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04/12/1987 | FRANCE | N°81158

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 04 décembre 1987, 81158


Vu la requête enregistrée le 12 août 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Christian X..., demeurant ... à Saint-Valéry-sur-Somme 80230 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 3 juin 1986 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins, la décision du 13 juin 1984 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a retiré sa décision du 13 avril 1984 autorisant ledit institut à l

icencier M. X..., délégué syndical, pour motif économique,
2° rejett...

Vu la requête enregistrée le 12 août 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Christian X..., demeurant ... à Saint-Valéry-sur-Somme 80230 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 3 juin 1986 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins, la décision du 13 juin 1984 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a retiré sa décision du 13 avril 1984 autorisant ledit institut à licencier M. X..., délégué syndical, pour motif économique,
2° rejette la demande présentée par l'institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins devant le tribunal administratif d'Amiens,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Leusse, Auditeur,
- les conclusions de M. Robineau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 412-18 du code du travail : "Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ou de l'autorité qui en tient lieu" ; qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis d'un mandat de délégué syndical bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article R. 436-6 du code du travail : "Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet ... " ;
Considérant que le directeur de l'Institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins a demandé le 26 juillet 1983 à l'inspecteur du travail compétent l'autorisation de licencier pour motif économique M. Christian X..., salarié de l'établissement et délégué syndical ; que, sur recours hiérarchique de l'employeur, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a annulé le 13 avril 1984 la décision implicite de refus d'autorisation résultant du silence gardé par l'inspecteur du travail ; que, pour retirer le 13 juin 1984 sa décision susmentionnée du 13 avril, le ministre s'est fondé, d'une part sur ce que la restructuration invoquée par l'employeur à l'appui de sa demande était encore à l'état d'avant projet et devait recevoir l'approbation de l'autorité de tutelle, et, d'autre part, sur l'existence d'un lien entre le licenciement demandé et le mandat syndical exercé par M. X... ;

Considérant que si l'Institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins faisait valoir, à l'appui de sa demande d'autorisation de licencier M. X..., que l'intéressé avait refusé la transformation de l'emploi d'éducateur technique spécialisé qu'il occupait en emploi d'aide médico psychologique, alors que cette modification de ses fonctions et de son contrat de travail était justifiée par une réorganisation des services rendue nécessaire par l'aggravation des handicaps des enfants et adolescents reçus dans l'établissement, il ressort de l'ensemble des circonstances de l'affaire, et notamment des conflits qui existaient entre la direction de l'institut et le syndicat dont M. X... était le délégué, que la demande de licenciement de l'intéressé était, en réalité, en rapport avec ses fonctions représentatives qu'il exerçait ; qu'ainsi, la décision du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 13 avril 1984 autorisant le licenciement de M. X... était entachée d'illégalité, et que ledit ministre, saisi par M. X... d'un recours gracieux contre ladite décision, était tenu de la retirer, ainsi qu'il l'a fait par sa décision du 13 juin 1984 ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat exercé par M. X... pour annuler la décision ministérielle du 13 juin 1984 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé devant le tribunal administratif par l'Institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins à l'appui de sa demande d'annulation de la décision ministérielle du 13 juin 1984 ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale était tenu de retirer sa décision susmentionnée du 13 avril 1984 ; que, dès lors, le moyen tiré par l'Institut de ce que la décision de retrait a été prise sans que le ministre ait procédé à une enquête contradictoire et entendu l'employeur est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision en date du 13 juin 1984 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, a retiré sa décision du 13 avril 1984 autorisant son licenciement ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 3 juin 1986 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par l'Institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à l'Institut d'éducation motrice - institut médico professionnel de Brighton-les-Pins et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL - LICENCIEMENT - SALARIES PROTEGES -Délégué syndical - Licenciement en rapport avec le mandat de l'intéressé.


Références :

Code du travail L412-18, R436-6
Décision ministérielle du 13 juin 1984 Affaires sociales et solidarité nationale décision attaquée confirmation


Publications
Proposition de citation: CE, 04 déc. 1987, n° 81158
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: de Leusse
Rapporteur public ?: Robineau

Origine de la décision
Formation : 1 ss
Date de la décision : 04/12/1987
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 81158
Numéro NOR : CETATEXT000007720467 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1987-12-04;81158 ?
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