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09/10/1987 | FRANCE | N°72670

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 09 octobre 1987, 72670


Vu le recours sommaire enregistré le 1er octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre des affaires sociales et de l'emploi et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement du 8 juillet 1985 du tribunal administratif de Toulouse en tant que celui-ci a partiellement annulé la décision de l'inspecteur du travail de Toulouse en date du 16 septembre 1983 et la décision du directeur régional du travail et de l'emploi de Midi-Pyrénées en date du 13 janvier 1984 demandant le retrait ou la modification de certaines dispositions cont

enues dans le règlement intérieur établi par la Régie national...

Vu le recours sommaire enregistré le 1er octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre des affaires sociales et de l'emploi et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement du 8 juillet 1985 du tribunal administratif de Toulouse en tant que celui-ci a partiellement annulé la décision de l'inspecteur du travail de Toulouse en date du 16 septembre 1983 et la décision du directeur régional du travail et de l'emploi de Midi-Pyrénées en date du 13 janvier 1984 demandant le retrait ou la modification de certaines dispositions contenues dans le règlement intérieur établi par la Régie nationale des Usines Renault pour son établissement de Toulouse-Mirail ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi °n 83-675 du 26 juillet 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fraisse, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Labbé, Delaporte, avocat de la REGIE NATIONALE DES USINES RENAULT,
- les conclusions de M. Robineau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-35 du code du travail : "Le règlement intérieur ne peut contenir de clause contraire aux lois et règlements... Il ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché" ; qu'en vertu des articles L. 122-37 et L. 122-38 du même code, l'inspecteur du travail "peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L.122-34 et L. 122-35" et que sa décision "peut faire l'objet... d'un recours devant le directeur régional du travail et de l'emploi" ;
Sur le recours du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle :
Considérant que le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 8 juillet 1985 en tant que l'article 2 de ce jugement annule les décisions de l'inspecteur du travail de Toulouse et du directeur régional du travail et de l'emploi de Midi-Pyrénées en tant que ces décisions exigent le retrait ou la modification de l'article 3-6, de l'article 3-7 et du deuxième alinéa de l'article 3-8 qui figurent dans le règlement intérieur établi par la Régie nationale des usines Renault pour sa succursale de Toulouse-Mirail ;
En ce qui concerne l'article 3-6 :
Considérant qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi °n 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, les entreprises soumises aux dispositions de cette loi, au nombre desquelles se trouve la Régie nationale des usines Renault, "avorisent la liberté d'expression des salariés, notamment par la liberté d'affichage. Les modalités d'exercice de ces droits sont arrêtées par le conseil d'administration ou de surveillance de ces sociétés" ;

Considérant que l'article 3-6 du règlement intérieur litigieux dispose : "La diffusion ou l'affichage dans l'établissement de journaux, tracts, imprimés, brochures, photographies, pétitions, etc... doit être autorisée par la direction. Cette interdiction ne vise pas les publications syndicales qui sont soumises aux dispositions légales ou conventionnelles" ; qu'il n'est pas contesté par la Régie nationale des usines Renault que ces prescriptions, qui concernent l'exercice de la liberté d'expression des salariés dans l'entreprise, n'ont pas été arrêtées par le conseil d'administration de la régie ; que, par suite, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle est fondé à soutenir qu'elles ont été fixées par le règlement intérieur en méconnaissance des dispositions précitées de la loi du 26 juillet 1983 ; que le ministre est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé les décisions contestées de l'inspecteur du travail et du directeur régional du travail et de l'emploi en tant que lesdites décisions demandaient le retrait de cet article 3-6 ;
En ce qui concerne l'article 3-7 et le deuxième alinéa de l'article 3-8 :
Considérant qu'aux termes de l'article 3-7 du règlement intérieur litigieux : "Toute quête ne peut être admise qu'avec l'autorisation de la direction. Les ventes d'objets, organisation de paris ou tous jeux sont interdites dans l'enceinte de l'établissement" ; et qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 3-8 : "L'introduction d'appareils photographiques, caméras, magnétophones, magnétoscopes et autres appareils, de ce type est interdite, sauf autorisation de la direction" ; que de telles dispositions ne portent par elles-mêmes aucune atteinte à l'exercice des attributions et prérogatives des comités d'entreprise et des comités d'hygiène de sécurité et des conditions de travail ; que, dès lors, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et du directeur régional et de l'emploi en tant que ces décisions exigeaient la modification de ces dispositions du règlement intérieur ;
Sur l'appel incident de la Régie nationale des usines Renault :

Considérant que les conclusions de l'appel incident de la Régie nationale des usines Renault sont dirigées contre les articles °1 et 3 du jugement du tribunal administratif rejetant, en tout ou partie, les conclusions de ses demandes relatives à des dispositions du règlement intérieur autres que celles qui font l'objet du recours du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ; qu'ainsi, cet appel incident soulève un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal ; que, dès lors, présentées après l'expiration du délai imparti pour faire appel, ces conclusions ne sont pas recevables ;
Article 1er : L'article 2 du jugement en date du 8 juillet 1985 du tribunal administratif de Toulouse est annulé en tantqu'il annule les décisions de l'inspecteur du travail de Toulouse et du directeur régional du travail et de l'emploi de Midi-Pyrénées en tant que lesdites décisions exigent la modification de l'article 3-6 figurant dans le règlement intérieur établi par la Régie nationale des usines Renault pour sa succursale de Toulouse-Mirail.
Article 2 : Le surplus des conclusions du recours du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et le recours incident de la Régie nationale des usines Renault sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des affaires sociales et de l'emploi et à la Régie nationale des usines Renault.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 72670
Date de la décision : 09/10/1987
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - LOI - VIOLATION - Loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public [article 37 - 2e alinéa] - Règlement intérieur établi par la Régie nationale des usines Renault.

01-04-02-02, 43-01-04, 66-03-01 En vertu du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, les entreprises soumises aux dispositions de cette loi, au nombre desquelles se trouve la Régie nationale des usines Renault, "favorisent la liberté d'expression des salariés, notamment par la liberté d'affichage. Les modalités d'exercice de ces droits sont arrêtées par le conseil d'administration ou de surveillance de ces sociétés". Or les prescriptions de l'article 3-6 du règlement intérieur établi par la Régie nationale des usines Renault pour sa succursale de Toulouse-Le Mirail, qui concernent l'exercice de la liberté d'expression des salariés dans l'entreprise, n'ont pas été arrêtées par le conseil d'administration de la régie et ont donc été fixées en méconnaissance des dispositions précitées de la loi du 26 juillet 1983.

NATIONALISATIONS ET ENTREPRISES NATIONALISEES - ENTREPRISES NATIONALISEES - PERSONNEL - Régie nationale des usines Renault - Fixation du règlement intérieur dans un établissement - Méconnaissance des dispositions du 2e alinéa de l'article 37 de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - REGLEMENT INTERIEUR - Entreprises appartenant au secteur public - Dispositions du réglement intérieur relatives à l'exercice de la liberté d'expression des salariés - Adoption par le conseil d'administration - Violation de l'article 37 - 2e alinéa de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.


Références :

Code du travail L122-34, L122-35, L122-37, L122-38
Loi 83-675 du 26 juillet 1983 art. 37 al. 2


Publications
Proposition de citation : CE, 09 oct. 1987, n° 72670
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Fraisse
Rapporteur public ?: M. Robineau

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:72670.19871009
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