La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/05/1988 | FRANCE | N°72100

France | France, Conseil d'État, 10/ 1 ssr, 13 mai 1988, 72100


Vu la requête enregistrée le 6 septembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le COMITE DE DEFENSE DES SITES DE LA TURBIE, dont le siège social est route du Mont-Agel à la Turbie (06320), représenté par Mme Nadia Vidal, son président en exercice, domiciliée route du Mont-Agel à la Turbie (06320), agissant également à titre personnel, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 10 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet commissaire de

la République du département des Alpes-Maritimes en date du 21 juin 19...

Vu la requête enregistrée le 6 septembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le COMITE DE DEFENSE DES SITES DE LA TURBIE, dont le siège social est route du Mont-Agel à la Turbie (06320), représenté par Mme Nadia Vidal, son président en exercice, domiciliée route du Mont-Agel à la Turbie (06320), agissant également à titre personnel, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 10 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet commissaire de la République du département des Alpes-Maritimes en date du 21 juin 1984 accordant à la société civile immobilière agricole "Carloz" un permis de construire 17 villas à la Turbie (Alpes-Maritimes),
°2) annule pour excès de pouvoir cette décision,
°3) à titre subsidiaire, ordonne une enquête afin de permettre aux requérants de rapporter la preuve des faits rapportés à l'appui de leur recours et mémoire,
°4) condamne l'Etat aux dépens,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil et la loi du 4 janvier 1978 ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi °n 63-645 du 6 juillet 1963 ;
Vu le plan d'occupation des sols de la commune de la Turbie approuvé le 11 mars 1982 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Montgolfier, Auditeur,
- les conclusions de Mme Lenoir, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte des articles R. 421-1 et suivants du code de l'urbanisme que l'administration, saisie d'une demande de permis de construire, doit vérifier que le pétitionnaire justifie de sa qualité de propriétaire, d'un mandat ou d'un titre l'habilitant à construire ; que, dès lors que cette justification est, comme en l'espèce, apportée il ne lui appartient pas, en revanche, de rechercher si la personne morale qui sollicite le permis a été régulièrement constituée et si l'opération entreprise est réalisée conformément aux statuts de cette dernière ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que la société Carloz n'aurait pas été constituée conformément aux dispositions des articles 1845 et suivants du code civil, de ce qu'elle n'aurait pu délivrer de mandat faute d'avoir défini les pouvoirs des gérants dans ses statuts et de ce que l'opération entreprise ne serait pas conforme à l'objet social de cette société, tel qu'il est fixé par ses statuts, sont inopérants ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 315-2 du code de l'urbanisme : "Ne constituent pas des lotissements et ne sont pas soumises aux dispositions du présent chapitre : ... c) les divisions de terrains en propriété ou en jouissance, lorsque les terrains issus de la division constituent l'assiette d'un immeuble à construire dont la vente est régie par les articles 1601-1 à 1601-4 du code civil ..." ; qu'il ressrt des pièces du dossier que les terrains issus de la division de la propriété de la société Carloz constituent l'assiette d'immeubles à construire dont la vente est régie par les articles 1601-1 à 1601-4 du code civil ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que le permis litigieux serait contraire aux règles applicables aux lotissements sont inopérants ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-2-8 du code de l'urbanisme : "Les demandes de permis de construire sur lesquelles il n'a pas été statué à la date du tranfert de compétence continuent d'être instruites et font l'objet de décisions dans les conditions prévues par les dispositions en vigueur au moment de leur dépôt" ; qu'il est constant qu'il n'avait pas été statué, à la date du transfert de compétence, sur la demande de permis de construire déposée le 23 décembre 1983 pour la société Carloz ; que, dès lors, en vertu des dispositions du °5 de l'article R. 421-32 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce, le préfet, commissaire de la République du département des Alpes-Maritimes, était bien compétent pour délivrer l'autorisation sollicitée ;
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les dispositions applicables en zone N.B. du plan d'occupation des sols de la Turbie sont compatibles avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de la région de Menton qui limitent la construction dans cette zone à une urbanisation légère et imposent de préserver le caractère de campagne de ces zones ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à invoquer l'illégalité des dispositions du plan d'occupation des sols de la Turbie pour contester la légalité du permis délivré à la société Carloz ;
Considérant que l'opération litigieuse ne constituant pas un lotissement, les requérants ne sauraient utilement pour contester la légalité du permis attaqué, invoquer les dispositions de l'article N.B. 2 du plan d'occupation des sols de la Turbie, qui interdisent les lotissements en zone N.B. ; que si, en vertu des dispositions de l'article N.B. 5 du même plan, tout terrain doit, pour être constructible, avoir une superficie au moins égale à 2500 m2 en zone N.B. c et si la construction d'un seul volume principal est autorisée sur cette superficie minimale, aucune disposition du plan d'occupation des sols n'interdisait la construction de plusieurs volumes sur le terrain appartenant à la société Carloz dont la superficie totale s'élève à 12 081 m2 ; qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la construction litigieuse respecte les marges de recul fixées par les articles N.B. 6 et N.B. 7 du plan d'occupation des sols ainsi que le coefficient d'emprise au sol et le coefficient d'occupation des sols fixés respectivement par les articles N.B. 9 et N.B. 14 du même plan ; qu'en imposant aux pétitionnaires de restituer intégralement le bosquet de pins abattus et d'aménager 60 % de la superficie du terrain en espaces libres communs, le préfet s'est borné à faire application des dispositions des premiers et troisième alinéas de l'article N.B. 13-2 du plan d'occupation des sols où il est précisé, respectivement que, "dans la mesure où l'abattage d'arbres s'avèrerait indispensable, ces derniers devront être soit transplantés, soit remplacés à raison d'un arbre de dimension équivalente pour un arbre abattu" et que, "dans les opérations de maisons individuelles groupées, 60 % de la superficie du terrain doivent être aménagés en espaces libres communs" ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le permis litigieux aurait été délivré en méconnaissance des dispositions du plan d'occupation des sols de la Turbie ;

