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23/12/1988 | FRANCE | N°83813

France | France, Conseil d'État, 10/ 1 ssr, 23 décembre 1988, 83813


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 décembre 1986 et 16 avril 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Paul X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 1er octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'annulation d'une part du titre de recettes n° 19 émis et rendu exécutoire le 19 novembre 1983 par le maire de la commune d'Encourtiech et d'autre part du commandement émis par le trésorier principal de Saint-G

irons le 21 mars 1984, ainsi qu'à la décharge de la somme de 8 013,...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 décembre 1986 et 16 avril 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Paul X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 1er octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'annulation d'une part du titre de recettes n° 19 émis et rendu exécutoire le 19 novembre 1983 par le maire de la commune d'Encourtiech et d'autre part du commandement émis par le trésorier principal de Saint-Girons le 21 mars 1984, ainsi qu'à la décharge de la somme de 8 013,80 F ;
2°) annule ce titre de recettes, ce commandement, et le décharge de ladite somme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes, notamment son article R.241-4 ;
Vu le décret n° 65-29 du 11 janvier 1965 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Montgolfier, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de M. Paul X...,
- les conclusions de Mme Leroy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, en premier lieu, que le premier alinéa de l'article 1er du décret susvisé du 11 janvier 1965 dispose que : "sauf en matière de travaux publics, la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; qu'il résulte de cette disposition que le délai de deux mois qu'elle fixe ne s'applique pas aux demandes présentées en matière de travaux publics, même si ces demandes sont dirigées contre une décision administrative notifiée au demandeur ; que constituent de telles demandes celles qui sont dirigées contre les actes tendant à percevoir tout ou partie des sommes nécessaires au financement de travaux publics lorsque ces demandes ne sont pas régies par des dispositions spéciales ;
Considérant que le maire d'Encourtiech (Ariège) a émis et rendu exécutoire le 19 novembre 1983 à l'encontre de M. X..., un titre de recettes portant le n° 19 d'un montant de 8 013,80 F ; que cette somme correspondait au coût de la reconstruction d'un métier à ferrer les bovins implanté sur la place communale du Coch, entreprise en application d'une délibération du conseil municipal en date du 1er avril 1983 ; que les travaux de reconstruction de cet ouvrage public ont le caractère de travaux publics ; que, dès lors, en l'absence de dispositions spéciales régissant les contestations relatives à cette charge et nonobstant la notification du titre de recettes faite à l'intéressé le 20 décembre 1983, la requête de M. X..., enregistrée au tribunal administratif de Toulouse le 20 novembre 984, en tant qu'elle tendait à l'annulation de cet acte, n'était pas tardive ; qu'il suit de là que le jugement de ce tribunal en date du 1er octobre 1986, en tant qu'il a rejeté la requête de M. X... comme irrecevable sur ce point en raison de sa tardiveté, doit être annulé ;

