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03/06/1988 | FRANCE | N°58876

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 03 juin 1988, 58876


Vu °1) la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés sous le °n 58 876 respectivement le 2 mai 1984 et le 27 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme "ENTREPRISE J.P. PALUD", dont le siège est ..., représentée par son président directeur général demeurant audit siège et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 1er mars 1984 en tant qu'il a condamné l'entreprise J.P. PALUD conjointement et solidairement avec d'autres constructeurs à ré

parer le préjudice résultant pour la commune de Plobannalec des désordres ...

Vu °1) la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés sous le °n 58 876 respectivement le 2 mai 1984 et le 27 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme "ENTREPRISE J.P. PALUD", dont le siège est ..., représentée par son président directeur général demeurant audit siège et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 1er mars 1984 en tant qu'il a condamné l'entreprise J.P. PALUD conjointement et solidairement avec d'autres constructeurs à réparer le préjudice résultant pour la commune de Plobannalec des désordres survenus dans les bâtiments du groupe scolaire ;
°2) rejette en ce qui la concerne la demande présentée par la commune de Plobannalec devant le tribunal administratif de Rennes ;
°3) à titre subsidiaire écarte le principe de la condamnation solidaire en ce qui concerne les désordres affectant le réseau de chauffage, l'exonère de toute responsabilité de ce chef et déclare que l'architecte M. X... la garantira des condamnations qui seraient prononcés contre elle du fait des autres désordres ;
°4) enfin réduise le montant des indemnités que les constructeurs ont été condamnés à payer à la commune ;
Vu °2) la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés sous le °n 58 947 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat respectivement le 4 mai 1984 et le 4 septembre 1984, présentés pour la société anonyme "RAUB", dont le siège est ..., poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 1er mars 1984 en tant qu'il a condamné la société "RAUB" conjointement et solidairement avec d'autres constructeurs à réparer le préjudice résultant pour la commune de Plobannalec de désordres survenus dans les bâtiments du groupe scolaire,
°2) rejette en ce qui la concerne la demande présentée par la commune de Plobannalec devant le tribunal administratif de Rennes et prononce sa mise hors de cause,
°3) subsidiairement réduise à 5 % maximum le part de la société "RAUB" dans la charge définitive de la condamnation ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faure, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Le Bret, de Lanouvelle, avocat de l'ENTREPRISE J.P. PALUD, de la S.C.P. de Chaisemartin, avocat de la commune de Plobannalec, de Me Boulloche, avocat de M. X..., de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges, avocat de la société anonyme "RAUB", et de Me Roger avocat de la société de Contrôle Technique et d'Expertise de la Construction,
- les conclusions de . Robineau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête °n 58 876 de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" et la requête °n 58 947 de la société "S.A. RAUB" sont relatives à un même litige ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'à la suite d'une demande de la commune de Plobannalec (Finistère) tendant à obtenir, sur le fondement de la garantie décennale, la réparation du préjudice résultant pour elle des désordres survenus sur les bâtiments du groupe scolaire de la commune, le tribunal administratif de Rennes a, par jugement du 1er mars 1984, condamné conjointement et solidairement vis-à-vis de la commune de Plobannalec en premier lieu M. X... et la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" à payer une indemnité de 396 124 F pour les travaux de réfection des fondations et des sols, en deuxième lieu M. X..., la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" et la société "S.A. RAUB" à payer une indemnité de 393 320,62 F pour le traitement des façades, le revêtement des murs intérieurs des salles de classes et de la salle de jeux, et le bardage du pignon ouest et en troisième lieu M. X..., la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" et la société Quenet à payer une indemnité de 28 000 F pour la réfection des installations de chauffage, la charge définitive des condamnations étant répartie respectivement pour moitié entre M. X... et la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" pour les travaux de réfection des fondations et des sols et dans la proportion de 50 % pour M. X... et 25 % pour chacune des entreprises pour les deux autres catégories de travaux ;
En ce qui concerne la requête °n 58 876 :
Sur les conclusions de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" :

