui ont été assignés, en matière de taxe sur la valeur ajoutée et pour la période du 1er janvier 1974 au 31 déc

embre 1977, par avis de mise en recouvrement du 28 janvier 1980,
2°- remette...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 25 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°- réforme le jugement du 2 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la société "Mondial Manutention", société à responsabilité limitée dont le siège est ..., à Maisons-Alfort 94700 , décharge des droits supplémentaires et indemnités de retard qui lui ont été assignés, en matière de taxe sur la valeur ajoutée et pour la période du 1er janvier 1974 au 31 décembre 1977, par avis de mise en recouvrement du 28 janvier 1980,
2°- remette à la charge de la société "Mondial-Manutention" 2 350 407 F de droits, et 820 439 F d'indemnité de retard,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales du nouveau code des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fabre, Maître des requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la Société Mondial Manutention,
- les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts dans la rédaction en vigueur durant la période d'imposition, sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée toutes les affaires qui "relèvent d'une activité de nature industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats" ; qu'aux termes de l'article 266 du même code, "le chiffre d'affaires imposable est constitué... c pour les prestations de services, par le prix des services ou la valeur des biens ou services reçus en paiement" ; qu'il résulte de ces dispositions que toutes les sommes reçues de ses clients par un prestataire de services exerçant une activité de nature industrielle ou commerciale constituent des recettes passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, même si certaines d'entre elles, correspondant à des remboursements exacts de frais, n'ont pas pour objet et ne peuvent pas avoir pour effet la réalisation d'un profit ; que l'article 267 du même code prévoit, toutefois, que "... 3. Les sommes remboursées aux personnes qui rendent compte exactement à leurs commettants des débours effectués en leurs lieu et place n'entrent pas dans les prix des services à raison desquels elles sont imposées" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en vertu de contrats passés avec les sociétés "Editions mondiales" et "Imprimerie Cino Del Duca", la SARL Mondial-Manutention effectue pour ces dernières des opérations de manutention, transports, stockage, ainsi que des services d'entretien des locaux, nécessités par les activités d'éditeur et d'imprimeur de ses clientes ; que ladite société conserve seule la qualité d'employeur des personnes qu'elle recrute à cet effet et qu'elle affecte à ces prestations de services ; qu'ainsi, bien qu'elle facture distinctement à ses deux clientes, d'une part, le montant exact et justifié des charges salariales afférentes à chaque personne mise à leur disposition et, d'autre part, le montant d'une commission prévue au contrat, la SARL Mondial-Manutention agit pour son propre compte en qualité de prestataire de service, sans que ses clients puissent être regardés comme des commettants au sens du 3 de l'article 267 précité, dont elle ne saurait ainsi se prévaloir ; qu'elle est, dès lors, redevable au regard des dispositions susrappelées de la taxe sur la valeur ajoutée à raison de la totalité des sommes qu'elle perçoit en rémunération de ses services ; que le ministre de l'économie, des finances et du budget est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a jugé que la société était en droit de bénéficier de la disposition précitée du 3 de l'article 267 du code général des impôts ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé devant le tribunal administratif par la société à responsabilité limitée "Mondial-Manutention" ;
Considérant que la société invoquait, en outre, devant le tribunal administratif, en se prévalant des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice de la doctrine administrative, notamment exprimée dans une réponse ministérielle du 22 juin 1971 à la question d'un parlementaire, selon laquelle les "régisseurs de travaux" ne doivent la taxe sur la valeur ajoutée que sur le montant de leur rémunération, à l'exclusion des sommes qu'ils reçoivent en remboursement des dépenses qu'ils ont engagées pour l'exécution des travaux et dont ils rendent le compte exact au maître de l'oeuvre ; qu'il résulte de l'instruction que la société "Mondial-Manutention" exécute sous les directives et sous le contrôle des sociétés "Editions Mondiales" et "Imprimerie Cino Del Duca" et sans en assumer la responsabilité les diverses opérations qui lui sont confiées, et rend à ces sociétés le compte exact des heures de travail effectuées pour ce faire par ses personnels et dont elle leur facture le coût ; qu'ainsi, la société exerce son activité dans les conditions mêmes que vise la doctrine administrative relative aux "régisseurs de travaux", et, par suite, est en droit de se prévaloir de ladite doctrine au soutien de sa demande en décharge de l'imposition litigieuse ;

Considérant qu'il suit de là que le ministre de l'économie, des finances et du budget n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à la société à responsabilité limitée "Mondial-Manutention" la décharge qu'elle sollicitait ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et à la société à responsabilité limitée "Mondial-Manutention".


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02-01-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PERSONNES ET OPERATIONS TAXABLES - OPERATIONS TAXABLES -Divers - Activités des personnes morales - Prestations de services effectuées pour des tiers - Notion de commettant au sens de l'article 267-3 du C.G.I. - Absence d'exonération au regard des articles 256, 266 et 267-3 du C.G.I., mais assujettissement sur le seul montant de sa rémunération du fait de la doctrine administrative.

19-06-02-01-01 Une société effectue pour d'autres des opérations de manutention, transports, stockage, ainsi que des services d'entretien des locaux. Cette société conserve seule la qualité d'employeur des personnels qu'elle recrute à cet effet et qu'elle affecte à ces prestations de services. Bien qu'elle facture distinctement à ses clients d'une part le montant exact et justifié des charges salariales afférentes à chaque personne mise à leur disposition et d'autre part le montant d'une commission prévue dans les contrats signés par eux, la société requérante agit pour son propre compte en qualité de prestataire de service, sans que ses clients puissent être regardés comme des commettants au sens de l'article 267-3 du C.G.I.. Ainsi elle est redevable de la T.V.A. à raison de la totalité des sommes qu'elle perçoit en rémunération de ses services, au regard des articles 256, 266 et 267-3 du C.G.I.. Mais il résulte de l'instruction que la société exécute les diverses opérations qui lui sont confiées pour ses clients sous leurs directives et contrôle et sans en assumer la responsabilité et qu'elle leur rend le compte exact des heures de travail effectuées pour ce faire par ses personnels et dont elle leur facture le coût. Elle exerce donc son activité dans les conditions visées par une réponse ministérielle du 22 juin 1971 à la question d'un parlementaire, selon laquelle les "régisseurs de travaux" ne doivent la T.V.A. que sur le montant de leur rémunération, à l'exclusion des sommes qu'ils reçoivent en remboursement des dépenses qu'ils ont engagées et dont ils rendent le compte exact au maître de l'oeuvre.


Références :

CGI 256, 266, 267 3, 1649 quinquies E
CGI livre des procédures fiscales L80 A


Publications
Proposition de citation: CE, 08 jui. 1987, n° 53700
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. M. Bernard
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Le Roy

Origine de la décision
Formation : 9 / 8 ssr
Date de la décision : 08/07/1987
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 53700
Numéro NOR : CETATEXT000007622460 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1987-07-08;53700 ?
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