Considérant, en second lieu, que par la même demande M. X... a formé opposition contre le commandement émis le 21 mars 1984 par le trésorier principal de Saint-Girons en vue d'assurer le recouvrement du titre de recettes mentionné ci-dessus ; que ses prétentions ne concernaient pas la régularité des actes de poursuite mais le bien-fondé d'une créance de nature administrative dont le commandement tendait à assurer le recouvrement ; que, dès lors et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la juridiction administrative est compétente pour connaître de ce litige ; qu'ainsi, le jugement attaqué doit être également annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre ledit commandement ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le métier communal à ferrer les bovins avait été primitivement installé en exécution d'une délibération du conseil municipal d' Encourtiech en date du 30 mai 1977 ; que M. X..., qui était alors maire de la commune, en a ordonné ensuite la démolition en raison de l'irrégularité de sa construction qui avait été relevée par le sous-préfet de Saint-Girons et le directeur départemental de l'équipement et à l'invitation de ces autorités ; qu'il a ainsi agi, sans rechercher aucune fin personnelle, en qualité d'exécutif de la commune et pour le compte de celle-ci ; que, dans ces conditions, le coût de la reconstruction de l'ouvrage, décidée par le conseil municipal le 1er avril 1983, ne pouvait être supporté que par la commune ; que M. X... est, dès lors, fondé à soutenir que le titre de recette émis par le maire le 19 novembre 1983 afin de mettre à sa charge la dépense correspondant à cette reconstruction est entaché d'excès de pouvoir et doit donc être annulé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la commune n'était pas fondée à mettre à la charge de M. X... la somme de 8 013,80 F ; que, dans ces conditions, le commandement émis le 21 mars 1984 n'a pas de fondement légal ; qu'il y a lieu, dès lors, d'accorder à M. X... la décharge qu'il demande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 1er octobre 1986 est annulé.
Article 2 : Le titre de recettes n° 19 d'un montant de 8 013,80 F émis et rendu exécutoire le 19 novembre 1983 par le maire d' Encourtiech (Ariège) est annulé.
Article 3 : Il est déclaré que le commandement émis le 21 mars 1984 par le trésorier principal de Saint-Girons est sans fondement.
Article 4 : M. X... est déchargé du paiement de la somme de 8 013,80 F au profit de la commune d' Encourtiech.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Paul X... au maire de la commune d' Encourtiech et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10/ 1 ssr
Numéro d'arrêt : 83813
Date de la décision : 23/12/1988
Sens de l'arrêt : Annulation évocation annulation décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 COMMUNE - ORGANES DE LA COMMUNE - MAIRE ET ADJOINTS - MAIRE - STATUT - Responsabilité - Responsabilité du maire envers la commune - Ouvrage public construit sur l'ordre du maire en exécution d'une délibération du conseil municipal puis détruit sur son ordre en raison de son illégalité - Maire n'ayant pas agi dans son intérêt personnel - Absence de responsabilité (1).

67-01-02-01 Un métier communal à ferrer les bovins est un ouvrage public.

- RJ1 COMMUNE - FINANCES - BIENS - CONTRATS ET MARCHES - BIENS DES COMMUNES - OUVRAGES PUBLICS - Ouvrage public construit sur l'ordre du maire en exécution d'une délibération du conseil municipal puis détruit sur son ordre en raison de son illégalité - Maire n'ayant pas agi dans son intérêt personnel - Absence de responsabilité du maire envers la commune (1).

16-02-02-02-01, 16-04-02-03, 18-03 Le métier communal à ferrer les bovins avait été primitivement installé en exécution d'une délibération du conseil municipal d'Encourtiech en date du 30 mai 1977. M. R., qui était alors maire de la commune, en a ordonné ensuite la démolition en raison de l'irrégularité de sa construction qui avait été relevée par le sous-préfet de Saint-Girons et le directeur départemental de l'équipement et à l'invitation de ces autorités. Il a ainsi agi, sans rechercher aucune fin personnelle, en qualité d'exécutif de la commune et pour le compte de celle-ci. Dans ces conditions, le coût de la reconstruction de l'ouvrage, décidée par le conseil municipal le 1er avril 1983, ne pouvait être supporté que par la commune. M. R. est, dès lors, fondé à soutenir que le titre de recette émis par le nouveau maire le 19 novembre 1983 afin de mettre à sa charge la dépense correspondant à cette reconstruction est entaché d'excès de pouvoir et doit donc être annulé.

- RJ1 COMPTABILITE PUBLIQUE - CREANCES DES COLLECTIVITES PUBLIQUES - EXISTENCE - Absence - Ouvrage public construit sur l'ordre du maire en exécution d'une délibération du conseil municipal puis détruit sur son ordre en raison de l'irrégularité de sa construction - Maire n'ayant pas agi dans son intérêt personnel - Absence de responsabilité du maire envers la commune (1).

TRAVAUX PUBLICS - NOTION DE TRAVAIL PUBLIC ET D'OUVRAGE PUBLIC - OUVRAGE PUBLIC - OUVRAGE PRESENTANT CE CARACTERE - Ouvrage bénéficiant d'un aménagement spécial - Métier communal à ferrer les bovins.


Références :

Décret 65-29 du 11 janvier 1965 art. 1 al. 1

1.

Rappr. 1975-06-06, Commune d'Arcis le Ponsart, p. 340


Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 1988, n° 83813
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. de Montgolfier
Rapporteur public ?: Mme Leroy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:83813.19881223
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