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02/11/1988 | FRANCE | N°55228

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 02 novembre 1988, 55228


Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir :
1- l'arrêté en date du 24 octobre 1983 par lequel le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a agréé la décision résultant de l'accord national interprofessionnel du 15 septembre 1983 signé par les organisations signataires de la convention du 31 décembre 1958 ;
2- la circulaire n° 83-52 du 3 novembre 1983, signée par le directeur de l'UNEDIC et co

ncernant l'allocation instituée par l'accord précité ;
Vu les autres ...

Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir :
1- l'arrêté en date du 24 octobre 1983 par lequel le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a agréé la décision résultant de l'accord national interprofessionnel du 15 septembre 1983 signé par les organisations signataires de la convention du 31 décembre 1958 ;
2- la circulaire n° 83-52 du 3 novembre 1983, signée par le directeur de l'UNEDIC et concernant l'allocation instituée par l'accord précité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Daguet, Auditeur,
- les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions dirigées contre la circulaire :

Considérant que la circulaire attaquée en date du 3 novembre 1983 émane du directeur de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce qui est une personne morale de droit privé ; qu'elle porte sur les modalités d'attribution d'une allocation, équivalente à l'allocation de garantie de ressources, instituée par la décision résultant de l'accord national interprofessionnel du 15 septembre 1983 conclu entre les organisations patronales et syndicales représentatives ; qu'une telle circulaire, intervenue pour l'application d'un régime social conventionnel de droit privé ne constitue pas un acte administratif susceptible d'être déféré au juge de l'excès de pouvoir ; que, dès lors, les conclusions susanalysées doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté ministériel du 24 octobre 1983 portant agrément de la décision du 15 septembre 1983 prise par les organisations signataires de la convention du 31 décembre 1958 :
Considérant que, si M. X... demande l'annulation totale de l'arrêté en date du 24 octobre 1983 par lequel le ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, chargé de l'emploi, a agréé, en vertu de l'article L.352-2 du code du travail, la décision résultant de l'accord susmentionné, il n'invoque, à l'appui de ses conclusions, de moyens que contre les dispositions concernant le cas des salariés licenciés pour motif économique à partir de 55 ans avant la conclusion par leur entreprise d'une convention du Fonds National de l'Emploi (FNE), elle-même antérieure au 27 novembre 1982 ; que, par suite, M. X... n'est recevable à demander l'annulation de l'arrêté précité qu'en tant que ce dernier agrée lesdites stipulations ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.352-2 précité du code du travail : "Les accords ayant pour objet exclusif le versement d'allocations spéciales aux travailleurs sans emploi ... peuvent être agréés par arrêté du ministre chargé du travail lorsqu' ils ne comportent aucune stipulation incompatible avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ..." ;
Considérant que l'accord du 15 septembre 1983 a pour effet de permettre à d'anciens salariés non encore entrés en garantie de ressources le 31 décembre 1982, de bénéficier au taux de 70 % et jusqu'à l'âge de 65 ans d'une allocation équivalente à ladite garantie de ressources qu'avait supprimée l'article 1er de la loi n° 83.580 du 5 juillet 1983, à condition d'avoir été "licenciés pour motif économique à partir de 55 ans avant la conclusion par leur entreprise d'une convention FNE, elle-même antérieure au 27 novembre 1982" ;
Considérant que M. X... soutient que de telles stipulations sont entachées d'illégalité car elles conduisent à traiter de façon différente des salariés ayant fait l'objet de licenciements pour motif économique en dehors de toute convention d'allocations spéciales du FNE, suivant que leur entreprise a signé ou n'a pas signé, entre la date de leur licenciement et le 27 novembre 1982, une telle convention, alors que, selon le requérant, ces salariés, dont les droits à revenu de remplacement ne sauraient être influencés par leur seule appartenance à telle entreprise plutôt qu'à telle autre, se trouvent dans une situation identique ;

Considérant que la légalité d'un arrêté ministériel portant agrément d'un des accords mentionnés par l'article L.352-2 du code du travail est nécessairement subordonné à la validité des stipulations de l'accord en cause ; que, lorsqu'une contestation sérieuse s'élève sur cette validité, la juridiction administrative, compétemment saisie d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté d'agrément, est tenue, eu égard au caractère de droit privé que présente l'accord, de renvoyer à l'autorité judiciaire l'examen de cette question préjudicielle ;
Considérant que le moyen ci-dessus analysé invoqué par M. X..., qui commande la solution du litige soumis au Conseil d'Etat, soulève une contestation sérieuse ; qu'il y a lieu, dès lors, pour le Conseil d'Etat, de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si les stipulations contestées sont légales ;
Article 1er : Les conclusions de la requête de M. X... dirigées contre la circulaire en date du 3 novembre 1983 émanant du directeur de l'UNEDIC sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de M. X... dirigées contre l'arrêté du ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, chargé de l'emploi en date du 24 octobre 1983 jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la validité de la clause de la décision du 15 septembre 1983 adoptée par les organisations signataires de la convention du 31 décembre 1958 et selon laquelle les salariés licenciés pour motif économique à partir de 55 ans avant la conclusion par leur entreprise d'une convention F.N.E., elle-même antérieure au 27 novembre 1982, pourront bénéficier d'une allocation équivalente à l'ancienne allocation de garantie de ressources. Dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision par le secrétaire du contentieux du Conseil d'Etat, M. X... devra justifier de ses diligences à l'effet de saisir de la question dont s'agit la juridiction compétente.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 55228
Date de la décision : 02/11/1988
Sens de l'arrêt : Rejet incompétence sursis à statuer
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFERENTES CATEGORIES D'ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - NOTION - ACTES A CARACTERE ADMINISTRATIF - ACTES NE PRESENTANT PAS CE CARACTERE - Circulaire intervenue pour l'application d'un régime social conventionnel de droit privé (1).