Considérant que par deux accords dits "contrats de rétrocession" passés le 19 juillet 1975 entre la commune de Plobannalec d'une part et les deux sociétés EGO et J.P. PALUD d'autre part la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" a accepté de poursuivre à la place de la société EGO et avec les mêmes obligations que celles qu'imposaient à cette dernière société les contrats initiaux, les travaux de construction du groupe scolaire de Plobannalec en ce qui concerne respectivement le lot °n 2 "gros oeuvre" et les lots 4, 5, 6 et 7 relatifs à la charpente-menuiserie ; que la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que sa responsabilité décennale vis-à-vis du maître de l'ouvrage n'est pas engagée du fait des travaux exécutés antérieurement par la société Ego ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que si des fissures sont apparues avant la réception définitive sur le mur séparant deux salles de classe d'un bâtiment du groupe scolaire ni l'origine de ces désordres, ni leurs conséquences n'avaient pu apparaître dans toute leur étendue au maître de l'ouvrage ;
Considérant que le choix du maître de l'ouvrage d'implanter le groupe scolaire en front de mer, à la suite duquel les bâtiments auraient été particulièrement exposés aux intempéries ne saurait constituer par lui-même une faute de nature à exonérer même partiellement la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" de sa responsabilité décennale ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que la corrosion des canalisations de chauffage est en partie imputable à la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" qui a omis de prévoir une protection hydrofugée sur la partie verticale des fondations ; qu'ainsi cette société n'est pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient à tort retenu sa responsabilité pour les désordres affectant les installations de chauffage ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la société, c'est à bon droit que les premiers juges, estimant que chacune des trois catégories de désordres était imputable à l'action commune de plusieurs constructeurs ont prononcé dans chaque cas la condamnation conjointe et solidaire de ces constructeurs ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les travaux de réfection préconisés par l'expert apporteraient une plus value à l'ouvrage, ni qu'en fixant à 50 % le montant de la garantie due par l'architecte aux autres constructeurs, dont la société "ENTREPRISE J.P. PALUD", pour chacune des trois catégories de dommages le tribunal administratif a fait une inexacte appréciation des circonstances de l'affaire ;
Considérant enfin que le jugement attaqué est suffisamment motivé ; qu'il y a lieu, dès lors, de rejeter la requête présentée par la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" ;
Sur les conclusions d'appel provoqué de M. X... et de la société "S.A. RAUB" :
Considérant que les conclusions de M. X... et de la société "S.A. RAUB" qui ont été provoquées par l'appel de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" et présentées après l'expiration du délai de recours contentieux en vue d'obtenir une réduction de l'indemnité mise à leur charge ne seraient recevables qu'au cas où l'appelant principal obtiendrait lui-même une réduction de l'indemnité qu'il a été condamné à verser solidairement avec d'autres constructeurs au maître de l'ouvrage ; que la présente décision rejetant l'appel de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" les conclusions présentées respectivement par M. X... et par la société "S.A. RAUB" contre la commune de Plobannalec ne sont pas recevables ;
En ce qui concerne la requête °n 58 947 :
Sur les conclusions de la société "S.A. RAUB" :
Sur les désordres affectant les façades des bâtiments :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'emploi de l'enduit plastique type "Saidagrain" sur la face extérieure des moellons "Durox" utilisés pour la construction des murs n'a pas permis d'assurer l'étanchéité de ces murs qui étaient particulièrement exposés aux intempéries ; que ce défaut rendait les bâtiments du groupe scolaire impropres à leur destination et par suite était de nature à engager la responsabilité des constructeurs par application des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant que si la technique de ravalement des façades et notamment le type d'enduit à utiliser ont été choisis par l'architecte cette circonstance n'est pas de nature à décharger la société "S.A. RAUB" de toute responsabilité alors que malgré sa qualification technique elle n'a formulé aucune observation ni aucune réserve sur ce choix ;
