Vu la requête, enregistrée le 30 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Francis Y..., demeurant Ferme de Loizy, à Besny-Loisy (02000), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 15 avril 1986 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1980 dans les rôles de la commune de Besny-Loisy (Aisne) ;
2° lui accorde la décharge de l'imposition contestée,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Toutée, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Martin-Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du II de l'article 9 de la loi du 21 décembre 1970, codifié sous l'article 69 quater du code général des impôts : "1. Le bénéfice réel de l'exploitation agricole est déterminé et imposé selon les principes généraux applicables aux entreprises industrielles et commerciales ... mais avec des règles et modalités adaptées aux contraintes et caractéristiques particulières de la production agricole ... 2. Des décrets précisent les adaptations résultant du 1er alinéa" ; que l'article 11 du décret du 7 décembre 1971, pris sur le fondement des dispositions précitées de la loi du 21 décembre 1970, codifié sous l'article 38 sexdecies J de l'annexe III au code général des impôts, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "1. Lorsqu'un exploitant réalise un bénéfice supérieur à 50 000 F et excédant deux fois la moyenne des résultats des trois années précédentes, il peut demander que la fraction de ce bénéfice qui dépasse 50 000 F, ou cette moyenne si elle est supérieure, soit imposée selon les règles prévues à l'article 150 R du code général des impôts" ; que l'article 150 R du même code dispose que : "Le total net des plus-values, à l'exception de celles mentionnées à l'article 150 V, est divisé par cinq. Le résultat est ajouté au revenu global net. L'impôt est égal à cinq fois la cotisation supplémentaire ainsi obtenue ... son paiement peut être fractionné pendant une période de cinq ans ..." ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 38 sexdecies J de l'annexe III au code général des impôts que celles-ci ne peuvent recevoir application que si tant l'exercice auquel correspond l'année d'imposition concernée que les périodes à raison desquelles il a été imposé au titre des trois précédentes ont chacune une durée de douze mois consécutifs ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la période qui s'est écoulée entre le 1er juin 1977, date du début de l'exploitation de M. Y..., et le 1er juillet 1979, date d'ouverture de l'exercice de douze mois dont les résultats ont été retenus pour déterminer le bénéfice agricole de M. Y... au titre de l'année 1980, n'a compris qu'une période de sept mois, courant jusqu'au 31 décembre 1977 en vertu des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 du code général des impôts, une période de six mois et une période de douze mois ; que, par suite, en tout état de cause, M. Y... ne pouvait prétendre, pour son bénéfice imposable au titre de ladite année 1980, à la répartition prévue par les dispositions précitées de l'article 38 sexdecies J de l'annexe III au code général des impôts ;
Considérant, il est vrai, que M. Y... invoque, en premier lieu, l'interprétation de la loi fiscale qui serait contenue dans une réponse du ministre du budget, en date du 6 mai 1980, à M. Paul X..., sénateur, qui admet que, pour l'application des dispositions de l'article 38 sexdecies J de l'annexe III au code général des impôts, il est possible de retenir des exercices d'une durée inférieure ou supérieure à douze mois au cours de la période de trois années ouvrant droit au bénéfice des dispositions dudit article ; qu'il ressort, toutefois, des termes de cette réponse que son auteur n'écarte pas la condition requise pour l'application des dispositions de l'article 39 sexdecies J et qui est que les résultats imposés au titre des trois périodes de référence doivent avoir été réalisés au cours de la période de 36 mois précédant l'année d'imposition ; que cette condition n'étant pas remplie en l'espèce, M. Y... n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, reprises à l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, de l'interprétation susmentionnée ;
Considérant, en second lieu, que si M. Y... invoque également, sur le même fondement légal, l'instruction ministérielle n° 5-E-8-86 du 26 septembre 1986, cette instruction est postérieure à l'établissement de l'imposition contestée ; qu'ainsi, en tout état de cause, M. Y... ne peut utilement se prévaloir de l'interprétation du texte fiscal qu'elle contiendrait ; que, si cette instruction prévoit qu'elle s'appliquera aux litiges en cours, elle ne peut être regardée sur ce point comme interprétant le texte fiscal qui constitue la base légale de l'imposition contestée et, dès lors, ne peut être valablement invoquée sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts reprises à l'article L. 80 du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.