La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/1988 | FRANCE | N°78833

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 06 mai 1988, 78833


Vu la requête enregistrée le 26 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Claude X..., architecte, demeurant 29, rue Bois-le-Vent à Paris (75016), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 3 avril 1986 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté sa requête tendant à ce que le département du Morbihan soit condamné à lui verser diverses indemnités en réparation du préjudice résultant de la violation de ses droits d'auteur, du plagiat et de la contrefaçon de certains de ses plans relatifs à la rénov

ation de la préfecture et à la construction de l'hôtel du département d...

Vu la requête enregistrée le 26 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Claude X..., architecte, demeurant 29, rue Bois-le-Vent à Paris (75016), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 3 avril 1986 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté sa requête tendant à ce que le département du Morbihan soit condamné à lui verser diverses indemnités en réparation du préjudice résultant de la violation de ses droits d'auteur, du plagiat et de la contrefaçon de certains de ses plans relatifs à la rénovation de la préfecture et à la construction de l'hôtel du département dont il a été l'architecte concepteur et le mandataire commun ;
°2) condamne le département du Morbihan à lui verser 600 000 F en réparation dudit préjudice et ordonne la capitalisation des intérêts échus à la date du dépôt de sa requête ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 11 mars 1957 ;
Vu le nouveau code de procédure civile ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Leroy, Auditeur,
- les observations de Me Boulloche, avocat de M. X... et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du département du Morbihan,
- les conclusions de M. Schrameck, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6, 1er alinéa, de la loi du 11 mars 1957 sur les droits de l'auteur d'une oeuvre de l'esprit, oeuvre qui, aux termes de l'article 3 de la même loi, comprend les oeuvres d'architecture : "l'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre" ;
Considérant, en premier lieu, que la rénovation intérieure des ailes est et ouest de la préfecture du Morbihan, qui a consisté en une consolidation des charpentes et planchers et un réaménagement des bureaux, ne présentait pas un caractère suffisamment original pour permettre à M. X..., architecte mandataire du groupement chargé par le département du Morbihan de la maîtrise d'oeuvre de cette rénovation, de se prévaloir des dispositions précitées pour exiger que son nom fût inscrit sur la façade de la préfecture ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le même groupement était chargé, dans les mêmes conditions, de la conception et de l'édification d'un bâtiment administratif complétant l'ancienne préfecture ; qu'à la suite de l'intervention de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, les autorités départementales ont modifié la destination du bâtiment en cours d'édification qui devait dorénavant abriter les services du département du Morbihan et, de ce fait, comprendre une nouvelle salle des séances du conseil général, et demandé au groupement dont M. X... était le mandataire d'établir les nouveaux plans et de continuer à assurer la maîtrise d'oeuvre d l'opération ; que M. X..., après avoir commencé à travailler sur ces nouvelles bases, a décidé, le 31 mars 1983, d'abandonner définitivement cette mission ; que dans ces conditions, le département du Morbihan a pu, sans méconnaître le droit moral du requérant sur son oeuvre, continuer l'opération en chargeant les deux membres restants du groupement, l'architecte GUILLOU et le bureau d'études SEBA, de réaliser les études nécessaires ; qu'il ne ressort d'ailleurs des pièces du dossier ni que la nouvelle salle des séances du conseil général constitue un "plagiat" du petit bâtiment d'accueil conçu par M. X... à un stade antérieur du projet, ni que l'architecture de cette salle porte atteinte à celle du corps de bâtiment conçu par le requérant, ni enfin que l'aménagement définitif du "patio" de ce corps de bâtiment équivale à une dénaturation de la conception due à l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à ce que le département du Morbihan soit condamné à l'indemniser du préjudice moral résultant de la prétendue violation de ses droits d'auteur, du plagiat et de la dénaturation de son oeuvre ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au président du conseil général du Morbihan et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 78833
Date de la décision : 06/05/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ARTS ET LETTRES - GENERALITES - Propriété littéraire et artistique - Droit de l'auteur au respect de son oeuvre (loi du 11 mars 1957) - Violation - Absence - Nom de l'architecte n'ayant pas été inscrit sur la façade d'un immeuble public rénové (1).

17-03-02-05-01-01 M. G., architecte, mandataire du groupement chargé par le département du Morbihan de la maîtrise d'oeuvre de la rénovation de la préfecture, demande au juge administratif que le département du Morbihan soit condamné à l'indemniser du préjudice moral résultant de la prétendue violation de ses droits d'auteur, du plagiat et de la dénaturation de son oeuvre constituée par la poursuite du projet par les deux membres restants du groupement, après qu'il eut décidé d'abandonner cette mission. Une telle demande relève bien de la compétence du juge administratif.

COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - RESPONSABILITE - RESPONSABILITE EXTRA-CONTRACTUELLE - COMPETENCE ADMINISTRATIVE - Divers - Action fondée sur la violation de la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique - Violation par un département - dans le cadre de travaux de rénovation d'une préfecture.

09-005, 26-04-03, 39-06, 60-01-05 Aux termes de l'article 6, 1er alinéa, de la loi du 11 mars 1957 sur les droits d'auteur d'une oeuvre de l'esprit, oeuvre qui, aux termes de l'article 3 de la même loi, comprend les oeuvres d'architecture, "l'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre". Toutefois, la rénovation intérieure des ailes Est et Ouest de la préfecture du Morbihan, qui a consisté en une consolidation des charpentes et planchers et un réaménagement des bureaux, ne présentait pas un caractère suffisamment original pour permettre à M. G., architecte mandataire du groupement chargé par le département du Morbihan de la maîtrise d'oeuvre de cette rénovation, de se prévaloir des dispositions précitées pour exiger que son nom fût inscrit sur la façade de la préfecture.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - DROIT DE PROPRIETE - PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droit moral de l'auteur d'une oeuvre - Droit au respect de son nom - Absence de violation - Non-inscription du nom de l'architecte sur la façade d'un immeuble public rénové.

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - Droit pour l'auteur d'une oeuvre architecturale de voir respecter son oeuvre (articles 3 et 6 de la loi du 11 mars 1957) (1) - Absence de violation - Nom de l'architecte n'ayant pas été inscrit sur la façade d'un immeuble public rénové.

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE REGIE PAR DES TEXTES SPECIAUX - Loi du 11 mars 1957 sur la propriété intellectuelle - Droit pour l'auteur d'une oeuvre architecturale de voir respecter son oeuvre (articles 3 et 6) (1) - Absence de violation - Nom de l'architecte n'ayant pas été inscrit sur la façade d'un immeuble public rénové.


Références :

Loi 57-298 du 11 mars 1957 art. 3, art. 6 al. 1
Loi 82-213 du 02 mars 1982

1.

Rappr. 1977-01-05, Marcuccini, p. 3


Publications
Proposition de citation : CE, 06 mai. 1988, n° 78833
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: Mme Leroy
Rapporteur public ?: M. Schrameck

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:78833.19880506
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award