Vu la requête enregistrée le 21 mai 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société "VOGUE-PIP", société anonyme dont le siège est ... 93430 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule un jugement en date du 18 février 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des compléments d'imposition à l'impôt sur les sociétés et à la contribution exceptionnelle auxquels elle a été assujettie au titre des années 1973, 1974 et 1975 et au titre des années 1974 et 1976 ;
°2 lui accorde la réduction des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'article 93-II de la loi °n 83-1179 du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;
Sur le désistement :
Considérant que, dans sa lettre adressée au directeur des services fiscaux de la 3ème direction des vérifications de la région Ile-de-France le 20 décembre 1982, la société anonyme "VOGUE-PIP" a déclaré se désister de sa requête sous la condition que l'administration lui accorde le dégrèvement de la moitié des intérêts de retard ; que les intérêts de retard auxquels se réfère cette lettre sont ceux, d'un montant de 45 211 F, correspondant à des droits supplémentaires d'impôt sur les sociétés de 241 129 F que l'administration avait assignés à la Société anonyme "VOGUE-PIP" au titre de l'année 1974 à raison de la réintégration dans les bénéfices sociaux d'une somme de 482 258 F et restant seuls en litige après décision du même directeur en date du 20 décembre 1982, rectifiée par une décision en date du 28 décembre 1982, accordant à ladite société le dégrèvement du surplus des impositions contestées ; que, par une autre décision, en date du 20 décembre 1982, le directeur des services fiscaux de la 3ème direction des vérifications de la région Ile-de-France a accordé à la société "VOGUE-PIP", à la suite de la lettre ci-dessus mentionnée, le dégrèvement d'intérêts de retard résultant de la réduction des intérêts de retard encore dus de 45 211 F à 33 557 F, soit un dégrèvement de 11 654 F au titre de l'année 1974 ; que, ce dégrèvement étant inférieur à la moitié des intérêts de retard encore dus, la condition mise au désistement de la requête susvisée de la société "VOGUE-PIP" ne se trouve pas remplie ; qu'il ne peut, dès lors, être donné acte dudit désistement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par les décisions susmentionnées en date des 20 et 28 décembre 1982, postérieures à l'introduction de l'instance, le directeur des services fiscaux de la 3ème direction des vérifications de la région Ile-de-France a, ainsi qu'il a été dit, accordé à la société "VOGUE-PIP", d'une part, le dégrèvement du surpls des impositions contestées, soit le dégrèvement d'impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés de 454 410 F, 157 065 F et 709 915 F en droits et de 113 601 F, 29 314 F et 69 216 F en intérêts de retard, au titre, respectivement des années 1973, 1974 et 1975 ainsi que le dégrèvement d'impositions supplémentaires à la contribution exceptionnelle de 81 794 F et de 28 396 F en droits et de 8 180 F et 2 844 F en majoration légale au titre respectivement des années 1974 et 1976, et, d'autre part, le dégrèvement supplémentaire de 11 654 F d'intérêts de retard précédemment mentionné, portant le dégrèvement total des intérêts de retard afférents à l'année d'imposition 1974 à 40 968 F ; que les conclusions de la requête de la société "VOGUE-PIP" tendant à la réduction des impositions ci-dessus sont, dès lors, devenues sans objet ;
Sur le bien-fondé de l'imposition restant en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment : ... °2 les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation..." ;
Considérant que ni ces dispositions, ni celles de l'article 22 de l'annexe II au code, ni aucune autre disposition applicable n'autorisaient la société "VOGUE-PIP", ainsi que celle-ci ne le conteste d'ailleurs pas, à pratiquer comme elle l'a fait un amortissement dégressif en deux ans sur des immobilisations des frais d'enregistrement de disques de musique de variétés qu'elle produit ;
Considérant, toutefois, que la société "VOGUE-PIP", pour justifier le taux d'amortissement de 75 % la première année et de 25 % la seconde année qu'elle a pratiqué sur la valeur d'actif constituée par les frais d'enregistrement des disques de variétés qu'elle commercialise, se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l'article L. 80 - A du livre des procédures fiscales, de l'interprétation de la loi fiscale contenue dans une lettre, rendue publique, du secrétaire d'Etat au budget en date du 23 août 1954, adressée à une société d'enregistrement de disques ; qu'il ressort de ce document que l'administration a admis, en matière de frais d'enregistrement de disques de variétés, un amortissement sur deux ans soit "la 1ère année : 75 %, la 2ème année : 25 %..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société "VOGUE-PIP" a appliqué, au cours de l'exercice 1974, l'interprétation que l'administration avait ainsi donnée du texte fiscal ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a réintégré dans son bénéfice imposable de l'exercice 1974 des amortissements de 482 257,88 F, en méconnaissance de ladite interprétation ; qu'il y a lieu, dès lors, d'accorder à la société "VOGUE-PIP" la réduction du surplus des impositions contestées, soit la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés de 241 129 F en droits mise à sa charge à raison du redressement ci-dessus et les intérêts de retard correspondants, dans la mesure où il n'en a pas été accordé dégrèvement ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête susvisée de la société "VOGUE-PIP" tendant à la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1973, 1974 et 1975 , à concurrence de droits s'élevant à 454 410 F, 157 065F et 709 915 F et d'intérêts de retard s'élevant 113 601 F, 40 968 F et 69 216 F, respectivement, et des impositions supplémentaires à la contribution exceptionnelle au titre des années 1974 et 1976, soit à concurrence de 81 794 F et 28 396 F en droits et de 8 180 F et 2 844 F en pénalités.
Article 2 : Il est accordé à la société "VOGUE-PIP" la réductionde la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelleelle a été assujettie au titre de l'année 1974 à concurrence de 241 129 F en droits, ainsi que des intérêts de retard correspondants dansla mesure où il n'en a pas été accordé dégrèvement.
Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Paris, en date du 18 février 1982, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société "VOGUE-PIP" et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.