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24/02/1988 | FRANCE | N°28342

France | France, Conseil d'État, 7 / 8 ssr, 24 février 1988, 28342


Vu la requête enregistrée le 27 novembre 1980 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la Compagnie des SALINS DU MIDI et DES SALINS DE L'EST, société anonyme dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 29 septembre 1980 en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande en décharge de droits et pénalités en matière de taxes de prestations de services auxquels elle a été assujettie

au titre des périodes du 1er janvier 1962 au 30 juin 1965, d'une part, e...

Vu la requête enregistrée le 27 novembre 1980 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la Compagnie des SALINS DU MIDI et DES SALINS DE L'EST, société anonyme dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 29 septembre 1980 en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande en décharge de droits et pénalités en matière de taxes de prestations de services auxquels elle a été assujettie au titre des périodes du 1er janvier 1962 au 30 juin 1965, d'une part, et du 1er juillet 1965 au 31 décembre 1967, d'autre part, par les avis de mise en recouvrement des 6 avril 1966, 7 décembre 1966 et 25 août 1970,
2°) lui accorde la décharge des impositions contestées ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Querenet X... de Breville, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au cours de la période du 1er janvier 1962 au 31 décembre 1967 : "5. Les affaires faites en France par les personnes qui, habituellement ou occasionnellement, achètent pour revendre ou accomplissent des actes relevant d'une activité industrielle ou commerciale sont soumises : ...2°) en ce qui concerne toutes autres opérations (que les ventes et les travaux immobiliers) à une taxe sur les prestations de services au taux de 8,50 %" ;
Considérant que la société "COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI ET DES SALINES DE DJIBOUTI a conclu en 1897 avec les exploitants de marais salants de la côte méditerranéenne un contrat intitulé "Traité de participation", qui a été renouvelé le 20 octobre 1955, en vue de former, pour la commercialisation des sels récoltés par les co-contractants, une association en participation dénommée "Participation générale" dont elle assurait statutairement la gérance ; que l'administration, estimant que la COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI était passible de taxes sur le chiffre d'affaires en sa qualité de gérant d'une entente commerciale, l'a assujettie, sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts, à la taxe sur les prestations de service à raison de l'ensemble des dépenses qu'elle avait exposées pour le compte de la "Participation générale" au cours de la période du 1er janvier 1962 au 31 décembre 1967 et qui avaient été prélevées sur le produit des ventes ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a déchargé la société "Compagnie des salins du midi et des salines de Dibouti", devenue "COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI ET DES SALINES DE L'EST", des seules taxes qui correspondent aux dépenses faites par la société pour la commercialisation de son propre sel ;

Considérant, en premier lieu, que la COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI tenait, conformément aux prescriptions de la Convention du 20 octobre 1955 et, notamment, de son article 11, la comptabilité générale de la participation ; que cette comptabilité, reconnue sincère et probante, retraçait l'ensemble des opérations exécutées par la gérante ou les associés pour la commercialisation des sels apportés par chacun des co-participants et relevant, par convention, de la participation mais à l'exclusion de celles qui sont requises pour la production des sels, y compris celles qui sont nécessaires à leur récolte et qui, réputées être hors participation, restaient à la charge de chaque associé ; qu'en vertu des stipulations de l'article 12 de la même convention, le résultat net de la commercialisation des sels, c'est-à-dire, selon la convention : "le produit des ventes, défalcation faite des frais de vente, des frais généraux, des frais de transport, d'agences, de personnel, etc ... et généralement de toutes les charges quelconques constatées par les comptes approuvés par l'Assemblée générale", est distribué aux associés proportionnellement à leurs droits ; qu'il résulte de ce qui précède que l'association créée par l'acte constitutif du 20 octobre 1955, régie par les dispositions des articles 47 à 50 du code du commerce dans leur rédaction applicable au cours de la période d'imposition, avait le caractère d'une association en participation ; que, pour faire obstacle à cette analyse, l'administration n'est pas fondée à prétendre que le tribunal administratif aurait jugé par un jugement du 11 juillet 1972, devenu définitif, que la convention de 1955 n'était pas une association en participation dès lors que, dans ledit jugement, les premiers juges se sont bornés, pour justifier le supplément d'instruction qu'ils ordonnaient en vue de pouvoir qualifier l'organisme créé par cette convention, à exposer la thèse de l'administration selon laquelle la société requérante avait une activité de gérant d'affaires, sans prendre parti eux-mêmes sur cette question ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que les dépenses exposées par la société requérante pour la commercialisation des sels apportés sous des formes diverses par les associés comprennent, à l'exclusion de toute rémunération de la gérante, d'une part, des frais spécifiques de manipulation, de traitement, de transport qui sont, pour chaque apport, exactement déterminés et portés à la fois au débit du compte de la participation générale et au crédit du compte-courant de chaque associé, et, d'autre part, des frais généraux, des frais de personnel et des frais de promotion commerciale correspondant aux services d'intérêt commun aux divers associés qui sont répartis entre les associés au prorata de la valeur des sels apportés ; qu'il n'est pas contesté que la COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI a réparti entre les co-participants l'intégralité des dépenses qu'elle a supportées du fait des opérations ci-dessus énumérées, soit en imputant à chacun d'eux, au titre des frais spécifiques, le montant exact des achats de fournitures et des prestations qui le concernaient, soit, en ce qui concerne les frais généraux, en répartissant, en fonction de la valeur des apports, les sommes qu'elle avait effectivement déboursées ; qu'ainsi les sommes que la COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI prélève sur le produit des ventes ne peuvent, en raison du mode de répartition des charges qu'elle a adopté, être regardées comme une rémunération de services rendus par elle et pouvant, par là-même, comporter pour elle une possibilité de bénéfice ou un risque de perte ; qu'il s'ensuit que les prélèvements qu'elle opère sur le produit des ventes ne correspondent pas à des affaires au sens des dispositions précitées du code général des impôts ;

Considérant, enfin, que, si l'administration soutient que les versements faits aux associés pour la dénomination de "premier acompte" auraient un caractère forfaitaire, il résulte de l'instruction, et notamment des constatations faites par les experts commis en première instance, que le moyen manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la "COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI ET DES SALINES DE L'EST" est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a partiellement rejeté ses demandes ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les frais d'expertise à la charge de l'Etat ;
Article 1er : La COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI ET DES SALINES DE L'EST est déchargée des droits et pénalités auxquels elle est restée assujettie en matière de taxe sur les prestations de service au titre de la période du 1er janvier 1962 au 31 décembre 1967, à la suite du jugement du 25 septembre 1980.
Article 2 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 29 septembre 1980 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE DES SALINS DU MIDI ET DES SALINES DE L'EST et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19 CONTRIBUTIONS ET TAXES


Références :

. Code du commerce 47 à 50
CGI 256


Publications
Proposition de citation: CE, 24 fév. 1988, n° 28342
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Querenet Onfroy de Breville
Rapporteur public ?: Fouquet

Origine de la décision
Formation : 7 / 8 ssr
Date de la décision : 24/02/1988
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 28342
Numéro NOR : CETATEXT000007624931 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1988-02-24;28342 ?
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