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28/12/1988 | FRANCE | N°59279

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 28 décembre 1988, 59279


Vu la requête, enregistrée le 17 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société de fait "BRETIN PERE ET FILS", dont le siège est à Beaurepaire en Bresse à Sagy (71580), représentée par l'un de ses membres, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 13 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1979 ;
2°) lui ac

corde la décharge sollicitée ;
3°) ordonne, à titre subsidiaire, une expert...

Vu la requête, enregistrée le 17 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société de fait "BRETIN PERE ET FILS", dont le siège est à Beaurepaire en Bresse à Sagy (71580), représentée par l'un de ses membres, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 13 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1979 ;
2°) lui accorde la décharge sollicitée ;
3°) ordonne, à titre subsidiaire, une expertise,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Bechtel, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Liébert-Champagne, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la décision du directeur des services fiscaux de la Saone-et-Loire :

Considérant que les irrégularités qui peuvent entacher la décision par laquelle le directeur des services fiscaux d'un département, saisi d'une réclamation contentieuse, rejette celle-ci sont sans influence sur la validité de l'imposition contestée ; qu'il suit de là que le moyen tiré par la société requérante de ce que la décision du directeur, en l'espèce, serait insuffisamment motivé est inopérant ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et sur la charge de la preuve :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration, après avoir fait connaître à la société de fait "BRETIN PERE ET FILS", le 20 mai 1981, les redressements du chiffre d'affaires taxable auxquels elle allait procéder par voie de rectification d'office, n'a effectué aucune notification rectificative ; que, par suite, le moyen selon lequel une notification rectificative serait intervenue dans des conditions que la société estime irrégulières manque en fait ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société de fait "BRETIN PERE ET FILS", qui exploite une activité de négociant en vins à Beaurepaire-en-Bresse (Saône-et-Loire), n'a pas été en mesure, pour ses ventes aux particuliers, qui représentaient en moyenne 60 % de ses ventes totales, de présenter au vérificateur le livre spécial prévu par les dispositions du 3° de l'article 286 du code général des impôts, ni aucun autre document pouvant tenir lieu de ce livre sur lequel elle aurait inscrit au jour le jour, en les individualisant, chacune de ses opérations taxables ; que, si elle fait valoir que, ses ventes au détail étant toutes d'un montant inférieur à 200 F, elle était autorisée par les dispositions du 3° de l'article 286 à enregistrer globalement ces opérations en fin dejournée, elle n'a pu apporter au cours de la vérification de sa comptabilité, et elle n'apporte davantage dans ses productions devant le Conseil d'Etat, de documents permettant de suivre le détail desdites opérations, qu'elle se bornait à inscrire le plus souvent sous la mention globale "divers en capsules-congés" ; que, notamment, les documents mécanographiques dont elle fait état enregistraient seulement en fin de mois les ventes de vin qui avaient fait l'objet initialement d'une saisie manuelle, sans qu'aucune trace de ladite saisie eût été conservée en comptabilité en ce qui concerne les ventes au détail ; que le mode d'enregistrement ainsi adopté, ne permettant pas de justifier le montant exact du chiffre d'affaires taxable, était à lui seul de nature à entacher la comptabilité d'une irrégularité grave et à motiver le recours à la procédure de rectification d'office ;

Considérant, en troisième lieu, que, si la société requérante se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts reprises à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'une instruction du ministre des finances du 17 janvier 1978, reproduite au paragraphe 13 L-1-78 de la documentation administrative de base, relative aux "contrôles et redressements", ladite instruction a trait à la procédure d'imposition et ne contient ainsi aucune interprétation du texte fiscal au sens des articles 1649 quinquies E et L. 80 A ; que l'appréciation portée, par un agent des impôts, à l'occasion d'une précédente vérification, sur la comptabilité de l'entreprise ne peut pas davantage être regardée comme une interprétation du texte fiscal au sens et pour l'application desdites dispositions ; qu'il suit de là que les moyens de la requérante sur ces points ne peuvent qu'être rejetés ;
Considérant que la société de fait "BRETIN PERE ET FILS", ayant été ainsi régulièrement imposée d'office, ne peut obtenir, par la voie contentieuse, la décharge ou la réduction des impositions contestées qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases retenues ;
Sur le bien-fondé de l'imposition contestée :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour reconstituer le chiffre d'affaires imposable, le vérificateur a appliqué au montant des achats des exercices clos en 1977, 1978 et 1979, un coefficient de marge brute de 1,81, calculé d'après les prix pratiqués par l'entreprise sur 58 produits à l'époque du contrôle en janvier 1981, coefficient que le vérificateur a recoupé en le rapprochant par sondage des marges pratiquées pendant lesdits exercices ;

Considérant que la circonstance que le vérificateur n'aurait pu déceler aucun enrichissement inexpliqué des associés de la société de fait est par elle-même sans influence sur la validité de la méthode ainsi suivie ; que, si la société requérante soutient que ce coefficient calculé en 1981 ne correspondrait pas aux conditions d'exploitation effective de la période d'imposition du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1979, elle ne justifie son allégation ni par de prétendus changements dans son environnement commercial, sur lesquels il ne donne aucune précision, ni par des barèmes de prix reconstitués après la vérification et qui ne sont pas probants ;
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 230 de l'annexe II pris en application de l'article 271 du code général des impôts : "La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils relèvent d'eux-mêmes n'est déductible que si les biens et services sont nécessaires à l'exploitation et son affectés de façon exclusive à celle-ci" ; que l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les vins que les associés avaient prélevés sur les stocks de l'entreprise pour leur consommation personnelle et dont la société avait à tort opéré la déduction alors que lesdits biens n'avaient pas été affectés à son exploitation ; que la société requérante n'établit pas l'exagération des chiffres retenus par le service en se prévalant de la seule circonstance que les vins prélevés n'auraient pas excédé la marge de tolérance admise par l'administration des contributions indirectes ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin, en l'absence de précisions sur les documents qui pourraient être utilement soumis à un expert, de prescrire l'expertise sollicitée, que la société de fait "BRETIN PERE ET FILS" n'est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge de l'imposition contestée ;
Article 1er : La requête susvisée de la société de fait "BRETIN PERE ET FILS" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société de fait "BRETIN PERE ET FILS" et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 59279
Date de la décision : 28/12/1988
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE


Références :

. CGI Livre des procédures fiscales L80 A
. CGIAN2 230
CGI 1649 quinquies E, 38, 271, 286
Instruction ministérielle du 17 janvier 1978 Finances


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 1988, n° 59279
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Bechtel
Rapporteur public ?: Mme Liébert-Champagne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:59279.19881228
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