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14/10/1987 | FRANCE | N°48836

France | France, Conseil d'État, 8 / 7 ssr, 14 octobre 1987, 48836


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement les 23 février 1983 et 23 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE OUDEBERT "LE COIN DE PARIS", société anonyme, représentée par son président-directeur général, dont le siège est ... à Dijon 21000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement en date du 14 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en réduction de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie dans les rôles de

la commune de Dijon au titre de l'année 1975 ;
°2 accorde la réduction demand...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement les 23 février 1983 et 23 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE OUDEBERT "LE COIN DE PARIS", société anonyme, représentée par son président-directeur général, dont le siège est ... à Dijon 21000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement en date du 14 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en réduction de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Dijon au titre de l'année 1975 ;
°2 accorde la réduction demandée ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'article 93-II de la loi °n 83-1179 du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Quandalle, Maître des requêtes,
- les observations de Me Célice, avocat de la SOCIETE OUDEBERT "LE COIN DE PARIS",
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société "OUDEBERT LE COIN DE PARIS", société anonyme, a contracté en 1967, auprès de deux de ses actionnaires, un emprunt remboursable huit ans plus tard, comportant le versement d'un intérêt annuel de 8 %, ramené à 6 % à compter de 1971, et en outre, au moment du remboursement, la revalorisation, en fonction d'un indice, du capital prêté ; que la société a versé aux prêteurs, à l'échéance, déduction faite d'une somme réglée par anticipation en 1970, le produit de l'indexation, soit 291 520 F ; qu'elle a imputé ce versement sur son résultat de l'exercice clos en 1975 ;
Considérant que, lorsqu'une entreprise a souscrit à une clause d'indexation portant sur des sommes qui lui ont été prêtées ou qui ont été laissées à sa disposition en exécution d'un accord assimilable à un prêt, les charges résultant du jeude cette clause en cas de hausse de l'indice ne peuvent, en application des articles 38 et suivants du code général des impôts, être admises en déduction des bénéfices imposables soit à titre de provisions, soit définitivement lorsque les sommes supplémentaires dues à raison de l'indexation ont été payées ou sont devenues exigibles, que si la clause n'est pas illicite et en outre à la double condition que, d'une part, l'indexation soit stipulée dans un contrat de prêt par lequel est mis à la disposition de l'entreprise, pour une période convenue, qui ne saurait être inférieure à une année, un capital d'un montant déterminé ou que, dans le cas d'une avance en compte courant, le blocage de celle-ci ait été stipulé pour une période et dans les conditions permettant de l'assimiler à un prêt de cette nature, et que, d'autre part, le produit de l'indeation ne soit liquidé et éventuellement mis à la disposition du prêteur qu'au terme du contrat ou lors deséchéances de remboursement d'une partie du capital ; qu'en tout cas, le jeu de l'indexation, s'il se cumule avec l'allocation d'intérêts, ne doit pas conduire à une rémunération anormalement élevée du service rendu par le prêteur ;

Considérant que l'administration ne conteste pas que les trois premières conditions auxquelles est subordonnée la déductibilité d'une somme versée par l'effet d'une clause d'indexation d'un prêt sont remplies en l'espèce ; que, pour apprécier si l'indexation a conduit à une rémunération anormalement élevée du service rendu par les prêteurs, il y a lieu de se référer aux circonstances qui prévalaient à l'époque où la société emprunteuse a accepté la clause d'indexation, c'est-à-dire, en l'espèce, aux conditions qui auraient pu être consenties en 1967, dès lors que si, en 1972, les parties au contrat de prêt ont modifié celui-ci par un avenant, la modificationn'a eu pour objet que d'abaisser le taux de l'intérêt ainsi qu'il a été dit ci-dessus ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le prêt que la société a obtenu en 1967 d'un particulier et celui qu'une banque s'était déclarée disposée à lui accorder la même année ne comportaient aucun engagement quant à leur durée et que le prêteur pouvait en demander à tout moment le remboursement ; que le ministre de l'économie, des finances et du budget ne peut utilement les opposer à ceux que la société a obtenus de ses associés et faire état de ce qu'ils n'étaient pas indexés pour soutenir que la société disposait en 1967 de sources de financement équivalentes, à des conditions moins onéreuses que celles auxquelles elle a eu recours ;
Considérant, d'autre part, que, si le ministre fait valoir l'importance de la somme que l'indice choisi a conduit la société à rembourserà ses prêteurs en 1975, il n'établit pas que les conséquences du mode d'indexation retenu étaient prévisibles dès 1967, ni que le recours à ce mécanisme a été motivé par un autre intérêt que celui de l'entreprise ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration n'était pas en droit de regarder comme une charge anormale non déductible le versement, en 1975, par la société de la somme susindiquée de 291 520 F et que, par suite, la SOCIETE OUDEBERT "LE COIN DE PARIS" est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge de l'imposition contestée ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 14 décembre 1982 est annulé.
Article 2 : Le bénéfice de la société "OUDEBERT LE COIN DE PARIS" imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1975 est réduit de 291 520 F.
Article 3 : Il est accordé à la SOCIETE OUDEBERT "LE COIN DE PARIS" décharge de la différence entre le supplément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1975 dans les rôles de la commune de Dijon et celui qui résulte de l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE OUDEBERT "LE COIN DE PARIS" et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 8 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 48836
Date de la décision : 14/10/1987
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES


Références :

CGI 38 et suivants


Publications
Proposition de citation : CE, 14 oct. 1987, n° 48836
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Quandalle
Rapporteur public ?: Mme de Saint-Pulgent

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:48836.19871014
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