La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/06/1988 | FRANCE | N°71922

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 10 juin 1988, 71922


Vu le recours et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 septembre 1985 et 24 décembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat présentés par le ministre délégué auprès du ministre du redéploiement industriel et du commerce extérieur, chargé des P.T.T., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule un jugement en date du 13 juin 1985 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat (ministre délégué auprès du ministre du redéploiement industriel et du commerce extérieur, chargé des P.T.T.) à verser à la compagnie générale

des eaux (CGE) la somme de 1 700 000 F majorée des intérêts légaux à compter ...

Vu le recours et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 septembre 1985 et 24 décembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat présentés par le ministre délégué auprès du ministre du redéploiement industriel et du commerce extérieur, chargé des P.T.T., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule un jugement en date du 13 juin 1985 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat (ministre délégué auprès du ministre du redéploiement industriel et du commerce extérieur, chargé des P.T.T.) à verser à la compagnie générale des eaux (CGE) la somme de 1 700 000 F majorée des intérêts légaux à compter du 16 avril 1981 à la suite de l'inondation qui a endommagé plusieurs salles d'opérations de la clinique de Sartrouville ;
°2) dire que la responsabilité imputable à la compagnie générale des eaux devra être égale à 20 % ; que celle de la clinique de Sartrouville ne saurait être inférieure à 20 % ; que celle de l'administration des P.T.T. ne peut être supérieure à 70 %, devant être égale à 60 % ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Falque-Pierrotin, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Vier, Barthélémy, avocat de la Compagnie générale des eaux,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'appel du ministre délégué auprès du ministre du redéploiement industriel et du commerce extérieur, chargé des P.T.T. :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des conclusions de l'expert commis par les premiers juges, que la cause principale des inondations survenues le 8 novembre 1979 dans la clinique de Sartrouville est la rupture d'une canalisation d'eau potable à la suite de la pression exercée par une chambre téléphonique appartenant à l'administration des P.T.T. placée sans protection immédiatement au-dessus de cette canalisation et, en partie, sous une entrée de la clinique destinée aux piétons mais également empruntée par les ambulances ; que l'Etat doit être regardé comme responsable des dommages pour 85 %, la clinique gardant, en raison de diverses fautes ou négligences commises par elle, 15 % de ceux-ci à sa charge ; qu'aucune faute n'ayant été commise par la compagnie générale des eaux, le ministre des P.T.T. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, il a été condamné à verser à la compagnie des eaux, la somme non contestée de 1 700 000 F, somme correspondant à l'avance faite par cette société à la clinique ;
Sur l'appel incident de la compagnie générale des eaux :
Considérant que par la voie de l'appel incident la société compagnie générale des eaux, se prévalant 'une lettre du 4 juin 1980 de l'ingénieur en chef, chargé de la direction opérationnelle des télécommunications de Saint-Quentin-en-Yvelines, demande les intérêts au taux bancaire de 18 % sur les sommes qui lui sont dues par l'Etat (ministère des P.T.T.) ; que par cette lettre, la direction susmentionnée s'engageait, lorsque son éventuelle responsabilité aurait été déterminée, à assurer sa dette envers la compagnie générale des eaux, "majorée des intérêts bancaires" ; qu'en ne respectant pas cet engagement, l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, faute qui a causé à la Compagnie générale des eaux, à la suite de l'avance de fonds à laquelle elle a procédé, un préjudice égal à la différence entre les intérêts calculés au taux bancaire et au taux légal ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 60 000 F ;
Sur la capitalisation des intérêts :

Considérant que la compagnie générale des eaux a demandé, le 12 décembre 1986, par la voie de l'appel incident, la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité que le tribunal administratif de Versailles lui a accordé ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

Article 1er : Le recours du ministre des P.T.T. est rejeté.
Article 2 : Le ministère des P.T.T. est condamné à verser à la compagnie générale des eaux la somme de 60 000 F majorée des intérêtslégaux à compter de la date de la présente décision.
Article 3 : Les intérêts afférents à l'indemnité de 1 700 000 F que l'Etat a été condamné à verser à la compagnie générale des eaux par le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 13juin 1985 et échus le 12 décembre 1986 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Le surplus des conclusions de l'appel incident est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la compagnie générale des eaux et ministre des postes et télécommunications et de l'espace.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 71922
Date de la décision : 10/06/1988
Sens de l'arrêt : Rejet admission recours incident
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - PROMESSES - Existence d'une faute - Non-respect d'un engagement de l'administration d'assumer une dette majorée des intérêts bancaires.

60-01-03-03 La Compagnie générale des eaux, se prévalant d'une lettre du 4 juin 1980 de l'ingénieur en chef, chargé de la direction opérationnelle des télécommunications de Saint-Quentin-en-Yvelines, demande les intérêts au taux bancaire de 18 % sur les sommes qui lui sont dues par l'Etat (Ministère des P.T.T.). Par cette lettre, la direction susmentionnée s'engageait, lorsque son éventuelle responsabilité aurait été déterminée, à assurer sa dette envers la Compagnie générale des eaux, "majorée des intérêts bancaires". En ne respectant pas cet engagement l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - Préjudice correspondant à des frais et charges - Non respect d'un engagement de l'administration d'acquitter une dette majorée des intérêts bancaires - Préjudice subi par le créancier qui a fait l'avance - Différence entre les intérêts calculés au taux légal et au taux bancaire.

60-04-03-02 La direction opérationnelle des télécommunications s'était engagée, lorsque son éventuelle responsabilité aurait été déterminée, à acquitter sa dette envers la Compagnie générale des eaux, "majorée des intérêts au taux bancaire". Cet engagement n'a pas été respecté. En raison de cette faute de l'administration, la Compagnie générale des eaux, à la suite de l'avance de fonds à laquelle elle a procédé, a subi un préjudice égal à la différence entre les intérêts calculés au taux bancaire et au taux légal. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 60 000 F.


Références :

Code civil 1154


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 1988, n° 71922
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: Mme Falque-Pierrotin
Rapporteur public ?: M. de La Verpillière

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:71922.19880610
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award