01-01-05-01-02, 17-03-02-005-02, 66-10-02(1) Circulaire en date du 3 novembre 1983 émanant du directeur de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce qui est une personne morale de droit privé. Elle porte sur les modalités d'attribution d'une allocation équivalente à l'allocation de garantie de ressources, instituée par la décision résultant de l'accord national interprofessionnel du 15 septembre 1983 conclu entre les organisations patronales et syndicales représentatives. Une telle circulaire, intervenue pour l'application d'un régime social conventionnel de droit privé, ne constitue pas un acte administratif susceptible d'être déféré au juge de l'excès de pouvoir.

- RJ1 COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - ACTES - ACTES DE DROIT PRIVE - Actes pris par des organismes de droit privé - Associations - Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce - Circulaire de son directeur intervenue pour l'application d'un régime social conventionnel de droit privé (1).

17-04-02-01, 66-10-02(2) La légalité d'un arrêté ministériel portant agrément d'un des accords mentionnés par l'article L.352-2 du code du travail est nécessairement subordonnée à la validité des stipulations de l'accord en cause. Lorsqu'une contestation sérieuse s'élève sur cette validité, la juridiction administrative, compétemment saisie d'un recours pour excès de pouvoir contre l'arrêté d'agrément, est tenue, eu égard au caractère de droit privé que présente l'accord, de renvoyer à l'autorité judiciaire l'examen de cette question préjudicielle. A l'encontre de l'arrêté ministériel du 24 octobre 1983 portant agrément de l'accord du 15 septembre 1983 signé par les organisations signataires de la convention du 31 décembre 1958, M. L. soulève un moyen tiré de ce que certaines stipulations de cet accord sont entachées d'illégalité car elles conduisent à traiter de façon différente des salariés ayant fait l'objet de licenciements pour motif économique en dehors de toute convention d'allocations spéciales du F.N.E., suivant que leur entreprise a signé ou n'a pas signé, entre la date de leur licenciement et le 27 novembre 1982, une telle convention, alors que, selon le requérant, ces salariés, dont les droits à revenu de remplacement ne sauraient être influencés par leur appartenance à telle entreprise plutôt qu'à telle autre, se trouvent dans une situation identique. Ce moyen, qui commande la solution du litige, soulève une contestation sérieuse. Il y a lieu dès lors pour le Conseil d'Etat de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si les stipulations contestées sont légales.

COMPETENCE - COMPETENCES CONCURRENTES DES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - CONTENTIEUX DE L'APPRECIATION DE LA LEGALITE - CAS OU UNE QUESTION PREJUDICIELLE S'IMPOSE - Question préjudicielle du juge administratif au juge judiciaire - Arrêté portant agrément d'un des accords mentionnés par l'article L - 352-2 du code du travail (assurance-chômage) - Contestation sérieuse sur la validité de l'accord.

- RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - POLITIQUES DE L'EMPLOI - INDEMNISATION DES TRAVAILLEURS PRIVES D'EMPLOI (1) Insitutitions conventionnelles - Circulaire du directeur de l'U - N - E - D - I - C - portant sur les modalités d'attribution de l'allocation - équivalente à la garantie de ressources - instituée par l'accord national interprofessionnel du 15 septembre 1983 - Acte de droit privé échappant à la compétence du juge administratif (1) - (2) Accords relatifs aux allocations d'assurance des travailleurs privés d'emploi - Arrêté ministériel du 24 octobre 1983 portant agrément de la décision du 15 septembre 1983 prise par les organisations signataires de la convention du 31 décembre 1958 - Légalité de l'arrêté subordonnée à la validité des stipulations de cet accord - Contestation sérieuse - Renvoi au juge judiciaire de la question de la légalité desdites stipulations.


Références :

Accord national interprofessionnel du 15 septembre 1983
Arrêté ministériel du 24 octobre 1983 emploi décision attaquée
Circulaire 83-52 du 03 novembre 1983 directeur de l'UNEDIC décision attaquée
Code du travail L352-2
Convention collective nationale du 31 décembre 1958
Loi 83-580 du 05 juillet 1980 art. 1

1.

Cf. 1983-11-09, Marchand le Poittevin, p. 584


Publications
Proposition de citation : CE, 02 nov. 1988, n° 55228
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Daguet
Rapporteur public ?: M. Tuot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:55228.19881102
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