Vu le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS enregistré le 2 janvier 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement en date du 25 juin 1985 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande du groupe d'action municipale (G.A.M.) d'Embrun, l'arrêté du maire de cette commune en date du 19 avril 1983 accordant à M. X... l'autorisation de construire un bâtiment à usage de sanitaires pour camping ;
°2 rejette la demande présentée par le groupe d'action municipale d'Embrun devant le tribunal administratif de Marseille,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le décret °n 77-755 du 7 juillet 1977 ;
Vu le décret °n 77-1281 du 22 novembre 1977 approuvant la "directive montagne" ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Nauwelaers, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales lorsque, par leur importance, leur situation et leur affectation, des constructions contrarieraient l'action d'aménagement du territoire et d'urbanisme telle qu'elle résulte de directives d'aménagement national approuvées par décret" ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, lorsqu'elle est saisie d'un projet qui se heurte aux orientations énoncées par une telle directive, d'apprécier s'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de lui opposer ces orientations ; qu'au cas où elle délivre néanmoins le permis, son apréciation ne peut être censurée par le juge de l'excès de pouvoir que si elle est manifestement erronée, si elle se fonde sur une erreur de fait ou de droit, ou si la décision est entachée de détournement de pouvoir ;
Considérant que d'après les dispositions de la directive d'aménagement national relative à la protection et à l'aménagement de la montagne approuvée par le décret du 22 novembre 1977, la construction ne doit pas être autorisée, dans les communes où s'applique cette directive, sur les parcelles agricoles de faible déclivité qui ne seraient pas incluses dans des zones "déjà bâties pour l'essentiel" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle sur laquelle le maire d'Embrun a, par arrêté du 19 avril 1983, autorisé la construction d'un bâtiment à usage de sanitaire pour un camping autorisé par arrêté préfectoral du 20 juillet 1982 est composée de terres agricoles de faible déclivité et n'est pas incluse dans ue zone déjà bâtie pour l'essentiel ; que toutefois, compte tenu de la faible importance de la construction projetée, le maire d'Embrun n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que cette construction n'était pas de nature, dans les circonstances de l'espèce, à contrarier l'action d'aménagement des zones de montagne telle qu'elle résulte de la directive précitée ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille s'est fondé, pour annuler le permis de construire litigieux, sur le motif tiré d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par le groupe d'action municipale d'Embrun devant le tribunal administratif de Marseille ;
Considérant, en premier lieu, que les directives d'aménagement national approuvées par décret dans les conditions prévues à l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme modifié par l'article 10 du décret °n 77-755 du 7 juillet 1977 n'avaient pas, à la date de la décision attaquée, le caractère de schéma directeur au sens des articles L. 122-1 et suivants du code de l'urbanisme, et ne s'imposaient pas au plan d'occupation des sols ; qu'ainsi, et nonobstant les dispositions du paragraphe 1-1 de la directive d'aménagement national relative à la protection et l'aménagement de la montagne approuvée par décret du 22 novembre 1977, le groupe d'action municipale d'Embrun n'est pas fondé à soutenir à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté municipal du 19 avril 1983 que le zonage prévu par le plan d'occupation des sols à l'endroit de la construction projetée serait incompatible avec les dispositions du paragraphe 1-1-2 de cette directive ;
Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de l'illégalité de la délibération du conseil municipal d'Embrun en date du 15 décembre 1982 approuvant la convention passée par la ville avec M. X... pour la réalisation d'un camping est inopérant à l'égard de conclusions dirigées contre le permis de construire un bâtiment à usage de sanitaire dans ce camping ;
Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que l'un des propriétaires des terres louées à M. X... pour la réalisation du camping et des sanitaires aurait manqué à ses obligations au regard du droit rural n'est pas de nature à entacher d'illégalité le permis de construire attaqué ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé le permis de construire accordé à M. X... le 19 avril 1983 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 25 juin 1985 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le groupe d'action municipale d'Embrun devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports, au groupe d'action municipale d'Embrun et à la ville d'Embrun.