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20/01/1988 | FRANCE | N°48337

France | France, Conseil d'État, 10/ 4 ssr, 20 janvier 1988, 48337


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er février 1983 et 1er juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME DES EDITIONS FUZEAU, dont le siège est à Courlay (79380), représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 1er décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a déclaré qu'aucune décision implicite autorisant le licenciement de M. X... ne résultait au profit de l

a SOCIETE FUZEAU du silence gardé par l'administration pendant plus de qua...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er février 1983 et 1er juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME DES EDITIONS FUZEAU, dont le siège est à Courlay (79380), représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 1er décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a déclaré qu'aucune décision implicite autorisant le licenciement de M. X... ne résultait au profit de la SOCIETE FUZEAU du silence gardé par l'administration pendant plus de quatorze jours sur sa demande de licenciement ;
2° déclare que la décision de l'inspecteur du travail de Niort autorisant le licenciement pour motif économique de M. X... est légal ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Honorat, Auditeur,
- les observations de Me Odent, avocat de la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU,
- les conclusions de M. Massot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.321-7 du code du travail dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : "tout licenciement individuel ou collectif, fondé sur un motif économique, d'ordre conjoncturel ou structurel, est subordonné à une autorisation de l'autorité administrative compétente" ; qu'en vertu des dispositions de l'article R.321-8 du même code, "tout employeur auquel sont applicables ces dispositions législatives doit adresser une demande d'autorisation de licenciement au directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre" ; qu'enfin, aux termes de l'article R.321-9 du même code, "la décision statuant sur la demande prévue à l'article R.321-8 est prise par le directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre" ;
Considérant que, par lettre en date du 26 mai 1977, la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU a sollicité l'autorisation de licencier pour motif économique deux salariés, dont M. X... ; que cette lettre était adressée au directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre du département des Deux-Sèvres, territorialement compétent en vertu des dispositions précitées pour autoriser le licenciement litigieux, et non, comme l'ont affirmé les premiers juges, à l'inspecteur du travail de Niort ; qu'ainsi, et même si l'inspecteur du travail de Niort a procédé à l'instruction de la demande, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a, par le jugement attaqué, déclaré qu'aucune autorisation tacite de licenciement pour motif économique n'était née au profit de cette société, au motif que la demande de licenciement avait été adressée à ue autorité incompétente pour y statuer ;

Considérant qu'il appartient, toutefois, au Conseil d'Etat, en vertu des dispositions de l'article L.511-1 du code du travail de statuer sur la question préjudicielle posée par le tribunal d'instance de Montauban statuant en matière prud'homale et relative à la légalité de la décision du directeur départemental du travail et de l'emploi des Deux-Sèvres autorisant tacitement la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU à licencier pour motif économique, M. X... ;
Considérant que si, par une lettre en date du 28 avril 1977, la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU a sollicité l'autorisation de licencier pour motif économique l'un de ses représentants, et s'il n'est pas contesté que cette autorisation lui a été refusée, la demande d'autorisation de licenciement en date du 28 mai 1977, en tant qu'elle concerne M. X..., ne constitue pas un recours gracieux contre la précédente décision de refus d'autorisation de licenciement et a pu, par suite, faire naître valablement au profit de la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU une autorisation tacite de licenciement à l'expiration des délais prévus par l'article L.321-9 du code du travail ; qu'ainsi M. X... n'est pas fondé à soutenir que le silence gardé par le directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre des Deux-Sèvres pendant plus de 14 jours sur la demande en date du 26 mai 1977 présentée par la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU n'a pu faire naître au profit de cette dernière une autorisation tacite de licenciement ;
Considérant que, pour solliciter l'autorisation de licencier pour motif économique M. X..., la société requérante s'est fondée sur la nécessité de réorganiser ses structures commerciales compte tenu de l'aggravation des difficultés financières qu'elle connaissait depuis plusieurs mois ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal d'instance de Montauban statuant en matière prud'homale, que la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU a, en raison des difficultés de trésorerie qu'elle connaissait depuis plusieurs mois, réorganisé son réseau commercial en supprimant effectivement, contrairement à ce que soutient M. X..., les deux emplois de représentants multicartes au sein de l'entreprise ; que, dès lors, en autorisant le licenciement litigieux, le directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre, qui a d'ailleurs effectué une enquête sur la situation de l'entreprise, ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que le moyen tiré de ce que la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU aurait méconnu l'ordre des licenciements applicables à l'entreprise ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision litigieuse ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a déclaré qu'aucune autorisation tacite de licenciement n'était née au profit de cette société ; qu'il y a lieu, dès lors, de déclarer que l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre de la décision du directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre des Deux-Sèvres, autorisant tacitement la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU à licencier pour motif économique M. X... n'est pas fondée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif dePoitiers en date du 1er décembre 1982 est annulé.
Article 2 : L'exception d'illégalité relative à la décision du directeur départemental du travail et de la main-d'oeuvre du département des Deux-Sèvres autorisant tacitement la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU à licencier pour motif économique M. X... n'est pas fondée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Société anonyme des EDITIONS FUZEAU, à M. Robert X..., au secrétaire-greffier du conseil de prud'hommes de Montauban et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - MODALITES DE DELIVRANCE DE L'AUTORISATION ADMINISTRATIVE - QUESTIONS PROPRES AUX AUTORISATIONS TACITES - DEMANDES SUCCESSIVES - Dépôt d'un nouveau dossier - Autorisation tacite acquise.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - REALITE DU MOTIF ECONOMIQUE - MOTIF REEL - Difficultés de trésorerie - Réorganisation du réseau commercial - Suppression de deux emplois de représentants multi-cartes.


Références :

Code du travail L321-7, R321-8, R321-9, L511-1


Publications
Proposition de citation: CE, 20 jan. 1988, n° 48337
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Honorat
Rapporteur public ?: Massot

Origine de la décision
Formation : 10/ 4 ssr
Date de la décision : 20/01/1988
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 48337
Numéro NOR : CETATEXT000007706498 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1988-01-20;48337 ?
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