Considérant que le permis étant délivré sous réserve des droits des tiers, les requérants ne sauraient utilement invoquer à l'appui de leur requête les inconvénients qu'emporterait pour eux la construction autorisée par le permis litigieux ; qu'ils ne sauraient non plus, en tout état de cause, invoquer le non respect des droits de bandite qui ont été supprimés par la loi °n 63-645 du 8 juillet 1963 ;
Considérant que la circonstance que le panneau d'affichage sur le terrain ne mentionnerait pas le nom du pétitionnaire mais celui d'une autre société, en méconnaissance des dispositions de l'article A. 421-7 du code de l'urbanisme, est sans influence sur la légalité du permis attaqué ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner les mesures d'instruction sollicitées, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré à la société Carloz ;
Considérant qu'en raison de la nature particulière du recours pour excès de pouvoir des conclusions reconventionnelles tendant à ce que le requérant soit condamné à payer à une personne mise en cause des dommages-intérêts pour procédure abusive ne peuvent être utilement présentées dans une instance en annulation pour excès de pouvoir ; que, par suite, les conclusions de l'appel incident présenté par la société Carloz et tendant à ce que les requérants soient condamnés à lui verser des dommages-intérêts pour procédure abusive ne sont pas recevables ;

Article 1er : La requête du COMITE DE DEFENSE DES SITES DE LA TURBIE et de Mme Vidal ainsi que le recours incident de la société Carloz sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au COMITE DE DEFENSE DES SITES DE LA TURBIE, à M. Vidal, à la société Carloz, au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoireet des transports et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10/ 1 ssr
Numéro d'arrêt : 72100
Date de la décision : 13/05/1988
Type d'affaire : Administrative

Analyses

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PROCEDURES D'INTERVENTION FONCIERE - LOTISSEMENTS - OPERATIONS CONSTITUANT UN LOTISSEMENT - Absence - Terrain issu d'une division constituant l'assiette d'un immeuble à construire dont la vente est régie par les articles 1601-1 à 1601-4 dU code civil.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - PROCEDURE D'ATTRIBUTION - DEMANDE DE PERMIS - Qualité du demandeur - Cas d'une personne morale.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - PROCEDURE D'ATTRIBUTION - AUTORITE COMPETENTE POUR STATUER SUR LA DEMANDE - Répartition des compétences entre les communes les départements et l'Etat - Application des dispositions en vigueur à la date du dépôt de la demande (article L421-2-8 du code de l'urbanisme) - Compétence du préfet.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE AU REGARD DE LA REGLEMENTATION LOCALE - PLAN D'OCCUPATION DES SOLS - Règles relatives à la superficie minimale des terrains constructibles - aux marges de recul - à l'emprise au sol - au coefficient d'occupation des sols et à l'abattage d'arbres.


Références :

Code civil 1845 et suivants, 1601-1 à 1601-4
Code de l'urbanisme R421-1, R315-2 c, L421-2-8, R421-32, A421-7
Loi 63-645 du 08 juillet 1963


Publications
Proposition de citation : CE, 13 mai. 1988, n° 72100
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: de Montgolfier
Rapporteur public ?: Mme Lenoir

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:72100.19880513
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award