Sur les désordres affectant le pignon ouest :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'opération de bardage du pignon ouest préconisée par l'expert a été rendue nécessaire par le défaut d'étanchéité de cette partie du bâtiment résultant, comme il a été dit ci-dessus, de l'emploi de l'enduit plastique "Saidagrain" sur des moellons Durox ; que, par suite, la société "S.A. RAUB" n'est pas fondée à soutenir qu'elle devait être mise hors de cause en ce qui concerne lesdits désordres ;
Sur les désordres affectant les murs intérieurs :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réfection de la peinture des salles du groupe scolaire y compris la salle de jeux a été rendue nécessaire par la formation des fissures dans les murs et par les dégradations subies par les revêtements intérieurs causées les unes et les autres par des infiltrations dues notamment au défaut d'étanchéité des façades ; qu'ainsi la société "S.A. RAUB" n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif l'a à tort condamnée conjointement et solidairement avec l'architecte et la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" à supporter le coût des travaux de réfection des peintures intérieures des bâtiments du groupe scolaire ; qu'elle ne saurait davantage soutenir, eu égard à leur objet, que ces travaux n'étaient pas destinés à réparer des désordres de nature à engager la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale ;
Considérant enfin qu'en fixant à 25 % la part devant être supportée par la société "S.A. RAUB" dans la charge définitive du coût des travaux de réfection des façades des bâtiments et du revêtement intérieur des murs le tribunal administratif n'a pas fait une inexacte appréciation de la gravité de la faute commise par cette entreprise ; qu'ainsi ses conclusions tendant à ce que sa part soit ramenée à 5 % ne sauraient être accueillies ;
Sur les conclusions d'appel provoqué de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" et de M. X... :
Considérant que les conclusions de M. X... et de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" qui ont été provoquées par l'appel de la société "S.A. RAUB" et présentée après l'expiration du délai de recours contentieux en vue d'obtenir une réduction de l'indemnité mise à leur charge ne seraient recevables qu'au cas où l'appelant principal obtiendrait lui-même une réduction de l'indemnité qu'il a été condamné à verser solidairement avec d'autres constructeurs au maître de l'ouvrage ; que la présente décision rejetant l'appel de la société "S.A. RAUB" les conclusions présentées respectivement par M. X... et par la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" contre la commune de Plobannalec ne sont pas recevables ;
Article 1er : Les requêtes °n 58 876 de la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" et °n 58 947 de la société "S.A. RAUB" sont rejetées.
Article 2 : : Les conclusions d'appel provoqué présentées respectivement par M. X... et la société "S.A. RAUB" dans l'affaire°n 58 876 et par M. X... et la société "ENTREPRISE J.P. PALUD" dansl'affaire °n 58 947 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société "ENTREPRISE J.P. PALUD", à la société "S.A. RAUB", à M. X..., à la société SOCOTEC, à la société Quenet, à la commune de Plobannalec, auministre de l'intérieur et au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et des sports.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 58876
Date de la décision : 03/06/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - DESORDRES DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DECENNALE DES CONSTRUCTEURS - ONT CE CARACTERE - (1) Défaut d'étanchéité des façades des bâtiments d'un groupe scolaire - Fissuration des murs intérieurs d'un bâtiment - (2) Corrosion des canalisations de chauffage - (3) Désordres affectant les sols et les fondations des bâtiments.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - RESPONSABILITE DE L'ENTREPRENEUR - FAITS DE NATURE A ENGAGER SA RESPONSABILITE - Entrepreneur ayant omis de prévoir une protection hydrofugée sur la partie verticale des fondations - Corrosion des canalisations de chauffage.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - RESPONSABILITE DE L'ENTREPRENEUR - FAITS N'ETANT PAS DE NATURE A EXONERER L'ENTREPRENEUR - (1) Choix du maître de l'ouvrage d'implanter les bâtiments d'un groupe scolaire en front de mer - (1) Choix de l'architecte de la technique de ravalement des façades et notamment le type d'enduit à utiliser.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - CONDAMNATION SOLIDAIRE.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - PARTAGE DES RESPONSABILITES.


Références :

Code civil 1792 et 2270


Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 1988, n° 58876
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Faure
Rapporteur public ?: Robineau

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:58876.19880603
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