La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/1987 | FRANCE | N°67307

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 14 octobre 1987, 67307


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 mars 1985 et 22 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN, dont le siège social est 34 Champs Elysées à Paris 75008 , représentée par ses dirigeants légaux dûment habilités et domiciliés en cette qualité audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 29 janvier 1985, par lequel le tribunal administratif de Paris, saisi, sur renvoi du conseil de prud'hommes de Paris, de l'appréciation de la légali

té de la décision du 18 mars 1983 par laquelle le directeur départementa...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 mars 1985 et 22 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN, dont le siège social est 34 Champs Elysées à Paris 75008 , représentée par ses dirigeants légaux dûment habilités et domiciliés en cette qualité audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 29 janvier 1985, par lequel le tribunal administratif de Paris, saisi, sur renvoi du conseil de prud'hommes de Paris, de l'appréciation de la légalité de la décision du 18 mars 1983 par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi de Paris a autorisé la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN à licencier pour motif économique M. X..., a déclaré l'illégalité d'une décision tacite antérieure d'autorisation de licenciement ;
2° déclare que la décision du 18 mars 1983 n'est entachée d'aucune illégalité ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Pinel, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un jugement en date du 29 mai 1984, le conseil de prud'hommes de Paris, en application des dispositions du 3ème alinéa de l'article L.511-1 du code du travail, a sursis à statuer sur l'instance pendante entre M. X... et la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN et a saisi le tribunal administratif de Paris de la question de l'appréciation de la légalité de la décision en date du 18 mars 1983 par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi de Paris a autorisé la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN à licencier pour motif économique M. X... ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.321-7 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur lors de l'intervention de cette décision, tout licenciement fondé sur un motif économique est subordonné à une autorisation de l'autorité administrative compétente, laquelle, en application du 1er alinéa de l'article L.321-9 dudit code également alors en vigueur, doit, lorsque dans une entreprise occupant habituellement au moins cinquante salariés le licenciement envisagé concerne plus de dix personnes dans une même période de trente jours, vérifier les conditions d'application de la procédure de concertation, la réalité des motifs allégués par le chef d'entreprise pour justifier les licenciements ainsi que la portée des mesures de reclassement et d'indemnisation envisagées et faire connaître sa décision dans un délai de trente jours ;
Sur l'existence d'une décision tacite autorisant le licenciement de M. X... :

Considérant que si la demande d'autorisation de licencier M. X..., directeur de la production au sièg social de l'entreprise, adressée le 17 février 1983 à la direction du travail et de l'emploi de Paris se présente, en la forme, comme une demande individuelle, c'est à bon droit que l'autorité administrative l'a considérée comme rattachée au licenciement collectif envisagé par la société dans son usine de Nevers relevant directement du siège social et qui a fait l'objet d'une demande d'autorisation formulée le 7 février 1983 auprès du directeur départemental du travail et de l'emploi de la Nièvre ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il s'agit en l'espèce d'un licenciement collectif de plus de dix salariés ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le caractère individuel du licenciement de M. X... pour considérer qu'à l'expiration du délai, renouvelable une fois, de 7 jours imparti par l'alinéa 2 de l'article L.321-9 du code du travail tel qu'il était alors rédigé, le silence gardé par l'autorité administrative sur la demande d'autorisation de licenciement avait fait naître une décision tacite d'autorisation ; qu'ainsi le jugement du 29 janvier 1985 statuant sur une telle décision doit être annulé ;
Considérant que dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la question préjudicielle soulevée par le conseil de prud'hommes de la légalité de la décision expresse du 18 mars 1983 autorisant le licenciement de M. X... ;
Sur la légalité de la décision du 18 mars 1983 :
Considérant qu'en application des dispositions des articles L.321-3 et L.321-4 du code du travail, en vigueur lors du licenciement de M. X..., l'employeur de plus de cinquante salariés qui projette un licenciement pour motif économique est tenu de réunir et de consulter le comité d'entreprise, d'adresser aux représentants du personnel tous renseignements utiles sur les licenciements projetés ; qu'il ressort des pièces du dossier que le comité d'entreprise des Etablissements Matenin a été consulté les 6 et 21 décembre 1982 sur le projet de licenciement portant sur l'usine de Nevers et sur le siège social ; que l'employeur n'était pas tenu de faire connaître la liste nominative des slariés dont le licenciement était envisagé ; que le moyen tiré par M. X... d'une prétendue insuffisance des éléments d'information produits tant auprès du comité d'entreprise en application de l'article L.321-4 susvisé, qu'auprès du directeur du travail au titre des dispositions alors applicables de l'article R.321-8 du code du travail, n'est assorti d'aucune précision susceptible de permettre d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il ne saurait, dès lors, être accueilli ; qu'enfin, en vertu de l'article L.122-14-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au cas de l'espèce, l'employeur n'était pas tenu de faire précéder sa demande d'autorisation de l'entretien préalable prévu à l'article L.122-14 dudit code ;

Considérant que l'évolution très défavorable de l'activté de l'entreprise et de son chiffre d'affaires, survenue au cours de l'année 1982, a conduit la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN à mettre en place un plan de restructuration et de réorganisation de ses services, d'en réduire les effectifs et, notamment, de supprimer le poste de directeur de la production qu'occupait M. X... ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci ait été remplacé dans son emploi ; que M. X... n'établit pas que son licenciement serait intervenu en réalité pour des raisons d'ordre personnel ; que, dans ces conditions, le directeur départemental du travail et de l'emploi de Paris, en autorisant par décision du 18 mars 1983 le licenciement de l'intéressé pour motif économique, n'a pas commis une erreur de fait ou une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que la décision du directeur départemental de Paris est entachée d'illégalité ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 29 janvier 1985 est annulé.
Article 2 : L'exception d'illégalité soumise au tribunal administratif de Paris par le conseil de prud'hommes de Paris et relative à la décision du 18 mars 1983 par laquelle le directeur du travail et de l'emploi de Paris a autorisé les Etablissements MATENIN à licencier M. X... n'est pas fondée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DES ETABLISSEMENTS MATENIN, à M. X..., au greffier du conseil de prud'hommes de Paris et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award