Vu le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistré le 6 juin 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 25 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 9 juillet 1985 par laquelle le directeur adjoint du travail et de l'emploi du département du Rhône a rejeté la demande de M. Chedly Y... tendant à ce que lui soit délivrée une autorisation de travail en France ;
2°) rejette la demande de M. Y...,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le décret n° 82-389 du 10 mai 1982 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faure, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Robineau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.341-1 du code du travail : "Tout étranger, pour exercer ... une activité professionnelle salariée, doit être titulaire d'une autorisation de travail en cours de validité. Cette autorisation est délivrée par le commissaire de la République du département où réside l'étranger" ; qu'aux termes de l'article R.341-7 du même code : "Une autorisation provisoire de travail peut être délivrée à l'étranger qui ne peut prétendre ni à la carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ni à la carte de résident ..." ;
Considérant qu'en vertu de l'article 17 du décret susvisé du 10 mai 1982, relatif aux pouvoirs du commissaire de la République dans les départements, le commissaire de la République peut donner délégation de signature aux chefs des services des administrations civiles de l'Etat dans le département ou à leurs subordonnés en ce qui concerne les matières relevant de leurs propres attributions ; qu'il ressort des pièces produites devant le Conseil d'Etat par le ministre des affaires sociales et de l'emploi que, par arrêté du 25 juin 1985, le commissaire de la République délégué pour la police du département du Rhône a accordé délégation de signature à M. X..., directeur adjoint du travail et de l'emploi du département du Rhône, pour signer en son nom les autorisations provisoires de travail ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision du 9 juillet 1985 par laquelle M. X... a rejeté la demande présentée par M. Y..., ressortissant tunisien, le tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur ce que ladite décision avait été prise par une autorité incompétente ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens invoqués par M. Y... devant le tribunal administratif ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.341-4 du code du travail : "Pour accorder ou refuser le titre de travail sollicité, le commissaire de la République ... prend notmment en considération les éléments suivants d'appréciation : 1- La situation de l'emploi présente et à venir dans la profession demandée par le travailleur étranger et dans la zone géogaphique où il compte exercer cette profession" ;
Considérant que la décision du 9 juillet 1985 refusant d'accorder à M. Y... l'autorisation de travail qu'il sollicitait en vue d'occuper un emploi de cuisinier est fondée sur ce que 758 demandeurs d'emploi étaient inscrits en mai 1985 pour cette profession dans la région, dont 180 dans le département du Rhône ; que ce motif était de nature à justifier légalement le refus opposé à M. Y..., alors même que celui-ci, comme il le soutient, aurait effectivement trouvé un poste de cuisinier ; que si l'intéressé fait valoir que la profession qu'il entendait exercer était celle de cuisinier spécialisé dans la cuisine tunisienne, cette circonstance n'est pas de nature à établir que la décision contestée repose sur une appréciation erronée de la situation de l'emploi au regard de sa demande ; qu'enfin, les considérations relatives à la situation familiale de M. Y... sont sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des affaires sociales et de l'emploi est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision susmentionnée du 9 juillet 1985 ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 25 mars 1986 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y... et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.