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26/02/1988 | FRANCE | N°53871

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 26 février 1988, 53871


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 30 août 1983 et 28 décembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme LE BRETON, demeurant Kerchouren à Ploeven (29166), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement, en date du 30 mars 1983, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté, ses deux demandes dirigées la première contre l'Etat -direction générale des impôts- et la seconde contre la commune de Guengat (Finistère), afin que l'un et l'autre soient condamnés à leur verser la som

me de 150 000 F, en réparation du préjudice résultant de l'insuffisance...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 30 août 1983 et 28 décembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme LE BRETON, demeurant Kerchouren à Ploeven (29166), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement, en date du 30 mars 1983, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté, ses deux demandes dirigées la première contre l'Etat -direction générale des impôts- et la seconde contre la commune de Guengat (Finistère), afin que l'un et l'autre soient condamnés à leur verser la somme de 150 000 F, en réparation du préjudice résultant de l'insuffisance du prix qu'ils ont obtenu lors de la vente aux enchères publiques des biens immobiliers qu'ils possédaient dans la commune de Guengat ;
°2) leur accorde le bénéfice de leurs conclusions de première instance et condamne conjointement et solidairement l'Etat et la commune de Guengat à leur verser la somme de 150 000 F, avec les intérêts de droit depuis le 24 juin 1981 et la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'une année ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code des communes ;
Vu le décret °n 69-825 du 28 août 1969 et l'arrêté du 13 janvier 1970 pour l'application de l'article 52 dudit décret ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Le Bret, de Lanouvelle, avocat des époux LE BRETON,
- les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les biens immobiliers que M. et Mme LE BRETON possédaient dans la commune de Guengat (Finistère) ont été mis en vente aux enchères publiques en exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Quimper en date du 3 décembre 1980 et adjugés à la commune qui s'était portée acquéreur ; que M. et Mme LE BRETON demandent que l'Etat et la commune de Guengat soient condamnés à leur verser une indemnité en se prévalant du préjudice que leur auraient causé, à l'occasion de l'opération d'acquisition de leurs biens par la commune, tant les fautes des services fiscaux que celles du maire de Guengat ;
Considérant, en premier lieu, que le défaut d'avis de la commission départementale des opérations immobilières, a été sans incidence sur le montant de l'adjudication et n'a ainsi causé aucun préjudice aux époux LE BRETON qui ne sont dès lors pas fondés à demander une indemnité à l'Etat ;
Considérant, en second lieu, qu'en faisant connaître, par voie de presse, le jour même où il devait être procédé aux enchères publiques des biens immobiliers de M. et Mme LE BRETON, qu'en dépit des enchères qui pourraient intervenir, la commune poursuivrait la procédure d'acquisition de ces biens par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique, le maire de Guengat a tenté de décourager les autres enchérisseurs éventuels et s'est livré à une manoeuvre constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune envers M. et Mme LE BRETON ; que les intéressés sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les conclusions de leur demande dirigées contre la commune de Guengat ;

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par M. et Mme LE BRETON en condamnant la commune de Guengat à leur verser une indemnité de 30 000 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que M. et Mme LE BRETON ont droit aux intérêts de la somme de 30 000 F à compter du jour de la réception de leur demande par le maire de Guengat, le 24 juin 1981 ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 28 décembre 1983 et le 17 mai 1985 ; qu'à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 30 mars 1983 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. et Mme LE BRETON dirigées contre la commune de Guengat.
Article 2 : La commune de Guengat est condamnée à verser à M. et Mme LE BRETON une indemnité de 30 000 F avec les intérêts au taux légal à compter du 24 juin 1981. Les intérêts échus les 28 décembre 1983 et 17 mai 1985 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande en première instance est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme LE BRETON, à la commune de Guengat, au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 53871
Date de la décision : 26/02/1988
Sens de l'arrêt : Annulation indemnité
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - CONTENTIEUX DE LA RESPONSABILITE - Maire ayant troublé le jeu normal d'enchères publiques en faisant connaître que la commune poursuivrait la procédure d'expropriation des biens proposés à la vente - Faute de nature à engager la responsabilité de la commune.

34-04-03, 60-01-03 En faisant connaître, par voie de presse, le jour même où il devait être procédé aux enchères publiques des biens immobiliers des époux L., qu'en dépit des enchères qui pourraient intervenir, la commune poursuivrait la procédure d'acquisition de ces biens par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique, le maire de Guengat a tenté de décourager les autres enchérisseurs éventuels et s'est livré à une manoeuvre constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune envers les époux L..

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - Agissements administratifs constitutifs d'une faute - Manoeuvre ayant troublé le jeu normal d'enchères publiques - Faute de l'administration.


Références :

Code civil 1154


Publications
Proposition de citation : CE, 26 fév. 1988, n° 53871
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Labarre
Rapporteur public ?: Mme Hubac

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:53871.19880226
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